L’actualité du Green IT analysée par un développeur web— 3ème édition

Il s’agit de la troisième édition de cette revue d’actualité proposée par Jérôme Cognet autour du numérique responsable.

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L’Actualité Tech — Blog CBTW
7 min readNov 3, 2022

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Green IT — Photo by Ergita Sela

Jérôme Cognet est développeur web, ainsi que membre du comité RSE.
Passionné par l’univers informatique et engagé sur les enjeux de développement durable, il nous partage sa veille sur les sujets de Green IT.

Dans cet article, il aborde : La mesure de l’impact via les CI/CD, ses lectures de la troisième version du référentiel Green IT et du livre ‘Les clés pour des projets informatiques plus responsables’, ainsi que l’impact de l’industrie du minage.

Ça bouge du côté des CI / CD !

L’intérêt pour suivre les KPI (Key Performance Indicator) d’un site internet afin de l’optimiser se renforce de plus en plus. Et notamment sur le suivi de la performance environnementale et des actions d’écoconception.

Pour ce faire, les outils les plus cités sont EcoIndex de Green IT et Lighthouse de Google.
D’ailleurs, vous pouvez retrouver un article sur le sujet, coécrit avec Florent, développeur front. Ensemble, nous présentons de manière pratique ces différents outils de mesure d’impact et comment nous les avons utilisés pour optimiser le site web de Linkvalue :

Cependant, ces outils sont statiques. Et pour avoir des indicateurs clé de performance sur la durée, il est nécessaire de scanner les sites à la main de manière régulière sur des parcours donnés.
Cela peut se révéler chronophage et fastidieux, et donc démotivant.

Pour pallier à ce point (évoqué dans cet article sur la mesure des émissions du web), trois outils sont sortis de manière indépendante pour se greffer à la CI (Continuous Integration)/CD (Continous Deployment).
Ils se basent sur des sondes pour suivre le code poussé sur un outil de gestion de code (tels que GitHub, GitLab, …) et mesurer l’évolution de l’impact de ce code.

  • L’outil PAGIEL de Zenika
    Il s’agit d’un outil de monitoring d’indicateurs environnementaux conçu pour être intégré dans des pipelines de déploiement continu. Il permet de lancer les outils GreenIT Analysis, SiteSpeed, Yellow Lab Tools et PowerAPI depuis un runner GitLab et de récupérer les résultats dans un dashboard.
  • L’outil EcoSonar d’Accenture
    Il s’agit d’un plug-in SonarQube pour analyser le code sur des critères d’écoconception. Cet outil se base sur Google Lighthouse et EcoIndex.
  • L’outil Heart de Fabernovel
    Grâce à la mise en place d’appels API, cet outil de mesure permet de connaître les performances écologiques de pages internets.

Je n’ai pas encore eu le temps de tester ces outils, et il est encore trop tôt pour savoir si l’un d’eux s’imposera davantage qu’un autre.
Dans tous les cas, saluons l’effort de ces entreprises pour créer des outils open source qui permettent de prendre en compte les impacts environnementaux dès le développement d’une application. Et surtout d’automatiser ce rendu des KPI pour une intégration facilitée dans les projets.

À quand un poker planning, où en plus du calcul de la complexité de la tâche et de valeur métier*, les parties prenantes prendraient en compte le coût écologique d’une feature ?
(*Spoil, ça existe déjà, je vous en reparlerai bientôt !)

Sortie de la V3 du référentiel Green IT

La V3 du référentiel Green IT, sortie en juin 2022, est accessible gratuitement en ligne.

Son objectif est de présenter des bonnes pratiques que les sociétés peuvent entreprendre afin de diminuer leur empreinte numérique, au-delà du développement d’applications écoresponsables.

Ce document a été écrit sous la supervision de Frédéric Bordage. Et de manière plus générale, par le Club Green It. Il est constitué d’un regroupement d’entreprises et de structures publiques (comme des villes) qui mettent en commun leurs expériences afin de proposer des outils communs sur le numérique responsable.

En 74 points, le référentiel évoque notamment : les réseaux de télécommunication les moins énergivores, la maîtrise des capacités de stockage ou encore l’achat de matériel reconditionné.
Certains sujets semblent plus difficiles à mettre en pratique que d’autres, car ils impactent la sous-traitance. Comme par exemple l’organisation des allées dans les centres de stockage ou encore l’utilisation du free cooling.

Chaque recommandation est présentée sous la forme d’une fiche récapitulative. Elles sont toutes accessibles et structurées de la même manière avec un mélange de texte et d’icônes reprenant :

  • La pratique et sa description
  • Les impacts sur lesquels elle agit et son degré de priorité
  • La facilité/ difficulté d’implémentation
  • Les gains potentiels espérés
  • Les KPI à suivre

Le référentiel propose également une méthodologie pour mesurer sa maturité et sa performance sur le sujet, en se donnant une note de 1 à 5 sur chaque élément. Ainsi, les entreprises peuvent calculer un score et se donner l’objectif de l’améliorer d’année en année afin d’être plus vertueuses.

Ce référentiel est très accessible grâce à sa mise en page dynamique et met en avant les gains attendus. Il faudrait le diffuser à tous les responsables techniques et informatiques !

Et ce sujet est d’autant plus d’actualité que le gouvernement travaille également sur un guide de bonnes pratiques numériques responsables pour les organisations. En cours de consolidation, la présentation est plus austère, mais permet des exports au format CSV et JSON.

’Les clés pour des projets informatiques plus responsables’

Les clés pour des projets informatiques plus responsables est un excellent livre qui résume tout ce qui touche au Green IT. Il regroupe en 300 pages toutes les informations utiles pour tendre vers des entreprises plus vertueuses.

Après l’introduction sur les enjeux de la sobriété numérique et les raisons pour lesquelles nous devons faire attention à tous les appareils électroniques, on entre dans le concret sur les thématiques :

  • Des différents acteurs qui ont un rôle dans le domaine (en France),
  • Des normes et référentiels pour avoir un SI durable,
  • Des approches pour mieux gérer l’informatique dans une entreprise (comme le BYOD = Bring your own device),
  • D’écoconception de services numériques (dont une partie sur les Analyses de Cycle de Vie).

Le livre prend aussi le temps de rentrer dans les détails, comme avec l’analyse du bilan carbone de certains algorithmes de deep learning. Il va au-delà de la technique, en évoquant même le crafting.

Le périmètre et le thème du sujet peuvent laisser penser à une lecture fastidieuse, mais j’ai dévoré le livre pendant les vacances ! En effet, il est facile d’accès, avec des diagrammes et un discours simple. Et cerise sur le gâteau : toutes les sources sont partagées afin de creuser certains sujets.

La guerre des métaux

Grâce à Aurore Stephant, présidente de l’association Systex, le numérique devient de plus en plus concret.
À travers 3h d’interviews chez Thinkerview, complétées par un document de 55 pages, puis 2 heures de discussions chez Techologie, elle nous ouvre les yeux sur les impacts de l’industrie du minage dans le monde.

Ce sujet a également était abordé récemment dans Le Monde :

Et dans le média Nourritures Terrestres :

Que retenir de ces échanges et publications ?

Le numérique est extrêmement consommateur de ressources. Pour preuve, bien qu’un téléphone portable moyen pèse environ 200g, il faut extraire plus de 800kg de terre initiale et consommer plus d’une tonne d’eau afin de pouvoir regarder des gifs de chaton mignon dans le métro sur son écran.

En effet, le taux moyen d’extraction de cuivre dans une mine est de 0.2 %. Ce qui signifie que pour obtenir 2 kg de cuivre, les miniers sont obligés d’extraire 1 tonne de roche… Sans parler des produits chimiques nécessaires à l’extraction et au raffinage qui peuvent polluer les terres autour des mines. L’eau est également souvent oubliée, mais on cite le chiffre d’utilisation de 200 mètres cubes d’eau pour extraire 1 tonne de cuivre.

Par ailleurs, l’activité du minage représente pas loin de 10% de l’utilisation de l’électricité mondiale et génère beaucoup de déchets. Le tout dans des régimes politiques pas forcément démocratiques et dans des conditions sociales pas toujours idéales (dont le travail des enfants en particulier).

De son côté, l’Europe ne possède aucune mine en exploitation mais réfléchit à s’assurer un approvisionnement sécurisé afin d’éviter de dépendre d’autres pays.
Le défi est de taille car les demandes explosent à cause :

  • De la transition énergétique qui exige de plus en plus de métal suite à l’électrification des voitures (de 20 kg pour une voiture thermique à 80 kg pour une voiture électrique), le développement des éoliennes et des panneaux solaires.
  • Du numérique et de l’internet des objets connectés dont la quantité approche les 18 milliards d’appareils en service.

Ces quelques lignes qui se concentrent sur le cuivre ne sont que la partie émergée du problème, car il faut compter une cinquantaine de métaux pour fabriquer des téléphones portables…

Toutes ces contraintes d’extractions expliquent pourquoi nous devons faire attention à nos appareils (les plus gros pollueurs numériques par rapport à l’infrastructure et aux data centers) afin de les garder en utilisation le plus longtemps possible. Ceci explique aussi pourquoi en tant que développeur, nous devons réaliser des applications qui prennent en compte les anciens appareils afin de lutter contre leur obsolescence et limiter les besoins de renouvellement.

En bref, le bien le plus précieux n’est peut-être pas celui que vous croyez ! Alors, je retourne regarder des chatons mignons sur giphy :)

Des articles sur le numérique inclusif et responsable et des sujets de développement produit web et mobile, data et analytics, sécurité, cloud, hyperautomatisation et digital workplace sont régulièrement publiés sur le compte Medium Positive Thinking Company. N’hésitez donc pas à le suivre pour être notifié des prochaines publications et réaliser votre veille professionnelle.

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