Pourquoi nous allons transformer L’imprévu

Pierre Leibovici
Le blog de L'imprévu
6 min readFeb 15, 2018

Quand il s’agit de définir le plus beau métier du monde, chacun a sa petite idée. Une naturaliste vous répondrait que c’est assurément de marcher sur les pas d’un loup, de saison en saison, pour observer son comportement. Un conducteur de trains vous dirait que c’est plutôt de fendre l’air à toute vitesse dès l’aube et de se laisser porter par les aiguillages réglés à la perfection. Et nous, à L’imprévu, on vous dirait sans hésiter qu’on l’a trouvé, notre plus beau métier du monde : inventer un média de toutes pièces.

L’une des (nombreuses) séances de réflexion pour repenser L’imprévu, à l’été 2017 / Photo CC BY : Maud Serpin

Sans triompher, on est heureux du chemin parcouru depuis juin 2015, date de mise en ligne de la première version de limprevu.fr. Déjà, nos articles sont lus par plus de 25 000 d’entre vous chaque mois, ce qui prouve qu’il existe une place pour une information en dehors des sentiers battus. Des journalistes indépendants nous écrivent chaque jour pour nous proposer de nouveaux articles à publier. Surtout, nous sommes toujours là, après bientôt trois ans, grâce à notre modèle économique qui repose sur les abonnements de nos lecteurs et des formations que nous donnons à des journalistes travaillant chez d’autres médias.

Mais si L’imprévu est notre plus beau métier du monde, c’est surtout parce qu’il nous donne la possibilité d’être libres. Libres de publier les articles que l’on souhaite, sans devoir viser des sujets faciles qui attirent une « audience » vendable à des annonceurs publicitaires. Libres de choisir le format et la longueur de nos articles, parce que le web est notre terrain de jeu. Libres, enfin, de balayer nos certitudes d’un revers de main et de tout changer pour créer un média qui vous ressemble, qui à la fois vous donne envie et vous soit utile.

Tout changer, ou presque, c’est ce que nous sommes en train de faire depuis plusieurs mois. Et je vous explique pourquoi.

Comment faire revenir nos lecteurs de jour en jour sur L’imprévu ? / Photo CC BY : Claire Berthelemy

L’imprévu sur un divan

Au printemps 2017, il était temps de faire le point. La version payante de L’imprévu était sortie plus d’un an auparavant et, même si nous comptions de plus en plus de visiteurs sur le site et d’inscrits à nos newsletters, nous avions convaincu moins de lecteurs de s’abonner que ce qu’on espérait.

Mais pourquoi au juste ? Parce qu’un lecteur s’abonne à un média ou deux, mais pas un de plus ? Parce que notre offre d’abonnement, qui propose d’accéder à des articles exclusifs, n’est pas assez attrayante pour vous ? Ou le problème venait-il plutôt de nos articles, de notre notoriété timide ou encore de notre site web ? Et si c’était un peu tout ça à la fois ?

Ce n’est pas parce qu’on connaît le symptôme qu’on a trouvé la cause du problème

Un médecin ou un designer vous le dirait : ce n’est pas parce qu’on connaît le symptôme qu’on a trouvé la cause du problème. Dans l’équipe de L’imprévu, justement, les visions divergeaient quant à notre difficulté à séduire de nouveaux abonnés. Alors, pour ne pas se tromper dans notre diagnostic, nous avons installé L’imprévu sur un divan. Et nous vous avons écoutés.

Alors que le mois de juin arrivait, de mystérieux visiteurs ont franchi le seuil de nos bureaux. Des visages inconnus. Des gens généreux. Nous avons fait appel à des personnes qui n’avaient jamais entendu parler de L’imprévu et qui ont accepté de se laisser observer alors qu’elles naviguaient sur notre site. Nous leur avons posé des questions sur ce qu’elles comprenaient des articles, sur le prix de l’abonnement et bien d’autres choses. Nous voulions comprendre ce que ressentait un lecteur qui nous découvre.

Une fois ces témoignages recueillis, nous avons passé la main à ceux qui nous connaissent le mieux : les actionnaires de la Société des Amis de L’imprévu. Ces proches des cofondateurs — ils sont exactement 55 — nous soutiennent financièrement (et moralement !) depuis deux ans, il était normal d’entendre ce qu’ils pensaient de L’imprévu. Morceaux choisis de deux rencontres de quatre heures chacune avec les Amis de L’imprévu :

  • « Moi j’ai toujours appris plein de choses sur L’imprévu »
  • « Quand on arrive sur le site, on peut se sentir submergé »
  • « Ce que je préfère, c’est la recherche d’une plus-value informationnelle »
  • « Parfois, vous êtes un peu austères quand même. Le contenu est bien, maintenant, il faut le vendre ! »
  • « On est vraiment sur du magazine. On imagine le papier glacé derrière »
  • « Aller lire L’imprévu, pour moi, ce n’est pas un réflexe »
  • « Tout le monde peut y trouver un sujet qui l’intéresse »
  • « On ne sait pas à quel moment de la semaine vous publiez »
  • « L’abonnement est cher et pas cher à la fois«
  • « Quand on lit chaque article, qu’il revient sur l’actu passée, pourquoi le publier maintenant ? Et pas dans deux semaines ? »
  • « J’attends de L’imprévu qu’il soit plus bavard sur les réseaux, plus fort dans sa communication, plus référent auprès des médias traditionnels »

On souffle un peu, on reprend nos esprits et maintenant on se pose la question : on en fait quoi de tous ces avis éclairés et nuancés ?

Comment conserver la singularité de L’imprévu par rapport aux autres médias en ligne ? / Photo CC BY : Claire Berthelemy

L’invention du nouvel Imprévu

Juillet 2017 a été le mois des post-its, ceux qu’on a remplis lors de nombreux ateliers organisés en interne. Nous avions ouvert nos oreilles, il restait à transformer les suggestions de nos lecteurs en idées concrètes. Fréquence de publication, thème des articles, modèle économique, communication : L’imprévu allait être revu.

Nous avons dessiné (littéralement) les contours de notre nouvelle offre éditoriale

L’imprévu v2, c’est son petit nom entre nous, devait :

  1. Rester singulier dans la manière dont il traite l’actualité ;
  2. Être compréhensible par tout un chacun ;
  3. Présenter un visage humain ;
  4. Donner envie d’être lu et partagé.

Les objectifs de la nouvelle mouture établis, nous avons dessiné (littéralement) les contours du nouveau site et de notre nouvelle offre éditoriale. C’est le moment où, par facilité, je ne vais pas me lancer dans l’explication de chacun des schémas ci-dessous. Sachez qu’ils représentent nos idées les plus folles et les plus raisonnables sur le futur Imprévu, du « Netflix de l’info » au « biscuit à croquer », en passant par le « média qui remet l’actualité en contexte ».

Croquis n°1 du futur Imprévu / Dessin anonyme
Croquis n°2 du futur Imprévu / Dessin anonyme
Croquis n°3 du futur Imprévu / Dessin anonyme
Croquis n°4 du futur Imprévu / Dessin anonyme
Croquis n°5 du futur Imprévu / Dessin anonyme

Je prends le risque de vous laisser sur votre faim : je ne vous dirai pas lequel de ces dessins représente le futur Imprévu (indice : il mélange tous ces dessins). On le façonne, brique par brique, depuis l’été et je vous raconterai bientôt pourquoi on est allés jusqu’à rencontrer un média basé à Hawaï.

Reste que, de ces mois passés à repenser le média qu’on avait construit et à écouter nos lecteurs durant des heures et des heures, on aura retiré au moins une chose : le plus beau métier du monde, c’est celui qui vous rend humble.

Et ça sort quand au fait ? Dans un mois !

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Pierre Leibovici
Le blog de L'imprévu

Président et cofondateur de @limprevu, le média qui remet l’actualité en contexte