Quel(s) futur(s) pour le Design Fiction ?

Design Friction
Design Friction
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13 min readOct 22, 2019

Un atelier pour imaginer les lendemains qui chantent et déchantent du Design Fiction, organisé à la Gaîté Lyrique dans le cadre du Design Fiction Club.

Pour plus de clarté, deux graphies du terme « design fiction » sont ici utilisées :
- Le Design Fiction (masculin, majuscules) fait référence à l‘approche.
- Une design fiction (féminin, minuscules) fait référence au produit (scénario, expérience) d‘une démarche de Design Fiction.

Un exercice d’introspéculation

Et si on passait le Design Fiction au crible de sa propre pratique ?
Cette idée fut le point de départ de l’une des sessions d’atelier que nous avons menée dans le cadre du Design Fiction Club. Une session un peu particulière, car s’adressant à un public déjà familier de la pratique en question, pour imaginer de quoi pourraient être faits les futurs plus ou moins souhaitables du Design Fiction.

Il nous a semblé important de chercher à éviter l’idéation de scénarios trop naïfs ou unidirectionnels, mais bien plutôt d’ouvrir un œil critique et des perspectives aussi bien sceptiques que pleines d’espoir. Le Design Fiction sera-t-il devenu Émancipateur ? Mercantile ? Manipulateur ? Rebelle ? Omniprésent ou disparu ? Ces axes d’évolution ont été présentés aux futur.es participant.es en amont de l’atelier, qui pouvaient voter pour ceux qu’ils souhaitaient voir retenus dans le cadre de l’exploration. À cette liste ouverte se sont aussi ajoutés leurs propositions : le Design Fiction Initiateur, Activiste, Politique et Révélateur.

Outillage : Lentilles de spéculation et arbres du futur

Dans le cadre de cette session résolument participative, nous avons développé un ensemble d’outils pour l’occasion : un jeu de lentilles de spéculation pour l’étape d’idéation et un système d’arbres à branches pour cartographier les contributions.

Parmi les axes d’évolution soumis au vote, trois ont été sélectionnés — le Design Fiction initiateur, le Design Fiction Émancipateur et le Design Fiction Manipulateur — qui sont devenus des lentilles de spéculation c’est-à-dire les prismes à travers lesquels observer la pratique pour en imaginer les futurs. Ceci a permis de cadrer l’idéation tout en stimulant la production de scénarios plus ou moins gris.

Afin d’enrichir les spéculations et approfondir les idées, nous avons choisi de mettre en place un format d’atelier inspiré du principe du world-café : les participant.es étaient invité.es à rédiger des fictions sur la base de celles construites par d’autres au tour précédent — chacun.e se déplaçant de table en table pour imaginer des scénarios à travers les différentes lentilles de spéculation.

À la fin d’un tour, les productions des participant.es étaient présentées au sein du groupe puis rassemblées sur un canevas “arbre du futur” permettant de visualiser l’ensemble de ces futurs possibles. En cas d’interconnexions entre leurs fictions (il pouvait s’agir d’une problématique, d’une tension, d’un espoir commun, etc.), celles-ci étaient disposées sur le canevas de manière à former une “branche”, mettant en exergue un fragment de futur commun.

Grandes tendances spéculatives

Grâce à ce système d’embranchements, nous avons pu distinguer des “tendances spéculatives” au sein des productions. Ci-dessous la synthèse de ces lignes communes envisagées pour les futurs du Design Fiction, par lentilles de spéculations utilisées.

Le Design Fiction Émancipateur

Le Design Fiction devenu outil accessible d’émancipation pour le peuple
Une pratique fortement implantée dans la vie politique et citoyenne, permettant la prise de décisions collectives adaptées aux besoins des populations et à leur expression. Qu’il soit devenu une étape centrale des cycles de débats nationaux, la première étape de la concertation pour des problématiques ultra-locales ou même un parti politique financé par crowdfunding, le Design Fiction oeuvre pour et par l’émancipation des populations.

Rebondissant sur ces visions positives, l’un des scénarios l’imagine en tant qu’outil politique de domination : employant le Design Fiction pour anticiper les tentatives émancipatrices des peuples, la classe politique peut les déjouer en pavant la route de déviations toutes tracées.

Quid des populations oppressées ou emprisonnées ? L’une des fictions, ouvertement dystopique, imagine que le Design Fiction est devenu un outil décisionnel pour sélectionner les détenus aptes à sortir de prison. Charge au détenu de se projeter par la fiction dans la société de demain et de designer son rôle fictif dans le monde libre pour tenter de convaincre un jury de l’utilité de sa libération.

Le Design Fiction devenu matière pédagogique
Une matière enseignée à l’école pour nourrir son esprit critique ou imaginer ensemble des futurs collectifs, une formation accessible dans des centres pour imaginer son futur professionnel, un processus pour “réincarner sa vie de son vivant” en “vivant sa vie pour de faux pour choisir comment on veut vivre pour de vrai”,… le Design Fiction est devenu un enseignement et un guide aussi bien pour le collectif que pour l’individu.

L’une des fictions, plus grinçantes que les autres, présente le Design Fiction comme une discipline imposée au baccalauréat, mais permettant dans le même temps de constater l’inutilité future de l’examen lui-même.

Le Design Fiction devenu méthode thérapeutique
Une méthode thérapeutique pour soigner sa dépression en vivant dans des réalités fantasmées, ou pour faire face à ses anxiétés en se projetant dans ses futurs proches sous la houlette de conseillers-thérapeutes-designers, un outil pour s’émanciper de ses fantasmes liés aux plaisirs charnels et renouveler ses imaginaires sexuels, et (scénario rebond), limiter les dissidences sexuelles liées aux pulsions refoulées en les débridant grâce à des dispositifs immersifs permettant de se projeter dans ses propres fictions.

L’un des scénarios pousse la dimension artisanale et de “création manuelle” du Design Fiction et l’imagine présent dans des fablabs où les makers invitent à produire des objets du quotidien qui “libèrent l’esprit” par le faire, “émancipateurs d’un monde trop technologique”.

Le Design Fiction Initiateur

Le Design Fiction devenu initiateur de changement sociétal en figurant les impensés
L’un des moyens utilisés pour se figurer l’infigurable et stimuler le changement, dans un “aller-retour entre la fiction et les constructions sociales et politiques”.
Mais c’est aussi un mode d’influence, de “propagande fictionnelle” incitant à faire adopter une idée par la fiction. C’est aussi une approche qui “sort de sa sphère purement spéculative” pour faire naître de “véritables” nouveaux produits ou services — comme la “brosse à dents pour poules” — dans un monde où des “usines à projets” conçoivent des objets pour faire face aux mutations génétiques animales.

Le Design Fiction devenu outil stratégique en entreprise
Méthodologie pour convaincre les comités exécutifs de repenser la stratégie de l’entreprise dans un contexte de transformation, label de sélection sur les marchés, obligation de mise en débat des responsabilités de l’entreprise, ou encore modalité d’entretien d’embauche pour évaluer la compatibilité d’une recrue potentielle avec ses futurs collègues en la faisant se projeter dans des scénarios construits par ces derniers… dans ce futur proche le Design Fiction s’est installé en entreprise pour le meilleur et pour le pire.

Le meilleur, comme dans ce scénario où une loi impose aux entreprises de fournir des directions idéales pour leur activité en projetant leur entreprise dans un futur à 5 ans, 10 ans et 100 ans, avant de faire étudier ces orientations par un collectif de citoyen qui se prononce sur le cap à suivre.

Le pire, comme dans ce scénario où Renault, influencée par l’entreprise de Design Fiction Nextivy, décide d’abandonner la conception de voiture à roues pour se focaliser sur les véhicules à chenilles en raison des spéculations de recrudescence de catastrophes naturelles et finit par faire faillite, investie dans un futur qui ne se produit jamais.

Le Design Fiction acteur pour l’urgence écologique
Que serait la vie “d’après” une réelle transition écologique ? Les clés sont données à des écrivains de SF, des concepteurs de jeux et des designers de fiction pour surprendre, permettre l’imagination collective, passer par la fiction et en revenir. Dans cette autre fiction, une communauté d’anciens designers diffuse ses tactiques de survie pour reconstruire un monde solidaire et vertueux, quand le Design Fiction est enseigné à l’école buissonnière pour distiller des nouveaux imaginaires. Ou encore : le designer fiction s’engage dans la lutte pour l’antispécisme et organise des meetings pour initier les populations.

Le Design Fiction Manipulateur

Le Design Fiction devenu une arme de propagande politique
À travers cette lentille de spéculation plus frontalement critique que les autres, les futurs apparaissent bien sombres. On utilise le Design Fiction comme un outil de persuasion de programmes politiques et on discrédite telle ou telle idée en l’incarnant dans des fictions négatives, on projette les électeurs dans les futurs portés par les politiciens avant les campagnes électorales — et ceux ayant accès aux meilleurs bureaux d’études et aux meilleurs modélisateurs ont évidemment plus de chances de réussir.

L’un des scénarios va jusqu’à imaginer la formation de trois partis politiques organisés selon des “orientations politico-fictionnelles”“Socialiste Fiction, Fiction Républicains, Fiction Centre” — qui segmentent les citoyens en fonction de leur adhésion aux scénarios pour le futur du pays.

Le Design Fiction devenu annihilateur du libre arbitre
Ici le Design Fiction se fait produit marketing puisqu’on utilise des fictions qui tendent à convaincre les gens d’acheter tel ou tel produit ou service, ou carrément on contrôle les flux de la société en écrivant pour chacun.e des design fictions qui guident sa vie personnelle. Ou : dans une “auto-manipulation” permanente, le Design Fiction permet à l’individu de s’imaginer au futur proche et d’orienter ses choix, “comme un psychologue en temps réel”.

Dans une autre fiction, le Design Fiction prend les enfants pour cible afin de propager des imaginaires variés à travers les dessins animés, l’école, les jouets, dans le but de développer leur esprit critique et en faire des esprits éveillés et créatifs.

Le Design Fiction devenu champ de bataille des imaginaires
“La Bataille des imaginaires fait rage”. Le Design Fiction est l’arme de manipulation des imaginaires, employé aussi bien par les défenseurs du “tout technologique” que par les militants de la décroissance. L’atout de cette méthode : “toucher les cordes sensibles”.

Dans cet autre futur proche, l’université d’Assas décide d’ouvrir une nouvelle spécialisation en deuxième année de master, le “Droit des imaginaires”, avec pour objectifs de “fermer les futurs”. Rebondissant sur cette fiction, un scénario imagine qu’à présent les imaginaires ont “le devoir de nous projeter”, par le Design Fiction, sous peine d’être interdits.

Points de critiques décelés

Il nous a semblé intéressant de lister les points de critique ou de crainte qui ont été adressés au Design Fiction en tant que pratique à travers l’ensemble des productions de manière plus ou moins directe :

  • Le Design Fiction, massivement répandu et accessible à tous, permet de s’émanciper des designers.
  • Tous égaux dans notre capacité de projection ? Quelle pénalisation pour ceux qui se projettent le moins aisément dans les futurs ?
  • Qui finance le Design Fiction ?
  • Le Design Fiction, une illusion qui enferme dans des réalités fantasmées.
  • Tant qu’on aura besoin du Design Fiction, c’est qu’il existe une marge d’amélioration de la société.
  • Le Design Fiction dans un flou assumé et dangereux entre faits et fake news.
  • Et si le Design Fiction devenait un réflexe pas toujours bienvenu ?
  • Le Design Fiction risque de devenir un outil marketing.
  • Le Design Fiction est une arme de manipulation. Constructrices d’imaginaires positifs ou négatifs, les design fictions peuvent servir le développement de l’écologie politique comme de permettre aux populismes d’accéder au pouvoir.
  • La puissance d’une design fiction est conditionnée par les moyens financiers mis en oeuvre pour la concevoir.
  • Le Design Fiction permet de dissimuler les véritables problèmes. On fait croire au changement futur pour ne rien faire au présent.

Zoom sur les productions de l’atelier

Trois exemples de scénarios

Nous avons sélectionnés trois scénarios, un par lentille de spéculation, parmi la soixantaine de fictions produites :

Le Design Fiction “Émancipateur”
Dans ce futur proche, le Design Fiction permet un meilleur débat démocratique en proposant des fictions de leaders avant les élections ; les candidats réels sont en compétition face à des candidats fictionnels co-construits par les citoyens. Si aucun candidat réel ne remporte l’élection, le candidat fictionnel se transforme en nouvelle constitution (Le Grand Candidat National). Émancipation citoyenne par la fiction.

Le Design Fiction “Initiateur”
Dans ce futur proche, le Design Fiction est devenu un mode de formation aux futurs métiers inexistants par la sauvegarde de l’environnement par rapport aux changements climatiques. Le Design Fiction va créer une plateforme initiatrice au mouvement écologiste, comme un Pôle Emploi mais uniquement dans la sauvegarde de l’environnement. M. X étudiant en droit n’a aucune formation, ni connaissances dans l’écologie, pourtant il est défenseur fervent de ce mouvement. Cette plateforme ne nécessitant aucun diplôme lui permettra de poursuivre et de trouver un métier dans cette voie. L’écologie qui devient un enjeu majeur a besoin de métiers spéciaux à son égard.

Le Design Fiction “Manipulateur”
À l’approche des élections présidentielles de 2022, les médias sont omniprésents dans la sphère politique et sociale. Les journalistes sont débordés et croulent sous l’information, ou plutôt la désinformation. La lutte et la chasse aux fake news sont devenues vaines depuis que le Design Fiction s’est étendu à la politique. Les partis politiques s’en sont emparés comme outil de “propagande” politique pour construire des informations et projections fictives de la France. Fictions souhaitées, véridiques ou factices, utopiques ou dystopiques, souhaitées ou craintes. Peu importe, elles sont toutes diffusées, partagées en masse. Les journalistes ne savent et ne peuvent plus trier… Ils ne s’en préoccupent même plus, car tant le milieu politique leur donne à manger 24/24. Le Design Fiction est devenu l’outil n°1 de manipulation politique toute l’année et durant tout le mandat dont l’objectif ultime, tous partis compris, est l’incitation au vote. Le programme politique s’incarne maintenant par des fictions sous différentes formes (storyboard, BD, série, web série, roman, etc.). Les citoyens n’ont plus les billes suffisantes pour juger… Ils plongent dans les fictions et se laissent embarquer… ou pas !

Constructeurs d’imaginaires positifs ou négatifs qui peuvent servir le développement de l’écologie politique comme de permettre aux populismes d’accéder au pouvoir.

Inventaire à la Prévert des éléments stimulateurs d’imaginaires forts

Plusieurs éléments des fictions, parfois simplement par les tournures et les mots employés, nous ont semblé propices à l’éveil d’imaginaires forts ou alternatifs. En toute subjectivité assumée, en voici l’inventaire à la Prévert :

“Les États organisent des “appels à fiction” qui sont intégrés dans les débats nationaux”, “le Design Fiction est devenu un hymne”, “création d’un Ministère du Plaisir Émancipé”, “le Design Fiction est un indicateur de la marge d’amélioration dans la société”, “des chamans font appel à l’imagination collective. Ensemble, sous des tentes enfumées, ils imaginent leur nouveau modèle sociétal. Ils l’ont oublié, mais c’est du Design Fiction. Après débats et contradictions, chaque mini-société dicte ses “non-lois”, qui la différencie des autres.”, “ le Design Fiction est devenu un laboratoire expérimental et on y teste les possibilités uniquement pour savoir si c’est possible, sans aucun sens ni aucune finalité.”, “le Design Fiction fait émerger des objets purement émotionnels d’un monde post-effondrement : à quoi ressemble le doudou d’un enfant post-effondrement ?”, “le Design Fiction est devenu un initiateur de conflits”, “le Design Fiction est devenu un réflexe”, “le Design Fiction est un produit de “non-designers” à l’adresse de tous”, “demain mon objectif est de devenir le héros que je souhaite être (autofiction)”, “le Design Fiction libère l’humain de son libre arbitre”, “la manette géante du gouvernement”, “effacer jusqu’à la moindre trace de technique de tous les objets de design”.

Design Thinktion : le Design Fiction devenu objet mercantile

Nous nous sommes nous-mêmes frottés à l’exercice et avons imaginé une design fiction incarnant la dérive d’une pratique qui serait devenue mercantile.

Dans ce futur proche peu réjouissant, le Design Fiction est devenu “Design Thinktion” suite à un mariage de déraison avec la méthode du Design Thinking dans ses dimensions les plus critiquables. Une offre soigneusement packagée, qui comprend plusieurs produits comme : le kit de Design fiction-washing, le Bruce-Sterlingator et le Design Fiction Sprint. Une design fiction acide et humoristique qui fait écho à une crainte et un risque de dévoiement aujourd’hui bien réels.

Découvrez le pitch-deck disruptif du Design Thinktion :

Retours d’expérience et bilan

Cette session s’est révélée particulièrement audacieuse dans le fait d’y enjoindre la contribution d’un public “entre deux eaux” : non-expert du Design fiction tout en étant déjà familier de cette notion. La compréhension parfois floue de la posture et de l’objectif du Design Fiction a pu donner lieu à quelques fictions donnant dans le hors sujet, mais également à d’autres, intéressantes de par ce décalage avec la réalité des choses. C’était aussi l’occasion de prendre la température quant à la perception grand public d’une pratique encore émergente sur le territoire français.

Il a été intéressant de constater les associations d’idées les plus immédiates en fonction des lentilles de spéculations présentées, fruit des imaginaires et des réflexes de pensée communs. Ainsi l’adjectif “émancipateur” a très souvent été interprété par les participant.es comme attribut de l’émancipation politico-sociale des populations ; “initiateur” comme le moteur du changement face à l’urgence écologique ; “manipulateur” dans le champ de la politique.

Nous retenons par ailleurs une utilisation réussie de l’outil de cartographie qui permet de mettre en exergue les chevauchements des fictions, mais le temps manquait pour débriefer chaque scénario et noter les interconnexions et donc les classifier sur le vif. Le processus itératif de construction d’un scénario en partant du contexte d’un scénario précédent a quant à lui moyennement pris, les participant.es préférant le plus souvent imaginer leurs propres fictions sans base préalable.

Retrouvez en ligne la retranscription de l’ensemble des scénarios imaginés par les participant.es en brut.

Un grand merci à tous les participant.es de l’atelier pour leur réflexion et leur enthousiasme !

Cette session est soutenue par la Gaité-Lyrique, dans le cadre des rendez-vous du Design Fiction Club. Le Design Fiction Club est le rendez-vous mensuel de la Gaîté Lyrique proposé par Max Mollon et ses invité.e.s pour se rassembler, découvrir, penser et pratiquer le Design Fiction. Consulter les séances mensuelles en vidéo sur designfictionclub.com

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A humble design practice producing speculative and critical scenarios for the upcoming presents. We deconstruct realities to build new perspectives.