COP 28: Compter sur un avenir durable avec les données relatives au genre et à l’environnement

Homa Azodi
La REVUE du CAIUM
Published in
6 min readDec 16, 2023

“Plus de 60% des personnes vivant dans l’extrême pauvreté sont des femmes”. “Les femmes et les jeunes filles ont aussi quatorze fois plus de chances de souffrir des conséquences du changement climatique”. D’après les projections à l’échelle planétaire, l’écart entre les femmes et les hommes va se creuser dans les dix prochaines années sans la mise en place d’actions urgentes. Il y aura plus de pauvres en 2030 qu’en 2020 et la majorité de ceux-ci seront toujours des femmes.

Être pauvre c’est avant tout ne pas avoir accès à des besoins essentiels tels que l’éducation, l’eau potable et l’électricité. Face au changement climatique, une plus grande dépendance à des nécessités et des ressources naturelles signifie également une plus grande difficulté de diversification de ses moyens de subsistance. Dans le cas des femmes en position de vulnérabilité, leur participation inégale aux processus décisionnels et aux marchés du travail s’ajoute aux inégalités existantes. Les limites de l’intégration des femmes ajoutées à leur dépendance aux ressources essentielles aggravent leur capacité limitée à répondre au changement climatique. Cela les empêche souvent de contribuer pleinement à la planification, à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques liées au climat. Les femmes étant moins représentées aux niveaux des politiques sont donc aussi plus vulnérables aux risques et effets des changements climatiques, tels que les sécheresses, les glissements de terrain, les inondations et les ouragans.

Oxfam France, 2023

La 28e Conférence des Parties (COP 28)

Dans le cadre de la 28e Conférence des Parties (COP 28) à Dubaï, la présidence de la COP28, en collaboration avec les co-organisateurs de la conférence mondiale sur les données relatives à l’égalité des sexes et à l’environnement, a œuvré à la création d’un espace de dialogue commun. L’objectif était de discuter des moyens actuels et potentiels pour combler les lacunes en matière de données concernant la corrélation entre le genre et l’environnement.

Ce projet a été élaboré en étroite collaboration avec des représentants de l’Organisation des Nations Unies, de la Convention-Cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), d’ONU Femmes, de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), de l’Organisation des femmes pour l’environnement et le développement (WEDO) , ainsi que des leaders et des responsables de la coalition d’action “Action féministe pour la justice climatique”. De plus, des membres de l’Alliance pour des données environnementales sexospécifiques (GEDA) ont également contribué à cet effort collaboratif.

Une conférence mondiale sur les données relatives au genre et à l’environnement est alors née, du 28 au 29 novembre 2023. La présence d’une vaste diversité de participants a mis en avant l’impératif d’impliquer femmes et hommes de manière équitable dans l’élaboration des politiques climatiques. Parmi ces acteurs, on comptait des responsables gouvernementaux, des décideurs politiques, des représentants d’organisations de la société civile, des leaders autochtones, des membres de communautés locales, ainsi que des universitaires.

Ayshka Najib, Climate Justice Activist, Fridays for Future MAPA presents the Call to Action of the Global Gender and Environment Conference.

Photo: UN Women.

Leurs efforts combinés visaient à élargir la compréhension du lien entre le genre et l’environnement. L’objectif principal de cette conférence était de mettre l’accent sur l’élaboration et la mise en œuvre de politiques climatiques nationales qui tiennent compte des sexospécificités. L’inclusion d’un texte primordial dans l’Accord de Paris et d’un point de l’ordre du jour spécifique dans le cadre de la Convention sur les enjeux de genre dans les politiques climatiques étaient aussi également des priorités.

La Conférence mondiale sur le genre et l’environnement s’est clôturée, avant la COP28, par un appel mondial à l’action lancé à tous les dirigeants mondiaux, décideurs politiques et autres acteurs clés des systèmes de données sur le genre et l’environnement. L’appel met l’accent sur la nécessité d’un renforcement d’urgence des partenariats multipartites pour soutenir la production, l’adoption, le financement, ainsi que la gestion et la gouvernance inclusives des données mondiales sur le genre et l’environnement.

Tiofilusi Tiueti, Minister for Finance, Revenue and Customs, Kingdom of Tonga, Ayshka Najib, Climate Activit, Fridays for Future MAPA, Fridah Githuku, Executive Director, GROOTS Kenya, H.E. Razan Al Mubarak, IUCN President and COP28 UN Climate Change High-Level Champion, H.E. The Chhun Hak, Director General, Gender Equality and Economic Development, Ministry of Women, Cambodia.

Photo: IUCN

Le leadership des femmes pour l’établissement d’une paix durable

Grâce à leur connaissance approfondie des réalités locales et à leur leadership, notamment en ce qui concerne la gestion durable des ressources et les pratiques durables adoptées dans les foyers et au sein des communautés, les femmes jouent un rôle crucial. Leur implication dans la sphère politique conduit à une meilleure prise en compte des besoins des citoyens, au renforcement des liens entre les différents partis et groupes ethniques, ainsi qu’à l’établissement d’une paix durable. À l’échelle locale, l’intégration des femmes dans les postes décisionnels a un impact positif sur les résultats des initiatives et des politiques environnementales. En revanche, l’absence significative de participation des femmes dans la mise en œuvre de politiques ou de projets peut aggraver les inégalités préexistantes et réduire leur efficacité. Seuls 10 des plus de 90 indicateurs environnementaux des objectifs de développement durable (ODD) comportent une dimension de genre et, parmi ceux-ci, les données ne sont disponibles que pour deux d’entre eux. Une transition vers une représentation plus juste est donc primordiale.

Les dix conclusions cruciales de la COP28

Les femmes jouent un rôle essentiel dans la réponse au changement climatique. La question principale reste la suivante: Comment faciliter leur représentation dans les politiques climatiques? La conférence Compter sur un avenir durable: Conférence globale sur les données relatives au genre et à l’environnement de la COP28 arrive aux dix conclusions suivantes.

  1. La diversification des méthodes de collections de données qualitatives et quantitatives de manière éthique et transparente, telles que la légitimation de données en provenance d’acteurs civils à l’échelle nationale et la facilitation du dialogue qualitatif en statistiques, permet d’assurer une meilleure représentation et participation des femmes.
  2. L’augmentation de l’utilisation de statistiques sexospécifiques et environnementales permet d’acquérir plus de données à l’échelle locale et nationale. L’information statistique est très utile pour établir des liens plus révélateurs entre le genre et le changement climatique nécessaires pour la prise de décision, l’élaboration de programmes, le suivi, la recherche et le plaidoyer.
  3. L’investissement à l’échelle nationale et globale dans les organisations locales et communautaires contribue à mieux supporter les initiatives civiles féministes.
  4. La garantie d’inclusion et de représentation du leadership statistique des femmes, des jeunes, des communautés locales, des autochtones et d’autres populations vulnérables crise dans le cadre de discussions sur le changement climatique ainsi que la transition climatique est essentielle pour une coopération équitable.
  5. La création d’objectifs et d’indicateurs spécifiques locaux et communautaires est importante pour l’encadrement des initiatives politiques inclusives au niveau régional et national.
  6. Le support de partenariats multipartites et multisectorals entre les ministères gouvernementaux ainsi que les régions favorise les investissements publics et l’encadrement de projets respectant les droits de l’homme.
  7. Le renforcement de la communication de données relatives au genre et à l’environnement entre les États et les défenseurs de droits humains est crucial pour partager des stratégies ainsi que des solutions prouvées efficaces, telles que des cartes méthodologiques de données sur le genre et le climat.
  8. La sensibilisation en ligne est un atout essentiel pour contrer la désinformation liée au climat et au genre ainsi qu’utile pour informer différents publics sur l’importance de l’utilisation des données relatives au genre et au climat.
  9. Le leadership de la jeunesse pour un développement durable est crucial pour la consolidation d’une justice intergénérationnelle.

Pour en apprendre plus sur le sujet, nous vous invitons à regarder la capsule vidéo suivante:

Gender Responsive Climate Finance

Sources pour approfondir:

IUCN. 2023. Indigenous young Kichwa woman’s high-level address at COP28 calls on world leaders to uphold Indigenous Peoples rights — Speech. https:////www.unfpa.org/stories/5-things-women-and-girls-demand-cop28-climate-summit

Oxfam France. 2023. La pauvreté dans le monde n’est pas une fatalité. https://www.oxfamfrance.org/inegalites-et-justice-fiscale/la-pauvrete-dans-le-monde/

United Nations Climate Change. 2023. Counting on a Sustainable Future: Global Conference on Gender and Environment Data. https://www.eventcreate.com/e/cop28genderdata

UNFCCC. 2023. Gender and Women at COP28. https://unfccc.int/gender/cop28#Global-Conference-on-Gender-and-Environment-Data

UNFPA. 2023. 5 things women and girls demand of the COP28 climate summit. https:////www.unfpa.org/stories/5-things-women-and-girls-demand-cop28-climate-summit

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