Le Kaléidographe | épisode #9
Je suis seule
Je me sens comme flottant hors de mon propre corps pendant que le banquier de mon époux m’explique qu’il va falloir que je gère certaines problématiques afférentes à son compte en banque. Je suis censée prendre des décisions annuelles sur plusieurs placements afin d’optimiser leur rendement mais cela ne me fait ni chaud, ni froid.
Je suis si seule. J’en suis à me demander si sa mort n’aurait pas été plus facile à gérer que cette absence si cruelle.
L’incertitude permanente, le déchirement d’être à la fois si proche de lui physiquement et si loin mentalement. Ne pas savoir si je suis à mi-distance, plus proche du bonheur, ou plus proche du malheur ultime. N’avoir que l’attente comme horizon. Même pas l’espoir, juste l’attente fade et longue.
Si au moins nous avions une famille unie et soudée pour traverser ce moment. Si seulement nous avions un foyer chaleureux dans lequel j’aurais pu trouver mon soutien, tout ceci aurai été plus facile à supporter. Plus doux à endurer.
Je me prends à nous imaginer avec une fille qui nous aimerait. Des relations simplement normales pour une famille banale. Une source de chaleur inextinguible pour nos coeurs. Et je commence à comprendre pourquoi les gens veulent si ardemment faire des enfants.
Mais il est un peu tard : je n’ai jamais voulu d’enfants et mon mari n’en a pas eu avant de me rencontrer non plus. Alors je reste seule dans mon enfer. Ai-je vraiment le choix ?
Pour aller plus loin…
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