Comprendre le conflit israélo-palestinien après le 7 octobre 2023: une perspective juridique

Camille Zhou
La REVUE du CAIUM
Published in
6 min readNov 2, 2023
La signature des Conventions de Genève de 1949 (Bettmann Archive/Getty Images)

Depuis l’escalade du conflit entre Israël et le Hamas le 7 octobre 2023, les regards du monde entier sont tournés vers la région. Cette escalade de violence soulève des questions cruciales sur la conformité au droit international et les crimes de guerre. Dans cette analyse, nous explorons les implications légales de ces actes et leur impact sur la situation actuelle.

Un bref tour d’horizon du conflit depuis le 7 octobre 2023

Le conflit israélo-palestinien a des racines profondes remontant à la création de l’État d’Israël en 1948, un événement marqué par des controverses et des violences. Cependant, ce sont les récentes actions du Hamas qui ont ravivé l’attention internationale. Le 7 octobre 2023, le Hamas a lancé une attaque contre Israël, entraînant la perte de plus de 1200 vies, des blessures pour au moins 3000 personnes et la capture de plus de 200 civils.

En réponse, Israël a officiellement déclaré la guerre au Hamas. Depuis lors, de nombreuses frappes aériennes sur Gaza, souvent qualifiée de “plus grande prison à ciel ouvert,” ont coûté la vie à plus de 3000 Palestiniens et blessé au moins 12 500 autres. Le 12 octobre 2023, l’Armée de défense d’Israël a donné 24 heures à environ 1.1 million de Palestiniens vivant dans le nord du territoire de Gaza de quitter la région pour se diriger vers le sud du territoire. De plus, les livraisons de nourriture, d’eau, de carburant et d’électricité ont été bloquées.

Quelles lois sur les crimes de guerre s’appliquent?

Les lois internationales humanitaires s’appliquant aux conflits armés ressortent des Conventions de Genève de 1949, que tous les membres de l’ONU ont ratifiées, ainsi que de la jurisprudence des tribunaux pénaux internationaux. Ces conventions établissent que les civils, les blessés et les prisonniers doivent être traités de manière humaine en temps de guerre. Elles interdisent le meurtre, la torture, la prise d’otages, le traitement humiliant et dégradant, et elles exigent que les combattants prennent soin des blessés de l’autre partie. Ces règles s’appliquent aux guerres entre nations, mais aussi aux conflits impliquant des acteurs non étatiques, tels que le conflit israélo-palestinien.

Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale énonce une autre loi sur le droit de la guerre, stipulant que les crimes de guerre comprennent les attaques intentionnelles contre les civils et les infrastructures civiles, la destruction de biens non nécessaires sur le plan militaire, la violence sexuelle et la déportation illégale. D’ailleurs, la Cour pénale internationale est l’organe international de justice habilité à poursuivre Israël ou le Hamas s’ils ne sont pas poursuivis localement. Elle a juridiction sur les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les génocides chez ces États membres, dont la Palestine, qu’elle reconnaît. Cependant, Israël rejette la juridiction de la Cour et n’y participe pas.

Les crimes de guerre de Hamas depuis le 7 octobre 2023

Le meurtre de plus de 1200 civils israéliens, dont des enfants, ainsi que l’attaque surprise par le Hamas violent le droit international humanitaire, qui vise à protéger les civils et leur propriété, surtout en temps de guerre. Ainsi, le Hamas viole l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève de 1949, qui requiert le traitement humain des civils et des non-combattants, l’article 51 du Protocole I des Conventions de Genève qui protège les populations civiles contre les attaques, et les articles 7 et 8 du Statut de Rome, qui reflètent le droit international coutumier sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. Les attaques continues du Hamas sur les personnes civiles israéliennes suite à la déclaration de guerre d’Israël continuent à être une violation des articles ci-dessus.

L’applicabilité du droit international à Hamas

Il y a un débat continu parmi les gouvernements et les juristes concernant l’application du droit international aux acteurs non étatiques tels que le Hamas, ainsi qu’aux États avec lesquels ils entrent en conflit. Cependant, il est important de noter qu’en 2006, la Cour suprême des États-Unis a décidé que l’article 3 commun aux Conventions de Genève s’appliquait effectivement à la guerre des États-Unis contre al-Qaïda. De plus, Israël et l’État de Palestine sont membres de l’ONU et ont ratifié les Conventions de Genève. Le Hamas, étant l’autorité gouvernementale de facto de Gaza, une partie de la Palestine, devrait donc être obligé de respecter les Conventions de Genève et ses 3 protocoles. L’État de la Palestine est également membre du Statut de Rome, ce qui fait en sorte que Hamas peut être tenu pour responsable par la Cour pénale internationale lorsqu’il commet des crimes de guerre. Par conséquent, même si Israël n’est pas un État membre du Statut de Rome, la Cour pénale internationale a tout de même juridiction pour examiner les actions menées à l’intérieur de Gaza, car cette région fait partie du territoire de l’État membre de la Palestine.

Les crimes de guerre d’Israël depuis le 7 octobre 2023

Bien que l’article 51 de la Charte des Nations Unies permet des actions de légitime défense « inhérentes » découlant du droit international coutumier, Israël pourrait également être attaqué pour violation du droit international humanitaire dans ses actions contre Gaza depuis le 7 octobre 2023. Le Comité international de la Croix-Rouge, basé à Genève, a d’ailleurs affirmé que l’ordre donné à des centaines de milliers de personnes de quitter leurs maisons et le refus de fournir de l’eau, de la nourriture et de l’électricité à Gaza ne sont pas conformes au droit international humanitaire. En effet, ces actions constituent des violations de l’article 6(c) du Statut de Rome et de l’article 8 des Conventions de Genève, qui interdisent également le traitement inhumain de la population, tel que le déni de besoins de base.

Israël serait aussi en violation de l’article 8 des Conventions de Genève en raison de la destruction de milliers d’unités de logement et de propriété (grâce à ses frappes aériennes). Cet article stipule également qu’il est illégal de causer intentionnellement des préjudices aux civils, ce qui englobe les attaques ayant prévisiblement pour conséquence des pertes civiles, comme de vastes frappes aériennes sur des quartiers civils.

Conclusion

Considérant la rapidité à laquelle de nouveaux développements se succèdent constamment dans ce conflit, il est évident que cet article est loin d’être exhaustif et se limite à offrir une vue d’ensemble de l’application du droit international depuis le 7 octobre 2023. Il est également important de noter que ce conflit préexistait à cette date, et il n’est pas la première fois que les deux parties sont accusées de violer le droit international. Toutefois, il demeure essentiel de comprendre comment le droit international s’applique aux événements récents, pour obtenir une meilleure compréhension de la situation.

Pour approfondir:

Deutsch, Anthony et Stephanie van den Berg. 12 octobre 2023. What war crimes laws apply to the Israel-Palestinian conflict? Reuters: https://www.reuters.com/world/middle-east/what-war-crimes-laws-apply-israel-palestinian-conflict-2023-10-11/

Ioanes, Ellen, Jonathan Guyer et Zack Beauchamp. 15 octobre 2023. 7 big questions about the Israel-Hamas war, answered. Vox: https://www.vox.com/world-politics/23910641/israel-hamas-war-gaza-palestine-explainer

Lawless, Jill. 19 octobre 2023. Why Hamas and Israel are both alleged to have broken international rules of war. PBS: https://www.pbs.org/newshour/world/why-hamas-and-israel-are-both-alleged-to-have-broken-international-rules-of-war

Scheffer, David J. 19 octobre 2023. What International Law Has to Say About the Israel-Hamas War. Council on Foreign Relations: https://www.cfr.org/article/what-international-law-has-say-about-israel-hamas-war#:~:text=The%20state%20of%20Palestine%20also,Israeli%20territory%20or%20in%20Gaza

Varoufakis, Yanis. 15 octobre 2023. List of war crimes and crimes qualifying as genocide committed by Israel in Gaza between 7th & 14th October 2023. Yanis Varoufakis: https://www.yanisvaroufakis.eu/2023/10/15/list-of-war-crimes-and-crimes-qualifying-as-genocide-committed-by-israel-in-gaza-since-7th-october-2023/

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