Security Token : L’arsenal stratégique de la finance de marché pour transformer et optimiser la gestion d’actifs.

Dounia Agharbi
ConsenSys France
Published in
8 min readJan 21, 2019

Notre dernier événement, portant sur l’intérêt grandissant des security tokens, ayant mobilisé plusieurs acteurs clés de l’écosystème, nous tenions à faire un résumé des éléments clés partagés pendant la conférence et surtout apporter des informations complémentaires sur les projets en cours dans ce domaine.

Merci encore aux douze intervenants qui nous ont rejoint pour la conférence avec le soutien de la Chaintech, du Journal du Net (JDN) et de l’Institut Louis Bachelier.

🎯Nos intervenants

🌟Panel 1 modéré par Charlie Perreau, Journaliste Fintech du JDN

  • Geoffroy Cailloux, Direction générale du Trésor
  • Anne Choné, ESMA, l’Autorité européenne des marchés financiers
  • Simon Polrot, ConsenSys
  • Mattia Rattaggi, membre de la Crypto Valley Association, regroupe les acteurs de la blockchain et des cryptos dans le fameux canton de Zug
  • Adrien Soumagne, secrétaire général de la Chaintech, principale association des start-up et avocat au sein du cabinet Bredin Prat

🌟Panel 2 modéré par Ken Timsit, Managing Director of ConsenSys

  • Domitille Dessertine, Autorité des marchés financiers
  • Faustine Fleuret , ConsenSys
  • Matthieu Lucchesi, Gide 255
  • Jean-Marc Stenger, Société Générale
  • Jérôme de Tychey, Asseth, ConsenSys
Conférence Blockchain & Numérisation des actifs financiers organisée par ConsenSys et la Chaintech

🎯Quid des Security Token

Un security token, est la représentation numérique sur une blockchain d’un instrument financier. Parfois, d’autres appellations sont utilisées, comme: “investment token”, ou “asset token”.

Le concept d’instrument financier comprend celui de titre financier (dont font partie les actions, les titres de dettes, les parts de fonds) et celui de contrat financier (dont font partie les produits dérivés).

Le terme Security Token renvoie à deux catégories d’instruments financiers :

➡️ Si cet instrument financier existait avant, c’est à dire qu’il a été émis puis échangé dans le monde réel avant d’être enregistré sur la blockchain, alors on parle de “tokenised security”. Le processus d’inscription dans la blockchain d’un instrument financier existant s’appelle “tokenisation”.

Au niveau juridique, ce sont les jetons représentatifs d’instruments financiers formellement qualifiés comme tel par le Code monétaire et financier.

➡️ Si cet instrument financier est créé à l’occasion de l’émission du jeton (STO), on parle alors de “Security Token”. STO signifie “Security Token Offering”, il s’agit de l’émission de jetons d’investissement.

“Un security token, c’est un token qui est une security. Ses caractéristiques vont le rapprocher d’un titre d’investissement financier.” Simon Polrot — ConsenSys

Deux problématiques ont été soulevées quant à la définition de ce concept :

“Il est important de souligner l’approche fonctionnelle quand on définit un security token. Concernant l’aspect réglementaire, la qualification légale conditionne la réglementation des tokens. Le problème est que les tokens ne sont pas forcément dans une unique catégorie. “Anne Choné — ESMA

“La définition d’un titre financier n’est pas la même selon les pays. Les security tokens pourraient justifier que l’on s’accorde mondialement sur la définition d’une nouvelle classe d’actifs (fonds immo tokenisés)” Mattia Rattagi — Crypto Valley Association

1)Les avantages

La blockchain est un registre partagé qui est en permanence mis à jour pour l’ensemble des acteurs. Cette technologie comporte une authentification forte des utilisateurs et elle permet de programmer des règles et des conditions de transfert des actifs du registre grâce aux smart contracts. La blockchain est le registre des transactions, donc elle assure la tenue de compte — conservation.

Cette conservation peut en principe s’appliquer à tout titre financier : les actions, les obligations, les parts d’organismes de placement collectif et les contrats financiers.

Nos intervenants ont présenté de multiples avantages d’ordres opérationnel et stratégique.

Adrien Soumagne a notamment souligné que les mécanismes inhérents à la technologie Blockchain permettent de réduire les délais pour le règlement-livraison :

La blockchain permet d’automatiser le règlement-livraison des transactions financières de façon instantanée, là où cela peut prendre jusqu’à deux ou trois jours dans les systèmes actuels. Le transfert d’un crypto-actif d’un utilisateur à un autre peut être concomitant au transfert du paiement pour cet actif, avec au passage la vérification de l’ensemble des conditions requises.

Par conséquent, les droits de vote sont également attribués de manière instantanée.

“Prenons l’exemple du droit de vote : Admettons que vous ayez acheté une action la veille d’une assemblée générale, grâce à la numérisation de l’actif dans la blockchain, plus besoin d’attendre deux jours pour voter et vous pouvez participer et voter à l’Assemblée générale le lendemain.” Adrien Soumagne — Chaintech

L’utilisation de smart contracts permet de programmer les modalités et conditions de transfert des instruments financiers “tokenisés”, permettant d’assurer une conformité totale de l’émission et de l’échange de ces jetons avec la réglementation. De plus, la transparence du registre et son immuabilité rendent possible l’audit et la supervision en temps réel des participants et des transactions par les autorités. Il serait par conséquent envisageable pour le régulateur de disposer de la possibilité d’intervenir sur la blockchain, par exemple pour suspendre une transaction.

“C’est aussi disposer de la capacité d’intégrer dans le titre lui même des contraintes pratiques et réglementaires. Et donc de baisser les coûts inhérents au respect des contraintes. Dans un marché où les rendements ne sont pas optimaux, la perspective de baisse des coûts est très séduisante.” Matthieu Lucchesi — Gide 255

Ces avantages se révèlent être assez évident pour les acteurs de la finance de marché mais il est important de soulever “le point d’attention sur les challenges au sein des banques, notamment sur la gestion de la transition d’un système traditionnel à un système basé sur la technologie blockchain”, comme l’a précisé Jean-Marc Stenger.

📣En bref, on peut distinguer des avantages aussi bien pour les émetteurs, les investisseurs et même pour les régulateurs.

  • Pour les émetteurs de security tokens : des coûts moindres (programmation, déploiement dans une infrastructure) et apport de liquidité
  • Pour les investisseurs intéressés par les security tokens : les coûts liés à la conservation sont faibles voire nuls car ils se limitent à la garde des clés cryptographiques
  • Pour les régulateurs : ils peuvent se voir attribuer des points de contrôle via la surveillance et le suivi en temps réel.

“2019 sera une année florissante pour les émissions de security tokens.” Mattia Rattagi — Crypto Valley Association

2) Faisabilité technologique & Scalabilité

Blockchain Privée & Nouveaux standards

Pour rappel, les crypto-actifs issus des ICOs (jetons non financiers) sont enregistrés dans des blockchains publiques notamment via le standard ERC20. Dans le cadre de security token offering, les standards comme ERC20 ne sont pas adaptés pour protéger les parties prenantes et assurer la conformité avec la réglementation. De plus, des contraintes de fonctionnement de la blockchain publique limitent aujourd’hui la fréquence de transfert de ces crypto-actifs (une quinzaine de transactions par seconde) ce qui n’est pas adapté à certains actifs.

Par conséquent, dans le cadre d’actifs réglementés et représentés par un token, il est plus approprié de recourir à des blockchains Ethereums ad-hoc aussi appelées sidechains. Cette configuration permet de lever bon nombre des contraintes de fonctionnement de la version publique d’Ethereum tout en établissant des ponts vers celle-ci.

“Travailler sur des blockchains privées permet un contrôle plus élevé et une conformité avec le règlement général pour la protection des données personnelles (RGPD)“ souligne Jérôme de Tychey-ConsenSys.

On y intègre notamment les problématiques de gouvernance et le contrôle de tiers de confiance.

“Ce sont désormais les ERC 1400 et 777 qui sont les plus propices à l’émission de security token” relève Jérôme de Tychey- ConsenSys.

📝Nous expliquerons via un autre article comment ces standards (ERC: Ethereum Improvement Proposal) sont opérés, les différents types d’ERC et leurs caractéristiques.

La Scalabilité

La technologie est tout à fait adaptée pour des actifs échangés des centaines de milliers de fois par jour, selon les processus métiers intégrés et la granularité de l’information stockée. Jérôme de Tychey a même suggéré de travailler sur une blockchain française réglementée pour certains actifs comme les bons du trésor:

“C’est techniquement possible et souhaitable; cela permettrait de traiter un volume de transactions conséquents.” Jérôme de Tychey — ConsenSys

🎯Et qu’en dit la réglementation ?

A ce jour, la réglementation des “security tokens” converge vers l’application stricto sensu de la réglementation des marchés financiers, sous réserve que l’actif soit numérisé sur une blockchain privée.

La réglementation française autorise la tenue de registres d’actifs financiers sur des dispositifs blockchain:

L’ordonnance blockchain dont le décret a été publié fin décembre, permet l’inscription dans la blockchain des titres financiers non-cotés. Désormais, les actifs numérisés/tokenisés produisent les mêmes effets juridiques que l’inscription en compte-titres.

“La France est pionnière sur ce segment des security tokens notamment avec l’ordonnance blockchain” Domitille Dessertine — AMF

L’encadrement des “security tokens” étant plus simple que celui des instruments financiers classiques, il sera très intéressant de voir si et comment la réglementation financière actuelle pourrait être simplifiée.

Mais l’AMF souligne que dans la mesure où le régime des ICO (initial coin offering) prévu par la loi PACTE est avantageux pour les émetteurs, il serait opportun pour les porteurs de projets français de se demander si un STO est nécessaire, et s’ils n’ont en conséquence pas intérêt à se tourner plutôt vers une ICO.

🎯Quels sont les principaux projets ?

Jusqu’à présent, les émissions de security tokens ont été plutôt un phénomène anglo-saxon et asiatique. La France n’a pas encore connu d’opération d’envergure.

Pour ce qui est de la tokenisation d’actifs financiers existants, en revanche, plusieurs projets sont relativement avancés. Faustine Fleuret a souligné notamment le projet LiquidShare (tokenisation d’actions de sociétés) et le projet PlanetFunds de BNP Paribas Securities Services (tokenisation de fonds en unités de compte). On peut également mentionner le projet Iznes qui utilise également une forme de registre distribué pour la tenue de compte de fonds.

A l’étranger, Faustine Fleuret liste les projets Meridio (USA) et 1Exchange (par Capbridge, une filiale du Singapore Stock Exchange).

Le Private Equity impose un horizon d’investissement de long terme, et d’autant plus au niveau des phases de capital-risque et capital-développement où l’entreprise est encore peu mature. C’est pourquoi seuls des investisseurs disposant de la tolérance aux pertes financières et de l’appétence au risque nécessaires peuvent y prendre part.

“En créant des opportunités d’entrée et de sortie plus fréquentes tout au long de la vie de l’entreprise, la “tokenisation” des fonds de capital-investissement apporterait une meilleure liquidité au bénéfice d’entreprises plus jeunes, souvent plus innovantes.” Faustine Fleuret — ConsenSys

L’équipe de ConsenSys France travaille également sur un plateforme “The Dauriel Network” dont la démo sera présentée le Jeudi 31 janvier dans le cadre d’un événement en partenariat avec la “Paris Fintech Week”. Plus d’informations

Rejoignez-nous sur nos réseaux sociaux !

➡️ Twitter

➡️ Instagram

➡️ Linkedin

Dounia Agharbi est responsable de la communication et des événements chez ConsenSys France.

A propos de ConsenSys

ConsenSys a été fondé par Joseph Lubin (co-fondateur de l’Ethereum) en 2014 et regroupe plus de 1000 personnes dans 40 pays. La société incube plus de 50 projets blockchain dans tous les secteurs d’activité, et sa division Entreprise assiste les grandes entreprises et les gouvernements dans la réalisation d’études stratégiques et le développement d’applications décentralisées dans les domaines des services financiers, de l’énergie, du la production industrielle, du divertissement et des services publics.

--

--