#premiersInstants — Write on my skin de Gala de Spax

Elodie Baslé
Milady
Published in
9 min readFeb 20, 2018

Découvrez les premières pages du nouveau roman qui va vous enflammer.

Dans les #premiersInstants, on vous propose ni plus ni moins que de découvrir les premiers chapitres de nos histoires préférées. Comme ça, sans contreparties, juste pour vous faire plaisir. Bonne lecture !

CHAPITRE 1

Classé dans la liste : « Je n’ai pas apprécié ».
Évaluation : 0/10
Commentaire :
Nul, nul, nul. À part la couverture, tout est à jeter! Bref, n’acheter surtout pas se livre, si on peu réellement appeler se «truc» un livre. L’histoire n’est pas crédible, s’est mal écrit, vulgaire et, en plus, s’est bourré de fautes d’orthographe. L’auteur devrais pensée à se recycler dans autre chose.

Et voilà, point final. Envoyer.

Je l’ai bien cassée celle-là ! Je ne pense pas qu’elle s’amuse à écrire un autre bouquin avant longtemps.

Je ne supporte pas ces pseudo-auteurs qui surgissent d’un peu partout en ce moment. Avant, à la belle époque, les écrivains étaient des personnes de valeur, avec une éducation bien au-delà de la normale et un vocabulaire à faire pâlir un dictionnaire. De nos jours, avec l’arrivée de toutes ces petites maisons d’édition vénales, on voit pousser des champignons vénéneux à tous les coins de rue : « les nouveaux auteurs français ».

Beurk, rien que d’en parler, j’ai la nausée et des boutons me grattent de haut en bas. Ce terme rassemble en réalité toute la basse populace qui passe son temps à écrire parce qu’elle n’a rien d’autre à faire. Des mères au foyer, des chômeurs, des fainéants, des parasites de la société en veux-tu en voilà !

Ils se disent artistes… Ha ha ha, laissez-moi rire !

Ils pondent quelques pages avec l’orthographe d’un enfant de dix ans, gribouillent deux-trois idées sans véritable plan et tentent leur chance auprès d’entreprises véreuses qui ne pensent qu’à se faire du pognon sur le dos des lecteurs.

Et le pire, c’est que ça marche !

Certains ont même réussi à devenir des best-sellers et à adapter leur torchon au cinéma. Et comme si ça ne suffisait pas, ils développent leurs séries en dizaine de tomes, histoire de tirer sur la corde jusqu’à ce qu’elle casse. Tant qu’il y aura des imbéciles pour acheter leurs pitoyables histoires, ils ne vont pas se gêner. Après tout, pour eux, les lecteurs ne sont que des vaches à lait qu’ils traient jusqu’à la dernière goutte avant de s’enfuir sous les cocotiers pour profiter de leur magot.

Sales voleurs !

Mais, je ne risque pas de tomber dans le panneau. Je ne suis ni naïve ni stupide. Je ne compte pas engraisser leurs comptes en banque déjà bien pleins d’argent sale.

Avec deux copines, Alexandra et Lisa, nous tenons un site de partage d’ebooks, « Livragogo », afin que tout le monde puisse lire gracieusement. Ça, ce n’est ni vénal ni malsain !

Par les temps qui courent, les gens ont autre chose à acheter que des bouquins !

Bien sûr, on pourrait se rendre à la bibliothèque… mais c’est un peu has-been ce genre de lieu. Et puis, il faut sortir de la maison, prendre la voiture ou le bus, affronter l’air glacial de l’hiver ou la chaleur écrasante de l’été, côtoyer de vieilles personnes qui sentent la naphtaline ou des bambins aux relents de couche sale, honorer des délais pour rendre les livres et, comble de l’absurdité, il faut payer un abonnement pour ça !

Sur notre site, au moins, tout est gratuit et à portée de main! Pas de souscription à débourser, pas d’horaires à respecter, rien. En un simple clic, le bouquin est prêt à se faire dévorer !

Chacun peut s’inscrire facilement, prendre le livre numérique qu’il souhaite et le garder jusqu’à la fin de sa vie. Aucune bibliothécaire mal léchée n’ira appeler à la maison parce qu’on a dépassé la date de prêt d’une semaine.

En parallèle de ce site de partage, je tiens aussi un blog littéraire. C’est une sorte de journal intime où je donne mon avis sur les romans que je viens de lire. C’est passionnant, même si cela me demande un temps fou. J’y passe près de deux à trois heures par jour. Entre les lectures, la rédaction des billets et celle des commentaires sur les sites de vente en ligne, je perds une bonne partie de mes soirées, mais au moins, les choses sont bien faites. Je me dois d’être irréprochable, car je suis énor- mément suivie sur les réseaux sociaux. Rien que sur Facebook, je compte près de 2500 abonnés, et je ne parle pas de Twitter ou Instagram! Les gens adorent consulter mes pages, complètement passionnés par mes avis. D’ailleurs, nombre d’entre eux m’ont conseillé d’écrire un roman car j’avais, d’après leurs dires, une plume fluide, un sens aiguisé de la répartie et une imagination débordante.

Vraisemblablement, ce n’était pas l’avis des maisons d’édition !

J’ai écrit un petit bijou qui m’a demandé plus d’un an de travail, mais aucune d’entre elles n’a daigné y jeter un coup d’œil. Un scandale ! Apparemment, mon écrit ne rentrait pas dans leur… comment disent-elles déjà… ah oui, leur fameuse « ligne éditoriale ». Une bien belle formule pour résumer le fait qu’elles ne m’aiment pas et que je n’aurai jamais mes chances dans ce milieu. Dommage… pour elles !
Je leur apportais la gloire sur un plateau d’argent et elles ont préféré me rejeter, moi et mes milliers de fans ! C’est à croire qu’elles ont une prédilection pour publier des auteurs sans talent afin qu’on continue à leur frapper dessus. Après tout, elles sont peut-être sadomasos, parce qu’elles ont l’air d’aimer ça, la critique.
Du coup, je ne me gêne pas pour leur en servir à foison. Surtout les petites maisons d’édition d’ailleurs. Elles se vantent d’offrir leur chance à tous, alors qu’elles ne savent même pas repérer un diamant au milieu d’un tas de bouses bien fraîches.

Les grandes maisons ne sont pas en reste en matière d’hypocrisie. Savez-vous qu’il y a quelques années, des journalistes ont trouvé judicieux d’envoyer les chefs-d’œuvre de notre société aux grands manitous de l’édition, histoire de tester un peu leurs compétences en matière littéraire ? Seulement, au lieu d’y laisser les noms de Proust, Hugo, Rimbaud ou Maupassant, ils les rebaptisèrent par de vulgaires pseudonymes bien contemporains. Et, sans surprise, les manuscrits ont tous été refusés ! La pauvre Marguerite Duras a même été refoulée par son propre éditeur ! C’est dire ! Sans parler des nombreux prix Goncourt qui furent recalés les uns après les autres comme de simples lycéens larmoyants devant les résultats du bac.

En réalité, les bouquins publiés ne sont, pour la grande majorité, pas passés dans les mains de comités de lecture. Non, ceux qui atteignent le sommet de la hiérarchie sont écrits par des auteurs qui passent par la petite porte. Vous savez, celle du voisin de l’ami de mon père qui connaît bien la copine du coiffeur de l’écrivain. Voilà, vous commencez à saisir ?

La porte du piston, plus précisément, pour ceux qui n’arrivent pas à suivre. Sans parler des « fils de » ou des « neveux de » qui trônent parmi les astres. Et pour peu qu’ils cumulent les deux à la fois, alors là, c’est le best-seller assuré dans l’année !

Bref…
Parlons d’autre chose, car ces manigances me donnent de l’urticaire. Mon blog s’appelle « Hell of the authors », « L’Enfer des auteurs » en français. J’ai préféré le nommer en anglais, ça fait plus sérieux, plus moderne.

En fait, je déteste la langue française. Ou les auteurs français, plus précisément… Je préfère nettement lire des livres anglophones.

Aux États-Unis, au moins, ils ont le sens du détail, la mélodie des mots… et puis, c’est les States quoi, ça en jette bien plus que notre pauvre petit pays en perdition.

Ça fait quand même plus classe de dire « je viens de finir le dernier Stephen King, c’était so amazing ! » que de raconter qu’on a lu le dernier « Gertrude Delamiche qui a reçu le prix littéraire prout-prout décerné par une horde de vieux croûtons ».

Les Français ne savent pas nous vendre du rêve sur papier.

Quand une Américaine écrit un livre sentimental, on y croit tout de suite. On se téléporte dans son univers luxueux, se baladant toute frétillante dans les rues de New York avec notre milliardaire au bras et une paire de talons hauts hors de prix aux pieds.

Alors qu’en France… ça fait tout de même moins glamour, le bon vieux Robert qui nous accompagne dans les rues de Lille pour acheter une baguette de pain sous la pluie.

Ce n’est pas exotique pour un sou, rien que le prénom des person- nages me coupe toute envie de poursuivre la lecture.

Mais mes découvertes anglo-saxonnes, je les garde pour moi. Hors de question d’encenser des écrivains sur mon blog, je ne suis pas là pour ça. Moi, ce que j’aime, c’est casser du petit « Frenchy », comme on dit entre nous. Alors, je passe mon temps à lire des daubes francophones, histoire de m’amuser un peu. Quoi de mieux que les humilier en public, rabaisser leur bouse sur Facebook et dégoûter les autres d’acheter leur bouquin en les cassant sur Amazon, Booknode et bien d’autres défou- loirs numériques.

She-devil, c’est mon nom.
Une petite diablesse rouge, c’est mon avatar sur le Net.
Lorsque les auteurs apprennent que je me penche sur leur roman,

ils ne mangent plus, ne respirent plus et attendent le verdict en priant tous les dieux pour que je ne leur inflige pas le coup fatal.

Alexandra et Lisa tiennent, elles aussi, un blog littéraire et la com- pétition est rude entre nous. Celle de nous trois qui décourage le plus d’incompétents dans l’année remporte la palme d’or du mérite. Personne ne peut rivaliser avec notre équipe de choc.

Contrairement aux autres blogueurs, nous n’attendons rien des maisons d’édition puisque le site de partage nous fournit tout ce dont nous avons besoin pour pallier nos fringales de lecture. Je ne me sens pas redevable d’avoir reçu un exemplaire gratuit et je peux donc me laisser- aller à mes pulsions les plus sombres sans avoir peur d’être « punie de service presse » lors des prochaines parutions.

La liberté d’expression, il n’y a rien de tel !

Sauf, peut-être, lorsque les auteurs souhaitent, à leur tour, en béné- ficier…

Certains se permettent parfois de répondre à mes articles en laissant des commentaires désobligeants à mon égard, alors que je ne fais que dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas.

Les auteurs sont là pour écrire leur livre, pas pour se rebeller et encore moins pour donner leur avis !

Alors, ouste les aigris pleins de frics, encaissez sans broncher mes articles vipérins sinon vous allez connaître la sanction suprême : la rébellion des garces. C’est ainsi qu’on aime à se surnommer mes copines et moi. Quand l’une d’entre nous est attaquée par l’un de ces bourgeois cafardeux, on se ligue contre lui et on ne le lâche pas jusqu’à ce qu’il arrête l’écriture.

On a des moyens plutôt persuasifs quand on y met du nôtre. Nous en sommes déjà à cinq auteurs perdus. Pas mal pour trois ans de bons et loyaux services.

À ce rythme-là, nous aurons fini d’épurer le monde de l’édition de ces vermines en moins de temps qu’il ne faut pour le dire !

Poursuivez votre lecture en quelques secondes :

Retrouvez-nous très bientôt pour un nouvel article. N’hésitez pas à nous suivre pour ne rien rater des prochaines publications.

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