Censure, ou not censure?

Quand je pose la question, mes enfants disent non!

Pascal Kotté
DataGueule Suisse romande
11 min readSep 8, 2018

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Vive la liberté d’expression et de presse! Disent-ils…

Tant mieux… Je suis aussi pour la liberté de presse et de parole!

Image trouvée sur le net, oublié de noter ma source, search for it… On la changera s’il le faut!

Mais ce n’est pas si simple, et la censure est une nécessité!

Je suis modérateur bénévole sur le POD Diaspora de Suisse romande, www.Diasporing.ch. C’est un Facebook “libre”, sans pub, sans manipulations (gérée ni vendue par la plateforme, les manipulateurs peuvent y publier, mais seuls ses abonnés reçoivent), sans abus de tes données, avec une plateforme dont le programme est “open source”, donc transparent. Un POD est un nœud (Node), car le système Diaspora est inter-collaboratif, et en mode peer-to-peer (P2P, distribué entre plusieurs serveurs, indépendants, comme le Blockchain).

Sur Diaspora, issu d’un autre POD @thepirate.party Nathan nous partage une censure dont il a été victime par Facebook!

Et je ne l’avais pas censuré, mais ce node Diaspora a été arrêté :( Et oui distribué et libre ne veut pas dire résilient…

Voici le GIF posté par cet usager Facebook:

Bien entendu que ce GIF est un dégât d’image sur la personne de Joe Biden, lequel souhaite se présenter aux élections USA en 2020… Sortie de tout contexte, sans explications, la séquence peut le faire passer pour un pervers, et qu’il ne l’est peut-être, ou probablement, ou absolument, pas du tout!

A notre époque un Buzz négatif peut ruiner une carrière politique, ou faire perdre un job!

Est-ce normal? Et sous l’arbitrage de qui? Et le droit à l’oubli? Et à l’erreur?

Revenons à notre exemple de Joe Biden

Ce pseudo dégât d’image (sous réserve de l’associer à une histoire et un commentaire salace, bref, un potin), avec la publication de 4 personnes qui sont exposées, sans avoir probablement données leur autorisation. Sont-elles les quatre des personnalités publiques ne pouvant invoquer le droit à la vie privée? Comme l’est Joe Biden? Cette accusation implicite, brute, sans enquête, sans témoignages, est-elle recevable et devrions-nous la propager? Ou pas?

Et je vous rappelle, que de faire juste un ‘like’ est aussi un moyen de ‘propagation’!

Je parle “en votre âme et conscience”!

Je ne vous parle pas de “légalité”, car sans l’autorisation des personnes, c’est effectivement illégal selon le droit Suisse et Européen, et j’imagine US aussi.

Le droit est-il raisonnable? Je suis le premier à prôner la désobéissance civile quand le droit ne l’est plus, mais en général, on peut le supposer, chez nous!

La technologie n’est pas neutre, et les réseaux sociaux des supports de manipulations terriblement efficaces. Notre culture en est modifiée, notre relation à la presse, aux politiques, à l’information, à la vérité est bousculée.

Et même notre démocratie peut être en danger: http://whatsapp.kotte.net

Alors, faire circuler ce type de GIF sans savoir, ou un Fake-news non vérifié, est un acte citoyen qui n’est pas neutre. C’est un engagement, une dénonciation. Mais sans fondement assuré, sans vérifications, c’est un bruit de couloir, un potin de concierges de quartier! Alors pourquoi leur donnons-nous une telle importance? Pourquoi acceptons-nous des potins, comme des vérités et sommes persuadés que les Médias officielles ne nous montrent pas tout? Qu’ils nous cachent des choses!

Parce qu’il doit y avoir un peu, ou beaucoup parfois, de vrai, dans le fait :

  • Que le droit, va protéger aussi l’image des vrais prédateurs, tant qu’ils ne sont pas reconnus coupables. C’est désagréable, mais c’est aussi une nécessité pour mieux protéger les nombreux innocents.
  • Qu’un rédacteur en chef pourra difficilement déplaire à son actionnaire majoritaire, son employeur. Les médias se font racheter, pour un nombre de propriétaires limités à 3 ou 4 grands groupes pour la Suisse, ou bien est-il contrôlé plus ou moins directement par l’état? La concentration n’est pas compatible avec la Démocratie, et incohérente avec l’auto-régulation libérale du Capitalisme (“La main invisible”).

La diversité devient une façade, même les opérateurs Telecom sortent leurs propres marques concurrentes pour diversifier leurs marchés, sans perdre de clients, c’est plus simple… Telecom et capitalisme de compétition? Ou prestidigitations?

Toutefois, nous ne devrions jamais traiter une info d’un inconnu, de la même façon que celle d’un journaliste “patenté”! Ni dans nos propres histoires… Surtout quand les sources ne sont pas citées ni vérifiables.

Car c’est bien là que le bât blesse, le journaliste cherche la vérité (c’est le premier engagement de sa charte), pas nécessairement le Facebookeur, twitteur, ni le blogueur (sauf moi et bien d’autres, heureusement, mais dans la limite de nos capacités…)! De nombreux Youtubeurs, sans être journalistes, feront attention à leur réputation, et feront autant, sinon plus attention qu’un porteur de carte presse. Plusieurs afficheront les sources de référence. Mais pas tous…

Ne pas prendre les partages de Facebook comme des informations crédibles, est une évidence et tout le monde le répète. Mais cela ne les arrête pas, visiblement… Car c’est aussi un support pour véhiculer de la vraie information. D’une certaine façon, la technologie est aussi, neutre, elle véhiculera les deux! Le Vrai, le Faux…

Et la censure alors?

J’ai pu visionner ce documentaire, passé sur Arte, “Les nettoyeurs du Web”: Enrichissant de mises en perspectives… Poignant aussi!

Accès limité dans le temps au 15 septembre...

Voici mon avis sur la censure, posté sur Diaspora:

Je suis (co)modérateur sur www.Diasporing.ch, à part une fois (en 3 mois), pas de cleaning nécessaire. Les usagers jouent bien le jeux et ils ajoutent d’eux-même le #NSFW pour limiter la “censure”…

Il faut reconnaître, que de visionner une fois les #NSFW, m’a dégoutté de ne plus jamais y retourner! Ce premier filtrage est bien là, activé par défaut, nécessaire, y compris sur un truc libre comme Diaspora, car le pire côtoie le meilleur!

Toutefois, même si moins exposé à l’Auto-régulation, un #NSFW peut aussi être ‘signalé’ sur Diasporing: De la même façon que tous les commentaires et ‘post’.

Chaque commentaire peut être signalé, et la publication elle-même. Les modérateurs sont alors alertés!

Nous ne pourrons pas, et je me refuse personnellement à contrôler les contenus #NSFW, trop traumatisant. Mais si quelqu’un signale un contenu inacceptable (Pédophilie par exemple, mais pas que…) nous pourrons alors intervenir.

Mais je m’interroge

  • Dois-je supprimer et détruire immédiatement, ce qui est notre seul “pouvoir” dans cet outil libre?
  • Ou bien dois-je éviter de supprimer la preuve, voir, suis-je interdit de la supprimer cette preuve, dois-je légalement dénoncer à la Police? (www.cybercrime.ch)

Sachant que l’identification de la personne ayant publié est difficile, voir impossible, car la plate-forme devenant GDPR (Loi de la protection des données en Europe), c’est anonymisé. Nous avons toutefois le pseudo du publicateur clairement visible (guère utile), et pourrions identifier peut-être le pays de sa connexion (mais par rebond, cela peut ne pas être sa vraie résidence), et plus de la moitié ne sont pas en Suisse…

C’est un acte volontaire, d’offrir aux citoyens d’autres nations, moins libres, un espace d’expression, de partages et d’échanges dans un territoire exemplaire!

Mais c’est donc aussi ouvert aux cyberdélinquants, ou aux cyber-abusants (Fake-news, campagne marketing, etc…)

Alors à part le bannir et supprimer les contenus, que faire?

L’Internet n’est pas compatible avec une jurisprudence morcelée par “nations”. Nous avons besoin d’une police de l’Internet sous gouvernance internationale, avec un contrôle public et un consensus planétaire, au moins avec les états relativement démocratiques, incluant une liberté de presse significative. Ils ne sont pas si nombreux…

Car même si je milite en faveur de la neutralité du Net

Cela ne veut pas dire que nous devons en faire un espace de “non-droit”!

A quand une fondation internationale d’intérêt public financée par le public et les états pour une surveillance bienveillante mais facilité du Net?

Avec des systèmes de contrôles et des “intercepteurs” de données, intégrés par défaut chez les cablo-opérateurs, sous contrôles publics, et non par des organismes aussi opaques que la NSA! Pour une cyberdéfense planétaire.

Filtrer des réseaux sociaux qui pourront enfin, ouvrir des API d’utilité publique, pour relayer vers un organisme central, en mode économique car collectif, des publications dénoncées.

Puis de récompenser (ranking?) les “bons” alerteurs, et informer les “mauvais” (sans pénaliser), afin de créer une culture globale pour un Internet au service de l’humanité, et non au service des revenus des multinationales, des cybercriminels, des dictatures, ou des nations abusives…

Mais aussi pour assurer un relais aux ONG et organismes spécialisés, des témoignages choquants, à des spécialistes formés et psychologiquement accompagnés, et qui ne se contenteront pas de “supprimer”, comme les censeurs philippins actuels du Web! Ce qui est une aberration, de la suppression de “preuves”!

Il nous faut aménager des espaces de témoignages et dénonciations, pénibles et difficiles, pour les experts journalistes, et ONG engagés dans la chasse à ces excès. Nous devons faciliter la mise en poursuite des crimes de guerres, ou de maltraitances par des dictatures, sans passer par des intermédiaires politisés.

Rien n’empêcherait cet organisme nécessairement décentralisé, d’embaucher aussi ces mêmes curateurs philippins (cf. “Les nettoyeurs du web”), mais cette fois, en cadrant mieux l’accompagnement psychologique, et en évitant les dérives spéculatives de nos entreprises gouvernées par le rendement, et non par l’intérêt public.

Je ne comprends pas que Google, Facebook et Twitter, ne proposent pas au sénat américain de fournir les API (portes d’accès informatiques) pour livrer les dénonciations, ou détections d’abus, en exigeant à ces sénateurs, de bien vouloir assurer l’arbitrage et la police nécessaire, sur ces contenus. Car ce n’est pas du ressort de ces entreprises de juger, ni de poursuivre les cyberdélinquants. C’est aberrant de le leur demander!

Est-ce normal que Twitter ou Facebook deviennent les “juges” de décider qui peut parler, et qui doit se taire?

Je n’aime pas, mais je comprends la nécessité de censure, tout en étant un grand défenseur de la Liberté de Presse, et de Paroles.

A chacun de se faire sa propre censure… Mais à la Société de condamner l’inacceptable, dans la culture du moment.

Notre Société du paraître, du marketing, du “présente bien”, se ment à elle-même! La réalité est toujours subjective et relative, mais la censure doit être très surveillée, pour être limitée.

Afin de se donner les moyens de regarder les choses “en face”…

Le danger pour nos pseudo-démocraties est d’accepter la censure implicite, discrète et bien plus insidieuse que celle des états: Celle des multinationales, elles-mêmes sous la pression publique et juridique de pays pseudo-démocratiques, et limites terroristes, comme les USA.

Après tout, faire sauter des bombes dans des pays sans y être en guerre, c’est du terrorisme, même si la bombe s’appelle un drone. Je ne juge pas si c’est bien ou mal, j’applique la signification du terrorisme.

Et si vous estimez que cela ne vous touche pas, et que vous n’êtes pas concernés, et bien, c’est une lourde erreur.

Pire que le bruit des bottes, est le silence des pantoufles!
Un témoignage intéressant, reproduit ici:
https://medium.com/datagueule/le-silence-des-pantoufles-1b9811990ca2

Mais dans tous les cas, nous sommes et devenons ce que nous visionnons, ce que nous lisons, ce que nous entendons. La perception de cette réalité subjective, peut donc être totalement programmée dans l’esprit humain!

Ainsi, le choix des images, livres, mentors et histoires, n’est pas neutre…

Qui est censé l’arbitrer?

Je suis modérateur modéré, mais au moins, je suis bénévole, moins biaisé?Non, car il est impossible d’être neutre! Cela n’existe pas…

Surtout quand le principal propriétaire du plus grand ‘data lake’ (lac de données) de personnes dans le monde, n’est visiblement pas un fervent supporter de libres démocraties:

Epilogue:

Ce GIF pas bien méchant!

Je vous confirme que le post (la publication) de ce GIF de Joe Biden, je ne l’ai pas censuré, même si je ne l’ai pas liké! Simplement car personne ne l’avait dénoncé, et que personnellement, je trouve aussi l’abus de censure détestable. Les actes de censures devraient être bien mieux traqués et traçables, et être justifiés. Donc je suis content d’avoir collaboré à permettre que Nathan puisse le repartager sur notre réseau social alternatif, libre! Il n’est pas bien méchant, ce GIF…

Diaspora, décentralisé!

Il faut comprendre que si j’avais censuré cela, le post n’aurait disparu que pour les 750 membres de Diasporing (en sept 2018), et c’est tout… C’est à la fois fantastique cette décentralisation, et cette autorité distribuée, et terrible. Mais quand nous signalons un contenu, à priori, le signalement est répété vers le pod émetteur… Enfin, je l’espère… Et les autres pods peuvent en recevoir le flag… Ou pas…

Je vais devoir escalader cette question à la communauté? Non, mauvaise approche! On pourra le tester nous-mêmes avec 2 autres pods... Quoique, finalement, une curation distribuée et adaptée aux sensibilités locales, ce n’est pas si mal, en fait! Pas si simple ;-)

Voir aussi

https://www.youtube.com/watch?v=XgoHS_cX2uc&list=PLtzmb84AoqRRFcoGQ5p7kqEVQ7deXfYuH

Proposition pour Lê:

Mettre en oeuvre des API pour assurer une mutualisation éthique de la curation de contenus: Et Mettre en bien commun des plateformes nationales (linguistiques et culturelles) en Open source et décentralisées, pour assurer le traitement des “posts” dénoncés ou détectés par les plateformes, qui soumettent alors leurs contenus à une autorité “externe”, sous financements participatifs par les états, les plateformes à proportions de leurs bénéfices (et donc offerte aux petites structures non profit), avec des API ouvertes qui permettent même à des particuliers de référence et de confiance de faire de la curation collective (un peu genre CaptainFact.io, mais sur les contenus moins “traumatisants”) en assurant le maintien des publications de caractères “complotistes” ou dés informatives, mais avec investigation des sources et références, origines pour tenter de remonter vers les “malveillants” et les manipulateurs. Quant aux contenus “violents, suicides en ligne, challenges nocifs ou dangereux, etc…” qu’ils soient redirigés sans tarder vers les organisations spécialisées, formées et adaptées, et “masqués” du public (temporairement, le temps de validations), pour permettre une éventuelle intervention urgente (acte possible de terrorisme, suicide, etc…). Idem pour la pédopornographie, ou esclavage humain, une redirection vers des espaces “ports de miels” spécialisés pour piéger leurs auteurs et contributeurs sont vivement souhaitables, au lieu de “bêtement supprimer”!

En aucun cas, la censure ne devrait être du ressort de multinationales, surtout si leur business model consiste à vendre de la manipulation massive!

Voir aussi

Tipeee Gate

Un bon exemple de situation où la demande même de censure hors du domaine juridique est une absurdité, dangereuse même.

Désolé à Monsieur Phi, DirtyBiology et StupidEconomy, mais je rejoins sa position. Voir aussi le témoignage de Psychodelik concernant l’impact sur la chaîne e-penser…

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Pascal Kotté
DataGueule Suisse romande

Réducteur de fractures numériques, éthicien digital, Suisse romande.