Et puis l’amour.

Elise Richard
3 min readJun 29, 2016

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Image : Francis Mariani

Un couple, ce sont deux personnes qui se sont un jour, à leur façon, promis de veiller l’une sur l’autre. L’histoire ne dit pas, à ses balbutiements, qui veillera sur qui, jusqu’à ce que la maladie fasse ding dong à la porte. Ils étaient deux, les voilà trois.
Spoiler alert : à la fin, c’est Parkinson qui gagne.

S’il y a autant de maladie de Parkinson qu’il n’y a de malades, il y a autant d’aidants qu’il n’y a d’aidés. Un aidant, dans le langage administratif, est quelqu’un qui accompagne quotidiennement un proche en situation de handicap, quelque soit son âge. Conjoint, parent, frère ou sœur, enfant.

Un aidant est essentiel au quotidien.

Un aidant, dans le cas de mes parents, c’est ma maman. Jusqu’à il y a quelques années, les rôles étaient restés dans leur définition première : papa, maman. Il a fallut finalement longtemps à Parkinson pour mettre au clair son plan de destruction et redéfinir les règles, puisque dorénavant il y a maman d’un côté et le couple papa / Parkinson de l’autre.

La maladie est subtile, à aucun moment elle ne se positionne frontalement comme étant en passe de devenir omniprésente. Elle le fait, juste.
D’abord on sait sa présence, mais elle se rend invisible, puis discrète, et ainsi, petit à petit, de plus en présente.

Vous connaissez la légende de la grenouille : trempez là dans l’eau bouillante et elle bondira pour s’en sortir, trempez là dans l’eau froide que vous faites chauffer doucement, alors elle cuira sans réagir. Parkinson, elle vous (les) chauffe à feu doux.
Parfois, je me dis qu’un bondissement brutal qui permettrait aux gens de se dire les choses une bonne fois pour toute sur ce qu’ils ressentent, ce qu’ils ne peuvent plus faire ou ne supportent plus, serait salutaire. En lieu et place on se retrouve chacun face à nos sensations avec le sentiment que c’est un peu mois facile qu’hier mais, après tout, non, je ne sais pas…
Reste qu’un matin on se réveille et on réalise qu’on est devenu un aidant et, qu’insidieusement, dans notre cerveau, on ne pense plus à soi, ni même à son conjoint, mais à Elle. Cette connasse de Parkinson. Tout le temps.

Elle structure les journées selon les prises de médicaments, elle structure les activités, elle structure les échanges aux rythmes de moments ON ou OFF dans des traitements qui réagissent différemment d’un jour à l’autre.
Le malade doit vivre avec.
L’aidant doit vivre avec ET accepter de perdre son conjoint à son profit.

La communication est alors essentielle, l’échange le seul remède pour ne plus se laisser déborder, et, alors, seulement, faire front. L’amour prend tout son sens pour que papa reste papa et maman, maman. Sans lui, sans les mots qui vont avec et l’acceptation nécessaire de voir, une bonne fois pour toute, qu’elle est là, omniprésente, de ses trois syllabes à trois lettres, Parkinson, prenant ses aises, continuera de diriger la situation avec suffisance.

Quoi qu’il en soit et d’une façon ou d’une autre, elle cristallise l’attention. À la fin, c’est toujours d’elle dont il est question.

ER

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Elise Richard

Écriveuse de bonnes aventures en quête du juste mot, tempo, support et format.