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Le temps d’aimer

Ce qu’il reste de toi quand tu n’es plus là

Chloe Conscience
Sur la route du Must
4 min readOct 14, 2017

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Je me souviens de ce que j’écrivais sur toi. Quand hier soir, l’un de mes amis m’a demandé ce qu’il m’a prit de réagir comme je l’ai fait aujourd’hui, je me suis souvenue de toi. Cet ami ne te connaissait pas. Il ne me connaissait pas non plus à cette époque, alors j’ai essayé de lui raconter. Alors, j’ai relu mes mots. Tu t’en souviens ? Ceux que j’avais étalés sur des pages pour ne pas m’étaler sur le sol.

“ J’aime.

Je venais d’appuyer sur envoyer. Cent fois j’avais appuyé sur envoyer. Je voulais tout, j’avais donc fini par lui dire absolument tout. Je n’en étais pas à une déclaration près. L’avantage de tout dire, me disais-je, était de finir par ne plus rien avoir à dire. Et partir.

En à peine 24h, il avait tout lu. « C’est fort, c’est prenant, c’est brut…Comme toi et ton talent. » Il lui manque cependant mon impertinence, mon effronterie, nos moments voilés mis à nus où se cache, d’après lui,« une grande force résiduelle ». Finalement il lui manque ma jeunesse et mon insouciance. J’avais presque envie de lui dire « la faute à qui ? ».

Je ne me suis pas demandée deux fois ce qui avait le pouvoir de nous dépouiller de la jeunesse et l’insouciance. Le chagrin avait œuvré.”

J’avais oublié. J’avais oublié la femme que je suis devenue en apprenant à être sans toi. J’avais oublié toute la force et le courage qu’il m’a fallu pour apprendre à être sans un homme qui n’a jamais été là. J’avais oublié nos paradoxes, notre relation si inexplicable qu’elle paraissait inextricable. J’avais oublié tout ce à quoi j’ai renoncé de moi, quand tu as renoncé à moi. J’avais oublié toutes les fins que tu avais marquées. J’ai mis tant d’énergies à soigner mes débuts après toi, que j’avais oublié.

J’avais oublié qu’un coeur abîmé se souvient. Et c’est ce qu’il s’est passé aujourd’hui.

« Qu’est ce qu’il t’a pris Chloé ? »

J’ai gardé le meilleur de moi que j’ai vu naître pendant toi. C’est pour cela que j’avais oublié. J’ai gardé l’écriture de mes mots, parce qu’ils ne m’ont pas seulement aidé à ne pas être à terre, ils m’ont aidé à viser le ciel. J’ai appris à m’aimer après toi, parce qu’il était trop dangereux de te laisser le faire sans savoir le faire. J’ai conservé l’audace, parce que j’avais déjà pris tous les risques à t’aimer : ceux qui m’ont bousculée, transformée, réinventée. J’ai laissé ouverte toutes les portes, parce que t’avais promis que je pouvais tout faire.

Ça a mis du temps après toi, mais il me restait le meilleur, parce que tout le mal que l’on a fait m’a fait du bien.

J’ai pris 10 kilos après toi. Je crois qu’il était trop lourd de te perdre. J’ai mis 3 ans à les laisser partir. Ils sont partis tout seuls au moment où je m’y étais habituée. Je t’avais tellement désiré que pendant des années, je ne voulais pas être désirable ; encore moins vulnérable. Alors, j’ai muré les choses que je ne voulais pas voir me toucher derrière des formes qui n’étaient pas moi. Éloigner l’autre à renfort de couches superficielles, je sais, c’est trop facile. Pourtant ça a été dur. J’ai dû sur investir tant d’autres projets pour ne pas totalement me laisser disparaître. J’ai voulu être brillante mais jamais sexy pour ne plus rencontrer quelqu’un comme toi, pour ne plus rencontrer quelqu’un. Bien sûr il y a eu des hommes après toi, mais sans être entière, je ne pouvais l’être avec aucun.

Et puis, je me suis trouvée quand je me suis retrouvée. J’ai enfin retrouvée la sensation d’être entière. Tu te souviens que je voulais tout ? J’étais si entière.

Je venais d’appuyer sur envoyer. Cent fois j’avais appuyé sur envoyer. Je voulais tout, j’avais donc finit par lui dire absolument tout. Je n’en étais pas à une déclaration près. L’avantage de tout dire, me disais-je, était de finir par ne plus rien avoir à dire. Et partir.

Une rupture est une souffrance si commune que personne ne jauge réellement le temps qu’elle prend. Pas même moi. Pas même moi qui ait tout mis en place pour devenir la femme que je suis, capable d’aimer l’amour et l’autre en même temps sans être diminuée quand il n’y a ni l’un ni l’autre.

Tu t’es marié depuis. J’étais si heureuse pour toi, que j’étais certaine de n’avoir gardé que le meilleur de nous, le meilleur de moi après toi. Je savais tout ce qu’il t’a fallu de force et de courage pour en arriver là. Pour qu’on en arrive là.

Et puis il y a eu hier quand mon ami m’a dit :

Qu’est-ce qu’il t’a pris Chloé ?

Et j’ai pensé à toi. À notre histoire qui m’aura permis de découvrir un amour, au point tel que j’ai oublié le temps que cela prend.

Le temps qu’il prend d’aimer.

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