Garde espoir

Nicolas Galita
Dépenser, repenser
6 min readApr 11, 2022
Photo by Clay Banks on Unsplash

Il y a des moments comme ça où la réalité vient nous percuter si fort qu’on se demande si tout n’est pas vain.

On a la tentation du nihilisme : de rien ne sert à rien.

Au final, c’est l’effet du désespoir. Or, le désespoir est un poison pour la santé mentale.

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Le contraire du bonheur c’est pas la tristesse mais bien le désespoir

Comme le poisson a besoin d’eau, l’esprit a besoin d’espoir pour survivre. L’espoir est le carburant de l’engin mental. C’est le beurre sur la tartine, et plein d’autres métaphores à la con. Sans espoir, tout l’appareil mental tombe en panne sèche. Sans l’espoir d’un avenir meilleur, d’une quelconque amélioration de la vie, l’esprit dépérit.

À quoi bon vivre, à quoi bon agir s’il n’y a pas d’espoir d’embellissement ? Voici ce que beaucoup de gens ne comprennent pas : le contraire du bonheur n’est pas la colère ni la tristesse.

Si l’on est fâché ou triste, cela veut dire qu’on s’intéresse encore à quelque chose. Cela veut dire qu’il y a encore quelque chose qui compte. Cela veut dire qu’on a encore de l’espoir.

Le contraire du bonheur, c’est le désespoir, l’horizon complètement bouché, la résignation, l’indifférence la plus totale. La conviction que tout est foutu et qu’on ne peut rien y faire.

Je n’aurais pas dit autrement. Ah si… je n’aurais pas dit que l’esprit a besoin d’espoir pour survivre. J’aurais dit que l’esprit a besoin d’espoir pour vivre. Et que, justement, sans espoir il ne fait que survivre.

L’espoir n’est pas le déni

L’anglais a un mot incroyable : delusional. C’est intraduisible. On pourrait dire “qui est dans le déni”, mais ce n’est pas exactement ça.

Delusional c’est cet état dans lequel on est quand on croit à ses propres esbroufes. Quand on se raconte des histoires auxquelles on croit.

Avoir un espoir delusional ne renforce pas le bonheur. Ça crée une bulle qui vous isole de la réalité. C’est comme ça que fonctionne le complotisme. Le complotisme c’est ce phénomène poussé à l’extrême chez un individu.

Voilà pourquoi mon espoir au moment où j’écris ce n’est pas que la gauche passe au second tour dans les heures qui vont suivre le moment où j’écris cette ligne. Ce n’est pas impossible, mais beaucoup trop improbable.

Mon espoir c’est qu’on continue à lutter, pour que ça arrive la prochaine fois.

Mon espoir c’est qu’on continue à faire de la pédagogie sur l’antiracisme. Car, même si l’instinct fasciste de ce pays a été réveillé depuis les attentats de 2015, on a aussi l’instinct émancipateur qui est là. On a perdu beaucoup de batailles sur cette année mais il ne faut pas oublier que l’antiracisme a gagné plein de batailles idéologiques récemment.

Bien sûr, on parle désormais de grand remplacement à la télévision. C’est une énorme défaite. Mais rien n’est irréversible. On peut renvoyer l’extrême-droite dans le coin idéologique qui était le sien. Ça va être dur mais on l’a déjà fait plusieurs fois dans l’histoire.

Mon espoir c’est qu’on continue à créer nos espaces en dehors du jeu politique.

Il y a 5 ans j’ai écrit un article pour expliquer 8 choses qu’on pouvait faire pour changer le monde sans voter. Je suis toujours d’accord avec cette liste :

  1. Éteins ta télévision
  2. Arrête de fumer
  3. Arrête les blagues racistes, sexistes et homophobes
  4. Arrête de manger des animaux
  5. Arrête le culte du consensus
  6. Continue à mener la lutte idéologique
  7. Lis des livres
  8. Comprends que TOUT est politique

Peut-être que je préciserais le point 5 avec ce que j’ai appris depuis. En vrai ce que je voulais dénoncer c’était le tone policing c’est-à-dire le fait que dans les luttes d’émancipation, les forces du statu quo viendront toujours dire qu’on parle trop fort, qu’on lutte mal, qu’on dessert la cause…

Mon espoir c’est qu’on continue à lutter même quand tout semble perdu. On peut être lucide sur le fait qu’on est en train de perdre, tout en n’arrêtant pas la lutte.

Peu importe le résultat des élections présidentielles, je vais continuer à lutter. Je vais continuer.

Lutter, c’est vivre.

Je ne compte pas survivre.

Ou en tout cas, pas encore. Peut-être qu’un jour je perdrais tout espoir.

Mais ce jour n’est pas arrivé.

L’espoir n’est pas le cynisme

J’ai remarqué que les pessimistes aiment bien se faire passer pour les réalistes. Souvent quand quelqu’un dit il faut appeler un chat un chat, il est en train d’appeler un chat un tigre.

Veille sur ton coeur, il peut vite glacer de froid

Faut garder sa vigilance pour ne pas s’éloigner de soi

J’ai répété ces vers tant de fois autour de moi…

Et j’enchaîne souvent avec :

La vie m'a dit "Le bonheur dépend de ton regard
De ce que tu dégages, ceux qui n'ont pas peur du vide ne tombent pas
Car la peur attire tout à elle, magnétique
Les erreurs se répètent parce qu'on cultive l'amnésie"
Elle m'a dit "Ne juge pas, évite les poncifs
Canalise tes analyses car tes pensées te construisent
Ne banalise jamais, tout est unique, médite ça

Le pessimisme forcené n’est pas plus sain que le déni optimiste. Ce pessimisme EST un déni. Mais surtout, on l’a vu, ce n’est pas sans conséquence sur la santé mentale.

L’anxiété chronique est un problème d’espoir : c’est la peur d’un avenir raté. La dépression aussi est un problème d’espoir : c’est la conviction que l’avenir sera vide de sens.

L’importance de la communauté

Il y a forcément des gens qui pensent comme toi. Des gens qui aimeraient obtenir les mêmes choses que toi.

Tu peux former avec eux une communauté. Or, la communauté permet de cultiver l’espoir. De ne plus ressentir l’isolement.

Fatiguée j'avance, là où l'désespoir est lâche 
Ecrasée par terre, la Vie m'a dit "lève toi et marche"
Ma fille, va au bout de tes rêves, et méfie toi de l'ordre
Des prisons cérébrales héritées de l'Histoire de l'Homme
Regarde le monde, sans t'imprégner de son mal
Des tonnes de rêves en sommeil, et des êtres humains façonnables
Des révoltes récupérées, des souffrances grisées
Crimes d'état banalisés comme les enfances brisées
Alors j'ai couru j'me suis retournée, j'étais seule
J'ai cherché, et j'ai vu qu'il y avait plein de frères et soeurs !

Plein ! Condamnés à errer ou à rentrer malgré nous dans leurs rangs
Parce qu'il n'y a pas de places pour nous dans leur monde
Le temps voudrait nous corrompre à force de fermer les portes
La Vie m'a dit " méfie toi de l'inertie de ton époque "

L’importance de l’empouvoirement

Dur de traduire empowerment. C’est un mélange entre la sensation de contrôle, l’émancipation et la découverte des valeurs qui nous motivent intrinsèquement.

Pour faire germer l’espoir et le garder, on a en fait besoin de trois choses : sentir qu’on contrôle un tant soit peu sa vie, accorder de la valeur à quelque chose et appartenir à une communauté.

Le « contrôle », c’est le sentiment de maîtriser sa propre vie, de pouvoir influencer sa destinée.

La « valeur », c’est trouver une cause assez importante pour nous motiver à agir, un but qui vaille la peine d’être poursuivi.

Enfin, la « communauté », c’est faire partie d’un groupe qui partage les mêmes valeurs et qui s’efforce d’atteindre les mêmes buts que nous. Sans communauté, nous nous sentons isolés et nos valeurs ne signifient plus rien. Sans valeurs, rien ne semble valoir la peine de se donner du mal.

Et sans sentiment de contrôle, on se sent totalement impuissant. S’il manque l’un des trois éléments, on perd les deux autres. Et si l’on perd l’un des trois, on perd espoir.

Tout finit par passer

Tu te rappelles de la détresse ressentie par une partie des américains quand Trump a été élu ? Peut-être même que tu as ressenti aussi cette détresse. Et bien… Trump n’est plus là et le pays n’est pas anéanti. Certaines choses ont été affaiblies, bien sûr, mais ça se répare.

Là c’est pareil.

Tout finit par passer.

Tout.

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Où ai-je volé tout ça ?

J’ai pris les passages de livre dans le livre Tout est foutu: Un livre sur l’espoir.

J’ai pris les passages de chansons dans plusieurs chansons de Keny Arkana. Principalement celle-ci :

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Nicolas Galita
Dépenser, repenser

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