Podcasts : pourquoi ça marche ?

Benoit Zante
TLDR by Benoit Zante
5 min readApr 7, 2020

Avec le confinement, l’offre de contenus disponible a totalement explosé, dans tous les formats et sur tous les sujets possibles…

Entre les contenus habituellement payant passés en gratuit, les contenus habituellement gratuits rendus plus visibles, la création de contenus spécifiques pour le confinement, le basculement des conférences et workshop physiques vers le online, ou les lancements de nouvelles offres qui tombent à pic (Disney+, Madelen,…), on ne sait plus trop où donner de la tête…

De mon côté, en plus des webinars dont je vous parlais la semaine dernière (d’ailleurs, s’il vous ne devez en regardez qu’un privilégiez le replay de “Comment gérer une crise à distance ?” par les Sommets du Digital), j’ai profité de la situation pour rattraper mon retard dans mes podcasts et élargir la liste de mes abonnements.

Bizarrement, j’ai de plus en plus de mal à m’intéresser aux sujets business/entrepreneuriat (Generation DIY, l’Empreinte, le Gratin, Tribu Indé…) ou trop orientés digital/marketing (Le panier, Growthmakers, Flashback…) que je suivais avant — mais que j’en reprendrai sans aucun doute l’écoute plus tard avec intérêt.

Certains d’entre eux s’adaptent quand même à l’actualité, avec pertinence. Je vous conseille par exemple “Manager l’humain durant la crise COVID-19” avec Cédric Watine, dans Le Gratin de Pauline Laigneau ou l’interview de Philippe Gabilliet, porte-parole et cofondateur de la ligue des optimistes de France, par Matthieu Stefani.

C’est aussi l’occasion de m’interroger sur “Qu’est-ce qui fait un bon podcast ?” Le sujet a déjà été abordé côté producteur, mais pas vraiment du point de vue de l’auditeur.

1. La cohérence

Il ne suffit pas de tendre un micro et de poser une série de question pour rendre un podcast intéressant et pertinent… il faut un angle fort, avec une promesse pour l’auditeur. Et il faut s’y tenir dans la durée, au risque de se banaliser. Beaucoup trop de podcasts d’interviews finissent par se ressembler…

Prenons l’exemple du podcast “Vieille Branche” dont j’ai écouté la cinquantaine d’épisodes (d’une heure chacun, environ) en… deux semaines* : au fil des épisodes, les intervenants s’enchaînent, de Geneviève de Fontenay à Edith Cresson, d’Henri Dès à Marek Halter, en passant par des personnalités moins connues mais non moins passionnantes (elles le sont même parfois davantage). Malgré cette diversité, le programme reste extrêmement cohérent et fidèle à sa promesse initiale : donner la parole à des personnes âgés de plus de 70 ans, pour recueillir leur souvenirs, mais aussi leur vision sur le monde actuel. Des questions récurrentes (“est-ce que c’était mieux avant ?”, “avez-vous peur de la mort ?”…) rythment les échanges et relient les interviews entre elles.

2. La proximité

La force du podcast, et même de l’audio en général, est le lien qu’il est possible de créer entre l’émetteur et le récepteur du contenu. Le podcast, parce qu’il est moins formaté que la radio permet d’aller encore plus loin dans la proximité… mais il y a proximité et proximité — : rien de plus énervant dans une interview que d’avoir un “host” qui prend prétexte de chaque question pour se mettre, lui, en avant, alors qu’on a surtout envie d’écouter son invité. La proximité peut se construire par plein de petits détails : les bruits en fond sonore, le fait d’expliquer le contexte de l’interview en introduction, le choix de laisser le micro ouvert pour capter les moments avant l’arrivée chez l’interviewé(e), le fait de ne pas couper certains ratés ou certaines interruptions, etc.

Un bon exemple de proximité est le travail de Philippe Corbé : son ton dans ses lettres d’Amérique est différent de celui qu’il va avoir à l’antenne “classique” de RTL : plus personnel et plus direct, moins formaté, il peut s’affranchir de beaucoup de contraintes, et notamment de celle de la durée ou même de la qualité sonore. Il est aussi totalement libre dans le choix des sujets qu’il aborde, et peut parfois aller dans le très personnel (même en parlant du système ferroviaire américain) : c’est l’une des forces de son format. Le plus personnel de tous ses épisodes est celui-ci : en introduction, il explique avoir longuement hésité à le diffuser. C’est pourtant le plus fort de tous.

3. La prise de recul

Pris dans le flot d’une interview, il est parfois difficile pour un animateur de tout maîtriser. Face à la personnalité de leurs interlocuteurs, certains peuvent tomber dans l’admiration excessive et perdre leur recul… c’est souvent frustrant pour l’auditeur, qui aimerait au contraire que les invités soient un peu “challengés”. Les formats qui ne reposent pas sur l’interview d’un interlocuteur unique permettent de rebondir plus facilement et de multiplier les regards. Une solution passe par le montage, qui permet de couper certaines questions, d’orchestrer leur ordre différemment, d’intégrer des commentaires de l’invité, de croiser des points de vue…

C’est ce que font les animateurs de Code Source et de La Story des Echos, mais cela demande beaucoup de travail de montage, parfois au détriment de la spontanéité. Dans Vieille Branche, dont chaque épisode repose sur un interlocuteur unique, les sujets qui fâchent sont bel et bien abordés — le sexisme, l’homophobie, le racisme, la guerre d’Algérie, etc. — et les animatrices l’expliquent à plusieurs reprises : le but n’est pas de piéger les invités. Elles le font toujours avec bienveillance et sentent lorsqu’il y a des points à ne pas trop aborder. Lorsqu’elles ne sont pas d’accord avec une réponse ou un point de vue, ou lorsqu’un invité a manifestement dit quelque chose de faux, elles profitent du montage pour apporter leur vision, en aparté.

4. La préparation

Finalement, ce qui fait la plus grande différence entre un bon et un mauvais podcast — d’interview ou non — réside dans sa préparation. Poser des questions, ça a l’air facile, mais ça ne s’improvise pas… et l’absence de maîtrise d’un sujet se fait vite sentir.

Toujours dans le cas de Vieille Branche, on sent, par la qualité des questions que chaque interview a été longuement préparée — les livres ont été lus, les biographie travaillées. Cela se remarque dès les premières minutes, avec la courte présentation de l’interviewé : celui-ci est souvent surpris par la précision des informations. Bref, s’il n’y avait qu’une leçon a retenir : un bon podcast, c’est du travail.

*je vais vous confier un secret… je les écoute en accéléré…

// Avant de nous séparer //

N’hésitez surtout pas à partager cet article :)

Vous souhaitez recevoir directement par e-mail les prochains articles? Un formulaire d’inscription est disponible ici.

A bientôt !

Benoit Zante

--

--