Utiliser la blockchain pour conquérir de nouvelles marketplaces

Simulation de note stratégique (à EDF) dans le cadre d’un cours d’économie des réseaux

Perrine Gernez
Essais sur la ville intelligente
3 min readDec 16, 2016

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Contexte et état des lieux

La blockchain est une technologie de stockage et de transmission d’informations, qui fonctionne comme un registre distribué et autonome. Le cryptage des “blocs” informationnels fournit des garanties d’inviolabilité, de traçabilité et d’irréversibilité des transactions. Elle agit comme une technologie-support de confiance pour les transactions entre acteurs du marché de l’énergie. Cela rejoint les tendances du marché de l’énergie en France : une décentralisation avec plus de systèmes locaux et l’essor des smart grids, la part croissante des ENR, et le passage d’un système univoque à un système bidirectionnel, où chaque consommateur peut devenir producteur d’énergie (par le biais de solutions de production autonomes d’énergie de type panneaux photovoltaïques, mini-centrales hydroélectriques…). Une telle désintermédiation est encore à l’état de projet dans des territoires circonscrits :

  • SolarCoin : il s’agit de la première utilisation connue de la blockchain pour l’énergie. Le SolarCoin consiste en la revente du surplus d’énergie solaire produite : chaque MWh crée un token (jeton, ici du nom de SolarCoin), qui peut être converti en euros ou en dollars.
  • Transactive Grids : le projet est développé par la plateforme LO3, en alliance avec ConsenSys, et permet d’établir des mini-grids, créant de fait de petites communautés énergétiques autonomes installées sur la blockchain Ethereum. À Brooklyn, la joint-venture a lancé une expérimentation avec 10 foyers : 5 consommateurs et 5 producteurs. La dimension citoyenne est au cœur de la démarche marketing.
  • Bouygues Immobilier, Microsoft, Energisme et Stratumn : un prototype est prêt, et sera proposé pour intégration à Lyon Confluence à la fin de l’année.

Enjeux et recommandations

Le déploiement de la blockchain permettrait d’établir des smart contracts entre utilisateurs du réseau, en fixant les règles d’utilisation, la tarification, et la sécurité des transactions. Dans cette nouvelle marketplace de l’énergie entre particuliers, les compteurs jouent un rôle déterminant, devenant un point de passage obligé entre tout fournisseur et son client. À terme, la blockchain permettra une tarification en temps réel, et in fine une meilleure gestion de l’énergie, réduisant les coûts fixes des opérateurs, du fait de l’intégration et de l’interopérabilité des systèmes de distribution. Il est donc crucial pour EDF de développer un démonstrateur-test sur un territoire, en partenariat avec une grande collectivité territoriale. Un essai grandeur nature sur une dizaine de foyers devrait être réalisé à l’aide d’une nouvelle génération de compteurs Linky d’Enedis, adapté aux potentialités de la blockchain, à horizon 6 mois, avec un objectif de fournir ce service dans 10 000 nouveaux foyers dans un an. S’il est difficile d’estimer des retombées économiques précises pour une telle technologie, couplé à une stratégie de valorisation des données produites, le retour sur investissement à moyen terme sera compris entre quelques dizaines de millions à plusieurs milliards d’euros de bénéfices à travers le monde.

Il est à noter que la blockchain représente un coût de mise en place, en-dehors des coûts liés à la R&D. La création exponentielle de données est coûteuse en stockage en data centers ; par ailleurs, les coûts liés aux calculs pour miner une transaction, également exponentiels, induisent un coût environnemental non négligeable, nécessitant des algorithmes “clean”. Un tel système ne pourra être mis en place qu’après la promulgation du Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Electricité (TURPE) autoconsommation.

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