Réseaux physiques et virtuels, nouvelle grammaire des territoires

Reihan APRILE
Stéphane Grumbach
Published in
4 min readNov 3, 2017

En juin 2017, la Commission européenne a infligé une amende record de 2,42 milliards d’euros à Google pour abus de position dominante, amende toujours impayée. En France, la CNIL s’est attaquée au droit à l’oubli et au déréférencement sur le moteur de recherche.
Ces batailles illustrent les difficultés des Etats dans le rapport de force qui les opposent au moteur de recherche.

Le droit à l’oubli

l’Union européenne peut demander à un moteur de recherche de supprimer, dans les résultats d’une recherche effectuée à partir du nom d’une personne, les liens vers des contenus qui présentent des informations «inadéquates, pas ou plus pertinentes ou excessives», dès lors que ce retrait ne va pas à l’encontre de «l’intérêt prépondérant du public».

Et Google, en accepte certains, mais ces déréférencements ne sont que parcellaires. En effet, le contenu n’est effacé que sur le domaine qui en fait la demande. Un État européen peut étendre ce droit à l’ensemble de L’UE, mais le contenu restera toujours visible sur un autre domaine, ou sur l’universel “.com”. Autant dire qu’il n’est pas effacé. Le droit européen a beau être puissant, il ne s’applique que sur son propre territoire.

Et pourtant…

Droit et Territoires

Dès que des transactions sont libellées en dollars, même si les échanges n’ont pas lieu sur le territoire des États-Unis, la loi américaine s’applique. Il en va de même pour les courriels qui transitent par un site ou un réseau américain.

Le droit américain s’applique sans qu’on le sache sur internet, parfois même au mépris des règles classiques du droit international privé.

À défaut de pouvoir ordonner le contrôle des informations qui le concerne, l’Etat français, avec 21.000 demandes par semestre, est troisième en nombre de sollicitations de renseignements. Elles visent à supprimer du contenu ou accéder à du contenu spécifique.
Des requêtes auxquelles Google répond favorablement dans 66% des cas et quand il ne répond pas, il se positionne comme défenseur de la liberté d’expression.

Mais qui peut juger de la légitimité des contenus sur la toile ?

Le référendum catalan

Vendredi 29 septembre 2017, le tribunal supérieur de justice de Catalogne a ordonné à Google de supprimer l’application “On Votar 1-Oct” utilisée par les indépendantistes catalans pour diffuser des informations relatives au référendum.
Sur son play store, Google précisait néanmoins que ce contenu restait téléchargeable dans d’autres pays.

La naissance d’un nouvel Etat

On se rend compte que Google devient de plus en plus puissant et prend de plus en plus de poids sur la scène politique et s’apparente clairement à un état : Plus d’un milliard de citoyens (utilisateurs), des services publics (Une identité avec Gmail, du stockage avec le Drive) et des impôts (financements via la publicité). Pour le reste, il y a un engagement politique évident, mais il demeure flou et ne se définit qu’au cas par cas, parfois sous la contrainte, parfois par conviction.

Pourtant depuis peu, cet engagement politique tend à se se structurer.

Google a annoncé le lancement de sa nouvelle filiale : Jigsaw, un « think tank » visant à relever les challenges géopolitiques du monde grâce à la technologie.

«Notre mission est d’utiliser la technologie pour affronter les grands défis géopolitiques, riposter à l’extrémisme violent, faire reculer la censure qui atténue les menaces liées aux attaques sur le digital. (Nos objectifs sont de lutter contre) le blanchiment d’argent, le crime organisé, la brutalité de la police, le trafic humain, le terrorisme ou le harcèlement sur Internet» Eric Schmidt

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