Les données, outil d’une démocratie renouvelée

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16 min readMay 3, 2019

La valeur d’usage des données va au-delà de sa seule dimension économique, que l’on songe à la dimension démocratique des politiques d’Open Data ou à l’utilisation qui peut être faite des données dans l’amélioration des politiques publiques. Encore faut-il que les administrations et les citoyens soient suffisamment formés pour s’emparer de ces nouveaux instruments.

Se saisir des enjeux démocratiques de l’ouverture des données

Favoriser une « vigie » citoyenne

Permettre aux citoyens d’accéder aux informations publiques est une idée ancienne, qui n’a pas attendu la fin des années 2000 et la mise en place des premières politiques d’ouverture des données publiques. L’objectif visé, celui de « favoriser l’émergence d’une contre-expertise citoyenne par la réduction des asymétries d’information », est inhérent à l’exigence de transparence dans une société démocratique [79]. La démocratisation d’Internet, en rendant possible une mise à disposition de l’ensemble des données publiques de manière immédiate et permanente, facilite l’accès aux informations et ouvre de nouvelles perspectives de participation citoyenne.

L’ouverture des données publiques permet d’introduire une « culture des faits » dans l’action publique. Désormais, les citoyens et la société civile disposent d’un accès aux informations nécessaires pour contrôler l’activité des élus et de l’administration, et le cas échéant demander des comptes sur les actions menées, sur l’affectation de l’argent public et plus largement sur les tenants de la décision publique. Tout cela dans une logique de redevabilité (accountability en anglais). Encore faut-il que l’ouverture ne se limite pas aux données dites « inoffensives » (comme les horaires d’ouvertures de bâtiments publics), mais qu’elle concerne aussi celles qui revêtent une dimension politique (qualité de l’air, détails des votes au conseil municipal, études d’impact, décisions de justice, qualité des services publics, données d’études cliniques présidant à l’autorisation sur le marché des produits de santé, etc.) [80].

Les effets vertueux attendus d’une libération de la donnée publique sont également de plusieurs sortes pour l’action publique [81]. D’une part, la transparence peut avoir une incidence sur l’efficacité de l’action publique. L’administration est incitée à expliquer la répartition des dépenses publiques et à poursuivre l’amélioration de la qualité de ses services. Elle accède aussi à une meilleure information grâce au partage des autres services et informations. En imposant l’ouverture des données des entreprises qui exercent une délégation de service public, la loi pour une République numérique de 2016 permet également de contrôler au plus près l’activité des délégataires [82]. Par exemple, dans le domaine de l’eau, l’organisme chargé du service dispose de bases de données sur la consommation des ménages et des entreprises, sur les fuites et les opérations de maintenance. Les services publics de vélopartage génèrent des données sur les déplacements, les durées d’utilisation ou encore l’usure du parc. Autant d’informations qui ont de la valeur aux yeux des autorités publiques, qu’il s’agisse d’évaluer la qualité du service, de faire évoluer son organisation ou de s’assurer que le délégataire respecte effectivement le cahier des charges.

D’autre part, la transparence démocratique peut être une source de légitimité supplémentaire pour l’action publique. L’ouverture des données conduit les autorités publiques à se rapprocher des citoyens pour dialoguer et interagir avec eux. Des citoyens mieux informés et associés à la conduite des politiques publiques gagnent en autonomie et en capacité d’action. Ils sont de ce fait plus à même de contribuer au bon fonctionnement des institutions démocratiques.

L’Open Government Partnership : un accélérateur pour la transition numérique des États ?

L’Open Government Partnership est une organisation internationale lancée en 2011 et composée de 80 pays et de centaines d’organisations de la société civile qui agissent pour promouvoir la transparence de l’action publique, sa construction avec la société civile et l’innovation démocratique

Ses membres s’engagent à respecter les grands principes de la Déclaration pour un gouvernement ouvert :

- Transparence de l’action publique, notamment par l’intermédiaire de l’ouverture des données publiques

- Participation des citoyens à l’élaboration et à l’évaluation des politiques publiques

- Intégrité de l’action publique et des agents publics

- Utilisation des nouvelles technologies en faveur de l’ouverture et de la redevabilité

Tous les deux ans, les pays membres élaborent, conjointement avec la société civile, un plan d’action sur les mesures qui seront développées en faveur d’une action publique transparente et collaborative. L’organisation ambitionne notamment d’établir un cadre légal pour la publication des revenus des hauts fonctionnaires, de promouvoir la transparence budgétaire et fiscale et d’augmenter la participation des citoyens dans l’action publique. À ce titre, chaque pays membre doit produire un Plan d’action national visant à faire progresser la transparence et l’ouverture de l’action publique dans les domaines promus par le partenariat.

L’Open Government Partnership est une organisation internationale lancée en 2011 et composée de 80 pays et de centaines d’organisations de la société civile qui agissent pour promouvoir la transparence de l’action publique, sa construction avec la société civile et l’innovation démocratique. Ses membres s’engagent à respecter les grands principes de la Déclaration pour un gouvernement ouvert : Transparence de l’action publique, notamment par l’intermédiaire de l’ouverture des données publiques; Participation des citoyens à l’élaboration et à l’évaluation des politiques publiques; Intégrité de l’action publique et des agents publics; Utilisation des nouvelles technologies en faveur de l’ouverture et de la redevabilité. Tous les deux ans, les pays membres élaborent, conjointement avec la société civile, un plan d’action sur les mesures qui seront développées en faveur d’une action publique transparente et collaborative. L’organisation ambitionne notamment d’établir un cadre légal pour la publication des revenus des hauts fonctionnaires, de promouvoir la transparence budgétaire et fiscale et d’augmenter la participation des citoyens dans l’action publique. À ce titre, chaque pays membre doit produire un Plan d’action national visant à faire progresser la transparence et l’ouverture de l’action publique dans les domaines promus par le partenariat

De l’intérêt d’une politique publique « data-driven »

Les services publics maintiennent traditionnellement le public dans un rôle passif, comme destinataire d’une offre de services standardisés. À l’heure de la révolution numérique, une autre approche est toutefois possible. À l’exemple des innovations en cours dans l’économie numérique, l’administration peut désormais s’appuyer sur ce que Nicolas Colin et Henri Verdier désignent comme « la multitude », ces millions de citoyens instruits et connectés, mais aussi des chercheurs, des associations et des entreprises, pour élaborer et conduire ses politiques publiques [83].

La figure de l’usager-contributeur peine encore à s’imposer, faute d’avoir réussi à trouver les formes institutionnelles appropriées pour mettre les ressources de l’intelligence collective au service de l’administration, sans ébranler l’autorité de cette dernière. Mais les plaidoyers pour une rupture stratégique de la part de l’État — sa plateformisation — se multiplient [84].

Avec en arrière-plan le risque que si rien n’est fait, l’État et les services publics finissent à leur tour par se faire « ubériser » [85].

Les secteurs marchands comme ceux des postes et des transports ont déjà été investis par les acteurs numériques. Pour autant, les services non marchands ne sont pas immunisés. Le gouvernement français a récemment abandonné l’application nationale d’alerte attentat SAIP (Système d’alerte d’information des populations), au profit d’accords passés avec les plateformes numériques que sont Google, Facebook et Twitter. Google, via sa filiale Sidewalk Labs, ambitionne de devenir un acteur majeur dans la conception et la gestion de la ville intelligente. Les premières expérimentations de l’entreprise devraient d’ailleurs prochainement voir le jour à Toronto sur une friche portuaire de cinq hectares.

Face à cette tendance, plusieurs initiatives récentes ouvrent d’intéressantes perspectives de coproduction du service public entre le public et le privé fondées sur la donnée.

L’administration peut tout d’abord recourir aux ressources du crowdsourcing pour faire remonter les signaux faibles et orienter son action. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), le gendarme français des télécoms, s’est ainsi engagée dans un programme de « régulation par la data » qui entend « faire de chaque citoyen un micro-régulateur » [86]. La plateforme « j’alerte l’ARCEP » permet aux particuliers de signaler les dysfonctionnements qu’ils rencontrent dans leurs relations avec les opérateurs de télécommunications. Les alertes recueillies permettent à l’ARCEP d’identifier les dysfonctionnements récurrents et de gagner ainsi en efficacité dans ses actions de régulation. L’ARCEP s’est également associée aux applications mobiles de mesure des débits pour compléter les données qu’elle produit elle-même sur la couverture et la qualité des réseaux. Dans le même esprit, elle a soutenu le développement de l’application « Wehe » par la Northeastern University de Boston. L’objet de l’application est de permettre à ses utilisateurs de contribuer à la neutralité d’Internet en détectant les bridages de flux Internet et en faisant remonter les signalements positifs au régulateur. En 2017, l’État a également lancé la plateforme cybermalveillance.gouv.fr, qui implique les acteurs du secteur de la cybersécurité, notamment les entreprises du numérique. Destinée à aider les victimes de cybermalveillance, qu’il s’agisse d’acteurs publics, privés, ou d’individus, le dispositif devrait également à terme permettre d’enrichir les informations sur la nature de la cybercriminalité [87].

L’administration s’est par ailleurs engagée dans l’emploi des data sciences pour améliorer l’efficacité des politiques publiques. Plusieurs dispositifs contribuent à diffuser l’usage de la donnée au sein des ministères [88]. Le ministère des Finances a généralisé le recours au data mining pour lutter contre la fraude fiscale [89]. La Bonne Boîte de Pôle emploi permet aux demandeurs d’emplois d’accéder au marché caché de l’emploi. Le service utilise un algorithme de prédiction de la probabilité d’embauche des entreprises dans une région donnée. MapVHL, développé par la Direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication (DINSIC) et le Service des technologies et des systèmes d’information de la Sécurité intérieure (ST(SI)²), est un outil d’aide à la décision qui permet de connaître l’historique des vols et des découvertes de véhicules.

L’État encourage également la constitution d’un écosystème autour de la production des services publics pour utiliser et favoriser l’innovation du plus grand nombre. Au-delà d’une simple mise à disposition des données publiques, il s’agit de nouer des partenariats et d’accompagner les innovateurs dans la création de services. C’est le sens de la mise à disposition des API d’État sur le site api.gouv.fr : les API s’adressent aux créateurs de services, qu’ils soient issus de la sphère publique ou de la sphère privée. Mais on peut également imaginer que l’administration noue des partenariats pour accéder aux données privées qu’elle juge utiles à l’activité de ses services publics. Une ville pourrait par exemple concentrer ses contrôles sanitaires sur les restaurants qui ont obtenu de mauvaises notes de leur clientèle sur des sites Internet comme TripAdvisor ou La Fourchette ou en fonction de la récurrence de certains termes sur le manque d’hygiène dans les commentaires.

Faire du citoyen un acteur à part entière de la donnée

You can see the computer age everywhere but in the productivity statistics” [90]. C’est ainsi que l’économiste Robert Solow s’étonnait à la fin des années 1980 de la situation paradoxale de l’économie américaine. Malgré des investissements considérables réalisés dans les nouvelles technologies de l’information et de la communication, la croissance de la productivité était plus faible dans les années 1980 qu’elle ne l’avait été dans les années 1960 et 1970. L’une des explications régulièrement avancées pour expliquer le « paradoxe de Solow » est celle du décalage qui existe entre l’introduction d’une innovation technologique et son incidence effective sur les évolutions économiques et sociales. La diffusion des innovations technologiques, la formation d’individus aptes à s’en emparer, la réorganisation sociale autour de leur usage, tout cela prend du temps. Et de fait, dès les années 1990, la productivité américaine liée aux nouvelles technologies repartait à la hausse.

Le paradoxe de Solow peut être utile pour comprendre la situation actuelle. Si nul ne conteste que les perspectives ouvertes par l’exploitation des données soient immenses, il reste encore du chemin à parcourir avant que les entreprises, les administrations et les citoyens soient en capacité d’en tirer tous les bénéfices. D’après l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les spécialistes des données représentent aujourd’hui moins de 1 % de l’emploi total parmi les États membres de l’organisation [91]. Faire émerger les compétences requises, c’est l’enjeu du développement de la littératie des données (de l’anglais data literacy) ou culture des données, qui se définit comme la capacité à produire, à comprendre et à utiliser les données numériques.

Si nous ne sommes pas tous destinés à devenir des data scientists aguerris, un travail pédagogique reste à faire pour permettre à chacun de lire les données, de les manipuler et de les mettre en récit. Au-delà de sa dimension économique, la littératie de la donnée est en enjeu démocratique crucial, puisqu’il en va de la faculté des citoyens à maîtriser leurs données et à peser sur les grands débats qui s’annoncent autour de la régulation des données [92].

Dans les entreprises, la culture de la donnée demeure souvent faible. Se doter d’un responsable des données (en anglais CDO, Chief Data Officer) ou de data scientists n’est pas suffisant. La donnée ne doit pas rester une affaire de spécialistes, mais être partagée par le plus grand nombre dans l’organisation, depuis le top management jusqu’au client. Pour cela, il est nécessaire de sensibiliser les acteurs en renforçant l’information et en démystifiant la donnée, notamment à travers la création de « datalabs » et d’« infolabs » qui organisent le partage des données et informent les salariés sur les ressources disponibles, les questions d’éthique et de sécurité. La prise de conscience de la valeur des données passe également par l’expérimentation, via des hackathons [93], etc.

De même, les agents publics ne perçoivent pas toujours les opportunités qu’offre le numérique pour faire évoluer leurs méthodes et leurs missions. Faire figurer les opérations de collecte, d’entretien et de publication des données sur la fiche de poste des agents publics n’est pas suffisant. Les agents doivent comprendre concrètement les opportunités offertes par une exploitation des données dans le cadre de leur activité. Au-delà des offres classiques de formation, la mise en place de programmes comme celui des startups d’État ou des entrepreneurs d’intérêt général renforce la culture de la donnée au sein de l’administration, en suscitant des synergies avec les acteurs de la tech.

Vers l’acculturation de l’État plateforme

L’Administrateur général des données

En 2014, la France a créé la fonction d’administrateur général des données, chargé de coordonner l’action des administrations en matière d’inventaire, de gouvernance, de production, de circulation et d’exploitation des données de l’administration. Il organise la meilleure exploitation des données et leur plus large circulation, notamment aux fins d’évaluation des politiques publiques, d’amélioration et de transparence de l’action publique et de stimulation de la recherche et de l’innovation. Son rôle est aussi d’encourager l’emploi des datasciences au sein de l’administration. L’administrateur général des données peut s’appuyer sur les services de la mission Etalab et de la DINSIC, ainsi que sur le réseau des administrateurs ministériels des données nommés dans les différents ministères. L’administrateur général remet chaque année un rapport public sur son activité. Dans son rapport 2016–2017, intitulé La donnée comme infrastructure essentielle, l’administrateur général des données dresse l’état des lieux de la politique française des données et prône la création d’une infrastructure de la donnée.

Les startups d’État

« Vous vous reconnaissez dans le profil d’un agent public indigné par une situation irritante pour les usagers ? Vous avez une idée précise de la solution qui pourrait faire levier sur du numérique ? Vous êtes prêts à vous investir pour la mettre en oeuvre ? ». C’est ainsi que le site beta.gouv.fr invite n’importe quel agent public à se transformer en intrapreneur. Lancé en 2013, le programme des startups d’État permet d’accompagner les innovateurs internes à l’administration dans la réalisation de leur projet et de mettre en place des expérimentations en dehors des canons traditionnels de l’administration.

Une startup d’État est composée d’une équipe de deux à quatre personnes (un chef de produit et des développeurs), financée par une administration pour apporter une réponse à un problème identifié. Tout cela, « pour moins de 200 000 euros et en moins de six mois », selon Henri Verdier, l’ancien directeur de la DINSIC. Par exemple, le projet Mes-aides permet à tout usager de connaître les aides sociales auxquelles il a droit à partir d’un questionnaire en ligne. La plateforme Le Taxi permet de géolocaliser les taxis. L’API Particuliers met en oeuvre le principe du « Dites-le-nous une fois », en permettant aux acteurs publics de s’échanger les informations sur les usagers.

Les entrepreneurs d’intérêt général

Lancé en 2016, le programme « Entrepreneur.e d’Intérêt Général » vise à recruter des spécialistes du numérique pour répondre à des défis lancés par les ministères. Le principe est simple : une administration soumet un problème précis à des experts extérieurs à l’administration qui doivent lui apporter une réponse en dix mois. Le programme permet à l’administration de s’appuyer sur l’innovation ouverte en attirant à elle une communauté de développeurs et de data scientists appelée à travailler de concert avec les membres de l’administration.

Parallèlement, cette acculturation doit emprunter la voie du développement d’une expertise en traitement des données au sein même des administrations et du développement de programmes de régulation par la donnée. L’un des enjeux, déjà soulevé par Renaissance Numérique et la Fondation Jean Jaurès, tient toutefois à la difficulté pour l’administration de recruter des experts de la donnée, compte tenu de la rareté des data scientists sur le marché du travail, et du fait que les salaires dans la fonction publique ne sont pas en mesure de rivaliser avec ceux qui sont proposés à ces profils dans le secteur privé [94]. L’État et les collectivités territoriales doivent débloquer les ressources financières nécessaires au recrutement des data scientists qui appliqueront le traitement des données au service des politiques publiques.

La littératie des données doit permettre aux individus et aux organisations de la société civile de s’impliquer dans les débats de la société de l’information [95]. Sous l’angle du contrôle démocratique, l’ouverture des données publiques n’a d’ailleurs de sens que s’il existe des citoyens dotés des compétences adéquates pour s’en saisir. Dès l’école, il faudrait mettre en place des programmes d’apprentissage numérique pour que les élèves apprennent à analyser et à manipuler les données. Plus largement, les acteurs du secteur numérique, tout autant que de nombreux acteurs de l’enseignement, appellent de longue date à faire entrer le numérique dans le socle commun de compétences de l’ensemble des Français, via la généralisation de l’apprentissage des « Humanités numériques » tout au long de la scolarité des élèves, au même titre que le français ou les mathématiques [96].

Une politique volontariste pourrait s’atteler à lutter contre la fracture numérique et à faire émerger une strate d’acteurs intermédiaires dans la société civile (journalistes, associations, etc.) capables de s’emparer des données et de construire des analyses pour les restituer aux citoyens [97].

Certains considèrent qu’un des grands chantiers qui s’annoncent est celui de la restitution des données générées par les utilisateurs. Si le règlement général sur la protection des données pourrait représenter en cela un premier pas, en clarifiant les droits des utilisateurs et en introduisant un droit à la portabilité des données personnelles, ils considèrent que l’approche juridique doit être complétée par la promotion de technologies respectueuses de la vie privée et par l’amélioration de l’information sur le traitement des données et leur portabilité. Les initiatives destinées à permettre aux utilisateurs de devenir acteurs de leurs données personnelles se multiplient : Self Data en France, Midata en Angleterre, Smart Disclosure aux États-Unis, Cloud Personnel, Personal Data Store, Personal Information Management System (PIMS), etc. Il s’agit de rompre avec la logique dominante actuelle dans laquelle les utilisateurs produisent des données qui sont exploitées par d’autres acteurs, bien souvent en dehors de leur contrôle. Pour cela, il faut créer les outils qui permettent aux individus de récupérer la maîtrise de leurs données pour les utiliser à leurs propres fins.

Des appels au partage de données volontaires — données contributives — voient également le jour, à l’initiative de la société civile ou des pouvoirs publics, dans l’objectif de renforcer l’information de ces acteurs. Ces nouvelles formes de contribution à l’action publique participent du renouvellement de la relation des usagers-citoyens avec les institutions. Elles nous interrogent sur nos modes de gouvernance et la place que nous souhaitons confier à ces individus et acteurs, qui participent plus activement à la vie de la cité. Au-delà de la refonte du rapport démocratique, cette réflexion sur un rôle plus effectif dans la gouvernance permettrait aussi d’encourager ces nouvelles formes de contribution par une incitation plus grande.

Self Data, comment ça marche ?

Source : http://mesinfos.fing.org/selfdata-2/ (extraits)

D’après le Fing, le Self Data se définit comme : « la production, l’exploration et le partage de données personnelles par les individus, sous leur contrôle et à leurs propres fins ».

1. Un individu obtient ses données personnelles des organisations avec lesquelles il est en relation (aujourd’hui ces données sont dans les systèmes d’information des entreprises, difficilement obtenables par les individus) et en ajoute d’autres qu’il capte ou produit lui-même.

2. Il les stocke et les administre de manière sécurisée (par exemple à l’aide de PIMS — Personal Information Management Systems, comme les Cloud Personnels).

3. Et il les exploite à ses propres fins, à l’aide d’applications et de services tiers pour mieux se connaître, prendre de meilleures décisions, évaluer ses décisions passées, se faciliter la vie, etc.

[79] Renaissance Numérique, Démocratie : mise à jour. 13 propositions pour une version améliorée de l’État, sa posture et son équilibre démocratique, avril 2016.

[80] Voir la partie relative à l’Open Data dans le chapitre 2.

[81] Peugeot Valérie, « L’ouverture des données publiques : convergence ou malentendu ? », in (dir.) Stiegler Bernard, Confiance, croyance, crédit dans les mondes industriels, éditions FYP, 2011.

[82] Duchesne Claudine, Cytermann Laurent, Vachey et al., Rapport relatif aux données d’intérêt général, op. cit., p. 34.

[83] Colin Nicolas et Verdier Henri, L’âge de la multitude. Entreprendre et gouverner après la révolution numérique, Armand Colin, 2015.

[84] O’Reilly Tim, “Government as a Platform”, Innovations: Technology, Governance, Globalization, vol. 6, n° 1, pp. 13–40 ; PezziardiPierre et Verdier Henri, Des startups d’État à l’État plateforme, Fondation pour l’innovation politique, fondapol. org, janvier 2017.

[85] Bertholet Clément et Letourneau Laura, Ubérisons l’État avant que d’autres ne s’en chargent, Armand Colin, 2017.

[86] https://www.arcep.fr/la-regulation/grands-dossiers-thematiques-transverses/la-regulation-par-la-data.html

[87] Untersinger Martin, « Plus de 36 00 victimes de ‘cybermalveillance’ assistées par la plateforme de l’Etat », Le Monde, 25 janvier 2019. https://www.lemonde.fr/pixels/article/2019/01/25/plus-de-36-000-victimes-de-cybermalveillance-assistees-par-la-plate-forme-de-l-etat_5414462_4408996.html

[88] Administrateur général des données, La donnée comme infrastructure essentielle, rapport annuel 2016–2017.

[89] Floc’h Benoît, « Bercy mise sur les nouvelles technologies pour traquer les fraudeurs au fisc », Le Monde, 3 janvier 2019. https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/01/03/bercy-mise-sur-les-nouvelles-technologies-pour-traquer-les-fraudeurs-au-fisc_5404663_823448.html

[90] « Vous pouvez voir l’ère informatique partout, mais pas dans les statistiques de productivité. »

[91] OCDE, Science, Technology and Innovation, Policy Note on Data-Driven Innovation for Growth and Well-being, Édition OCDE, octobre 2015.

[92] Voir le chapitre sur les défis de la régulation des données.

[93] Le terme hackathon désigne un événement où des personnes se rassemblent pour faire de la programmation informatique collaborative, généralement sur plusieurs jours, autour d’une ou plusieurs problématiques.

[94] Renaissance Numérique et Fondation Jean Jaurès, Démocratie : le réenchantement numérique, Groupe de travail sur la citoyenneté numérique, 2017.

[95] CNNum, Neutralité des plateformes : Réunir les conditions d’un environnement numérique ouvert et soutenable, op. cit, p. 35.

[96] Syntec Numérique, Cahier de Campagne « Éducation et Formation », janvier 2017.

[97] Isaac Henri, « La donnée numérique, bien public ou instrument de profit », op. cit.

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