Comment les émotions impactent nos décisions

De l’excès de raison à la tempérance.

Thierry Malhomme
Essentiel
5 min readJan 13, 2019

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Il est toujours bon d’avoir une activité lente avant de prendre une décision importante.

— Paulo Coelho.

Vous aussi vous vous étonnez d’avoir pris un jour une décision sans pour autant avoir fait le tour de la question ?

“Pourquoi ai-je fait ceci plutôt que cela ?”

“Pourquoi ne pas avoir fait cela ou ceci ?”

Notre mécanisme de prise de décision est assez rudimentaire. Dans une situation donnée, nous nous réfugions facilement derrière ce que nous appelons notre raison.

De peur d’agir à la légère, de céder à la facilité ou de laisser libre court à nos passions, nous mettons en place un mécanisme censé être infaillible.

Et qu’il soit question d’un choix ou d’une décision, il en est de même : nous soumettons à notre cerveau gauche le soin de trancher après un examen minutieux des possibilités en présence.

Pratique : il décompose, rationalise, classe et range. Nous en déduisons une issue logique : c’est la décision.

C’est comme cela que j’ai décidé d’arrêter de fumer … et que j’ai échoué à arrêter de fumer … et que, finalement j’ai appris à décoder le mécanisme en place.

Pour le cas en question, le moment était arrivé pour moi de stopper la consommation compulsive de ce mélange nocif. Aussi ai-je pesé le pour et le contre, examiner les avantages et inconvénients. Le cerveau gauche était bel et bien à l’œuvre !

C’était la 243ème fois que je prenais cette décision. Mais c’était la bonne, vu que toutes les autres fois, je n’avais pas été assez raisonnable, dans le sens que je n’avais pas suffisamment fait preuve de raison!

À savoir que l’appel à la raison est une invocation solennelle sensée inverser une tendance détestable et révoquée à jamais une situation qui n’a que trop duré.

Ben voyons ! Et qu’est-il advenu ?

À la première émotion forte venue, j’ai vite renié ma décision non sans m’être vertement auto-flagellé de cette incapacité à tenir ma résolution.

Et quelle émotion ! En effet, sur mon propre lieu de travail, le jour même de l’application effective de ma résolution, je fus agressé, jugé, rabaissé !

J’avais subi un revers tel qu’à la première officine croisée, je passais ma carte sur le lecteur en échange de la substance calmante.

Quel est le paramètre que j’avais omis de prendre en compte ?

Le premier, le plus important, à savoir le motif même de cette habitude. Ici, le plaisir, bien relatif, perçu comme tel en tout cas, devait contrebalancer l’agression et l’émotion qui en découlait.

Contrairement à toutes les autres fois, je ne trouvais pas la satisfaction que j’y cherchais. Je me retrouvais avec ce mal-être qui m’avait poussé à chercher le remède bien maigre et inadapté.

Ce qui restait, c’était une émotion intense et extrême suite à une agression gratuite. Cette fois-ci, le trouble était vif et extrême. Trop pour être contenu par un rituel comme celui du tabac.

Et c’est précisément à cet instant que j’ai fait ma plus grande prise de conscience. En absorbant ce mélange nocif, je me coupais de tous mes ressentis, émotions et peut-être même de mon intuition.

Qui plus est, je m’étais aussi entêté à y remédier de la même manière : sans en tenir compte.

Alors j’ai décidé de leur donner ou plutôt de leur rendre toutes leurs places.

C’est ainsi que je les ai invitées dans mon processus de prise de décision.

La tempérance comme température de l’esprit

Comme évoqué plus haut, dans notre société occidentale, le mode cartésien prédomine. Tout y est mesure, analyse et grille de lecture. Rien de très vertueux selon Platon qui leur préfère notamment la tempérance.

En effet, la tempérance réintroduit la présence des ressentis dans la mesure où ces derniers s’équilibrent avec la raison. Facile à comprendre : l’analogie avec la température du corps humain nous y aide. Ce sont deux mots de même racine étymologique.

Pour notre corps, la fièvre ou l’hypothermie sont synonymes d’excès ou de manque. Ces états nous signifient que nous ne sommes pas en possession de tous nos moyens. Le corps et notre cerveau luttent pour réguler notre température afin de retrouver notre état de bon fonctionnement. Il s’agit de notre harmonie, d’un équilibre qui nous garantit une bonne vie.

Ainsi, l’équilibre est l’état naturel. Ni hyperthermie, ni hypothermie, juste la bonne température. Idem donc pour la tempérance qui invitera les désirs, la passion, les émotions ou encore l’intuition au même titre que la raison, le discernement et le jugement dans une même mesure.

La tempérance en situation.

Pour cela, quoi de mieux que de faire un état des lieux avant même une prise de décision. Voici quelques exemples de question bien senties pour apprécier votre état :

  • Quelle est mon émotion actuellement ?
  • A quoi cette émotion est-elle due ?
  • Quelle action cette émotion me pousse-t-elle à réaliser ?
  • Cette action, est-elle en accord avec la décision que je suis amené à prendre ?
  • Que puis-je faire pour réguler mon émotion afin de prendre ma décision en parfait équilibre?
  • Quelle émotion vais-je ressentir après avoir pris cette décision ?
  • Quelle est l’émotion que je souhaite éprouver grâce à cette décision?

L’absence de référence au cerveau cartésien dans cette liste n’est pas fortuite. Celui-ci, je l’ai évoqué, est déjà suffisamment au centre de notre processus.

Ajouter cet ingrédient primordial et complémentaire qu’est l’émotion dans le mécanisme permet la balance et créée la tempérance.

A une époque où nos émotions n’ont jamais autant été sollicitées et manœuvrées par les publicitaires, réseaux sociaux, jeux sur écrans et également journalistes, médias ou romanciers ; il est grand temps de le reconnaître. Nos émotions guident nos vies. Elles sont à l’origine de nos aspirations. Elles nous font cheminer.

Lorsqu’elles sont à l’œuvre, plutôt que de les feindre d’une part, pour ensuite les ignorer d’autre part, autant les regarder et les identifier. Tout simplement comme des signaux d’une action à entreprendre.

La décision a besoin d’un esprit de maître ; et il est sans comparaison plus facile de faire ce qu’on est, que d’imiter ce qu’on n’est pas.

— Louis XIV.

Par conséquent, j’ai placé au centre de mon processus de décision un fonctionnement intérieur équilibré et agréable. En somme, je réunis tous les acteurs en place sans en omettre ni en diminuer aucun d’eux. Je prends en compte la totalité de mon être; c’est la complétude. Ma complétude.

Quelles émotions d’aujourd’hui vous permettront d’accéder à vos émotions de demain ?

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Thierry Malhomme
Essentiel

Comment nos émotions sont des clefs à notre mise en mouvement! Coach professionnel certifié, Expert en Émotions et en Management. www.thierrymalhomme.com