Je suis une femme sur quatre

La vraie histoire de la fausse couche

Chloe Conscience
Sur la route du Must

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Je suis une femme sur quatre. Cette idée ne m’avait jamais vraiment traversé l’esprit. Je n’avais jamais vraiment pensé pouvoir être l’une d’elles. Et aujourd’hui, je suis une femme sur quatre. Parce qu’aujourd’hui je fais une fausse couche. Mon histoire rejoint celles dont on parle si peu, parce que le silence est si présent dans les moments où il faudrait parler. C’est ce que je ressens depuis plusieurs mois, depuis ces mois où je n’écris pas. Je ressens de la pudeur à une période où ce que je pourrais écrire a le plus de valeur.

Ces derniers mois j’attends un enfant avec l’homme que j’aime. Je crois que nous attendons un enfant depuis plusieurs mois parce que nous attendions un enfant avant que je tombe enceinte. Il n’y a pas que les femmes enceintes qui attendent un enfant. Il y a toutes les autres qui essaient. Et j’ai essayé.

J’ai essayé jusqu’à ce jour, où tu es arrivé. Tu es arrivé sous la forme d’un petit trait. Juste un petit trait et mon sourire a basculé. J’en ai pleuré de t’aimer. En l’espace d’une demi seconde, j’attendais pour de vrai. Nous attendions un enfant. En l’espace d’une demi seconde, l’homme avec qui je partage ma vie est devenu ma famille. Et puis la médecine est arrivée : un peu de raison dans mon monde de sensations. J’ai du écouter des personnes me parler de la vie sans vie. Tu ne sembles pas évoluer normalement. J’ai dû apprendre que cette nouvelle vie en moi ne naîtrait jamais quand tout mon corps la sentait. J’ai dû finir cette histoire dans mon esprit et laisser mon corps continuer à la porter. Et pendant que je la portais, l’homme que j’aime nous portait. C’est la beauté de ces jours dans le noir : sa présence à lui, sa patience, son amour, son empathie, son écoute et sa joie. Plus je la perds et plus je l’aime. Plus c’est difficile et plus notre couple se révèle. Plus cette nouvelle vie s’éloigne de la nôtre et plus j’ai envie d’une famille avec lui.

Et aujourd’hui je fais une fausse couche. Je deviens une femme sur quatre et alors que cette vie là s’en va, j’apprends à être maman.

Oui, attendre un enfant est aussi être une maman. L’expérience est symbolique. Le temps que tu as mis à faire signe de vie et le choix que tu fais de ne pas t’incarner est à l’image de ce que requiert devenir mère. En t’attendant, j’apprends que tu choisis pour toi. J’apprends à avoir confiance en la vie davantage qu’avoir peur pour toi. J’apprends à apprendre de toi au lieu de vouloir t’apprendre. J’apprends que la fragilité de la vie est ce qui en fait toute sa magie.

Je suis une femme sur quatre. J’ai tout lu sur internet, j’ai pleuré tous les mois sans traits, j’ai caché pendant des mois la seule chose qui compte pour moi, je me suis sentie coupable de ne pas pouvoir t’aider à rester. Je suis une femme sur quatre.

Je vis une expérience qui me met au défi de continuer à vivre en accord avec ma spiritualité, de croire en la force de la vie même confrontée à la mort. Je vis une expérience qui m’invite à être humble et à rester dans la gratitude même confrontée à la perte.

Je vis une expérience qui me rappelle que les silences les plus lourds sont les plus importants à briser.

Et parce qu’on est une femme sur quatre à ne pas parler pendant l’une des périodes la plus vivante, désarmante et marquante de notre histoire, j’écris pour cette femme.

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