Epidemium : quand big pharma et hackers se rencontrent pour lutter contre le cancer

Par Isabelle Vitali (Roche) & Thomas Landrain (La Paillasse)

Epidemium
EPIDEMIUM
6 min readFeb 9, 2017

--

[Livre blanc | Avant-propos]

Epidemium : innover les pratiques de la recherche dans l’épidémiologie du cancer

Innover, ce n’est pas seulement développer de nouvelles technologies ou des objets connectés. C’est aussi expérimenter de nouvelles dynamiques et méthodologies de travail pour aider au développement du potentiel de l’intelligence collective, tout en dépassant les barrières qui cloisonnent les savoirs et les compétences. De plus, nous pensons sincèrement que l’innovation doit avoir des retombées positives et tangibles sur les conditions de vie des personnes et sur leur santé.

C’est sur cette base commune que la rencontre entre le laboratoire de recherche ouverte La Paillasse et l’entreprise pharmaceutique Roche a pu donner vie, grâce notamment à l’entremise de Gilles Babinet, à un projet très ambitieux : Epidemium.

Né en avril 2015, le programme Epidemium représente l’effort conjoint de Roche et de La Paillasse d’expérimenter une manière innovante de faire de la recherche scientifique et médicale, sur un problème majeur de santé publique comme le cancer, en utilisant une source de connaissances en plein essor bien qu’encore sous-exploitée : le big data. Il nous tenait aussi à cœur de prouver que, dans le périmètre de la science, la rencontre d’acteurs de nature différente et animés par les mêmes principes est source d’innovation.

« Dans le monde de la technomédecine 2.0, Big Pharma et biohackers s’allient contre le crabe ! », Dominique Nora (L’Obs, 05/11/2015)

Le choix de lancer un projet novateur, tant sur la forme que sur le fond, en épidémiologie du cancer, nous a semblé logique pour deux raisons principales :

  • malgré les avancées scientifiques récentes, le cancer est responsable de 8,2 millions de décès en 2012, dont 148 000 en France, avec la prévision terrifiante de 60% de décès en plus chez les femmes d’ici 2030 dans le monde ;
  • le big data offre une source précieuse de connaissances pour la recherche médicale, mais ses potentialités demeurent largement sous-exploitées dans le secteur de la santé.

Pour qu’un tel projet soit un succès, nous avons immédiatement compris qu’il fallait réunir une équipe insolite, composée de personnes aux compétences très différentes, ayant des parcours et venant d’horizons parfois éloignés, mais qui partagent et défendent tous les mêmes valeurs fondamentales : l’ouverture du savoir, la collaboration, la transdisciplinarité et l’indépendance.

Dès le début, nous avons eu l’intuition, qui fut confirmée par la suite, que ce projet nous porterait vers des territoires encore inexplorés de la science et de l’éthique. Il nous fallait donc veiller à accompagner la communauté dans ce parcours et c’est dans cette optique que nous avons créé le Comité d’éthique indépendant et le Comité scientifique. Ces deux comités ont fait face à des problématiques inédites qui dépassent le périmètre d’un projet de recherche traditionnel. C’est grâce à leur engagement constant que nous avons réussi à trouver le juste équilibre entre les nécessités de la recherche scientifique et la sauvegarde des droits ainsi que du bien-être des patients en particulier, et de tous les citoyens en général, qui sont toujours au centre de notre engagement.

La communauté si hétérogène et étendue d’Epidemium, plus de 1 000 personnes ayant participé à différents titres à nos événements pendant un an, n’aurait pu être productive sans le suivi d’une équipe de coordination, qui a su mobiliser un vaste réseau de parties prenantes, partenaires et membres de la communauté.

Dès ses débuts, Epidemium a suscité l’intérêt de plusieurs acteurs du milieu médical, de la recherche scientifique et du big data, qui se sont reconnus dans nos valeurs et qui partageaient notre ambition. Cet intérêt s’est vite transformé en partenariats très importants pour la réussite du projet et qui ont permis de mettre à disposition de la communauté compétences, outils et ressources.

Barbara Govin - CC BY NC ND

Après une première année de programme, le temps est donc venu de faire un bilan objectif et de partager avec vous, en toute humilité, notre expérience et les enseignements que nous en tirons pour continuer la dynamique lancée avec Epidemium.

Epidemium nous a donné l’opportunité, chez Roche et La Paillasse, de mettre en synergie nos compétences, de découvrir des complémentarités inattendues entre nos deux organisations, mais surtout de nous laisser surprendre par les résultats de l’intelligence collective exprimée par la communauté ouverte que nous avons supportée et accompagnée.

En tant qu’acteur de l’innovation en santé, l’ambition de Roche est, avec Epidemium, de réinventer l’épidémiologie du cancer pour en faire un véritable outil d’aide à la décision thérapeutique et de porter l’innovation au plus proche des patients. En regardant, après plus d’un an, les résultats atteints, nous pouvons mesurer l’immense pas en avant fait dans cette direction. De plus, Epidemium a été pour Roche une occasion unique d’expérimenter de nouvelles méthodes et de nouveaux instruments pour stimuler l’innovation dans le cadre de la science ouverte, jusqu’à ouvrir certaines de ses propres données à la communauté.

Lieu emblématique d’innovation et de transdisciplinarité, La Paillasse défend l’idée de faire émerger une nouvelle manière de faire de la recherche, grâce à la mise à disposition d’un environnement de travail ouvert et collaboratif. La Paillasse est le lieu où s’ancre l’histoire d’Epidemium, lieu qui a permis à la communauté de grandir en s’identifiant à un espace réel, élément fondamental pour garder le juste équilibre entre les échanges virtuels et en face à face. Epidemium a aussi été l’occasion pour La Paillasse d’avancer dans le perfectionnement de ses outils et méthodes de travail, ainsi que de montrer le potentiel de l’intelligence collective appliquée à la recherche médicale.

« Nous désirons plus que tout que le programme continue à se développer. »

Nous voulons également profiter de l’occasion offerte par ce Livre blanc pour partager avec vous notre vision de ce qui pourrait être amélioré. En effet, ce que nous avons initié ne s’arrêtera pas là…

Le premier de ces points, et c’est ce que nous nous efforcerons de faire pour les années à venir, est d’impliquer davantage la communauté médicale. Notre objectif de départ était et reste d’obtenir des résultats et des outils concrets qui pourront véritablement être portés par les équipes médicales dans leur travail quotidien. Or, cela ne peut se faire que si les médecins et l’ensemble du monde médical s’engagent de manière constante tout au long du programme. Certes, travailler sur les données et développer des algorithmes de machine learning est essentiel pour faire progresser la santé aujourd’hui, et c’est ce que nous avons voulu mettre au cœur d’Epidemium. Mais cela ne peut se faire efficacement sans les apports d’experts de la santé et de cliniciens.

De plus, nous souhaitons améliorer l’intelligibilité du programme et de ses enjeux. Nous sommes conscients, après un an de programme, que le sujet de la santé alimenté par le big data est complexe et qu’il existe probablement d’autres façons de le traiter. Nous nous efforcerons toujours d’adopter une approche collaborative et ouverte dans l’appréhension du programme ainsi que dans la manière dont nous le construisons. Le moyen que nous avons choisi pour aboutir à nos objectifs aurait pu être différent ; il doit certainement être amélioré.

C’est également la raison pour laquelle il était important pour nous de créer ce Livre blanc, afin de prendre du recul sur le travail accompli, de garder une certaine objectivité sur ce qui a été réalisé et de se donner des perspectives pour l’avenir puisque nous désirons plus que tout que le programme continue à se développer.

Soyons reconnaissants : beaucoup de ce qui a été réalisé nous a épatés. Nous avons été bluffés par la qualité des rendus, par la capacité d’une communauté à se mobiliser sur un sujet comme le cancer, par la qualité des experts qui sont restés engagés tout au long du programme et enfin par la bienveillance générale qui a entouré le programme, que ce soit de la part des participants, des partenaires, des comités ou encore du grand public.

Auteurs :

VITALI Isabelle : Directrice de l’Innovation et des partenariats de Roche jusqu’à octobre 2016.

LANDRAIN Thomas, Membre du Comité scientifique d’Epidemium : Président & co-fondateur de La Paillasse.

Retrouvez la version web du Livre blanc.

Rejoignez la communauté Meetup, Twitter & Facebook.

--

--

Epidemium
EPIDEMIUM

Exploring New Paths to Cancer Research with Epidemium: a data challenge oriented and community-based open science program #Open #Data #Science