Connaissez-vous vraiment l’objectif de votre vie ?

Nicolas Galita
Dépenser, repenser
12 min readAug 11, 2017

Êtes-vous autre chose qu’un hamster qui court dans une roue ? La question est plus sérieuse qu’il n’y paraît. Plus je m’observe moi-même, plus j’observe les autres, plus je me rends compte qu’on tombe vite dans des roues de hamster. On a tous un don inouï à courir très vite vers nulle part, à gravir une mauvaise montagne avant de vérifier si c’est bien la bonne…

Après, j’ai pris la mer et je suis revenue
Droit dans la fourmilière de Paris la vendue
Là-bas, les hommes se mentent en courant très très vite
Elle tient quand même debout, tout est question de rythme.

Avant de commencer, il est évident que tout ce qui va suivre ne s’applique que si et seulement si vous avez déjà réglé vos questions de survie. On ne peut pas s’occuper vivre quand on doit s’occuper de survivre. Ceci étant dit, on peut y aller !

Le danger de ne pas connaître son objectif de vie

Si vous ne prenez pas le temps de réfléchir au sens de votre vie, vous allez tomber dans le piège le plus banal : croire que vous avez besoin d’argent. Souvent en donnant à l’argent un statut magique, quasi-divin.

Née dans un monde qui m’a nourri à la broutille. A voulu m’abrutir ! Adorer l’ argent qui n’est qu’un outil.

Qu’est-ce que l’argent ?

Or, l’argent est tout sauf magique. On dit souvent que le temps c’est de l’argent. Ce qu’on devrait rajouter c’est que la réciproque est vraie : si vous êtes salarié, l’argent c’est du temps. Imaginons que vous gagniez 1500€/mois. En partant du principe que vous êtes aux 35 heures, ça vous fait quasiment 10€ de l’heure. 1€ les 6 minutes.

Vous pouvez donc convertir n’importe quel prix en nombre de minutes travaillées. Admettons que vous vouliez acheter une télévision (c’est un exemple, ne faites surtout mais alors surtout pas ça) et que le prix est de 350€. Concrètement la question à vous poser sera : « est-ce que ça vaut le coup de dépenser une semaine de travail (35 heures x 10€) pour obtenir ce téléviseur ? ». La réponse est évidemment non mais c’est un autre sujet. L’argent vous sert donc d’outil de troc super amélioré. La seule question qu’il vous reste à vous poser c’est « est-ce que ça vaut le temps ? ».

Remarquez au passage qu’il faut donc être très vigilant quand on vous propose un meilleur salaire absolu avec un moins bon salaire horaire. Par exemple, si je gagne 3000€/mois en travaillant 80 heures par semaine, j’ai plus d’argent à la fin du mois. Mais pas parce que je suis plus efficace : juste parce que j’ai échangé beaucoup plus de temps. Votre heure vaut désormais moins de 8€. Et si vous cumuliez deux emplois de 35 heures à 1500€, vous gagneriez autant d’argent en travaillant 10 heures de moins (70h).

L’argent est donc un instrument, un moyen au service d’une fin. À quelques exceptions près l’argent n’est donc JAMAIS l’objectif.

Ne pas comprendre pourquoi on veut de l’argent

Je déprime à chaque fois que je demande à quelqu’un « tu ferais quoi si ta question financière était réglée ? » et qu’il me répond « je ne sais pas ». Si vous ne savez pas pourquoi vous courrez, à quoi bon courir ? Si vous ne savez pas pourquoi vous voulez de l’argent, à quoi bon en gagner ? C’est la définition même d’une vie sans aucun sens.

Le système nous a eu et moi le premier
Il s’est bien assuré que je sois trop occupé
À courir après cet argent pour survivre
Je suis obnubilé par les deniers

Le plus grand danger hypnotique de l’argent vient de son plus grand avantage. L’argent est pensé pour être la valeur d’échange universelle, celle qui permet d’acheter le plus de de choses, même s’il ne permet pas d’avoir tout puisque certaines choses ne s’achètent pas avec de l’argent. Certaines choses s’achètent uniquement avec du temps brut, ou de l’amour, ou du pouvoir. Mais la valeur qui achète le plus de choses, le plus facilement c’est l’argent (le pouvoir est un bon prétendant mais il est dur à obtenir). Et c’est cette polyvalence de l’argent qui nous fait oublier que ce n’est qu’un moyen pour acheter d’autres choses.

Jouer au jeu des autres

Non seulement vous risquez de tomber dans le piège de l’argent sans but mais vous risquez également de tomber dans le piège de vouloir ce que les autres veulent.

À force de vouloir être comme tout le monde, peu sont vraiment quelqu’un en fin de compte. On devient ce qu’on nous montre, au lieu d’être ce qu’on est.

Un exemple qui me marque à chaque fois c’est celui du voyage. Énormément de gens prétendent vouloir voyager. Mettons-nous d’accord : avec un salaire de cadre moyen et l’invention du duo Ryan Air/Airbnb vous avez largement de quoi voyager tous les weekends dans une destination différente pendant un an. Tous les gens que je connais qui sont vraiment animés par cette flamme du voyage, voyagent.

Certes sous des formats différents. Certains acceptent de vivre dans un appartement plus petit, hors de Paris, et mettent la différence de loyer dans les voyages du weekend. Une autre, voyage seule quand l’envie lui en dit (je ne compte plus les gens qui disent adorer le voyage mais ne sont pas prêt à le faire seul). Une autre passe 3 mois à travailler comme saisonnière dans des restaurants , des hôtels, des pizzerias…puis utilise l’argent pour aller aux quatre coins du monde les 3 mois suivants. Une autre a trouvé une méthode pour gagner de l’argent en voyageant. Bref, il y a autant de formules que de caractères.

Le souci c’est que beaucoup de gens prétendent vouloir voyager car ils savent que c’est quelque chose qu’on est censé vouloir dans la vie. Et donc ils s’imaginent immédiatement un tour du monde, ou le trio médiatique : USA, Australie, Thaïlande. Si jamais vous prétendez aimer voyager et que vous faîtes une moue quand je vous parle de l’Albanie (ou de la Pologne): vous n’êtes pas un voyageur. Point. Un vrai voyageur quand je lui parle de l’Albanie, ses yeux s’éclairent et il me pose des questions sur comment on peut s’y rendre et ce qu’on peut visiter.

Il en va de même pour les gens qui prétendent vouloir de l’argent. Je connais de vrais passionnés de l’argent, des fous furieux. Des gens qui sont prêts à quitter leur ville préférée, à être loin de leur partenaire, à travailler 90 heures par semaine, à accepter de se faire humilier par un chef en attendant de pouvoir le remplacer, à faire un MBA pour doubler de salaire, etc.

Si vous voulez de l’argent, allez en chercher. Arrêtez de vous mentir. Je ne dis pas que c’est facile : on peut échouer dans la quête. Mais arrêtez de dire que vous voulez de l’argent si vous n’essayez pas d’en obtenir.

Je déprime à chaque fois que j’entends les gens répondre la même chose au jeu de l’Oncle Ralph.

C’est un jeu où on essaie de déterminer le sens de sa vie en imaginant trois années : une où on apprend, une dans une cause bénévole et une avec 18 millions d’euros. Croyez-le ou non mais plus de 60% des gens me répondent exactement la même chose. Année 1 : j’apprends l’anglais (ou le chinois, ou le russe). Année 2 : je vais sauver des bébés africains (c’est bien connu y’a qu’en Afrique qu’on trouve des pauvres). Année 3 : je voyage et je profite de la vie.

Sans s’en rendre compte ces gens ne font que répéter ce qu’ils ont entendu, ce qu’ils sont censés vouloir. Ce n’est pas leur volonté. À force de courir partout, ils n’ont pas pris le temps de découvrir leur propre voix/voie, leur propre volonté.

Les différents jeux

En fait, les différents objectifs de vie peuvent être classés en grandes catégories distinctes. Beaucoup sont d’ailleurs excluantes. C’est pour ça qu’il faut vraiment se poser la question du jeu auquel on joue.

D’ailleurs, les gens qui savent à quel jeu ils jouent ont souvent une grande incompréhension envers ceux qui choisissent un autre jeu. Un exemple frappant se trouve dans la série House of Cards. Sentez tout le mépris :

Such a waste of talent. He chose money over power. In this town, a mistake nearly everyone makes. Money is the Mc-mansion in Sarasota that starts falling apart after 10 years. Power is the old stone building that stands for centuries. I cannot respect someone who doesn’t see the difference.

(Traduction approximative : Tant de talent, gâché. Il a choisi l’argent plutôt que le pouvoir. Une erreur que quasiment tout le monde fait dans cette ville. L’argent c’est cette maison vulgaire et tape à l’oeil en Floride, qui commence à partir en miettes après 10 ans. Le pouvoir c’est ce vieux bâtiment en pierre qui est là depuis des siècles. Je ne peux pas respecter les gens qui ne voient pas cette différence.)

Voici donc une liste non exhaustive des différents jeux possibles.

Le jeu de l’argent

Quand j’ai dit que l’argent était un moyen et non une fin j’ai volontairement omis ce cas de figure. Il y a effectivement des gens qui jouent au jeu de l’argent comme une fin en soi, et qui savent ce qu’ils font. Parce que l’argent est alors un simple score qu’ils cherchent à améliorer pour le simple plaisir de l’améliorer. Pas pour s’acheter d’autres choses.

Le jeu de la tranquillité

Je ne savais pas trop comment le nommer. Mais si votre but c’est d’un jour pouvoir aller vous reposer sur une île déserte avec tous les gens que vous aimez, sans plus jamais vous soucier du monde extérieur, c’est votre jeu.

Le jeu du prestige

Certaines personnes cherchent à obtenir le prestige de leur société. Par exemple, si vous préférez être un avocat ou un médecin malheureux, plutôt qu’un boulanger heureux, il y a des chances que vous jouiez à ce jeu.

Le jeu du pouvoir

C’est le jeu décrit dans House of Cards. Vous préférez quoi ? Être milliardaire ou être président des États-Unis ?

Le jeu de l’impact

Laisser une empreinte sur le monde, avoir une influence observable sur lui. Vous préférez être milliardaire ou être l’inventeur de la ceinture de sécurité ?

Le jeu de la gloire

Se combine, ou pas, avec le précédent. On peut avoir un impact sans être connu (l’inventeur de la ceinture de sécurité) ou au contraire être très connu pour cet impact (Martin Luther King). Si vous avez le choix entre être Martin Luther King ou Liliane Bettencourt, vous choisissez quoi ? Une vie courte et relativement pauvre mais glorieuse ou une vie longue et riche mais sans accomplissement historique ?

Et partout dans la rue, j’veux qu’on parle de moi. Que les filles soient nues, qu’elles se jettent sur moi. Qu’elles m’admirent qu’elles me tuent !

Le jeu de l’aide de son prochain

Lui aussi peut se combiner, ou non, avec le précédent. Certaines personnes ont pour but principal d’aider les autres. Soit en les aidant à s’épanouir (comme un professeur par exemple), soit en les soutenant. L’Abbé Pierre est rentré dans la gloire comme ça, mais la plupart sont anonymes.

Le jeu de l’amour

Si votre priorité c’est de rendre heureuse la ou les personnes que vous aimez, vous êtes dans ce jeu.

Le jeu de la création

Ça consiste à trouver son bonheur dans le fait de créer des choses. Partir de rien pour arriver à la fin à accomplir quelque chose. C’est ce que fait un sculpteur, mais on trouve ce schéma dans des choses beaucoup moins artistiques comme : monter une conférence de A à Z.

Le jeu de la performance

Un peu similaire au précédent sauf que maintenant le but c’est de devenir le meilleur de son domaine. C’est le jeu auquel joue un sportif.

Le jeu de la spiritualité

Il s’agit de trouver son bonheur dans le respect de principes spirituels ou religieux.

Le jeu du marionnettiste

Probablement le pire de tous. C’est quand votre but c’est de faire ce que veut une autre personne, qui n’est pourtant pas actrice de votre vie. Par exemple vouloir devenir avocat parce que c’est ce que vos parents veulent. J’ai rarement vu des gens jouer à ce jeu et être heureux.

Prendre une décision ou tourner en rond

J’ai très certainement oublié des jeux dans la liste mais vous avez compris le principe. La question étant : derrière quoi vous voulez courir ? À part sur le dernier, j’ai essayé de ne pas polluer les descriptions avec mes propres préférences. Comme je vous le disais, les gens qui ont fait un choix clair ont vite tendance à ne plus comprendre ceux qui en font un autre.

Penser juste “je veux de l’argent” rajoute alors plus de flou qu’autre chose. Sauf si vous êtes vraiment dans le jeu de l’argent. En fait vous pensez vouloir de l’argent mais vous êtes juste paresseux intellectuellement.

Quelle est votre priorité ? Si vous ne devez en garder qu’une ? Évidemment que vous voulez plusieurs des choses de la liste, c’est le principe : ce sont des choses globalement toutes désirables. Le problème c’est qu’il faut connaître votre priorité pour ne pas vous perdre en chemin. Certains jeux sont antagonistes et ne peuvent pas être joué en même temps. D’autres ne peuvent se combiner que si et seulement si vous faîtes le choix de vous obliger à les combiner. Par exemple « je veux être connu mais uniquement dans une activité où j’aide les autres ».

Sans quoi, vous continuez à tourner en rond. Admettons que vous vouliez être médecin. Quel médecin voulez-vous être ? Le médecin le plus riche possible ? Le plus doué ? Le plus prestigieux ? Celui/celle avec le plus de pouvoir ? Le plus amoureux ? Le meilleur père ou la meilleure mère ? Le médecin ayant aidé le plus de gens ? Le médecin avec le plus d’impact ? Etc.

Ce sont des choix radicalement différents, qui vous emmènent à prendre des décisions radicalement différentes.

Si jamais un génie apparaît et vous propose deux choses. Premièrement, de faire votre métier ou votre passion pour 50 000€ par mois mais sans avoir jamais le moindre impact concret. Ou bien alors de faire la même chose pour le smic (tous les revenus supplémentaires générés sont taxés à 100% par le génie) mais en ayant un impact planétaire, avec ou sans la gloire. Vous prenez quoi ?

Si vous ne prenez pas la seconde option ça élimine le jeu de la gloire et de l’impact. Et on peut continuer à imaginer d’autres dilemmes comme celui-ci. Vous préférez être président(e) de la République à vie, au smic ou bien milliardaire isolé(e) sur une île paradisiaque ? Argent ou pouvoir ? Gloire ou tranquilité ? Performance ou spiritualité ? Aider vos proches ou aider le reste de la planète ?

D’ailleurs en écrivant je me rends compte d’un jeu que j’ai oublié : celui de la connaissance. Vous préférez quoi : tout savoir ou devenir milliardaire ?

Conclusion

Ne vous trompez pas de combat ou vous vous tromperez de victoire. L’argent n’est qu’un jeu parmi les autres. La plupart du temps quand quelqu’un croit jouer au jeu de l’argent c’est juste qu’il ne s’est jamais vraiment posé la question. L’argent ne fait pas le bonheur si vous ne jouez pas au jeu de l’argent, il vous permet juste éventuellement d’acheter des raccourcis et des jokers pour le jeu que vous pratiquez. Par exemple, on peut obtenir plus rapidement du pouvoir avec suffisamment d’argent. Ce n’est évidemment pas négligeable mais il faut l’avoir en tête pour ne pas perdre de vue le vrai objectif.

Choisissez votre jeu, jouez-y. Que vous gagniez ou pas, au moins vous saviez pour quoi vous jouiez. C’est déjà tellement dur de gravir une montagne que c’est vraiment bête de finir au sommet de la mauvaise. Comme dans la chanson :

Je suis pas heureux mais j’en ai l’air

J’ai perdu le sens de l’humour
Depuis que j’ai le sens des affaires
J´ai réussi et j’en suis fier

Au fond je n’ai qu’un seul regret
Je fais pas ce que j’aurais voulu faire

J’aurais voulu être un artiste
Pour pouvoir faire mon numéro
J´aurais voulu être un chanteur
Pour pouvoir crier qui je suis

J´aurais voulu être un auteur
Pour pouvoir inventer ma vie

--

--

Nicolas Galita
Dépenser, repenser

Tu as aimé ce que tu as lu ? Ce n’était qu’un amuse-bouche. Je partage bien plus de contenu ici : https://nicolasgalita.substack.com