Note #15 : Comment se faire racketter en 5 étapes ? 🤑

Entre le Vietnam et le Laos, il n’y a qu’un pas… et quelques euros.

Alexis Minchella
Carnet de notes
5 min readMar 11, 2018

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Photo by lucas Favre on Unsplash

On s’était quitté à Hanoï. Aujourd’hui, on quitte le Vietnam un peu triste.

Direction le Laos… !

Objectif de la journée : traverser la frontière entre le Vietnam et le Laos, sans (trop) d’encombres.

On part donc de Điện Bien Phu pour arriver à Muang Khua.

Pour mieux te repérer !

On embarque donc dans un mini van de 25 personnes. Sans surprise, nous sommes une majorité de touristes àvouloir traverser la frontière.

Bien entendu, nous partons avec un peu de retard.

On était sensé mettre 3h pour arriver à Muang Khwa, à 40 km de la frontière. (On en mettra donc finalement plus du double.)

C’était sans compter les nombreux arrêts pour récupérer sac de riz, hélice de bateau, nouilles en tout genre, etc. Et petit à petit, on commence à être bien serrés avec tout ces sacs. Il y en a partout : dans le coffre, sur le toit et (presque) sur nos genoux.

2h passent et nous voilà arrivés à la frontière vietnamienne.

La sortie du pays fut une formalité, aucun souci. Bien entendu, on ne fera pas mention des nombreux vietnamiens ayant décidés de passer devant tout le monde, un billet glissé dans le passeport. Mais bon, passons !

On fait ensuite quelques kilomètres dans un no man’s land. Entre le Vietnam et le Laos.

Passé cet épisode, on arrive enfin à l’entrée du Laos, et là, je commence à me dire que ça ne va pas être aussi simple…

La pièce se met en place.

Tout le monde a son poste. Chauffeur de bus compris.

Malheureusement le french accent et le sourire ne fonctionneront pas vraiment ici.

Passer la frontière laotienne, c’est un peu comme aller au drive chez Mcdo.

Tu passes par un premier guichet et le tour commence, passant d’un guichet à l’autre. Tu ne récupéreras ton passeport qu’après avoir dit bonjour (et fait quelques “cadeaux” — après tout c’est la période des fêtes non ?) à 5 guichets.

Mode emploi !

1er guichet : tu donnes une belle photo d’identité, et en échange tu as le droit à deux beaux papiers à remplir. Le tout, gratuitement.

Une fois les papiers remplis, tu passes au guichet suivant.

2ème guichet : tu remarques déjà une chose, le sourire a disparu. On se la joue Far West et Cowboy d’Amérique. Le gentil monsieur vient de signer les deux papiers et te demande maintenant 3$. Et oui le pauvre, c’est que ça demande un sacré effort de signer deux petits papiers. La première cartouche vient de passer, mais je garde le sourire. Je me dis que ce sont les 3$ de bienvenu et qu’après ça on sera tranquille. Erreur.

3ème guichet : le visa est là. Il aura fallu trois guichets pour enfin avoir ce visa laotien. 30$, prix français. Pas de problème, on s’était renseigné, le prix est le bon. Me voilà soulagé et prêt à récupérer mon passeport.

Et non ! On me dit d’aller au prochain guichet pour récupérer mon passeport.

4ème guichet : « passports approval : 1$ ».

Ah je vous rassure gentil monsieur, mon passeport est bien conforme. Pas besoin d’analyse approfondi sur mon passeport, merci !

1$. Bon d’accord. Je peux récupérer mon passeport maintenant ?

Et non l’ami, il te reste une dernière étape, guichet suivant !

5ème guichet : 1 tampon. 2 tampons. 3 tampons. 4 tampons. 2$.

Le cours de l’encre au Laos s’envole ces temps-ci, c’est incroyable.

Très franchement, je commence sérieusement à perdre patience. Déjà que mon stock de self-control n’est pas très élevé, mais là, j’hallucine.

Le ton commence a monter, mais on garde le sourire. Et vas-y que je balance ton passeport sur la table, à l’autre bout de la pièce.

Je lui explique donc calmement (ou presque) que ses 2$ j’en ai ras-le-bol et que du côté de l’ambassade, ça n’existe pas.

Il décide de la jouer attaquant. Il est à deux doigts de me mettre un tampon pour que je sois expulsé du territoire. Ah oui rien que ça quand même.

Je me mets gentiment sur le côté pour patienter. Parce que oui, pas de temps à perdre, il y a d’autres vaches à traire.

On est quelques-uns à ne pas vouloir payer. Les autres payent sans rechigner.

Quelques minutes passent. Nos passeports sont toujours de l’autre côté.

On a tenté le coup de fil à l’ambassade, le « no money more », le sourire légendaire de Margaux. Rien n’y fait.

Le bus est quant à lui prêt à partir, nos sacs à l’intérieur.

Alors on se résigne, et on garde le sourire.

Prends des 2$ et rends nous nos passeports.

Au total, notre visa nous aura coûté 36$, chacun.

J’entends déjà certains…

De quoi te plains-tu ? 35$ ce n’est pas cher lorsque tu compares ça à d’autres pays.

Bien sûr si tu raisonnes comme ça, rien n’est cher.

Ce n’est pas tellement le montant qui me gêne. C’est la façon dans tout ça est organisé.

J’appelle ça de la belle corruption, en bonne et du forme. Du chauffeur de bus, au dernier douanier de la frontière. Et ça m’énerve !

Parce qu’une fois de plus, l’argent n’ira pas aux plus pauvres. Bien sûr que non, il est ensuite partagé avec toute la belle équipe, pour arrondir des fins de mois déjà bien supérieures à la moyenne du pays.

On m’avait prévenu, je ne suis pas surpris. Mais je n’aime pas la façon dont ce racket est organisé.

La frontière est maintenant passée.

Direction Muang Khua. Bienvenu au Laos.

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