13 bonnes pratiques pour limiter les biais et favoriser un recrutement inclusif

Selon Pôle Emploi, plus de 3 millions d’embauches sont prévues en France cette année (+ 12% par rapport à 2021). Les besoins en recrutement connaissent donc une réelle envolée, y compris sur les métiers du recrutement eux-mêmes.

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10 min readJun 2, 2022

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Dans ce contexte de forte demande de l’offre, il est d’autant plus crucial d’opérer des recrutements qualitatifs et inclusifs. L’assimilation des enjeux de diversité et d’inclusion fait d’ailleurs partie des compétences les plus demandées aux équipes de ressources humaines en 2020 (source rapport The Future of Recruiting).

Entretien de recrutement — par Jason Goodman

Les biais et leur impact sur le recrutement

Un biais cognitif est un mécanisme de notre cerveau qui se manifeste lors du traitement d’informations en leur donnant plus ou moins d’importance ou en interprétant ces informations de manière personnelle et donc subjective.
Que l’information perçue soit écrite, visuelle ou encore émotionnelle, nous sommes tous soumis à certains biais.
Ce mécanisme est majoritairement inconscient, mais affecte notre jugement et peut entraîner des erreurs de perception, d’interprétation ou d’évaluation.
Nous jugeons un individu ou un événement au regard des informations que nous possédons sur le moment et selon notre perception de la réalité.

Malgré tout, tous les biais ne sont pas négatifs et ils nous sont même parfois utiles. Il s’agit d’un raccourci fait par notre cerveau pour nous permettre de prendre une décision efficace et rapide.
Notre cerveau doit filtrer le trop-plein d’informations pour ne retenir que les plus pertinentes. Ces informations doivent engendrer une décision rapide, de laquelle peut parfois dépendre notre sécurité.
Mais comme il n’est pas possible de mémoriser toutes les informations perçues, certaines informations importantes sont parfois écartées, des associations se font entre certaines informations, etc.

Dans le cadre d’un recrutement, un échange d’informations important se fait justement avec le candidat. Et ces informations doivent mener à une décision sur la compatibilité de celui-ci avec le poste et l’entreprise.
De nombreux biais inconscients sont donc susceptibles de se produire et d’interférer dans le processus, et ce dès la phase de sourcing.

Ces biais implicites peuvent être préjudiciables et avoir un fort impact sur le recrutement, l’entreprise et même la société. Ils peuvent mener à :

  • Une sélection de candidat restrictive, qui omet des profils intéressants.
  • Des recrutements basés sur des critères subjectifs plutôt que des critères objectifs attendus sur le poste.
  • Des recrutements inadaptés qui peuvent engendrer des incompréhensions, des tensions, un turn-over plus important, …
  • Un coût financier si des actions de formation ou un nouveau recrutement sont ensuite nécessaires.
  • Une équipe constituée majoritairement de profils semblables et qui manque donc de complémentarité.
  • Une discrimination indirecte à l’embauche, qui de manière implicite désavantage un candidat par rapport à un autre, selon une caractéristique telle que son sexe ou son genre, son âge, son apparence physique, son état de santé, …
    Les biais peuvent engendrer dans une situation similaire un traitement plus ou moins favorable du candidat, selon la perception inconsciente de certaines de ses caractéristiques.
    Le principe de non-discrimination est d’ailleurs renseigné dans la loi.
  • Un renforcement et une perpétuation des stéréotypes au sein de la société.
    En reproduisant implicitement des stéréotypes préexistants, je leur donne de la résonance et je favorise leur continuité.
    Aujourd’hui les profils dans la Tech sont essentiellement masculins. Si pour un recruteur, les profils féminins sont implicitement associés à certaines caractéristiques et certains métiers, et qu’il recrute une majorité d’homme sur des métiers techniques, il contribue à entretenir ce type de représentations sociétales.

Globalement les biais peuvent donc nuire à l’inclusion, l’équité et à la diversité au sein de l’entreprise et de la société.
Pour agir en faveur de ces enjeux, il est primordial d’intégrer des mesures pour lutter contre ces biais.
En tant qu’entreprise et recruteur, cela permet aussi de renforcer une culture d’entreprise bienveillante, de renforcer et de faire évoluer ses processus et compétences, de prendre de meilleures décisions et d’œuvrer à son échelle à un changement sociétal positif.

Les bonnes pratiques pour limiter les biais lors de recrutements

Comment s’assurer de prendre des décisions neutres et objectives et de garantir l’égalité des chances sur l’ensemble d’un processus de recrutement ?
Chaque individu, et donc chaque recruteur, est enclin aux biais. Et même s’il est possible d’en prendre conscience, il est difficile de s’y soustraire. En revanche, il est possible de les réduire et de limiter leur impact.

  1. Le premier pas est la prise de conscience de l’existence des biais et l’éveil à ce sujet.
  2. Ensuite, pour comprendre et maîtriser davantage le sujet, il est intéressant d’aller plus loin et de consulter différentes ressources ou même de suivre une formation sur les biais en entreprise et dans le recrutement spécifiquement.
  3. Avec la connaissance de l’aspect théorique, il est ensuite possible de transposer ces éléments dans son quotidien. Il s’agit alors d’analyser ses raisonnements et décisions au regard des biais existants. En faisant preuve de pensée critique, on peut essayer d’identifier les biais auxquels on est le plus fréquemment sujet.
  4. Pour aller plus loin dans le fait d’agir en conscience, cultiver la pensée divergente permet d’adopter de nouveaux points de vue et de se challenger.
  5. Un point important est aussi de préparer ses entretiens en amont.
    Il faut prendre le temps de bien analyser le poste à pourvoir pour se recentrer sur les compétences techniques et comportementales qu’il requiert.
    Une grille d’évaluation reprenant ses critères de sélection peut alors se dessiner, en incluant aussi des indicateurs liés à la culture d’entreprise.
  6. En s’appuyant notamment sur ces grilles d’évaluation, on peut ensuite mettre en place des entretiens structurés. C’est-à-dire définir un processus standard, identique pour chaque candidat, suivi par l’ensemble des intervenants sur un recrutement.
    Il peut bien sûr y avoir des échanges spontanés, mais l’entretien doit se baser sur l’utilisation de questions définies selon des critères objectifs et adaptés au poste à pourvoir.
    Cette base commune à l’ensemble des entretiens est nécessaire pour harmoniser les résultats et pouvoir s’appuyer sur des données concrètes dans sa prise de décision.
  7. Dans les questions posées, il est d’ailleurs recommandé de privilégier des questions ouvertes de type ‘Pourquoi ?’, ‘Comment’.
  8. Bien entendu, il est utile de prendre note des réponses aux questions au fur et à mesure, afin de garder une trace écrite sur laquelle s’appuyer a posteriori et se remémorer le contenu de l’échange.
  9. Faire intervenir plusieurs personnes dans le processus de recrutement est également idéal pour comparer différents points de vue et aboutir à un résultat plus objectif.
  10. Dans tous les cas, avant de prendre une décision, il est préférable de prendre du recul après un entretien et de prendre le temps de relire ses notes, de réexaminer les données factuelles, de solliciter un avis externe, …
  11. Il faut avoir à l’esprit que le candidat est lui-même sujet au biais. Cela peut être difficile à identifier, mais peut aussi interférer au bon déroulé de l’entretien. La transparence et un cadre d’échange bienveillant sont à cultiver avec d’autant plus d’importance.
  12. D’ailleurs pour limiter les biais et garantir un cadre propice à l’inclusion et à la diversité, il est nécessaire de mettre en place un plan d’actions avec des outils de mesure associés au sein de l’ensemble de l’entreprise.
    Une action liée au recrutement peut être la diversification des sources de recrutement : cooptation, job boards, réseaux sociaux, salons professionnels, relation école, …
  13. Une autre mesure peut aussi être de limiter les informations annexes reçues sur le candidat en amont d’un premier échange.
    Pour éviter d’être influencé, il est possible de généraliser les candidatures à l’aveugle, qui ne font pas apparaître certains éléments (photo, nom de famille, adresse, école, …) et aussi de limiter les recherches sur Google ou les réseaux sociaux.

Les principaux types de biais dans le recrutement

Plus de 200 biais cognitifs sont aujourd’hui recensés par différentes études.
Dans le cadre d’un recrutement ils peuvent se manifester dès la phase de sourcing, puis lors de l’étude de CV, dans le cadre des entretiens et de la phase de sélection des candidats.
Et bien que nous ne sommes pas tous exposés aux mêmes biais, il est possible de dresser une liste non exhaustive des biais les plus fréquents :

  • L’effet de récence
    Mieux se souvenir et accorder plus d’importance aux dernières informations reçues. Ou à l’inverse pour l’effet de primauté, des premières informations.
    Exemple : On se souviendra plus facilement et clairement des informations liées au premier et/ou dernier candidat vu en entretien, que ceux vus dans l’intervalle.
  • L’effet de simple exposition
    Ressentir une émotion positive par familiarité avec les personnes, lieux, objets déjà vus.
    Exemple : Je suis plus enclin à éprouver de la sympathie pour un candidat avec qui j’ai déjà été en contact auparavant ou durant une plus longue période.
  • Le biais de confirmation ou effet de halo
    Privilégier les informations qui vont dans le sens de notre pensée ou les interpréter en ce sens, en les prenant pour acquis et en accordant moins d’importance aux informations en contradiction.
    Exemple : Ne retenir des échanges avec le candidat que les points qui renforcent ma première impression, sans tenir compte d’autres éléments ou en minimisant les éléments contraires.
  • L’ancrage mental
    Dans la même lignée que le biais de confirmation, il consiste à conserver et à s’appuyer sur la première impression pour prendre une décision. L’information perçue en premier s’établit comme vérité et ne laisse pas l’opportunité de changer de point de vue.
    Exemple : Un candidat est arrivé en retard, j’ai donc l’impression qu’il n’est pas sérieux. Je ne considère pas d’autre élément de notre entretien et je décide de ne pas continuer à avancer dans le processus de recrutement.
  • Le biais de projection
    Présupposer que l’autre est similaire à nous, avec les mêmes mécanismes de pensée, la même logique et les mêmes raisonnements, ou qu’il partage forcément notre avis et nos préférences. Cela peut inciter à se baser sur nos préférences et à les généraliser pour prendre des décisions.
    Exemple : Je suis un adepte du travail en présentiel dans les bureaux car j’ai besoin de passer du temps avec d’autres collaborateurs. Je pense qu’il en va de même pour les autres, et je demande aux futurs collaborateurs de venir au bureau à plein temps, sans m’assurer que cela leur convient également.
  • Les biais de stéréotype
    Associer des caractéristiques à un individu selon son appartenance à un groupe social.
    Exemple : J’associe à l’ensemble des personnes sportives des prédispositions à travailler en équipe. Lorsqu’un candidat pratique un sport, je lui associe donc cette caractéristique sans qu’elle soit nécessairement vraie ou sans la valider au niveau individuel.
  • Le biais culturel
    Juger le monde extérieur selon notre système interne de normes et de valeurs issues de nos références culturelles.
    Exemple : Selon mon système de représentation, le vouvoiement exprime la politesse et le respect, je peux donc mal percevoir un candidat qui utilise d’emblée le tutoiement. Or selon son propre système de représentation le tutoiement peut être une pratique courante qui exprime le fait d’être à l’aise et sur un même pied d’égalité.
  • L’effet de contraste
    Évaluer une information en comparaison à une autre.
    Exemple : Après avoir vu une candidate en entretien, je la prends comme référence pour évaluer les candidats suivants au regard de ce candidat. Si je vois trois candidats, je pourrai alors embaucher celui que j’estime meilleur que les autres. Mais peut-être qu’aucun des trois ne convenait pour ce poste et qu’il serait préférable de rencontrer davantage de profils. Car il ne s’agit pas de trouver le meilleur d’un panel, mais la personne la plus adaptée au poste.
  • Le biais de cadrage
    Donner des indications de préférence, même implicites, influence le comportement de son interlocuteur.
    Exemple : Si je laisse entendre que j’apprécie les expériences autodidactes, le candidat pourrait orienter son discours sur ce point et laisser de côté la valorisation de ces autres expériences.
  • Le biais de l’angle mort
    Estimer être moins sujet aux biais ou plus en capacité de maîtriser leur impact que d’autres personnes. Et identifier les biais plus facilement chez les autres. Cela peut engendrer une baisse de vigilance ou une confiance excessive sur la qualité de son jugement.
    Exemple : J’ai repéré un biais chez un de mes collègues et je suis persuadé de ne pas y être sujet moi-même et d’être plus neutre que celui-ci. Or je suis peut-être tout autant biaisé, sans le réaliser.
  • Le biais d’extraordinarité
    Accorder davantage de valeur à une personne possédant une caractéristique extraordinaire.
    Exemple : Une candidate présente une caractéristique exceptionnelle, comme le fait d’être championne de France d’escalade. Je suis impressionné, et je pourrais la favoriser, bien que cette caractéristique ne soit pas forcément en lien avec le poste.
  • Biais d’autorité
    Attribuer de l’importance à un seul critère ou à l’opinion d’une seule personne que l’on estime faire figure d’autorité.
    Exemple : Le candidat valide la partie compétences techniques ou à l’aval du directeur technique. Il s’agit d’un élément de référence pour moi, qui suffit à valider la pertinence du candidat, sans valider d’autres critères comme les soft skills.
  • Le biais d’appartenance
    Favoriser les personnes qui ont des caractéristiques communes avec soi, que ce soit un loisir pratiqué, une école fréquentée, un caractère similaire, …
    Exemple : Je favorise un candidat qui aime cuisiner, tout comme moi, même si cette caractéristique n’est pas en lien avec le poste. Ou une candidate qui a le même parcours scolaire, même si cela n’est pas forcément gage de qualité. Cela peut mener au recrutement de profils similaires dans une équipe, au détriment de la diversité.
  • Le biais de négativité
    Retenir plus facilement et accorder plus d’importances aux éléments négatifs que positifs.
    Exemple : Si un élément négatif se manifeste durant un entretien, je le retiendrai davantage que les autres éléments positifs.
  • L’effet Dunning — Kruger
    Une personne non-qualifiée peut avoir tendance à surestimer ses compétences et à l’inverse une personne qualifiée à sous-estimer les siennes.
    Exemple : En entretien, un candidat junior peut manifester un excès de confiance en ses qualifications, et inversement pour une candidate plus expérimentée.

Pour une liste plus exhaustive des différents biais cognitifs :

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