L’artisanat : un retour vers l’authenticité

edeni
edeni stories
Published in
5 min readJul 30, 2020

Dans une société moderne où la production matérielle est de plus en plus standardisée, les notions de savoir-faire, de qualité et d’authenticité tendent à refaire surface. Désireux de consommer autrement, les individus délaissent chaque jour un peu plus la grand distribution au profit des petits artisans. Représentant aujourd’hui un tiers des créations annuelles d’entreprises, l’artisanat séduit un grand nombre de professionnels en quête de sens. Mais comment expliquer ce retour en force des métiers de l’artisanat ?

Envie d’avoir plus de contenus ? Inscrivez-vous à notre newsletter !

L’entreprise traditionnelle ne plait plus aux jeunes

Dans une société minée par le burn-out et l’ennui au travail, nombre de travailleurs ont l’impression d’occuper des emplois vides de sens, superflus et sans intérêt. L’anthropologue américain David Greberg a théorisé ce constat sous le nom de bullshit jobs : tous ces métiers où, une fois rentré∙e∙s du travail le soir, on ne sait pas concrètement ce que l’on a fait de notre journée.

La jeune génération fait face à une réelle crise de la vocation au travail. En effet, le taux de satisfaction au travail atteint aujourd’hui 64% chez les moins de 35 ans contre 80% en moyenne pour les autres générations. Ils sont également 82% à considérer qu’il est difficile de réussir sa vie professionnelle et seuls 58% d’entre eux se disent optimistes quant à leur avenir professionnel.

Face à ce mal-être et cet excès d’abstraction des métiers de bureaux, une vague de jeunes actifs se réorientent vers les métiers manuels, souvent jusqu’ici dévalorisés. Parfois dégoûtés par leur ancien métier, certains ont décidé de devenir boulanger∙e, fleuriste, fromager∙e d’autres brasseur∙se, ébéniste ou couturier∙e. L’artisanat exerce une véritable fascination sur la jeune génération car il demande un réel savoir-faire et est généralement synonyme de passion.

Aujourd’hui, un∙e nouvel∙le artisan commerçant∙e sur quatre est diplômé∙e de l’enseignement supérieur, et un sur dix affiche un bac + 5 au compteur. Il y a trente ans si un∙e étudiant∙e de grande école avait annoncé qu’il∙elle se lançait dans la création de bijoux, la fabrication de bière ou qu’il ouvrait une épicerie ou encore un foodtruck, ses camarades de promo lui auraient probablement ri au nez. Aujourd’hui, la tendance s’est inversée et travailler de ses mains n’est plus destiné aux mauvais élèves. Les reconversions sont désormais sujet à l’admiration et non plus au jugement.

Donner du sens à son travail : voilà pourquoi ils∙elles sont de plus en plus à se tourner vers l’artisanat. En quête de plaisir, de ressenti, d’échanges avec les autres, ils∙elles trouvent en lui une raison de se lever le matin.

Source : Le Télégramme “Stéphanie Odic. Paysanne, boulangère et fière”

Les métiers de l’artisanat ont du sens

Pointés du doigt à une époque, les métiers manuelles gagnent en popularité. Le retour à l’artisanat est le symbole du retour à certaines valeurs comme le désir du travail bien fait, la proximité et la durabilité des produits.

Après des décennies marquées par l’automatisation intense, la standardisation et l’hyper digitalisation des services, les néo-artisans remettent l’humain au cœur de leurs aspirations. En promouvant les créations artisanales, la société rend à la compétence humaine son caractère unique et irremplaçable. Utiliser ses mains pour travailler la matière, c’est aussi inscrire ses activités dans le territoire en tenant compte de la provenance et de la qualité de ses produits, en sélectionnant ses fournisseurs et en créant un lien fort avec ses clients.

Notre époque de surexposition aux écrans serait donc celle qui remettrait le rapport à la matière sur le devant de la scène.

Source : 3 brasseurs

L’artisanat répond aux nouvelles attentes de consommation

Le nouvel artisanat essaie de suivre une logique responsable et innovante : matières premières bio, éthiques et durables, suivi de la traçabilité des produits, transparence, fournisseurs payés au juste prix. Les nouveaux venus sur le marché tendent à redynamiser ce secteur en répondant aux valeurs de consommation actuelles.

Notre manière de consommer évolue et les gens cherchent davantage à acheter des produits locaux, authentiques, originaux et non plus des produits industriels formatés et aseptisés. Les imperfections, les irrégularités sont devenues gage de qualité.

Les consommateurs sont davantage prêts à mettre le prix pour ce genre de produits et services. Tellement habitués à pouvoir tout obtenir à très bas prix, nous comprenons aujourd’hui que nous avions perdus le sens de ce qui a vraiment de la valeur.

L’explosion des micro-brasseries, la recrudescence du métier de boucher∙e, la croissance continue du nombre de cavistes, mais également l’explosion du fait maison… sont des indicateurs qui montrent que le savoir-faire de l’individu passe avant celui de la marque.

Source : Made in Marseille

Une visibilité accrue

Vendre ses produits et services lorsque l’on est artisan peu s’avérer plus simple qu’auparavant.

Les artisans d’aujourd’hui ont à la fois le savoir-faire et le faire-savoir. Ils maîtrisent les règles de la communication 2.0 en accordant une grande attention à être présent sur internet, ce qui leur permet d’accroître leur visibilité.

Pour les créateurs par exemple, des plateformes telle que Etsy se sont démocratisées et permettent à chaque artiste de commercialiser ses produits faits main. Désormais le fabricant de céramique de Haute-Savoie a potentiellement des centaines de clients seulement grâce à sa connexion internet.

Les métiers manuels reviennent donc en force et gagnent en valorisation face aux métiers de bureaux. On assiste au retour, dans les centres villes, d’épiceries de quartier et d’ateliers de création , tandis que le modèle des grands centres commerciaux est, quant à lui, plutôt sur le déclin. Loin d’être facile : activité fluctuante, concurrence importante, difficulté à se faire une clientèle … l’artisanat séduit et devrait se démocratiser davantage à l’avenir.

Sources :

--

--