Étudiants internationaux et hors province : Sont-ils des éléments importants pour les universités ?

Baptiste EDOUARD
La REVUE du CAIUM
Published in
6 min readNov 21, 2023

À l’heure où la société est de plus en plus mondialisée, les étudiants internationaux et hors province sont devenus monnaie courante dans les universités canadiennes et du monde entier. Néanmoins, depuis le début du XXIe siècle ,leur impact ne se limite plus à l’apport économique qu’ils offrent aux universités. En effet, que ce soit sur le plan culturel ou politique, leur importance ne cesse de croître de jour en jour.

Groupe d’élèves internationaux à l’université de Prescott. Crédit photo : Prescott University https://prescott.erau.edu/campus-life/international-students

Dans un courriel envoyé à CBC News le 18 Octobre 2023 , le service des relations médiatiques de l’université de McGill a confirmé le report de la mise en place d’un investissement de 50 millions de dollars étalé sur cinq ans. Cet apport financier ayant pour but d’aider les élèves internationaux ou canadiens hors province à maîtriser la langue française et à s’intégrer dans la société québécoise fut compromis par une réforme annoncée par le gouvernement du Québec le 13 Octobre 2023. En effet, dès l’automne 2024 les frais de scolarité universitaire des étudiants internationaux et canadiens hors province seront quasiment doublés.

Ainsi, la Coalition Avenir Québec (CAQ) estime que la facture annuelle des étudiants canadiens hors province passera de 8 992 $ à 17 000 $. Quant à eux, les élèves internationaux devront débourser un minimum de 20 000 $ annuels afin d’étudier dans les universités québécoises. Il est tout de même notable de relever le fait que les nouvelles mesures adoptées par le gouvernement ne s’appliquent pas aux étudiants visés par des ententes internationales, comme les Français et les Belges. De plus, les étudiants non québécois inscrits dans des programmes au deuxième cycle et au troisième cycle sont également exemptés.

Pascale Déry, Ministre québécoise de l’Enseignement supérieur a argumenté que la majorité des étudiants universitaires originaires d’autres pays ou d’autres provinces quittent le Québec après y avoir étudié en anglais. Tandis que Jean-François Roberge, Ministre de la Langue Française affirme que le but de cette mesure est de « freiner le déclin du français. »

Les ministres Pascale Déry ( Ministre québécoise de l’Enseignement supérieur) et Jean-François Roberge (Ministre de la Langue Française) lors de l’annonce de la réforme des tarifs universitaires. Crédit Photo : Radio-Canada / Sébastien Lauzon

Quelles en sont les conséquences ?

Cette initiative gouvernementale n’a cessé de faire polémique depuis son annonce. En effet, de multiples représentants d’universités anglophones québécoises ont mis en lumière le fait que la hausse des tarifs aura un impact négatif sur les campus du Québec, mais également sur la province elle-même.

« Il ne fait aucun doute que ces mesures pourraient affecter le recrutement d’étudiants canadiens potentiels hors du Québec, car il sera moins coûteux d’étudier ailleurs au Canada pour de nombreux programmes », a déclaré Cynthia Lee, directrice adjointe des relations médiatiques de l’Université McGill.

D’autres comme Sébastien Lebel-Grenier, principal et vice-chancelier de l’Université de Bishop préfèrent mettre en garde le gouvernement sur l’impact culturel de cette réforme « La plupart d’entre eux seront exclus [par les nouveaux frais de scolarité]. » a-t-il déclaré.

« Nous avons beaucoup d’exemples d’étudiants, en particulier d’étudiants étrangers, qui ne maîtrisaient pas du tout le français — qui n’avaient aucune connaissance du français — et qui ont appris le français, se sont intégrés à la société québécoise et occupent aujourd’hui des postes de travail à prédominance française. C’est très important et c’est ce qui fait notre identité. »

Toutefois, même si cette initiative gouvernementale a fait couler beaucoup d’encre, elle est parvenue à mettre en lumière la place prépondérante qu’occupent maintenant les étudiants internationaux et hors province dans le paysage québécois, que ce soit dans le contexte universitaire ou culturel.

Pourquoi sont-ils aussi prisés ?

En 2000, 1,6 million d’étudiants internationaux étudiaient à l’étranger. Cette année-là, 70 % de ces étudiants étudiaient dans cinq pays seulement : les États-Unis (28 %), le Royaume-Uni (14 %), l’Allemagne (12 %), la France (8 %) et l’Australie (7 %).

En 2022, la répartition des étudiants étrangers a radicalement évolué. Plus de 6,4 millions d’étudiants ont franchi les frontières pour étudier, soit quatre fois plus qu’en 2000. Cette large augmentation résulte du nombre croissant de pays ayant besoin d’aide pour faire face aux pénuries de main-d’œuvre. Les étudiants étrangers sont des candidats idéaux pour la résidence permanente. Souvent jeunes, ils possèdent des compétences professionnelles recherchées, en plus d’avoir séjourné pendant au moins deux ans sur le territoire, ce qui favorise leur intégration à long terme.

De plus, la présence de ces derniers permet de pallier au phénomène de l’érosion des clientèles locales. En d’autres termes lorsque les effets de la démographie font en sorte qu’après une croissance forte les effectifs étudiants stagnent ou baissent, l’arrivée d’étudiants étranger permet de stabiliser ces effectifs et d’empêcher la baisse des clientèles. Ainsi, cet apport numérique permet de préserver certains programmes qui n’auraient pas pu survivre sans les étudiants internationaux.

Rishi Sunak ( 1er Ministre du Royaume-Uni) lors d’une assemblée ayant pour sujet les heures de travail des étudiants internationaux. Crédit Photo : Simon Walker/ Daily mail

C’est dans cette optique que le Royaume-Uni, pays ayant vu son nombre d’étudiants étrangers grandement diminué suite au Brexit ( déclin de 40% lors de l’année 2021/2022 suivi d’un déclin de 18% lors de l’année 2022/2023) ainsi que la pandémie de Covid-19, a mis en place une politique gouvernementale uniquement dédié à l’intégration des élèves internationaux.

La International Education Strategy (Stratégie d’éducation internationale) britannique a pour but de porter à 600 000 le nombre total d’étudiants internationaux qui choisissent chaque année d’étudier dans le système d’enseignement supérieur britannique d’ici 2030.

De plus, cette initiative vise également à augmenter la valeur des revenus généré par l’éducation britannique afin qu’elle atteigne 35 milliards de livre sterling soit un peu plus de 59 milliards de dollars canadiens d’ici 2030. Ainsi, depuis Octobre 2020 une nouvelle « route étudiante » ou « student route » a été mise en place afin de permettre aux élèves internationaux d’accéder plus facilement à un visa.

C’est donc dans une optique similaire, qu’en Juin 2021 une «student route » dédiée aux étudiants diplômés a vu le jour. Cette dernière donne l’autorisation à ces étudiants de rester 2 ans sur le territoire britannique suite à l’obtention de leurs diplômes. Dans le cas des étudiants ayant complété un doctorat cette autorisation est allongée afin de passer à 3 ans.

Que faut-il retenir ?

De nos jours, les étudiants internationaux et hors province représentent des atouts économiques, politiques, culturels et académiques pour les universités mais également les pays où ils étudient. Leur présence permet de faire face aux pénuries de main d’œuvre et de pourvoir des postes clés. De plus, outre leur valeurs durant leurs études, l’intérêt de ce type d’étudiants réside dans leurs potentielles résidences permanentes après leurs études permettant ainsi d’intégrer relativement rapidement et facilement de nouveaux éléments dans la société et dans le monde du travail.

Par conséquent, les étudiants étrangers représentent une alternative viable pour de nombreux pays afin de dynamiser leurs économies respectives. Toutefois, ce type d’immigration nécessite d’être encadré afin de rester efficace sur le long terme.

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Pour approfondir :

[1] Labbé,Jérôme (2023) « Québec haussera les tarifs pour les étudiants universitaires non résidents » :

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2017687/frais-scolarite-quebec-etudiants-etrangers

[2] Stevenson,Verity (2023) «McGill shelves $50M French program after Quebec out-of-province tuition hike » :

https://www.cbc.ca/news/canada/montreal/mcgill-shelves-program-teaching-french-1.7000385

[3] CTV News (2023) « McGill halts French-language program as Quebec increases tuition fees» :

https://montreal.ctvnews.ca/mcgill-halts-french-language-program-as-quebec-increases-tuition-fees-1.6608024

[4] Colpron, Suzanne (2023) « PLUS QU’UNE QUESTION D’ARGENT» :

https://www.lapresse.ca/actualites/education/etudiants-etrangers/plus-qu-une-question-d-argent/2023-10-15/cinq-raisons-d-accueillir-des-etudiants-d-ailleurs.php

[5] Applyboard (2023) «Which Countries Will Be the Next Big Destinations for International Students? » :

https://www.applyboard.com/applyinsights-article/which-countries-will-be-the-next-big-destinations-for-international-students#:~:text=In%202022%2C%20there%20were%20over,international%20students%20studying%20in%202000.

[6] UK Parliament (2022) « International students in UK higher education» :

https://commonslibrary.parliament.uk/research-briefings/cbp-7976/#:~:text=The%20UK%20Government's%20International%20Education,year%20to%20600%2C000%20by%202030

[7] DailyMail (2023) « Rishi Sunak gears up for new Cabinet row over foreign students with plan to allow them to work more to boost the UK economy while Home Secretary wants to cut the number coming to Britain» :

https://www.dailymail.co.uk/news/article-11682989/Rishi-Sunak-gears-new-Cabinet-row-foreign-students-plan-allow-work-more.html

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