La vie numérique d’un réfugié

Dans le monde en 2016, 350 000 de personnes ont migré pour des causes économiques, politiques ou de survie vers l’Europe. Dans cet énorme déplacement de population, il y a un outil indispensable au bon déroulé du voyage, voir à la survie de la personne: le téléphone portable.

Sur 350 000 personnes ⅓ sont des ressortissants syriens qui fui pour échapper soit à l’État Islamique soit aux persécutions du régime d’Assad choisissent de quitter leur maison, leur famille et parfois leur vie. Bien que la plupart choisissent de s’arrêter dans les pays comme la Turquie ou la Jordanie, d’autres rêve d’une vie meilleure en Europe. Mais à quel prix ? Malgré tout ce que peuvent raconter les médias nous avons du mal à nous figurer les difficultés à venir en Europe et la détresse dans laquelle sont plongée ces gens ! Le point de vue numérique peut être également difficile à trouver dans un premier temps et à comprendre dans un deuxième temps, pourtant il est omniprésent du début à la fin du voyage.

Assan a 21 ans et il vivait à Alep jusqu’à ce que l’EI prennent le contrôle de la ville qu’il a dû fuir. Il est parti seul, laissant sa famille dans la ville de Jisr al-Choughour en Syrie situé près de la frontière turque. Avec 3000$ en poche il décide de se rendre en Europe, en Suède plus particulièrement où vivent ses cousins. Il ne parle pas très bien anglais mais assez pour se faire comprendre. Bien qu’il soit loin de sa ville natale depuis bientôt 1 an son véritable périple commence maintenant, aux portes de la Turquie.

“Dans les îles grecques les prises de courants se font rares pour recharger les téléphones, juin 2016”

L’accès à internet et à un smartphone est le troisième besoin primaire des migrants après boire et manger. Le smartphone est devenu, avec la crise migratoire d’aujourd’hui un outil de survie et tous les services numériques produisent à destination des migrants sont devenu des nécessités. Au cours du périple de chaque migrant, le smartphone a une place marquante dans les grandes étapes du voyage. Nous allons suivre la vie numérique d’Assan, un syrien qui a quitté son pays avec l’objectif final d’atteindre Stockholm.

Premier point marquant de son voyage, la frontière turco-syrienne avec l’objectif d’atteindre Kilis. Assan a pris contact avec un passeur depuis Jisr al-Choughour sur un groupe Facebook privé et a convenu un rendez-vous avec lui grâce à l’application Telegram. Le rendez-vous est fixé à 16 km de la frontière dans la ville d’A’zaz. Assan anticipe son premier trajet avec le service Google Map.

Le deuxième objectif pour lui est désormais de traverser la Turquie pour ensuite traverser la mer Egée. Assan trouve un moyen de transport pour traverser la Turquie, mais il veut d’abord s’assurer de son point d’arrivée sur la côte et fait une pause de 2 jours. Pendant ces 2 jours il va prendre contact avec sa famille au moyen de l’application Whatsapp. Pour se renseigner sur la traversée de la mer et de l’entrée en Grèce, il va utiliser différents services : l’application InfoAid et le site web refugee.info. Info Aid permet d’obtenir un grand nombre d’information qui vont servir à Assan. Refugee.info permet d’obtenir des information notament sur l’état des frontières et sur les différentes îles grecques, dont l’île de Lesvos, la porte d’entrée européenne pour Assan. Aussi il a utilisé Gherbetna, une application à destination des Syriens présent en Turquie.

Assan traverse donc la Turquie jusqu’à la ville d’Izmir où il s’établit avant d’atteindre Lesvos. Pour trouver un passeur Assan utilise l’application Telegram, mais cette fois va la combiner avec Google Translate pour communiquer puis Macédoine.

Puis Hongrie. Sur le chemin de l’Allemagne, il va télécharger l’application Ankommen App, une application qu’un compagnon de voyage va lui conseiller. Arrivé à Munich. Il se ravise vis à vis de son projet de rallier la Suède et décide de rester en Allemagne. Grâce à Ankommen App, il obtient des informations sur les démarches de demande d’asile, la vie en Allemagne, le travail. Enfin il commence à apprendre l’allemand.

Questions pour les enjeux à venir

Tous les services web ou plus particulièrement les applications ont eu une approche visant à répondre aux différents besoins des réfugiés. Peut-on parler de culture du réfugié dans la mesure où le sujet a été étudié et réfléchi par des entrepreneurs, des designers ? A un moment et à une période donnée il y a eu un besoin et des hommes se sont penchés sur la question. Cependant les initiatives sont dans la majorité des cas isolés et ne dépasse pas la culture du silo.

Y aurait-il des pistes liés au design pour penser le parcours des réfugiés dans la globalité ? En quoi les outils, les méthodologie du design d’expérience ou encore de service pourraient contribuer à ces pistes ?

Quels liens pourrait-on imaginer voire développer entre les différents acteurs (institutionnel, politique, ONG) et le travail des designers ?

Comment évoluer vers la culture de l’expérience et de la recherche de terrain, pour mettre à profit le potentiel des designers ?

Dans le future potentiel avec une recrudescence du nombre de migrants dans le monde, quel rôle le design peut jouer de façon global ? Peut-être la production de service ou alors l’accessibilité des solutions ?

Nous l’avons vu dans cette article l’utilisation du smartphone par les migrants est une question de survie. Bien que beaucoup d’applications aient été créées pour les aider, il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine. L’expérience de l’utilisateur doit être essentiel pour ces projets, c’est pourquoi la vision du design doit absolument y être intégrées. Le design doit devenir un moteur et servir de prisme dans cette période de grands changements afin de faciliter au mieux la vie de ces personnes fuyant la persécution et la guerre.

David Auzias et Alexandre Cavaco

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