Diversité et évolution des métiers du test et de l’assurance qualité logicielle

L’univers du développement logiciel est en perpétuelle évolution. Et pour accompagner cette croissance, la qualité des logiciels est devenue cruciale. Selon une étude menée par le Consortium for IT Software Quality (CISQ), les défauts logiciels coûtent en effet environ 1,7 milliard de dollars à l’économie mondiale chaque année.

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12 min readNov 9, 2023

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Testing — By dtravisphd

La qualité d’un produit numérique est primordiale dans la réussite d’un projet. Pour ce faire, le domaine de la qualité logicielle présente une large diversité dans ses méthodologies et approches. Chaque testeur apporte sa vision et évolue au fil des défis techniques et des environnements professionnels.

Dans cet article, Ramzi, Estelle et Thibault nous partagent leurs expériences dans le domaine de la qualité logicielle. Ils reviennent sur leurs parcours, leurs outils de prédilection, et également sur les perspectives et évolutions du secteur.

Peux-tu nous décrire ton domaine d’expertise ? Comment décrirais-tu ton poste actuel ?

Ramzi : J’occupe un poste de QA Lead chez un leader européen d’e-commerce de fournitures industrielles. En tant que QA Lead, je travaille dans le domaine de l’assurance qualité et de la validation logicielle. C’est-à-dire que je suis responsable de superviser et de coordonner les activités de tests pour garantir que les produits logiciels répondent aux normes de qualité établies.
Je dirige une équipe de testeurs chargés de développer et d’exécuter des cas de tests pour identifier les défauts et les vulnérabilités dans les produits numériques.
Je suis également impliqué dans la planification des tests, la gestion des environnements de test et l’assurance que les produits soient conformes aux spécifications.

Estelle : Je suis testeuse logicielle, en mission dans une entreprise du domaine du transport.
Je suis une testeuse technico-fonctionnelle, puisque j’apporte de la technique, tout en me mettant à la place des utilisateurs finaux.
J’ai donc des taches diverses et variées, qui changent constamment. C’est d’ailleurs ce qui est intéressant dans ce métier. Ce n’est absolument pas rébarbatif, contrairement à ce que l’on peut penser. Le métier ne se résume pas uniquement à chercher des bugs ou des anomalies. Il y a aussi une partie recherche sur : le métier du test, l’accessibilité, l’écoconception, les nouvelles technologies, le ressenti des utilisateurs, etc. Et en tant que testeuse, je suis référente de ces informations, à la fois pour le produit et pour les utilisateurs finaux.
J’ai aussi une casquette d’accompagnement du client, que ce soit sur des ateliers thématiques ou des sujets techniques, comme l’utilité des tests de non-régression.
Je fais aussi beaucoup d’analyse, car derrière les tests il y a une stratégie à mettre en place avant chaque campagne. Ce qui inclut de la conception sur les types de tests à faire et sur les parcours de tests end-to-end. De plus, il faut aussi faire des bilans de tests après chaque sprint ou campagne.

Thibault : J’ai un poste d’intégrateur. En termes de responsabilité, je suis garant de la qualité logicielle en bout de chaîne, juste avant la mise en production.
Concrètement, je récupère les différents développements réalisés et je les intègre dans le produit final, avant de les tester.
Je vérifie alors que la fonctionnalité réponde à ce qui est demandé et qu’elle n’amène pas de conséquence non souhaitée sur d’autres fonctionnalités.
Effectivement, un intégrateur ne se contente pas de tester les développements qui lui sont soumis, mais il doit aussi réfléchir aux éventuels impacts annexes. Ces tests se font d’un point de vue utilisateur, donc avec un déploiement le plus semblable possible avec la version de mise en production finale.
Avec l’expérience et la connaissance du logiciel, il est possible de réussir à identifier rapidement l’origine d’un problème. Ensuite selon la complexité du problème et le temps disponible, il s’agit de resserrer l’intervalle des possibles avec des tests plus approfondis avant de passer le relais au développeur.

Comment as-tu découvert cette discipline et comment as-tu été amené à l’exercer ?

Ramzi : Dès le départ, j’ai exercé le métier d’ingénieur test et validation, après un diplôme en informatique et informatique embarquée. J’ai pu travailler dans différents secteurs d’activité, en commençant en informatique embarquée, puis dans le secteur aéronautique, avant de me tourner vers le domaine du web.
J’ai commencé dans l’e-commerce en tant qu’ingénieur et validation et suis monté en compétences sur le poste de QA Lead avec la gestion d’une équipe. Le poste comprend une partie opérationnelle et une partie management avec la gestion d’une équipe.

Estelle : J’ai découvert ce domaine par hasard. J’ai fait une formation de business analyst. Et il y avait aussi des tests à faire dans le cadre de ce poste. Et c’est en réalisant ces tests, que j’ai découvert le métier de testeur chez le client.
À partir de ce moment-là j’ai trouvé intéressant d’aller voir comment était utilisé le produit côté utilisateur.

Thibault : Je ne connaissais pas le poste d’intégrateur initialement, car je ne suis pas issu d’une formation initiale en informatique. J’ai d’abord été physicien et j’ai approché l’univers du développement à travers le système embarqué en milieu industriel.
Dans ce poste, il y a à la fois une dimension technique qui nécessite une connaissance du code, et une dimension métier qui demande de comprendre pourquoi et comment le logiciel est utilisé. C’est cette vision large et très intéressante qui m’a attiré.

Ton métier a-t-il connu une évolution depuis que tu as commencé à l’exercer ?

Ramzi : Pour moi, ce sont surtout les domaines d’application et les cultures de chaque entreprise et équipe qui permettent de découvrir de nouvelles mentalités, méthodologies de travail et de nouveaux outils. Il s’agit d’un point fort pour enrichir sa carrière, mais également sur le plan du développement personnel.
Après, l’industrie du logiciel évolue aussi rapidement, notamment avec le déploiement des méthodes agiles, des automatisations de tests, de l’intégration continue… Cela a forcément transformé la façon d’aborder l’assurance qualité. Mais dans tous les cas, on se concentre sur la qualité tout au long du cycle de développement. Donc finalement, j’effectue toujours le même travail mais d’une autre manière, avec un angle ou une vision différente.

Estelle : Effectivement je constate et je ressens une évolution. D’autant plus que j’ai été testeuse pendant plusieurs années, avant de devenir formatrice puis de revenir dans le consulting.
Je vois une amélioration et des changements au niveau du rôle de testeur.
Avant, le rôle était plutôt limité à la réalisation de tests et de tâches répétitives. Alors qu’aujourd’hui c’est beaucoup plus polyvalent, sur l’accompagnement, la garantie de la qualité, … Et en plus des compétences fonctionnelles, on attend désormais également davantage de compétences techniques pour tout ce qui a trait à l’automatisation et à la compréhension du code.
Il est aussi de plus en plus nécessaire d’être en veille quotidienne, car tout évolue très vite, et en particulier les outils. Et justement, l’automatisation permet de libérer du temps pour monter en compétences sur d’autres connaissances.

Thibault : Il y a eu une évolution dans la répartition des responsabilités. La maîtrise du planning et des livraisons laisse place à davantage de négociations. Et c’est le Product Owner qui est devenu décisionnaire.
Le poste d’intégrateur se fond également de plus en plus avec celui de développeur.
En tant qu’intégrateur, il nous arrive aussi de faire du code et de soumettre des développements légers. Et de la même manière, les développeurs ont commencé à accomplir des missions similaires aux nôtres. Il y a une tendance vers des postes polyvalents qui comprennent développement, test et relecture. Mais il est important de conserver une approche pédagogique, et de transmettre notre expérience, notre vision et nos raisonnements, qui restent assez différents de ceux des développeurs.

Quels sont tes outils de prédilection dans ton métier ? Et dans quels cas d’usage ?

Ramzi : J’ai utilisé de nombreux outils durant mes expériences professionnelles.
Parmi eux, on peut notamment citer des outils comme Xray ou TestRail, Cypress pour l’automatisation, Jira/ Confluence et Jenkins pour la gestion des tests automatisés.
Ce sont des outils essentiels pour planifier, tester, exécuter, automatiser et suivre les cas de tests, au niveau de tous les cycles de tests : tests d’intégration, d’acceptance, fonctionnels, de régression.
Mais il y en a beaucoup d’autres, sans oublier les différents appareils de test avec différents systèmes d’exploitation.

Estelle : Les outils utilisés dépendent principalement des missions. Actuellement j’utilise énormément Miro pour mes stratégies de tests, pour tout ce qui est MindMap, conception relationnelle et parcours utilisateurs, mais aussi en collaboration avec les équipes d’UX Design, et pour la gestion d’ateliers et réunions, … Je trouve que Miro apporte une complétude au niveau fonctionnalité en proposant une centralisation dans un même espace.
Je me sers également de Figma pour la collaboration avec les équipes d’UX Design. Et sinon, un autre outil essentiel au quotidien est Jira pour la gestion des projets en Scrum.
On peut ajouter Xray qui est interfacé avec Jira pour les campagnes de tests et la rédaction des cas de tests et l’outil Cypress pour l’automatisation des tests avec un GitLab à côté. Et il y a aussi pas mal d’outils qui me facilitent la tâche en tant que testeuse : Wave pour les tests accessibilité, Screaming Frog pour les tests SEO, Cucumber, ChatGPT, …

Thibault : Il y en a plein ! Déjà nécessairement Git et GitLab pour le suivi du code des développeurs, doublé avec Jira. Il s’agit d’un outil de ticketing plus utilisé au niveau Product Owner, mais qui nous permet de communiquer également.
Il y a aussi Jenkins pour tout ce qui est automatisation et Docker pour la création d’environnements de déploiements automatisés.
On utilise aussi les mêmes IDE que les développeurs pour aller explorer le code, avec la suite logicielle de JetBrains.

Quel a été l’impact de ces technologies dans la vision de ton métier ?

Ramzi : Ces technologies ont considérablement amélioré notre efficacité et notre précision en tant QA et manager QA. L’automatisation des tests nous permet de libérer du temps pour des tâches plus complexes et plus créatives. Elle permet aussi d’assurer une couverture exhaustive de tests en garantissant une bonne qualité de livrable, ce qui permet moins d’effort avec une plus grande précision.

Estelle : Ces outils et leurs évolutions fonctionnelles facilitent les tâches des testeurs, mais aussi des développeurs. Ils permettent de gagner du temps et de parfaire le résultat. Ce qui est important pour respecter les contraintes et la qualité demandée pour atteindre les objectifs de productivité et de time-to-market. Ce sont les outils qui nous permettent de nous améliorer. Et ils n’ont pas forcément besoin d’être très techniques. Il y a aussi des outils no code et low code qui permettent de tester rapidement.

Thibault : Les outils nous ont permis d’évoluer, car ils ont été optimisés, et aussi car on commence à en avoir une utilisation plus avancée.
Par exemple, au début Docker était utilisé de manière basique avec une création manuelle des environnements. Maintenant tout est automatisé et rendu commun entre les développeurs. Idem pour l’utilisation de Jenkins. On a maintenant beaucoup plus le réflexe d’utiliser des pipelines de tests automatisés, qui peuvent même être lancés directement avec Gitlab. Donc on obtient progressivement des briques qui commencent à se connecter les unes aux autres et qui sont plus faciles d’utilisation.

La reconnaissance de ton poste est-elle à la hauteur de tes responsabilités ?

Ramzi : J’ai l’impression que cela est variable d’une entreprise à une autre. Mais je trouve tout de même que l’importance de l’assurance qualité est de plus en plus reconnue. Les entreprises comprennent que les tests sont essentiellement réalisés pour garantir la satisfaction du client et la qualité du produit à livrer.
Donc ce métier est de plus en plus mis en lumière et prend une importance égale aux métiers du développement dans le cycle de vie d’un projet informatique.

Estelle : Mon poste est reconnu car j’apporte de la valeur et des compétences dans le domaine du test. Mais dans certains environnements, le métier du test peut être vu de manière plus condescendante, surtout quand on intervient en bout de chaîne.
Dans mon cas, je suis impliquée dans toutes les réunions et cérémonies depuis le début du projet. L’équipe m’inclut car elle attend beaucoup de moi, ce qui est un signe de reconnaissance.
Et avec Ramzi, nous avons lancé une communauté de tests au sein de l’entreprise. Ce qui montre aussi une reconnaissance de nos expertises.

Thibault : Je dirai que mon poste est bien intégré au reste de l’organisation, car nous avons des interactions avec de nombreuses parties prenantes du projet, dont les différentes équipes de développement, dont celle en charge de la maintenance opérationnelle et la mise en production, mais aussi les PO voire les utilisateurs finaux directement.
Le métier est aussi plutôt bien reconnu : Comme nous sommes finalement les seuls testeurs de l’équipe, il y a beaucoup de retours de notre part quand les développements arrivent à notre niveau. Ce qui fait que l’on compte beaucoup sur nous pour identifier les problèmes. Par ailleurs, notre vision plus proche du métier nous amène à faire des suggestions pour correspondre à l’usage souhaité des utilisateurs. C’est un cercle vertueux qui est reconnu, qui permet d’éviter que la plupart des défauts logiciels n’arrivent jusqu’aux utilisateurs, et de parfaire le produit.

Appliques-tu des notions d’écoconception/ d’accessibilité dans ton métier ?

Ramzi : Effectivement, au niveau accessibilité on applique les bons outils et les bonnes pratiques à tous les niveaux du cycle de développement du projet, et donc lors des tests de vérification.

Estelle : Oui, au quotidien. L’accessibilité est l’un des enjeux majeurs de mon projet actuel. Je réalise donc des tests d’accessibilité sur l’ensemble des fonctionnalités créées.
Et dans le cadre cette mission, il est aussi très important d’avoir un site écoconstruit. Pour cela nous nous basons beaucoup sur le référentiel GreenIT, sur des outils de calcul d’empreinte carbone et aussi sur un guide de 115 pratiques d’écoconception délivré lors de l’onboarding sur le projet.

Thibault : Il s’agit d’une question de parcimonie et d’économie des moyens, c’est-à-dire de trouver la solution à la fois la plus simple et la moins gourmande en ressources. Ce sont des bonnes pratiques sur lesquelles il m’est déjà arrivé de soumettre des idées. Notamment lorsque je repère des boucles longues et des traitements inutiles dans le code. Mais je ne suis pas décisionnaire sur l’application de ces principes.

Pourquoi et pour qui recommanderais-tu ton métier ?

Ramzi : Je recommanderai ce métier à des personnes passionnées par la qualité et la résolution des problèmes. Après, il faut avoir une bonne capacité d’analyse et aimer la contribution à la création d’un produit fiable et innovant tout en travaillant en équipe. C’est un domaine passionnant à explorer, qui favorise l’esprit d’équipe et la collaboration.
Un domaine qui laisse l’humain évoluer progressivement à travers différentes cultures et mentalités.
Les QA ne travaillent pas en silo, mais sont en contact avec les managers et développeurs, ce qui laisse l’occasion d’apprendre aussi sur les autres métiers avec une vision globale sur la livraison finale.

Estelle : C’est un métier en pleine évolution, qui est très demandé. C’est aussi un métier accessible qui nécessite surtout des soft skills comme la curiosité, avoir une pensée critique, savoir communiquer, aller vers les gens, … On y retrouve d’ailleurs beaucoup de profils issus de reconversions. Car c’est surtout par expérience et exploration que l’on apprend les choses. Je recommande donc ce métier à toute personne qui aime apprendre et découvrir. Il s’agit aussi d’un métier à part entière, et il y a encore un grand boulevard avec beaucoup de choses à apprendre et à mettre en place. Il y a de quoi faire !
Et il faut se dire que tester ce n’est pas uniquement écrire des cas de test. Il faut surtout définir une stratégie de test, qui peut ensuite être appliquée de manière différente, avec différentes méthodologies et approches. L’objectif du test est surtout d’avoir un outil de qualité en trouvant la valeur qu’apporte le produit. Donc c’est rechercher tout ce qui impacte la valeur du produit à travers l’exploration. On peut commencer en tant que testeur fonctionnel, puis vite progresser techniquement grâce aux outils. Et le test ne s’applique pas qu’au domaine Tech, il y a aussi des tests logiciels dans le domaine automobile, médical, …

Thibault : Je recommanderai ce poste car il permet d’avoir une position relativement centrale dans un projet. Pas forcément sur la partie amont, mais du fait des nombreuses interactions avec les différentes équipes. Ce qui permet de faire de la technique mais aussi d’avoir des connaissances plus larges du projet sur d’autres aspects.
C’est un poste qui est adapté à des personnes qui sont méthodiques et rigoureuses, et aussi persévérantes. Sans pour autant vouloir appliquer des processus trop formatés.
À noter qu’il peut y avoir une certaine pression liée aux responsabilités. En effet, la responsabilité des versions incombe à l’intégrateur, car il est le garant de la qualité. Ce qui implique aussi des qualités de communication et de négociation interpersonnelle avec des personnes qui peuvent être des supérieurs hiérarchiques. Ce n’est pas forcément évident mais en tant que garant de la qualité, il faut savoir tenir ses opinions et bien faire comprendre les risques au décideur en cas de décision contraire.

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