Avoir 27 ans aujourd’hui

Officiellement grande.

Chloe Conscience
Sur la route du Must

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Aujourd’hui, j’ai 27 ans. Aujourd’hui est le premier anniversaire où cela me fait plaisir d’entendre que je ne les fais pas. Les années précédentes, à l’écoute de cette phrase, j’avais l’impression d’entendre que je n’étais “pas assez” : pas assez femme, pas assez construite, pas assez mature, ou pas assez intelligente. Pourtant on me disait simplement que mes traits n’étaient pas marqués de tant d’années.

Aujourd’hui, j’ai 27 ans. La perception des autres ne m’intéresse plus. J’ai compris que celle-ci me renvoie simplement à celle que j’ai de moi-même. J’ai compris que le sujet n’est pas de savoir l’image que je renvoie, mais celle que je me renvoie. Cet égocentrisme de la jeunesse qui cache une question profonde et fondamentale, à laquelle même, certaines personnes ne répondent pas en une vie :

Quelle personne aimerais-je être, et devenir ?

On l’oublie et un jour, on devient officiellement vieux. Ce matin, au hasard de mon fil d’actualité, je tombe sur un article de Didier Lestrade : Officiellement vieux, qui a eu 58 ans il y a 2 jours et narre sa vie, la vie. Je n’aime pas les chiffres. Ces chiffres qui remplissent des cases qui ne sont pas l’illustration d’une vie remplie : l’âge, le poids, la taille, les années d’expériences, le nombre de kilomètres parcourus, etc.

Je suis touchée par la beauté de la teinte de tristesse du texte. Par l’authenticité, la sensibilité et le regard de cet homme sur sa vie. Je partage sa mélancolie malgré les 30 ans qui nous séparent, et je lis ce passage, qui m’interpèle :

On espère encore mais toute la vie vous ramène en arrière, et le pire c’est qu’il ne faut surtout pas donner l’impression d’être nostalgique ou aigri. Sentimentalement, on admet que certains rêves ne se réaliseront pas avant la mort. Parmi ces rêves, il y a les plus beaux.

Ces derniers jours, je me demandais ce que j’ai appris de ces 10 dernières années que je n’ai pas vu passer. Je me suis demandée ce que je suis devenue, et ce que j’aimerais devenir. Je n’ai pas su y répondre. J’ai vécu tant de choses différentes, que tout est différent : mon regard sur l’amitié, l’amour, le plaisir, le travail, l’humain et la mort. Plus je grandis, moins j’ai de certitudes. Plus j’apprends, moins j’ai l’impression d’en connaitre. Plus le temps passe, plus il m’est difficile d’imaginer l’avenir.

J’aimerais simplement ne pas me retourner et me dire que parmi les rêves que je n’ai pas réalisés, il y a les plus beaux.

Pourtant quand je lis cet homme, je me dis qu’il a une belle vie. La clairvoyance dont il fait preuve, sur ses manques et ses absences, prouve aussi de sa faculté d’appréciation des choses qui font partie de sa vie. S’il n’a pas une vie remplie de tous les rêves qu’ils auraient aimé vivre, il a une vie vécue en pleine conscience : conscient de qui il est, et audacieux de s’être choisi avant tout autre chose.

Depuis des mois, je me fiche de la façon dont je m’habille, de changer d’avis, de la sécurité d’un avenir certain. Je m’émerveille de rien, je suis en manque de nature et d’aventures, et ce matin, à 27 ans, j’étais simplement reconnaissante d’être vivante.

Est-ce être déjà vieille ou complètement illuminée de me concentrer sur la vie comme si elle menaçait de m’être retirée ? Je ne crois pas.

Pourtant, certains jours, il me semble plus normal de s’occuper de ma connexion à internet, des chaussures que je dois porter pour aller travailler ou de l’argent qu’il reste sur mon compte ; plutôt que de m’intéresser à quelqu’un à qui je n’aurais jamais encore parlé ou d’oser contredire avec mes idées.

On peut se sentir invisible à n’importe quel âge, parce que les personnes ne portent pas leur regard au bon endroit. Nous sommes dans une société où le désir de ressemblance s’effondre, et pourtant la singularité est encore sévèrement jugée. À 27 ans, je deviens femme. Certains jours, je peux me sentir moins regardée, moins belle, moins fit, moins jeune. À tous les âges, je suis plus vieille qu’à un autre. Je n’ai pas 20 ans.

Il y a des choses magnifiques aussi avec le temps qui passe. Apprécier toutes les rencontres, même les plus brèves, fugaces, lentes ou intenses. Tous ces échanges intellectuels et humains qui m’ont à chaque fois fait tomber un peu plus amoureuse de la vie et aidé à savoir ce que je veux faire de cette vie.

J’aime les gens qui aiment vivre. Voilà la femme que je m’applique à être et à devenir : une femme qui aime vivre.

Alors comment aimerais-je remplir les 10 années à venir ?

J’aimerais les partager entourée de personnes qui ont la fougue et le recul, l’insouciance et la conscience, la cohérence et l’inconstance de vivre leur vie avec authenticité.

J’aimerais continuer à vivre libre d’aimer, de refuser, de douter, d’avoir peur, d’être excitée, ou révoltée.

J’aimerais aimer quelqu’un. Pas n’importe qui : quelqu’un. Aimer passionnément, ou normalement, tous les jours, ou certains jours.

J’aimerais avoir un enfant avec ce quelqu’un, une personne que je n’aurais pas peur de perdre et dont je saurais pouvoir vivre sans. Quelqu’un avec qui je pourrais avoir un enfant qu’on accompagnera à devenir l’un de ces adultes dont le monde a tant besoin.

J’aimerais croire encore les choses en lesquelles je ne crois plus et ne plus croire en certaines dont je ne doute pas.

Surtout, je vivrai mes rêves.

Je ne suis pas sur que ce soit l’âge qui éteint les rêves : la conscience de la vie les place devant, et la peur de la mort les pose derrière.

Ce matin j’ai eu 27 ans. Je ne sais pas combien de temps la vie m’accordera encore le privilège de pouvoir vivre mes rêves.

Je suis simplement profondément reconnaissante d’avoir réalisé l’importance d’aller les vivre.

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