Le crédit d’impôt jeu vidéo a 10 ans !

Estelle Joan
BOLD LAW FIRM
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3 min readFeb 7, 2018

L’industrie culturelle française des jeux vidéo a attendu longtemps la consécration d’un levier fiscal incitatif adapté ! Alors que de nombreux pays dans le monde soutenaient cette industrie, avec en tête le Canada et les Etats-Unis, la France était le parent pauvre.

Les aides accordées varient fortement d’un pays à un autre, mais toutes ont le même objectif : favoriser le développement d’une industrie à forte valeur ajoutée sur leur territoire.

La révolution tant attendue en France est intervenue en 2007 et dès le 1er janvier 2008, après un accouchement législatif difficile, naissait le crédit d’impôt jeu vidéo.

Le crédit d’impôt jeu vidéo est un dispositif d’incitation fiscale qui permet aux entreprises de création de déduire de leur impôt une part des dépenses de production d’un jeu. Sont donc récompensées les entreprises qui assurent la réalisation artistique et technique d’un jeu vidéo et qui initient et engagent les dépenses nécessaires à la création de ce jeu.

A son arrivée en France, ce dispositif a incité des poids lourds du secteur, comme Ubisoft, à conserver des studios en France. Il a également permis de retenir des pépites françaises, comme Quantic Dream (Heavy Rain, Beyond: Two Souls).

Malheureusement, au bout de quelques temps, le constat était sans appel : le dispositif n’était pas ou mal adapté aux réalités du secteur en France.

En effet, le crédit d’impôt était taillé pour les jeux à gros budget, alors que les structures capables de produire ces blockbusters se font rares dans notre pays. Ainsi, au bout de 4 ans d’existence, en 2012, seuls 7 projets ont bénéficié du crédit.
Les studios de petite et moyenne taille, bien plus nombreux et spécialisés dans le jeu mobile n’étaient pas éligibles.

Le pari de la France de miser sur l’industrie culturelle des jeux vidéo n’était pas rempli : les faillites se sont multipliées, de plus en plus de talents formés en France partaient vers le Québec..

La sonnette d’alarme a été tirée auprès des pouvoirs publics français et en décembre 2013, la réforme du crédit d’impôt était votée.

Cette réforme a fait notamment évoluer les jeux vidéo pouvant être éligibles.

Cependant, il a fallu attendre réellement 2017 pour que ce dispositif soit revu de manière significative, ainsi désormais les mesures suivantes s’appliquent :
- Relèvement du taux de 20 à 30% des dépenses de production
- Doublement du plafond de crédit d’impôt dont chaque entreprise peut bénéficier (de 3 à 6 M€ par an)
- Augmentation des dépenses de sous-traitance européenne prises en compte dans le calcul du crédit d’impôt de 1 à 2 M€.

Le nouveau Crédit d’Impôt devient ainsi l’un des dispositifs de soutien au jeu vidéo les plus compétitifs du monde, et la France un territoire particulièrement attractif pour le développement de cette industrie.

Selon une enquête réalisée par le Syndicat national du jeu vidéo et Idate Digiworld, la France arrive en troisième position des pays les plus attractifs, derrière le Canada et les Etats-Unis. Et la tendance va en grandissant puisque 56,5% des entreprises interrogées considèrent que la France est attractive contre 38,2% en 2014.

Bilan très rassurant quand on sait que le marché du jeu vidéo devrait atteindre la barre des 100 milliards de dollars à l’échelle mondiale d’ici quelques années, on comprend donc aisément les effort fournis par plusieurs nations pour profiter au mieux de cette future manne financière.

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Estelle Joan
BOLD LAW FIRM

Avocate spécialisée dans la fiscalité de l'innovation (Public Equity) - Conseil et contentieux