Petites questions à… Lily Haime

Elodie Baslé
Milady
Published in
7 min readJun 17, 2018

Le jour où Lily Haime a découvert la Nouvelle-Calédonie lors d’un séjour avec son homme, elle a eu le coup de foudre. C’est là qu’elle a donné naissance à son fils, et ils n’en sont jamais repartis. Lily aime vivre pieds nus sur son île, croiser le vieux bonhomme qui sert de perchoir à mouettes à Nouméa, chanter Saturday Night Fever à son fils quand il pleure, profiter des gens qu’elle aime et, bien sûr, tout ce qui a trait aux mots. Car Lily a grandi au milieu des livres, et l’écriture est pour elle une inépuisable source de liberté. Les personnages qui prennent vie sous sa plume sont toujours touchants et justes, et une chose est sûre, Gabriel et Vicky de Wild Heart resteront dans votre cœur et vos pensées bien après la dernière page tournée…

Pourquoi vous être intéressée à l’univers de la secte, et comment vous êtes vous renseignée pour écrire « Ainsi battent les cœurs amoureux » ?

Je me souviens d’avoir entendu une conversation, enfant, et de ne pas avoir tout compris à l’époque. Plus tard, je me suis rendu compte que je ne comprenais toujours pas. Être croyant, avoir la Foi, ce n’est pas sectaire.

J’ai toujours mis bien haut la différence entre religion et secte. Certains diront qu’il n’y en a pas tant que ça. Je l’ai cru aussi et c’était difficile pour moi, venant d’une famille très pratiquante, avec un frère qui est devenu prêtre.

Alors j’ai cherché, j’ai discuté, j’ai lu, je me suis documenté, pour essayer de découvrir où se situe la limite entre le culte et la secte. Je pense que je l’ai trouvé. J’en avais besoin. Pour moi-même d’abord et aussi, je crois, pour tous ces enfants que l’on contient dans des croyances trop extrêmes, les coupant du monde et de ses beautés et de ses imperfections. Bien sûr tout n’est pas idéal, bien sûr qu’il est important d’avoir des valeurs, bien sûr pour tout ça. Mais que ça n’empêche jamais personne de croire en Dieu, que ça n’empêche personne de ne croire en rien. Et surtout, que ça n’empêche personne de vivre en harmonie et dans le respect de l’autre.

Je crois en tout et en rien, je ne porte aucun jugement sur les valeurs et la religion de mes voisins, mais je continue de me battre et de le dire, pour tous les bouts d’hommes et les bouts de femmes, qui ne connaissent rien d’autre de ce monde que les paroles d’un seul homme. Vivre, c’est avant tout accepter que nous sommes tous différents et que c’est dans chacune de nos différences que nous nous épanouissons.

Avez-vous des petits rituels sans lesquels vous ne pouvez pas écrire ?

J’adore les cahiers. Autant, j’écris à l’ordinateur, autant, j’adore inscrire des notes, des bouts de phrases, des morceaux de ci et de ça, des informations, dans des cahiers. Originaux, classiques, grands, petits, un peu retro — j’ai une grande passion pour le rétro et le vintage — enfin… Les cahiers, c’est mon truc. Un, ou deux, voir trois, par histoires. J’en ai besoin pour démarrer. Et pour continuer.

Étiez-vous lectrice de M/M avant d’en écrire ? Et il y a t’il une différence d’approche en ce qui concerne l’écriture d’un M/M par rapport à un F/M ?

Je ne connaissais absolument pas le MM, lorsque j’ai écrit Mathias. Je n’avais aucune idée que c’était un genre et, de fait, je n’en lisais pas. J’ai commencé en lire bien après et, évidemment, ça m’a beaucoup plu. Même si, étrangement, ce n’est pas le genre que je lis le plus.

Je n’ai pas trouvé l’écriture du FM et du MM, très différente. Bien sûr, la dynamique n’est pas la même, mais elle est déjà différente d’une histoire MM à l’autre. Chaque personnage a son caractère et chaque histoire est singulière. Mais mon approche n’a pas changé parce que c’était un homme et une femme. Sans doute parce que pour moi, il n’y a pas de différence. Gay, Hétéro, Bi… Ça reste des couples, quoi qu’il en soit. Ça reste normal. Ça reste bien et beau. C’est tout ce qui compte.

Quels sont vos auteures et auteurs favoris ?

Diana Gabaldon, évidemment. Toujours.

Où trouvez-vous vos idées ?

Dans tout ce que je vois, dans toutes les conversations que l’on a entre amis, en famille, en regardant un film, en écoutant une musique, en rêvant, en traversant une place au pas de courses, en mangeant le nez en l’air, en buvant un verre dans un bar, en prenant le train, l’avion, en me trouvant coincer dans les embouteillages aux heures de pointe, en voyant l’affiche d’un concert, d’une exposition, d’une pièce de théâtre, en allant au musée, en croisant un mime au coin d’une rue… Les idées viennent comme des flash.

Au début, ce n’est qu’un fil et puis, petit à petit, le fil devient une toile et hop, tous mes personnages se retrouvent coincés dedans. Je tisse mes histoires. Parfois ça donne quelque chose, parfois rien du tout. Sur une dizaine d’idées, une seule aboutira. J’ai des centaines de débuts qui traînent dans mes fichiers. J’aime essayer. Mais je n’ai pas peur de m’arrêter à une centaine de pages et de recommencer autrement, ou d’abandonner parce que j’ai « perdu le fil », ou simplement de laisser de côté pour plus tard…

Vous inspirez-vous d’acteurs ou de personnages autres pour créer les vôtres, ou naissent-ils intégralement dans votre esprit ?

Ils sont dans ma tête, d’abord flous et de plus en plus en nets à mesure que je les imagine.

Quelle bande son conseillez-vous pour lire votre dernier livre ?

J’ai des playlists pour chaque histoire. Je peux vous donner quelques morceaux que j’ai écouté pendant que j’écrivais Ainsi Battent Les Cœurs Amoureux. Tous, ça prendra trop de temps, mais en voici un petit échantillon :

  • Human de Rag’n’Bone Man
  • Fountain de Demira
  • De l’Homme à l’Animal de Bessa
  • Wolves de August and After
  • Selene de Metaxas
  • Pay The Man de Foster The People
  • Weapon de Matthew Good
  • Pour être deux de Rose et Jean-Louis Murat
  • Disarm de The Civil Wars
  • Good Man de Josh Ritter
  • Tous les vieux morceaux de soul, jazz and blues : John Coltrane, Aretha Franklin, Marvin Gaye, Nina Simone, Otis Redding, Al Green, Etta James, etc…

Et tant d’autres…

Quel rapport entretenez-vous avec vos lecteur/lectrices ?

Évidemment, je réponds à toutes les questions que l’on me pose par MP, même si je mets du temps à le faire. J’ai toujours plaisir à parler avec eux, à lire leurs retours, à me rendre compte qu’ils ont ressentis autant d’émotions que moi, en écrivant. Mais j’aime aussi qu’ils se sentent libres de dire ce qu’ils veulent entre lecteurs, sans avoir peur que l’auteur — moi en l’occurrence — vienne leur expliquer qu’ils se trompent. Un ressenti n’est ni juste, ni faux, et c’est une des raisons pour lesquelles je suis discrète sur les réseaux sociaux. Parce que c’est mon caractère, évidemment.

Je suis sur Facebook, comme dans la vie… Mais aussi, parce que je pense qu’en tant qu’auteur, je livre une histoire, une part de moi. Mais la suite, ce que deviendra cette histoire, cette part de moi, ça appartient aux lecteurs et seulement à eux.

Quel est votre film favoris ?

Beaucoup trop difficile comme question. Je suis une très grande cinéphile et j’ai un amour inconditionnel pour les biopics. Donc c’est impossible de vous citer un seul film.

Quel est votre plaisir coupable ?

Quel est le plaisir coupable que je peux avouer, plutôt ? ;) Les cookies. Les cookies énormes de chez « La Mie Câline » Je dois me faire violence pour ne pas en acheter trois ou quatre, chaque fois que je passe devant.

Combien de langues parlez-vous ? Parce que vos personnages parlent toujours plus de langues dans vos romans ?

Je ne parle que le français, et très mal. J’écris mieux que je ne parle, je dis plein de gros mots, j’invente des mots et je bafouille. C’est pour ça qu’en principe j’évite de me montrer en public. D’où l’utilité des pseudonymes… Mais j’ai une tonne de dictionnaire. Du russe au japonais, en passant par le coréen, l’italien, l’arménien, l’espagnol, le portugais et j’en passe. C’est le grand drame de ma vie, de ne pas savoir parler toutes ces langues et je pense que c’est un rêve qui revient dans tous mes écrits. J’aime voyager, j’aime les langues étrangères, j’aime que mes personnages viennent de partout.

Préférez-vous écrire des romances historiques ou contemporaines ?

J’adore vraiment les deux !

Considérez-vous le fait d’écrire et publier du Slash comme militant ou engagé ?

Bien sûr. C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai commencé. Et que je continuerai encore longtemps.

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