J’ai suivi mes activités toutes les 15 minutes pendant 4 semaines : voici ce que j’ai appris
Tout a débuté il y a quelques mois lorsqu’un de mes collègues m’a demandé comment je faisais pour m’impliquer sur autant de sujets. Il était persuadé que je travaillais 12h par jours, weekend compris.
De mon coté, j’étais assez perplexe, j’avais la sensation de maintenir un rythme de travail plutôt raisonnable. Lui dire que je ne travaillais ni le soir ni le weekend ne l’aidait pas vraiment à comprendre comment je travaillais. Notre débat manquait cruellement d’éléments factuels.
Je me suis alors lancé un défis :
Suivre dans le détail mes activités professionnelles pendant 4 semaines
Etape 1 : Catégoriser les activités
Avant de pouvoir suivre mes activités dans un fichier Excel, il était nécessaire de les catégoriser.
- Est ce qu’animer un atelier de travail et présenter un livrable à un client sont des activités similaires?
- Est-ce que recruter un futur collaborateur et un meeting individuel avec une de ses ressources actuelles sont des activités similaires?
Après de (très) nombreux aller retours, j’ai construit 10 catégories qui recouvrent 100% de mes activités professionnelles :
Cette liste d’activités est évidemment très personnelle, et dépend fortement de mon métier (consultant) et des éléments que je souhaite voir apparaitre.
Etape 2 : Donner un poids à chaque activité
Lister les activités ne suffit pas, certaines sont plus importantes que d’autres et/ou apportent plus de valeurs à mon travail que d’autres.
Pour faciliter l’analyse j’ai distingué les activités à forte charge cognitive (animer un atelier) par rapport à aux activités à faible charge cognitive (synchronisation interne), voire contre productive (être passif en réunion).
Encore une fois, cette pondération (=Valeur Pro) est tout à fait personnelle. En fonction des activités que vous souhaitez mettre en avant ou des activités que vous souhaitez réduire, la pondération est à adapter.
Dans mon cas, je souhaitais surtout augmenter le temps passer à construire des livrables en interne et avec mes clients, d’où la note de 3.
Etape 3 : Rajouter d’autres axes d’analyse
Suivre ses activités pendant 4 semaines n’est anodin, autant rajouter d’autres axes d’analyse pour répondre à d’autres questions.
Par exemple:
- Est ce que je travaille plus dans les locaux de mon entreprise ou chez moi?
- Où est-ce que je suis le plus efficace, avec des taches à plus haute valeur ajoutée?
- Comment varie mon niveau de fatigue en cours de semaine? en fonction de mes activités de la journée?
- Et mon niveau de satisfaction? suis-je plus satisfait quand je travaille plus? quand je suis plus productif? quand j’ai davantage d’interactions avec mes collègues?
En plus de renseigner les activités toutes les 15 min, j’ai donc décidé de rajouter les informations sur mon lieux de travail, la satisfaction et mon niveau d’énergie à la fin de chacun des journées, pour détecter des potentielles corrélations.
Etape 4 : Construire un fichier de saisie
C’est l’étape la plus chronophage de toutes, donc voici un template qui vous permettra de gagner du temps !
Le fichier est partagé sur GoogleSheet, mais non modifiable. N’hésitez pas à le copier pour le compléter de votre côté. Le fichier est construit pour être plus paramétrable possible avec un tutoriel dans le premier onglet.
Vos remarques sur des bugs ou des améliorations sont les bienvenues !
Etape 5 : Renseigner le fichier par créneaux de 15 min
Tout d’abord pourquoi 15 min? pourquoi ne pas réduire à 1h pour limiter le nombre de saisies?
En effet, pour une journée de 10h, cela fait 40 saisies différentes, ce qui peut sembler beaucoup. La principale raison de choisir des créneaux de 15 min est de permettre une certaine finesse dans la remonté des données. Utiliser des plages d’une heure ne permettrait pas de visualiser les pauses cafés, les discussions de bureaux avec les collèges, et donnerait donc une vision trop lissée de la réalité.
Mais il n’est pas nécessaire d’ouvrir et compléter le fichier toutes les 15 mins !
Concrètement, je ne renseignais le fichier que toutes les heures ou toutes les deux heures, en détaillant le détail de mes activités. Dans la réalité, certaines activités durent moins de 15 min. Et on constate rapidement que les catégories ne sont pas “pures”. Lors d’une réunion de 1h, il n’est pas rare de “perdre” son temps pendant 15 min, mais de participer activement pendant les 45 min suivante car le sujet nous intéresse. Ou pendant un créneau de 15 min, de lire un article sur LinkedIn, de répondre à un mail, et de prendre un café.
Dans tous les cas, je me suis fixé comme règle d’être le plus transparent et honnête possible. Je souhaitais suivre aussi bien mon temps de travail, que la durée de mes pauses, mais surtout la qualité de l’utilisation de mon temps.
Et voici le résultat :
Même en zoomant, et avec le code couleur, on n’y comprend pas grand chose. Il est maintenant temps d’analyser les résultats.
Etape 6 : Analyser les résultats
Après 4 semaines à renseigner mes activités toutes les 15 min, nous avons enfin pu répondre à toutes les questions que nous nous posions.
Sur la période considérée:
- J’ai travaillé en moyenne 8h25 par jour (en excluant les pauses cafés, les déjeuner, et les transports…). En tant que cadre et manager dans une entreprise de conseil, c’était plutôt raisonnable. Cela me permettait de ne jamais commencer mes journées avant 8h30, et de ne terminer après 19h30 que très rarement.
- Parmi ces 8h25, 50 min sont en moyenne dédiées à mon développement personnel, à mon apprentissage. Nous étions assez surpris par le résultat, car cela n’inclus pas les lectures de livre le soir par exemple.
- Je passe très peu de temps dans des meetings où je ne suis pas directement productif et actif, sur les 4 semaines, je n’ai noté que 3h30, soit moins d’une heure par semaine.
- En télétravail, je travaille en moyenne 30 min de plus, mais la répartition de mon temps entre mon client, mon cabinet et mon développement personnel reste identique. Je passe également 30 min de plus à mon niveau de productivité maximal. Je sens que j’ai plus d’énergie en fin de journée (+0,2 pt) mais je perds en satisfaction (-0,5 pt)…
- En télétravail, je fais régulièrement des pauses de plus d’une 1h, en dehors des déjeuners pour faire autre chose (sport, courses…). Mais aucun n’effet notable n’est à constater sur mon temps total de travail, ni ma productivité.
- Je passe en moyenne 4h30 à mon pic de productivité par jour, avec un maximum à 6h15. Mes jours de plus forte productivité sont le mardi et le jeudi, et j’ai une nette diminution d’efficacité le vendredi. Mon niveau de satisfaction en fin de journée est directement corrélé à mon temps passé à productivité maximal. Pour ce qui est de la fatigue, il n’y a pas de corrélation évidente, mais c’est certainement dû à des facteurs externes (enfants?).
- Ma productivité suit nettement un effet d’usure, plus j’avance dans la journée moins je suis productif, ce qui induit un effet “plateau”. Au delà de 5h30 à productivité maximal, je perds nettement en efficacité et j’use de l’énergie. Voici comment ma productivité évolue au cours d’une journée type :
Toutes ces analyses sont directement possibles avec le template partagé.
Etape 7 : Conclure et aller plus loin
Suivre mes activités pendant 4 semaines m’a beaucoup appris sur mon mode de fonctionnement. Après toutes ces analyses, je me connais mieux et je planifie mes journées avec plus de soin. En télétravail, j’ai aussi moins de scrupule à faire une pause de 1h en pleine journée car j’ai maintenant la preuve que cela ne nuit pas à mes activités.
J’ai aussi maintenant un bon argument pour aller voir mon management : en 4h30 par jour à productivité maximale, je remplis presque 100% de mes objectifs professionnels.
Il est temps grand temps que je demande un temps partiels au même salaire !
=== Chaque semaine, je partage les meilleurs passages de mes lectures dans une newsletter. Venez me retrouver ici: https://readwise.io/@bfabien ===