Hackez votre courbe d’apprentissage ! 🛠🎓🚀

Benoit Blancher
Equisense
Published in
15 min readAug 8, 2017

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Trois raisons font que, pour une startup, rien n’est plus important que l’apprentissage.

D’abord, par dĂ©finition, une startup doit trouver son business model. Elle doit apprendre qui sont ses clients, trouver de nouveaux usages, les bons canaux de distribution, etc. De la crĂ©ation Ă  l’hyper-croissance, ces problĂ©matiques Ă©volueront et l’apprentissage permanent permettra de s’y adapter. Ensuite, l’environnement de la jeune pousse est lui-mĂȘme en Ă©volution constante : l’essor des rĂ©seaux sociaux, les rĂ©volutions technologiques, les changements de mentalitĂ©s ou de lĂ©gislation sont autant de paramĂštres mouvants qui entrent dans l’équation du business model. Enfin, l’entreprise doit sa rĂ©ussite aux talents qui la composent. L’organisation doit faire grandir les femmes et les hommes qui feront son succĂšs. Dans un contexte de guerre des talents, proposer un cadre propice au progrĂšs et Ă  l’épanouissement professionnel est le meilleur moyen d’attirer les personnes qui ont soif d’apprendre et qui seront donc les mieux adaptĂ©es.

MalgrĂ© l’importance du sujet, on prend souvent l’apprentissage comme un plus auquel on se mettra quand on en aura le temps. On se dit que le temps suffira Ă  faire l’expĂ©rience... Je suis convaincu que l’apprentissage, comme la productivitĂ©, est une discipline. Il faut se mettre dans les bonnes conditions et procĂ©der avec mĂ©thode. Je partage dans cet article les ingrĂ©dients qui font mon apprentissage. Je les utilise Ă  chaque fois qu’une nouvelle problĂ©matique d’ampleur se prĂ©sente et qu’il faut y apporter une rĂ©ponse sans rĂ©inventer la roue.

I. Aimer son sujet ❀

Apprentissage = temps x attention x (capacité à apprendre)

Pour se concentrer pendant longtemps sur un sujet, on peut crĂ©er une organisation qui permet et valorise l’apprentissage. On peut aussi faire preuve Ă  titre personnel d’une grande discipline. Je ne pense pas que ce soit suffisant, la tĂąche serait trop fastidieuse. En la matiĂšre, rien ne remplace l’amour. L’amour est l’état qui capte toute votre attention et dans lequel vous ne comptez plus le temps. Je n’aime pas l’expression “sortir de sa zone de confort”. Au contraire, si l’on est amoureux et curieux — amoureux de la nouveautĂ© — on ne va faire qu’étendre sa zone de confort pour apprendre de nouvelles choses que l’on aime.

Nous cherchons donc des gens qui soient amoureux de leur sujet et curieux. Les deux questions qui m’intĂ©ressent le plus en entretien sont : “Quel est le sujet qui te passionne, sur lequel tu voudrais devenir le meilleur au monde ?” et “ Quel est ton dernier projet personnel (pour un dĂ©veloppeur) ou ta derniĂšre lecture (pour un marketer)?”

Si vous ĂȘtes profondĂ©ment amoureux, votre apprentissage a quelque chose de personnel. Parfois, il se fait sous des formes diffĂ©rentes mais il ne saurait s’arrĂȘter aprĂšs 18 h. Un designer ira voir des expos d’art ou faire de la photo, un marketer regardera Mad-Men ou lira sur le sujet, un happiness-officer donnera des cours de shiatsu, etc. Ne voyez pas dans ces propos une Ă©loge du dĂ©sĂ©quilibre pro-perso, bien au contraire, le cerveau a besoin de repos. Il faut faire du sport, bien dormir, bien manger, prendre des vacances et faire d’autres choses par moments. Mais je ne connais pas de maĂźtres dont l’art fĂ»t un mĂ©tier qu’ils pratiquĂšrent comme un gagne-pain et non comme une passion. Trouver des gens amoureux de leur mĂ©tier est le meilleur moyen pour qu’ils apprennent vite et soient performants et Ă©panouis. C’est le moyen pour l’entreprise de concilier un certain rĂ©alisme Ă©conomique avec le bonheur des personnes.

En tant que leader, une fois le recrutement fait, la question qui se pose est : comment inspirer aux gens l’amour de leur mĂ©tier et des connaissances qui le composent ? C’est un sujet capital sur lequel je m’interroge.

II. Adopter le bon Ă©tat d’esprit : Amerigo Vespucci, le lĂ©gionnaire, et les Beatles 🎓

Je ne saurais pas dĂ©finir clairement quel est l’état d’esprit Ă  adopter pour apprendre mais je vais vous raconter 3 histoires qui me semblent inspirantes :

Amerigo Vespucci

Comme c’est brillamment expliquĂ© dans « Sapiens » de Yuval Noah Harari, quand Christophe Colomb dĂ©couvrit l’AmĂ©rique, il Ă©tait persuadĂ© que c’étaient les Indes. Toute sa vie il resta dans cet ancien paradigme qui voulait que le monde soit composĂ© de l’Afrique, de l’Europe et de l’Asie. Il ne pouvait imaginer qu’on puisse avoir omis un continent entier pendant tant de siĂšcles. Si c’est Amerigo Vespucci qui donna finalement son nom Ă  ce nouveau continent bien des annĂ©es plus tard, il fut le premier Ă  admettre que les terres dĂ©couvertes Ă  l’ouest Ă©taient bel et bien un nouveau continent.

Remettez-vous en question et acceptez la complexité

Il Ă©tait de cette vague de gĂ©ographes qui commencĂšrent Ă  crĂ©er des cartes avec des trous lĂ  oĂč personne n’était jamais allĂ©. L’humanitĂ© comprit Ă  cette Ă©poque que l’ensemble du monde ne s’expliquait pas uniquement par la religion et qu’il y avait beaucoup Ă  comprendre et Ă  dĂ©couvrir. Ce changement d’état d’esprit amorça une accĂ©lĂ©ration exponentielle des dĂ©couvertes gĂ©ographiques et scientifiques qui permirent aux europĂ©ens de dominer le monde pendant les 5 siĂšcles qui suivirent.

Le légionnaire romain

Les lĂ©gionnaires romains n’avaient de supĂ©rioritĂ© sur leurs ennemis ni l’équipement, ni le nombre. Ils avaient en revanche une discipline personnelle et collective qui leur permit de devenir les soldats les plus aguerris et les mieux organisĂ©s de leur Ă©poque. Cette doctrine s’appelle “Excelsior” qui signifie « plus haut, plus Ă©levĂ© ». Elle veut que chaque jour on tĂąche d’ĂȘtre un peu meilleur que la veille. C’est l’idĂ©e que, pour grimper une montagne, il ne faut pas espĂ©rer sauter en haut mais par petits pas, monter les marches les unes aprĂšs les autres.

Soyez chaque jour un peu meilleur

Les Beatles đŸŽŒ

On loue le gĂ©nie des Beatles. Beaucoup y voient un don. Ce qu’on sait moins, c’est qu’avant d’aller aux Etats-Unis pour embrasser le succĂšs qu’on leur connait, les Beatles on passĂ© 2 ans Ă  Hambourg entre 1962 et 1964. A leur arrivĂ©e en Allemagne, ils Ă©taient de bien piĂštres musiciens, mais ils jouĂšrent dans des petits bars 8 heures chaque soir, 7 jours par semaine, sans interruption pendant ces deux annĂ©es. Cela reprĂ©sente 6000 heures !

L’excellence n’est ni innĂ©e, ni une question d’annĂ©es, elle vient avec le travail

La premiĂšre morale de cette histoire est que l’excellence ne vient que par le travail. Le second enseignement c’est qu’on peut devenir ce qu’on veut en 2 ans, mĂȘme le meilleur groupe du monde, pourvu qu’on y mette les moyens. C’est une belle illustration de la loi de Parkinson qui veut que les choses prennent le temps qu’on leur alloue. Si les Beatles s’étaient dit « dans 10 ans, nous seront le meilleur groupe du monde », ils auraient sĂ»rement fait 600 heures de concert par an et qui sait, ils auraient peut-ĂȘtre rĂ©ussi. Mais ils se sont donnĂ©s 2 ans et ont rĂ©ussi en y mettant l’investissement nĂ©cessaire. Notez qu’ils ne se sont pas entraĂźnĂ©s seuls dans leur garage. Ils se sont frottĂ©s au rĂ©el et Ă  la critique. C’est donc l’entraĂźnement mais aussi le feed-back permanent, l’expĂ©rimentation et les rencontres qui les ont construits.

III. L’apprentissage Ă©clair đŸ’„

a. Les 7 moyens d’apprendre

Dans mon cas, l’apprentissage a lieu dans un contexte d’urgence : un problĂšme se prĂ©sente et il faut entrer dans le sujet pour y apporter une solution rapide. Le temps d’apprentissage se retrouve alors sur le chemin critique de l’avancement du projet. L’un des mode d’apprentissage Ă  optimiser est ce que j’appelle “l’apprentissage Ă©clair”. Cette mĂ©taphore historique fait rĂ©fĂ©rence Ă  une attaque rapide combinant divers moyens :

  • Etude de l’état de l’art : Il ne s’agit pas de rĂ©inventer la roue indĂ©finiment. De la thĂ©orie la plus fondamentale Ă  la compĂ©tence la plus opĂ©rationnelle, il existe aujourd’hui plĂ©thore de livres, de moocs, d’articles, de podcasts ou de vidĂ©os qui vous permettront de ne pas partir de zĂ©ro.
  • Test and learn : pour faire des dĂ©couvertes et apprendre, il faut poser des hypothĂšses et trouver l’expĂ©rience qui pourra, par sa rĂ©ussite ou son Ă©chec, valider ou invalider l’hypothĂšse, et par lĂ  nous apprendre quelque chose.
  • Benchmark : Il s’agit d’observer la mise en application que d’autres ont faite pour la dĂ©construire et la comprendre ou simplement la copier.
  • Le mentoring : le mentor est un maĂźtre qui par son expĂ©rience peut donner un conseil ou une information descendante.
  • Le coaching : le coach n’est pas un maĂźtre, il n’est qu’un miroir qui permet par ses questions et sa simple prĂ©sence de structurer sa penser et de se poser les bonnes questions.
  • La confrontation avec ses pairs : Le fait de pouvoir Ă©changer sur des problĂ©matiques avec des pairs permet de confronter des avis, de partager des expĂ©riences et de construire une vision plus riche que si elle n’avait pas Ă©tĂ© enrichie de divers points de vue.
  • L’enseignement ou l’écriture : “Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire viennent aisĂ©ment.” Parfois, pour ancrer et structurer un apprentissage, la bonne mĂ©thode est de le transmettre.

Pour mobiliser ces moyens rapidement et efficacement, il faut s’y prĂ©parer :

Imaginez que votre capacitĂ© opĂ©rationnelle soit une tapisserie. La trame reprĂ©sente les connaissances thĂ©oriques sur lesquelles vous brodez des fils de plus en plus minces qui reprĂ©sentent des compĂ©tences et des savoir-faire de plus en plus opĂ©rationnels. Par exemple les mathĂ©matiques s’appliquent Ă  la rĂ©solution d’équations qui vous permettent d’étudier un circuit Ă©lectronique. Sur votre toile, vous avez la zone du produit, la zone du marketing, la zone de l’engineering
 Les brins de votre trame traversent plusieurs zone : le brin de la psychologie humaine traverse entre autres le produit, le marketing, le management et la vente. Les brins de connaissances s’entrecroisent. Pour dĂ©finir une fonctionnalitĂ© d’un produit, il faut comprendre la psychologie humaine mais aussi la programmation informatique pour en intĂ©grer les contraintes et avoir des brins de connaissance en design. Plus vos brins seront forts, plus la compĂ©tence que vous pourrez y adosser sera Ă©paisse et facile Ă  broder.

B. Savoir broder rapidement des savoir-faire

Le cerveau est d’une Ă©tonnante plasticitĂ©, si vous l’entraĂźnez sur un type de gymnastique, il deviendra performant !

Pour les langues par exemple, plus vous en apprenez de diffĂ©rentes, plus il vous sera facile d’en apprendre. Votre mĂ©moire s’adaptera, la gymnastique intellectuelle sera de plus en plus facile au fur et Ă  mesure que vous en apprendrez. Pour filer l’analogie, plus vous pratiquerez une langue, plus il vous sera facile de mobiliser le vocabulaire. A l’inverse beaucoup de gens connaissent bien l’anglais par exemple et sont de ce fait tout Ă  fait aptes Ă  lire un texte mais ne mobilisant pas rĂ©guliĂšrement leurs connaissances, ils sont bien en mal de tenir une conversation. C’est vrai aussi avec des savoir-faire. Pour quelqu’un qui a appris Ă  faire de la cuisine, de la menuiserie et de la couture, il n’est pas compliquĂ© d’apprendre la soudure par exemple.

Plus vous apprenez, plus il est facile d’apprendre. Plus vous mobilisez une connaissance, plus elle est facile à appliquer.

Par exemple, si vous avez appliquĂ© la psychologie humaine Ă  la nĂ©gociation et au design d’un produit, vous imaginez que le jour oĂč vous chercherez Ă  l’appliquer au marketing, cela vous sera aisĂ©. Si vous avez par ailleurs aussi fait ce travail sur les statistiques et le design, le jour oĂč vous chercherez Ă  faire une page web persuasive, vous apprendrez sans aucun mal comment mettre en place une dĂ©marche d’A/B-testing pour crĂ©er une page web persuasive par son design et ses textes.

C. Préparer sa trame de connaissances

20 % des connaissances se retrouveront dans 80 % des problématiques que vous aurez à traiter.

Vous allez donc dĂ©velopper quelques brins de trame trĂšs solides dessus. Pour autant, aucune problĂ©matique ne trouvera de rĂ©ponse sur un seul brin. Pour interagir avec des coĂ©quipiers et partenaires, vous devez comprendre leur mĂ©tier, et pour innover, vous devrez croiser des savoirs divers et faire preuve de sĂ©rendipitĂ©. Vous allez donc aussi constituer une culture gĂ©nĂ©rale sur un maximum de sujets. Dans mon cas, le produit, le marketing et le management sont mes sujets clefs sur lesquels je vais en profondeur, et je dĂ©veloppe une culture gĂ©nĂ©rale et une comprĂ©hension minimum de la tech, des sciences, du droit, de la finance mais aussi de la littĂ©rature, de l’histoire, de l’art, de la cuisine et de la couture.

Enfin, pour que la trame soit fin prĂȘte, il faut qu’elle soit dense par endroits, large, mais aussi qu’elle soit ordonnĂ©e. Si c’est un sac de noeuds, vous serez bien en mal le moment venu d’y broder quoi que ce soit. Enseigner, Ă©crire, Ă©changer sont des trĂšs bons moyens d’ordonner sa pensĂ©e et ses connaissances. J’utilise beaucoup Evernote pour ordonner ma comprĂ©hension d’un sujet sous forme d’une note que je pourrai modifier, implĂ©menter au cours de mes apprentissages.

D. CrĂ©er son environnement d’apprentissage

Les 7 moyens d’apprendre Ă©noncĂ©s plus haut nĂ©cessitent une prĂ©paration. Pour avoir un mentor, un coach, des pairs avec qui Ă©changer, il faut avoir constituĂ© un rĂ©seau. Pour faire un Ă©tat de l’art efficace, il faut avoir les bons outils et connaĂźtre les sources. Pour faire du test and learn, il faut s’ĂȘtre crĂ©Ă© un environnement propice pour faire ses expĂ©riences. Tout ça se prĂ©pare, et il faut bien souvent avoir expĂ©rimentĂ© de nombreuses fois l’apprentissage Ă©clair pour percevoir pleinement la valeur de cette prĂ©paration qui prend beaucoup de temps et d’énergie.

Pour entrer dans des exemples concrets, voici certains des Ă©lĂ©ments qui composent mon environnement d’apprentissage :

  • Je fais partie de l’APM (Association pour le ProgrĂšs en Management). Nous nous rencontrons chaque mois avec un groupe d’entrepreneurs pour Ă©changer de façon informelle et suivre une confĂ©rence sur un sujet donnĂ©. Ces dirigeants sont pour moi des pairs et des mentors et les formations sont toujours enrichissantes.
  • Nous avons installĂ© l’entreprise Ă  Euratechnologies, un accĂ©lĂ©rateur qui abrite 160 startups, ce qui fait autant d’entrepreneurs avec qui Ă©changer.
  • Chaque vendredi, je vide mon fil Feedly et lis entre 5 et 10 articles (en gĂ©nĂ©ral des choses assez appliquĂ©es comme le trĂšs bon blog de grooveHq ou d’Invision).
  • J’écoute un livre par mois (souvent plus thĂ©orique) sur Audible.
  • J’écoute une dizaine de podcasts comme l’Entreprise BFM pour des histoires d’entreprises, TheFamily ou Le Rendez-Vous Tech qui permet de se tenir Ă  jour de l’actualitĂ© tech, Internet et gadgets.
  • J’écris de temps en temps des articles de blog, donne chaque semestre un cours Ă  l’UTC, etc.
  • J’irais jusqu’à dire que le fait mĂȘme d’entreprendre est un moyen d’avoir un environnement oĂč faire ses expĂ©riences, des Ă©quipes avec qui Ă©changer, des investisseurs comme coachs


E. Passer Ă  l’assaut đŸ„Š

Ca y est ! Votre systĂšme d’apprentissage est en place et une problĂ©matique importante se prĂ©sente Ă  vous. Il y a Ă  ce moment deux Ă©cueils : appliquer une mĂ©thode dĂ©ployant des moyens surdimensionnĂ©s et confondre vitesse et prĂ©cipitation. VoilĂ  une maniĂšre de procĂ©der pour les Ă©viter :

  1. Analyser la valeur et dĂ©finir moyens et objectifs. Cela peut ne prendre que quelques minutes mais il est fondamental d’avoir une idĂ©e de la valeur qu’apportera la rĂ©solution d’une problĂ©matique et donc le temps et les moyens que vous pourrez y allouer.
  2. DĂ©construire le problĂšme. En dĂ©construisant le problĂšme, vous allez d’abord extraire les 20 % de tĂąches qui crĂ©ent 80 % de la valeur (voir loi de Pareto). Parmi ces tĂąches, vous en maitrisez certaines et d’autres nĂ©cessitent d’ĂȘtre apprises ou dĂ©lĂ©guĂ©es. Vous serez alors en mesure de savoir avec une grande prĂ©cision sur quoi orienter votre apprentissage.
  3. Lancer l’apprentissage Ă©clair. Pour un sujet donnĂ©, je passe entre 2 et 20 heures maximum. 2 heures s’il s’agit d’un sujet simple et trĂšs opĂ©rationnel proche de mon coeur de mĂ©tier, 20 heures s’il y a des compĂ©tences spĂ©cifiques Ă  acquĂ©rir comme l’apprentissage d’un langage ou d’un outil. Notez qu’en 2 heures il n’est pas possible de lire un livre ni de nombreux articles. Ce que je fais la plupart du temps, c’est que j’oriente mes routines de lectures vers les problĂ©matiques du moment. J’aime bien la rĂšgle des 20 heures. En 20 heures, vous pouvez ĂȘtre opĂ©rationnel sur quasiment tous les sujets, mĂȘme en partant de zĂ©ro. Pour autant, avec deux heures par jour pendant une semaine de boulot ou en rushant un week-end, on peut en venir Ă  bout. L’horizon de temps reste court, ce qui empĂȘche de procrastiner ou de se disperser. C’est votre sujet du moment, vous le prenez Ă  bras le corps un bon coup puis ensuite vous ĂȘtes opĂ©rationnel et mettez le sujet derriĂšre vous ! Ciao !
  4. Combiner les approches. Il est primordial d’apprendre en combinant les approches, par exemple, la lecture d’articles sur le sujet, le benchmark d’autres entreprises et une discussion avec une personne du mĂ©tier.
  5. Passer trĂšs vite Ă  la pratique. 🛠 En confrontant au plus vite votre apprentissage Ă  la rĂ©alitĂ©, vous pourrez l’orienter, l’incarner et mieux l’assimiler. Ne vous racontez pas d’histoires en restant dans le confort de considĂ©rations hors sol, c’est une perte de temps.

IV. L’apprentissage par copie d’une grosse masse d’exemples 🔼

“Les bons artistes copient, les grands artistes volent.” Picasso

Vous pouvez Ă©viter le travail fastidieux qui consiste Ă  broder toutes vos connaissances de la trame aux brins les plus fins. Il suffit de voler des morceaux entiers et de les rapiĂ©cer sur votre toile. Allez regarder les pages d’accueil des sites de 10 entreprises excellentes sur ce sujet, tentez de dĂ©construire leur approche et emparez-vous de l’intelligence qu’ils ont mise dans cette rĂ©alisation. Vous Ă©viterez des heures de rĂ©flexion, des phases de tests mĂ©thodiques et des erreurs.

Si, comme dans cet exemple, il est parfois facile de dĂ©construire une dĂ©marche pour en isoler la trame de connaissances des brins de leurs mise en application, il y a des cas oĂč on ne peut que reprendre le rĂ©sultat sans en comprendre toute la dĂ©marche. C’est le cas de stratĂ©gies d’entreprises ou de situations managĂ©riales complexes. Les dĂ©cisions prises font intervenir un trĂšs grand nombre de facteurs, elles sont propres Ă  un contexte et les informations qui nous parviennent peuvent ĂȘtre partielles et romancĂ©es par leurs auteurs. Dans ce genre de cas, il n’est pas interdit de copier mais se pose alors une question de pertinence de la solution.

En data-mining, il vaut mieux avoir beaucoup de donnĂ©es et un mauvais algorithme qu’un bon algorithme et peu de donnĂ©es.

Imaginons que vous cherchiez Ă  faire faire une action spĂ©cifique Ă  un utilisateur. Vous pouvez Ă©tudier des applications et vous apercevoir que pour beaucoup la solution est souvent de faire gagner des badges. Withings vous en donnera si vous marchez beaucoup, Waze, quand vous indiquez des radars, Audible, aprĂšs un certain nombre d’heures d’écoute, et mĂȘme Call of Duty, quand vous aurez tuĂ© beaucoup d’ennemis. Ces cas sont suffisamment divers pour conjecturer, sans en comprendre la raison, que donner des badges pousse un utilisateur Ă  rĂ©pĂ©ter une action au-delĂ  mĂȘme de la valeur intrinsĂšque que cette action a pour lui. C’est un savoir que l’on peut poser tel quel sur sa tapisserie et mobiliser le moment venu sans l’avoir complĂštement dĂ©construit. Cette connaissance reste superficielle. Elle n’est pas arrimĂ©e Ă  votre trame. Pourtant viendra le jour oĂč vous lirez un bon livre sur la gamification. Sans en comprendre l’ensemble des ressorts fondamentaux, vous lierez votre connaissance sur les badges Ă  ce brin plus gros qu’est la gamification, sur laquelle il y aura aussi les concepts de niveaux, d’avatars, d’équipes, de combats, de bosses, etc. Votre morceau ne sera toujours qu’un rapiéçage mais il sera plus solide, car vous aurez crĂ©Ă© des liens et de la cohĂ©rence entre plusieurs ensembles. Vous ajouterez d’autres Ă©tudes de cas qui viendront Ă©paissir cette connaissance bien qu’elle reste superficielle. Puis viendra le jour oĂč vous apprendrez ce qu’est un biais de possession en psychologie, et vous comprendrez pourquoi un utilisateur est poussĂ© Ă  collectionner des biens mĂȘme immatĂ©riels. Vous comprendrez que le biais de tribalisme fait du concept d’équipe un bon moyen de rĂ©tention dans un jeu. Vous aurez alors fait un lien entre une connaissance appliquĂ©e et un brin de thĂ©orie sur la psychologie humaine. Pour creuser ce sujet en particulier, je vous conseille la lecture de “Think fast and slow”.

Certains diront que malgrĂ© tout ça, il y a l’expĂ©rience, le temps, la maturitĂ© : tous ces Ă©lĂ©ments incompressibles. Qu’est-ce que l’expĂ©rience ? Ca n’est rien de plus que la somme des erreurs et rĂ©ussites qui nous ont enrichis, des situations que l’on a pu vivre et qui constituent une base de comparatifs, des connaissances et savoir-faire que l’on a tissĂ©s, des rencontres que l’on a pu faire et qui constituent un rĂ©seau. Evidement, il y a des temps incompressibles : un chef d’équipe dans le bĂątiment sera dĂ©pendant de la succession des chantiers pour multiplier des expĂ©riences, un livre prendra toujours un certain nombre d’heures Ă  lire


ConsidĂ©rer le sujet comme une question d’annĂ©es est le meilleur moyen d’attendre passivement que le temps fasse le travail alors que nous avons de l’emprise sur une grande partie des leviers de l’apprentissage, Ă  commencer par l’état d’esprit et la mĂ©thode. Comme dans l’histoire des Beatles, ça n’est pas une question d’annĂ©es. La vrai question est : que faites-vous pour hacker votre courbe d’apprentissage ? Avez-vous choisi le mĂ©tier qui vous passionne ? Quel temps et quelle attention dĂ©diez-vous Ă  votre apprentissage ? Comment faites-vous pour multiplier les expĂ©riences et rencontres qui vous construisent ?

Ces questions sont d’autant plus importantes que j’ai prĂ©sentĂ© lĂ  une mĂ©thode qui m’est propre et que j’ai construite en fonction de mon mode de fonctionnement propre. L’important est que vous preniez conscience de l’importance du sujet pour y allouer le temps et l’intelligence qui permettront de trouver votre mĂ©thode.

Au-delĂ  de l’individu, il reste Ă  ce sujet deux axes sur lesquels je m’interroge, le premier dont j’ai parlĂ© est de savoir comment inspirer Ă  des coĂ©quipiers l’amour de leur travail et de l’apprentissage. Le second est de savoir comment manager la connaissance dans l’organisation pour ne pas avoir des personnes apprenantes isolĂ©es mais une organisation qui capitalise l’ensemble des apprentissages.

Si vous avez de bonnes lectures ou idĂ©es sur ces sujet, je suis preneur et, qui sait, quand j’y verrai plus clair, peut-ĂȘtre que ce seront de bons sujets d’articles 😉

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