« L’agriculture, ça peut pousser tout seul »

Usbek & Rica
Crowd
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3 min readApr 12, 2017

Plus de 200 agriculteurs se sont constitués en réseau pour étudier et promouvoir une agriculture nouvelle génération. Le collectif Maraichage Sol Vivant en est persuadé : pour une meilleure pousse des plantes, ne surtout pas travailler les sols !

Comment avoir une agriculture hyper-productive qui concilie respect de l’environnement et santé du paysan ? En ne travaillant pas le sol. C’est en tout cas la vision défendue par le réseau de paysans-chercheurs Maraichage Sol Vivant depuis 2012. « Le sol, c’est un écosystème. Il faut le considérer comme un être vivant à part entière. Un sol a une activité biologique qui le structure. Il a un squelette, des vaisseaux sanguins comme nous : ce sont les champignons, les vers de terre, les bactéries qui constituent l’habitat qui va convenir à la plante », explique François Mulet, maraîcher et membre fondateur du réseau Maraîchage Sol Vivant. Les outils à socs comme la charrue ou les motoculteurs (machines utilisées pour le labour de terrain) détruisent cet écosystème. Le principe est de remplacer le métal par le végétal : les racines des plantes cultivées travaillent le sol, les vers de terre aussi qui permettent par exemple à l’eau de mieux s’infiltrer. Et le système se révèle aussi efficace, si ce n’est davantage, que la culture plus classique. « Aujourd’hui, sur presque toutes les cultures, on produit autant qu’avec les méthodes de l’agriculture classique et le rendement est doublé, voire triplé sur les cultures d’oignon ou de betterave, par exemple ».

Quand le sol est vivant

Mais avant d’arriver à ce mode de culture, le chemin a été long. « Certains ingénieurs agronomes au XVIIIe et XIXe siècles ont essayé d’y réfléchir mais à l’époque, faute de semoir adapté, il fallait aux types 20 jours pour semer un hectare de blé ».

On n’a pas besoin de remonter si loin pour comprendre pourquoi cette agriculture du sol vivant ne s’est pas déployée plus tôt, expose François Mulet : « Quand on cultive sans travail du sol, les fabricants n’ont plus grand-chose à vendre. Les plantes sont plus saines. Le vendeur de produits, ça ne l’intéresse pas. Celui d’engrais, moins aussi : il y a moins de perte de nutriments dans la méthode du sol vivant ». Pour les agriculteurs, le gain est évident : plus ou autant de productivité et un travail moins pénible. C’était donc aux agriculteurs de cultiver ce champ-là.

Le paysan-chercheur, un Professeur Tournesol inspiré et moins lunaire ?

« Dans les années 1970–80, les paysans ont commencé à communiquer par téléphone pour témoigner de leurs méthodes. Mon père était de ceux-là ». Et le mouvement a évidemment été accéléré avec « les Internets ». Aujourd’hui, le réseau Maraichage Sol Vivant forme grâce à des MOOC sur Youtube à peu près 50 personnes par jour : « 1500 agriculteurs regardent nos vidéos pendant 15 min environ chaque jour sur 6 heures de formation complète. » Une fois instruits, les producteurs font de leur ferme un laboratoire d’expérience. « Il devient donc essentiel pour nous de recueillir les résultats, les classifier et les partager au plus grand nombre dans un corpus ». MSV vient de lancer une campagne de crowdfunding pour financer des visites techniques d’analyse de sols dans ces fermes, la compilation des données récoltées selon un protocole scientifique et leur publication sous forme de wiki et de vidéos. Au fond, s’amuse François Mulet, « on redevient des chasseurs-cueilleurs doublés de scientifiques. On arrête d’être juste des applicateurs. On a appris à développer notre propre système en ayant une démarche scientifique méticuleuse ». Quand le nom de Professeur Tournesol prend tout son sens…

Pour aider Maraichage Sol Vivant, rendez-vous sur leur collecte chez KissKissBankBank !

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