Potentialités des huiles essentielles de Madagascar

Maya Disraëli
Enabling Sustainability
3 min readJun 22, 2020
Champ de Ravintsara. Copyright : Les Litsées citronnées

Madagascar est associé au mot « diversité » en raison de sa diversité ethnique et sa diversité des biotopes de la faune et de la flore, toutes deux marquées par leur fort taux d’endémicité. En effet, parmi les 15 000 espèces de plantes se trouvant sur le territoire, 83% sont endémiques de Madagascar (Goodman et Benstead, 2005). En outre, 110 espèces aromatiques ont été recensées, comprenant 58 espèces autochtones dont 86% sont endémiques (Rakotovao et Randrianjohary, 1996). Cette richesse en plantes médicinales et aromatiques reflète la singularité de ce patrimoine naturel que l’aromathérapie valorise depuis quelques années.

Depuis des décennies, les remèdes traditionnels font partie intégrante de la culture malgache. Alors, dès l’annonce des premiers cas de coronavirus dans la grande île, les malgaches se sont rués sur les plantes médicinales traditionnelles pour éviter de contracter le virus. C’est devenu une bonne affaire pour les vendeurs de rue puisqu’auparavant, les tas de branche se vendaient à 1000 ariary (0,25 euro) et depuis le coronavirus, ils sont passés à 5000 ariary (1,25 euro). Ce sont surtout le ravintsara ou cinnamomum camphora (une espèce endémique de Madagascar), l’eucalyptus et l’eucalyptus blanc (« kininim-potsy ») qui sont utilisés pour faire des décoctions à boire et à inhaler le soir.

En outre, les recherches menées par l’Institut malgache de recherche appliquées (IMRA) et le Centre national de recherche en pharmacologie a abouti à l’élaboration du Covid-Organics, un remède traditionnel amélioré composé d’artemésia et d’autres plantes médicinales endémiques. L’artemésia annua a déjà fait l’objet d’une vingtaine d’études à Madagascar où elle a été introduite en 1975 par le Pr Albert Ratsimamanga pour lutter contre le paludisme. Cependant, l’absence des essais cliniques rigoureux a provoqué des controverses. Néanmoins, 105 sur 171 cas ont été guéris majoritairement par ce remède selon la présidence.

Par ailleurs, la situation post-covid pourrait être une opportunité pour développer la filière des huiles essentielles. « Le marché a été multiplié par cinq en cinq ans », se félicite Olivier Nirina Rakotoson, président du Groupement des exportateurs d’huiles essentielles de Madagascar (Gehem). Dans 10 ans, je suis convaincu que le chiffre d’affaire peut dépasser le milliard avec l’appui des autorités.” ajoute-t-il. Dotée de cette biodiversité, la grande île possède un atout attrayant pour les laboratoires et entreprises dans la parfumerie, le cosmétique et la pharmacie afin d’identifier de nouvelles plantes aromatiques et proposer de nouveaux produits.

Néanmoins, l’exploitation des huiles essentielles devrait être profitable non seulement pour les industries pharmaceutiques, mais également pour les petits paysans. En effet, prenons l’exemple de la filière artemesia : le kilo de l’artemésia est acheté à environ 2000 ariary (0,5 euro) aux paysans alors que la tonne de l’artemésia sous forme de sucre est vendu à environ 2700 euro sur le marché international. Une meilleure distribution des bénéfices s’impose sur les acteurs de la filière pour que les producteurs puissent en bénéficier autant que les transformateurs. En somme, la filière des huiles essentielles peut être un des piliers de l’économie verte de Madagascar mais il faut veiller à ce que les paysans en profitent pleinement.

Écrit par Maya Disraëli.

Cet article fait partie de Covid-19 Food/Future, une initiative du projet SEWOH Lab du TMG ThinkTank for Sustainability (https://www.tmg-thinktank.com/sewoh-lab). Elle vise à fournir un aperçu unique et direct des impacts de la pandémie Covid-19 sur les systèmes alimentaires nationaux et locaux. Suivez également @CovidFoodFuture, nos journaux vidéo de Nairobi, et @TMG_think sur Twitter. Le financement de cette initiative est assuré par le BMZ, le Ministère Fédéral Allemand de la Coopération Économique et du Développement.

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