L’année 2021 en 5 livres
Des surprises, des surprises et encore des surprises…
Après une année 2020 difficile à tout point de vue, l’année 2021 nous a réservé son lot de surprises : l’assaut du Capitole à Washington, la victoire de l’Italie à l’Euro 2020 de football, le départ d’Angela Merkel après 16 ans à la tête de l’Allemagne, le retour de l’Etat Islamique en Afghanistan et le coronavirus qui est encore et toujours parmi nous.
En ce mois de Décembre, le moment est venu de vous partager les 5 livres qui résument mon année 2021, et qui m’ont le plus apporté.
L’édition 2020 est disponible ici.
C’est parti !
1. The Death of expertise — Tom Nichols
Le livre ne déplore pas uniquement qu’une partie de la population devient de plus en plus ignorante sur des faits basiques en science, politique ou géographie. La connaissance a toujours été répartie entre des experts et des néophytes, et la division du travail et des responsabilités permettent à l’ensemble de la société de fonctionner malgré ces différences.
La problématique de fond traitée par Tom Nichols, c’est l’attachement farouche d’une partie de la population à des idées fausses. En plus de croire à des inepties (La Terre est plate, le VIH n’existe pas, le vaccin de la rougeole provoque l’autisme…), de nombreuses personnes rejettent toute connaissance, information qui viendrait contredire leurs croyances, et vont même jusqu’à revendiquer leurs positions.
On observe alors une inversion des valeurs, où des non-spécialistes certains d’eux-mêmes viennent contredire et challenger des experts dont c’est le domaine d’expertise. Tout peut ainsi devenir une question d’opinion, même les faits scientifiquement démontrables.
Bien sûr, un expert peut se tromper, et les autorités abusent parfois de notre crédulité. Mais notre scepticisme est de moins en moins sain, nous refusons de plus en plus souvent la parole de l’expert, sous prétexte qu’il est expert et que son avis contredit nos opinions.
Dans son livre, Tom Nichols étudie ainsi certaines racines de ce problème: l’école qui tend à considérer l’étudiant comme un client à satisfaire, Google qui donne l’illusion que l’acquisition du savoir est un processus simple, les journalistes qui vérifient trop peu la véracité des informations qu’ils partagent, et tout nos biais cognitifs qui limitent notre objectivité.
Ces problématiques sont cruciales pour moi car elles impactent notre cohésion en tant que nation. Une société ne peut fonctionner que si elle partage une même compréhension de l’existant. Si nous n’arrivons plus à distinguer les faits des opinions sur des sujets complexes tels que le chômage, l’immigration ou l’agriculture, comment démocratiquement construire un pays qui satisfasse tout le monde? J’avais d’ailleurs rédigé un article sur le lien entre Covid et expertise suite à la lecture de ce livre.
Pourquoi ce livre est intéressant :
- il permet de mieux comprendre la relation entre expertise, scepticisme et confiance et comment notre consommation continue d’informations nous rend paradoxalement plus idiots
- il décrit des solutions pour reconstruire la confiance avec les experts et l’autorité, et chacun de nous peut et devrait y contribuer afin de construire les bases d’une société saine et capable d’affronter les défis de demain
2. L’espion et le traite — Ben Macintyre
Ce roman décrit l’histoire d’espionnage la plus incroyable de ces 60 dernières années. Fils d’un officier du NKVD, Oleg Gordievsk a toute les cartes en mains pour devenir un fervent patriote soviétique. Après une solide formation d’espion, il est envoyé en mission à Berlin en 1961 pour le compte des affaires étrangères russes. La construction du mur le marque alors durablement: l’URSS ne peut pas être cet havre de prospérité si des milliers de russes choisissent de fuir vers le bloc de l’Ouest. 7 ans plus tard, envoyé par le KGB à l’ambassade de Copenhague, il assiste avec horreur à la répression dans le sang du Printemps de Prague. Il décide alors de signaler son intérêt aux services secrets occidentaux dans le but de détruire de l’interieur le système soviétique. Commence alors une dizaine d’années de mensonges, de double vie, de partages d’informations ultra confidentiels sur le fonctionnement du KGB, ses points forts et ses points faibles.
Pourquoi ce livre est intéressant :
- Ce livre nous plonge au cœur de la grande époque de l’espionnage, des messages codés, des techniques pour éviter les filatures et boites aux lettres mortes
- Basée sur une histoire vraie, ce livre permet de mieux comprendre les enjeux géo politique entre les deux blocs en pleine guerre froide et les contributions majeurs d’Oleg au maintien de la paix
3. La règle? pas de règle — Reed Hastings & Erin Meyer
Netflix est une entreprise hors du commun. Créée en 1997 elle a réussit à se réinventer de nombreuses fois pour passer de la location de DVD à un des producteurs majeurs de l’industrie cinématographie. Netflix a disrupté le monde du streaming, du cinéma et du divertissement, le tout en à peine 20 ans d’existence. Quelles sont les clefs de son succès?
Reed Hasting, co-fondateur de Netflix et Erin Meyer, une des professeurs les plus réputés de l’INSEAD, nous présentent dans ce livre un concept central chez Netflix, la densité de talent.
Ce concept a émergé au début de la vie de Netflix, lorsqu’après une année difficile financièrement, Reed s’est retrouvé obligé de licencier 1/4 de ses effectifs. A sa grande surprise l’entreprise a par la suite significativement gagné en productivité et en efficacité en ne gardant que des “superstars”. Depuis ce jour, tous les processus internes ont pour unique objectif de maximiser la densité de superstars dans l’entreprise et de leur donner le champ d’action le plus large possible.
Plus de limite sur les congés, plus d’approbations sur les budgets, plus de grilles salariales, la confiance accordée à chaque employé est quasi absolue. En échange, le niveau d’exigence est revu à la hausse, et un collaborateur qui remplit simplement ses objectifs, sans les dépasser se verra remercié en fin d’année (avec un chèque de départ conséquent).
Pourquoi ce livre est intéressant :
- Reed nous force à remettre en question bon nombre de nos croyances sur les pratiques qu’il est possible de mettre en place au sein d’une entreprise, ainsi que les bénéfices qu’il est possible d’en tirer
- Comprendre dans quelle mesure des pratiques innovantes déployées dans des activités de création (production, réalisation, marketing, …) peuvent être transférées dans des activités de management, gestion, conseil…
4. Fondation (le cycle) — Isaac Asimov
2021 a aussi été marqué par la sortie d’une nouvelle version de Dune sur nos écrans. Ce film a été pour moi le moment de découvrir un nouveau genre littéraire, la science fiction. Après avec dévoré Dune, j’ai plongé dans l’univers d’Asimov, via son épopée Fondation, l’un des plus grands classiques de la SF.
Dans 22 000 ans, l’humanité peuple la quasi totalité des étoiles de la galaxie, sous l’autorité d’un gouvernement central. Un illustre scientifique Harry Seldon fait alors une découverte majeure : en associant ses connaissances poussées en psychologie, en sciences sociales et en mathématique, il se rend compte qu’il est possible de prévoir les grandes tendances historiques d’une civilisation. Et il découvre que l’empire galactique va s’effondrer, et 30 000 ans de chaos seront nécessaires avant que l’ordre et la paix reviennent. Il décide alors de construire une fondation, qui regrouperait l’ensemble des connaissances de son temps afin d’accélérer la transition vers un nouvel age d’or. Grâce à cette fondation, ses équations lui indiquent que ces 20 000 années de chaos se réduiront à 1000 ans.
Tout au long des 5 tomes, qui retraceront 1000 ans d’Histoire, Isaac Asimov nous amène à réfléchir sur notre futur, les notions de destin, liberté individuel, de transcendance, le tout avec un scénario extrêmement bien ficelé.
Pourquoi ce livre est intéressant :
- Rédigé à partir de 1942, le livre est étonnamment moderne sur sa description des tensions entre science, religion, finance, et leurs impacts sur les choix politiques des societés
- En nous faisant visiter des dizaines de mondes sur des centaines d’années, Asimov nous brosse un panorama éclairant de la nature humaine, et nous pousse à l’introspection
5. AI 2041, 10 visions for our future — Kai-Fu Lee, Chen Qiufan
Kai-Fu Lee s’est déjà fait remarquer avec son ouvrage precedent “AI Superpowers: China, Silicon Valley, and the New World Order” où il décrivait l’impact de l’IA et pourquoi la Chine allait dépasser les Etats Unis dans les années à venir. Dans son nouvel ouvrage, il va un cran plus loin. Un peu à la manière de Black Mirror, au travers de 10 courtes histoires, il décrit 10 scenarios possibles en extrapolant en 2041 les technologies en cours d’expérimentation d’aujourd’hui.
Et si des IA étaient utilisées pour créer des professeurs particuliers qui adapterait la formation de chaque enfant à ses capacités à ses envies? Quels seraient les bénéfices pour les enfants? pour quels effets pervers? la perte de sociabilité? l’hyper compétition?
Comment lutter contre l’arrivée massive des IA et robots sur le marché du travail? Est-ce que le revenu universel est une solution durable? Quel serait l’impact sur nos sociétés? sur la monnaie? sur notre quête du bonheur?
Contrairement à Black Mirror, chaque histoire est suivie d’un commentaire critique de Kai-Fu Lee, pour analyser les évolutions technologiques et les impacts sociétaux illustrés par l’histoire. Cela apporte une touche de concret qui rend les histoires encore plus réalistes, et donc angoissantes.
Une histoire interroge par exemple l’impact sur nos sociétés de la généralisation des IA dans le domaine de la santé. Détail “amusant”, cette histoire se passe à Shanghai en 2041 et la crise du COVID n’est toujours pas résolue. Chaque individu doit se vacciner tous les 6 mois pour maintenir ses défenses immunitaires face aux nouveaux variants de plus en plus agressifs qui ne cessent d’apparaitre…
Pourquoi ce livre est intéressant :
- Chaque histoire nous donne un apercu de ce à quoi pourrait ressembler le monde dans 20 ans, et donc les orientations personnelles que nous devrions prendre maintenant pour nous y préparer
- La majorité des histoires se passent en Asie, dans des villes qui rayonnent mondialement par leur niveau technologique et économique, avec une volonté farouche d’avancer et d’innover. Par contraste, on peut comprendre que pour les auteurs, nos villes Européennes par leur indécision et létargie ne seront en 2041 plus que des vestiges du passé
Sur cette note plein d’optimisme, continuez à apprendre, lire, progresser et à l’année prochaine !
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