Mélanie Péron panse les douleurs du monde réel par le virtuel

Usbek & Rica
Crowd
Published in
3 min readMar 6, 2017
© L’Effet Papillon

Mélanie Péron, fondatrice de l’entreprise sociale et solidaire L’Effet Papillon, est la Peter Pan des hôpitaux. Sa poudre de Fée Clochette ? Un univers virtuel pour aider les patients atteints par le cancer de s’évader et de se détendre pendant des soins invasifs.

« Bonjour Mélanie, c’est la manager de Bénabar. On vient ! ». Non, ce n’est pas un épisode oublié de Stars à Domicile. En 2007, Mélanie Péron travaille dans une asso culturelle en tant que bibliothécaire quand on diagnostique à son compagnon une leucémie. S’ensuivent 18 mois de traitement très lourd. Cette année-là, le chanteur Bénabar fait un carton et doit jouer dans la région. « Au culot, j’envoie un mail sur son site ». Quelques jours plus tard, un appel inconnu. « Depuis, je réponds toujours aux inconnus », s’amuse-t-elle. Bénabar va passer à l’hôpital. « On a ri pendant un quart d’heure. C’est bête mais c’était une bulle magique dans un moment dramatique ». Elle crée sa structure, L’Effet papillon pour « soulager les patients et leur famille » grâce à des spectacles dans les hôpitaux, puis avec des soins de support : sophrologie, art-thérapie et socio-esthétique (soins esthétiques auprès de personnes fragilisées par la maladie). En 6 ans, 2000 patients « s’évadent » grâce à elle.

Aujourd’hui elle fréquente les salons de réalité virtuelle. « En 2010, je repensais à cette chambre stérile où on est particulièrement frappés par la solitude. Les copains avaient la trouille. Skype, quand tu es malade et blafard, t’as pas envie ». Dans cette chambre, elle combat en jeu vidéo avec son compagnon. « J’avais été très marquée par Avatar. Tous les deux, on se dit qu’il faudrait créer un monde virtuel et onirique sur lequel on pourrait communiquer avec les gens et oublier pendant un instant ce qu’on vit ». Pas de compétences techniques ? Pas grave, un poil geek, elle va au Laval Virtual — grand rdv annuel autour de la réalité virtuelle — pour y rencontrer des étudiants d’école d’ingé. Le projet les emballe. On est en 2010. Pour se connecter sur Bliss, le monde immersif de Mélanie, ça se passe alors sur PC, Kinect et lunettes 3D. « Je louchais déjà sur des casques virtuels, mais je voulais du sans fil et du mobile ». En 2015, c’est chose faite, après un passage par la case crowdfunding.

Logé dans un casque, son monde virtuel Bliss trouve sa place dans les salles d’opération. Et les résultats sont assez surprenants. Le premier test est réalisé lors d’une ponction de moelle osseuse. Une opération qui permet de voir où en est la maladie. La patiente chausse les casques virtuel et audio. Verdict ? « Elle n’a rien senti ». Elle essaie à nouveau sur des patients atteints d’Alzheimer, « souvent en situation de grand stress ». De nouveau, la surprise : « Leur rythme cardiaque se calme et ils se sont mis à chanter comme des enfants ». Une autre patiente s’endormira pendant l’opération. « Ça plonge les patients dans une forme d’hypnose qui les apaise », explique Mélanie. A l’avenir, l’Effet Papillon compte poursuivre ses expérimentations en salles d’opération dans 5 établissements sur une centaine de patients. « Je tiens à travailler avec les médecins depuis le début. Je voulais que le projet soit l’objet de programmes de recherche pour qu’à terme, ça puisse être prescrit par ordonnance ». Demain, le casque en pharmacie ?

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