« Ubuntu. Je suis parce que nous sommes. »
En tant qu’animal social, nos vies se déroulent au sein de collectifs: famille, communautés, associations, clubs, organisations, nations… Quand nous nous interrogeons sur leurs modes de fonctionnement, nous en faisons le plus souvent un bilan mitigé. Il y a les instants de joie, les connexions fortes, les expériences nourrissantes, les réussites vertueuses, les utopies crédibles. Il y a tout autant les moments de frustration, les débats stériles, les bureaucraties aliénantes, les inégalités douloureuses, la violence institutionnelle, la marginalisation inhumaine, l’inertie de la société face au défi écologique.
Nous sommes certainement nombreux à partager les analyses de Dee Hock qui affirme : « Nous vivons une époque d’échec institutionnel massif » et de Peter Senge qui nous dit : « nous faisons face à des problèmes pour lesquels les organisations dominantes, autoritaires et hiérarchiques sont inadéquates ». La complexité est à la fois la toxine et le poison de ces organisations dépassées. Réjouissons-nous qu’elle soit le terreau de l’intelligence collective.
Depuis plusieurs années, des signaux de moins en moins faibles nous révèlent des voies alternatives très tangibles. Des enfants s’épanouissent et sont heureux à l’école, des villes revisitent la manière d’impliquer directement les citoyens dans leur gouvernance, des collectifs écocitoyens montrent qu’une culture agricole respectueuse est possible, des entreprises ambitionnent le bonheur au travail, des mobilisations massives s’organisent et destituent des régimes tyranniques ou s’en affranchissent. Ces phares nous montrent le cap et nous donnent désormais la certitude que c’est possible. De grandes réussites entrepreneuriales, sociales, artistiques, culturelles, sportives ont adopté ces pratiques de manière délibérée. Elles ont su devenir des écosystèmes permettant l’émergence et la floraison d’intelligence collective. N’est-il pas grand temps de comprendre ce qui est si spécifique à ces organisations ?
Il ne s’agit plus de faire autrement avec les mêmes règles du jeu, ni de seulement appliquer des processus différents ou de nouveaux outils, mais bien de modifier les paradigmes, les présomptions, les vérités qui sous-tendent nos pensées. Nous devons revisiter notre vision du monde. Nos représentations mentales sur le bien-vivre ensemble ont été forgées au sein d’une boîte conceptuelle dépassée. Dans cet étau, l’intelligence collective semble utopiste, irréaliste et illusoire. Ce livre a pour but d’élargir le regard, d’apprendre à mieux reconnaître l’intelligence collective qui jaillit et de mieux identifier les conditions qui la favorisent pour apprendre à la faire émerger dans nos vies.
L’intelligence collective est maintenant nécessaire, c’est même une urgence vitale de la faire croître dans chacun de nos collectifs, pour notre bien-être, notre bien-vivre et peut-être même pour notre survie en tant qu’espèce.
Comme l’a dit Thomas Paine : « nous avons en notre pouvoir de commencer le monde à nouveau ».
Alors, découvrons de nouveaux paysages et surtout, apprenons à percevoir avec des sens plus affûtés. Ce qui est bruit pour un esprit non préparé devient signal riche de sens pour celui qui sait entendre.
Introduction / “Découvrir l’intelligence collective“, Olivier Piazza
