Le pouvoir de la nature

Grégory Besnard
Essentiel
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10 min readMar 15, 2019

J’ai grandi dans une petite bourgade située à l’extrême-est de la Bretagne à quelques encablures de la Normandie. Et qu’on se le dise, même si je n’ai pas passé mon enfance dans une ferme, je me suis toujours considéré comme un “gars de la campagne”. Et c’est un fait, j’aime côtoyer la nature et ses coins les plus paumés, j’aime y flâner, y glander aussi… bref j’aime y être et m’y ressourcer.

Aujourd’hui, j’habite en ville. Oh, ce n’est pas une mégapole, loin de là… L’appartement familial est idéalement placé. Comme le dirait mon agent immobilier : quartier calme, épargné par la circulation du centre-ville, proche des commerces et des services. Grosso modo, le rêve citadin.

Seulement, même s’il a ses avantages, il ne me convient plus ce nid douillet urbain. A présent, la nature me veut, elle m’appelle chaque jour de plus en plus fort…

En fait, si je vous narre les conditions de mon illustre existence et que je vous livre mes états d’âme à son propos c’est d’abord parce que j’adore parler de moi (Vous devriez essayer cela fait un bien fou) mais aussi et surtout parce que cet appel grandissant de la nature m’a permis de prendre conscience d’une chose…

Je vis dans des boîtes…

Tout à fait… Force est de constater que je me suis “librement” enfermé dans des boîtes. Pour vous expliquez cela, permettez-moi de vous décrire brièvement ce qui constituait, il y a encore peu de temps, une de mes journées… (Et oui, je vais encore parler de moi. C’est trop bon !!!)

Le réveil sonne. J’ouvre les yeux. Je suis dans ma chambre à coucher (jusqu’ici tout va bien). Afin de me préparer à affronter ce nouveau jour qui s’annonce, je passe d’une pièce à l’autre de mon appartement et cela pendant une bonne heure.

Ensuite, je sors à l’extérieur pour me rendre à ma voiture (ma caisse comme disent les anciens jeunes…). Après que cette dernière ait consentie à m’amener sur le parking de mon employeur, je me rends à mon bureau. J’y passe environ 4 heures.

Arrive alors le temps du midi. Je vais de mon bureau à ma bagnole, qui, toujours serviable, me transporte jusqu’à mon appartement. Je prends mon repas. Et par la même mécanique, retourne à mon bureau.

L’après-midi est globalement la copie de la matinée : 4 heures de bureau, retour à la maison, repas…

C’est ici que le drame arrive : en regardant la manière dont s’articulait une journée typique pour moi, j’ai eu un gros frisson dans le dos.

En effet, si je cumulais le temps passé à l’extérieur sur une de ces journées, en étant large, j’arrivais à peu près à 5 bonnes minutes. En résumé, je passais le plus clair de mon temps à circuler d’une boîte à une autre.

Bien entendu, pour les besoins de la description, j’ai simplifié les choses à l’extrême. Il m’arrive aussi d’aller faire des courses, de pratiquer des loisirs… De la fantaisie, que diable !!!

Mais soyons honnêtes, même en incluant ces temps qui de toute façon se passent dans d’autres boîtes et même en prenant en compte le fait que le week-end je sois plus à l’extérieur : allez 2 heures environ si je cumule le samedi et le dimanche.

Eh bien… j’arrive à un résultat moyen d’environ 20 minutes par jour passées à l’extérieur. Pour un gars qui aime être dehors… c’est une vrai réussite.

Dès lors, je me suis posé quelques questions, notamment :

  • Ce quotidien coupé de l’extérieur a-t-il des effets sur moi ?
  • Qu’aurais-je à gagner en me rapprochant de notre bonne vieille mère nature ?

Le lien entre nous et la Nature

Maintenant que vous savez tout concernant mon palpitant quotidien, il est grand temps d’entrer dans le vif du dur… Pour ce faire, je vais faire le “fou fou” et vous parler du lien Homme / Nature d’un point de vue anthropologique…

J’entends d’ici la foule en liesse, galvanisée à mort à l’idée de parler d’AN-THRO-PO-LO-GIE !!! Bon maintenant calmez-vous, reprenez vos esprits, relevez ceux de vos amis qui sont tombés au sol et laissez-moi poursuivre…

Pour vous la faire en version ultra réduite, l’anthropologie étudie l’Homme (et la Femme) dans ses dimensions à la fois physiques et culturelles. Cette science s’intéresse par exemple à l’Humain en société, ses croyances, ses rites religieux, son évolution anatomique, son habitat, ses comportements… En gros, y’a pas de quoi s’ennuyer chez les anthropologues.

Fin de la parenthèse, je reviens au lien qui unit l’Homme à la Nature. Au cours de son évolution, nous dit l’anthropologue, notre espèce a passée 99,5 % de son temps au contact exclusif de milieux naturels.

En effet, on estime que notre genre “Homo” existe sur terre depuis 2,3 à 2,4 millions d’années.

Notre espèce est, quant à elle, apparue à la louche, il y a 200 000 ans sur le continent africain.

En 100 000 ans (et ouais ça prend son temps…), nous avons colonisé la plupart des régions du globe : du sud-est asiatique à l’Europe en passant par l’Océanie et l’Amérique.

Pendant toute cette période, nos ancêtres étaient principalement des cueilleurs, un peu chasseurs aussi, qui vivaient de ce que “Mère Nature” leur offrait plus ou moins spontanément.

Ce n’est qu’avec l’apparition de l’agriculture, il y a environ 11 000 ans que l’Homme a commencé à sortir, très très progressivement, de la forêt et qu’il s’est mis à se regrouper dans des villages de plus en plus important. Les premiers regroupements s’apparentant à des villes apparaissant il y a environ 8000 ans de cela…

Tout ce temps passé dans la nature a laissé sur nous des empreintes indélébiles. Ainsi, différentes recherches, dans divers champs scientifiques, montrent des résultats que je trouve étonnants. Par exemple :

  • Le vert est la couleur dont l’Homme peut distinguer le plus grand nombre de nuances. Eh oui, le vert étant de loin la couleur la plus présente dans notre environnement primaire, nos ancêtres ont très vite appris à en discriminer les différentes tonalités pour augmenter leurs chances de survie. Il fallait bien repérer les sources de nourriture et les prédateurs dans toute cette verdure. Pour vous donner une idée, nous sommes en mesure de percevoir des centaines de nuances pour le vert contre quelques dizaines pour d’autres couleurs.
  • Des chercheurs de l’université de Santa Barbara ont montrés que notre corps réagit plus rapidement à l’apparition d’un animal dans notre champ de vision par rapport à la vue d’une voiture. Et ce même pour les populations urbaines.
  • Nous réagissons également plus rapidement aux sons émis par certains prédateurs tels que le lion, le léopard ou encore le jaguar en comparaison à des sons d’alarmes artificielles. Nous pouvons donc, en toute sécurité, réintroduire les lions et autres bestioles dans notre environnement.

A travers ces quelques éléments, nous voyons bien que la Nature et Nous, c’est plus qu’une simple amourette…

Les effets de la nature sur le bien-être

Depuis plusieurs décennies de nombreux chercheurs dans le monde entier étudient les bienfaits des environnements naturels sur la santé humaine. En voici, pêle-mêle, quelques résultats :

  • Le contact régulier avec la nature améliore le bien-être physique et psychologique perçus (1) (2).
  • Les activités motrices pratiquées dans la nature augmentent nos performances cognitives et procurent un sentiment de fatigue plus léger que si l’on réalise ces mêmes activités en intérieur. De bonnes raisons pour faire nos réunions à l’extérieur et pour nous (re)mettre au jardinage.
  • Les personnes sortant d’interventions chirurgicales lourdes se remettent plus vite lorsque leurs chambres donnent sur des espaces naturels en comparaison aux patients pour lesquels les chambres donnent sur des espaces urbains. Globalement, on observe des périodes d’hospitalisation plus courtes en moyenne pour les patients du premier groupe. De plus, ces derniers ont globalement besoin de prendre moins d’analgésiques pour soulager les douleurs postopératoires (3).
  • Les arbres (et les plantes) émettent des substances similaires à celles que vous retrouvez dans les huiles essentielles ayant d’étonnantes facultés sur notre biologie interne (4) (5) :

Elles stimulent notre système immunitaire en augmentant la production et la résistance des lymphocytes NK (Non, je ne viens pas de vous insulter…). Ces cellules sont celles qui tuent les microbes qui ont l’outrecuidance de s’insinuer en nous. NK signifie Natural Killer.

Elles réduisent la quantité de différentes hormones liées au stress présente dans notre sang et notre salive (cortisol, adrénaline et noradrénaline notamment). Ainsi, se balader en forêt à un effet biologiquement relaxant (ce qui n’est pas le cas d’une ballade en ville

Elles régulent le rythme cardiaque et font baisser la tension artérielle.

Un peu de physique

Avant de poursuivre, un peu de physique et d’électricité pour être plus précis…

Avez-vous entendu parlé de la dégradation de la qualité de l’air que nous respirons ? Bien évidemment… Notre air est de plus en plus vicié par l’infinie variété de substances que nous y déversons allègrement depuis quelques décennies (progrès oblige…).

Savez-vous qu’au delà des impacts purement chimiques que cette soupe de molécules nous fait subir, elle a un autre effet ? Elle dégrade la charge électrique de notre air en y faisant baisser drastiquement la présence de charges électriques négatives (de leur petit nom : ions négatifs ou anions pour ceux qui ont écouté pendant les cours de physique…).

Cette information vous choque, je le pressens. OK, je vous en dit un peu plus. Il est maintenant montré, sans entrer dans le détail, qu’un air déficitaire en ions négatifs :

  • Augmente le stress, les troubles de l’humeur, la fatigue physique et mentale.
  • Favorise la dégénérescence des cellules de notre corps (en raison d’une sombre histoire de radicaux libres…).

A contrario, les scientifiques se sont aperçus qu’un air chargé en ions négatifs (ce qui est naturellement le cas) permettait :

  • Une action dépolluante
  • Une amélioration de l’asthme au bout de quelques minutes d’exposition massive et une diminution des symptômes à long terme engendrant une baisse dans la prise de médicament.
  • Une diminution du stress
  • Une augmentation du bien être psychologique
  • Une facilité accrue pour se remettre d’un effort physique intense
  • Une amélioration des performances cognitives

Pour conclure, je ne résiste pas à l’idée de vous évoquez une petite information que je trouve intéressante.

Naturellement, la concentration d’ions négatifs chute les jours de grands vents ou juste avant qu’un orage éclate.

Ce phénomène a des effets bien connus dans certains pays comme l’Italie (ou souffle un vent nommé le sirocco) et les États-Unis (où sévit le Santa Ana). En effet, il a été remarqué lors des ces périodes plus d’absentéisme et de difficultés de santé. A tel point que certains hôpitaux américains reportent des opérations prévues ou font fonctionner des ionisateurs d’air dans les blocs opératoires. Ce phénomène porte même un petit nom “la météoropathie”.

Application n°1: Pratiquez le bain de forêt.

Vous l’aurez compris, plus vous augmenterez votre contact avec la nature, les plantes et les arbres et plus vous obtiendrez de bénéfices tant sur le plan psychologique que physique. D’ailleurs, vous ne m’avez pas attendu pour en avoir l’intuition… Ne vous est-il jamais arrivé de rechercher un endroit naturel pour vous apaisez alors que vous étiez stressé ?

Le docteur Li (un chercheur japonais) a établi un protocole qui permet de profitez pleinement de la Nature : le bain de forêt. Je vous le décris et on s’en cause après.

L’objectif est de passer 3 jours en forêt :

  • Le premier jour, promenez-vous pendant 2 heures le matin.
  • Les 2ème et 3ème jour, doublez votre temps de promenade en réalisant 2 heures le matin et 2 heures l’après-midi.

Lors de ces journées, vous pouvez marcher à la vitesse que vous le souhaitez, faire des pauses, flâner… Le seul impératif est de réaliser, a minima, 2.5 km chaque jour.

Je sais ce que vous allez me dire, puisque je pense la même chose : Voilà une application pour le moins contraignante, 3 jours en forêt c’est quasi-impossible à organiser.

Ce à quoi je vous réponds sans cligner des yeux “c’est pas faux”. Moi-même, je n’ai pas encore tenter l’expérience dans son ensemble… Mais je me dis qu’à l’occasion de vacances à venir cela pourrait être envisageable… Pensez tout de même qu’au delà du simple plaisir de la randonnée, les effets de ce type d’expérience ont des impacts significatifs sur notre organisme (baisse du stress, renforcement de l’immunité…) pendant plus de 30 jours après l’expérience.

Malgré ces arguments en béton armé, vous n’êtes pas prêt à passer le cap ? Rassurer-vous, il est possible de profiter des générosités de mère nature en mettant en place quelques pratiques.

Application n°2 : Fréquentez des endroits naturels régulièrement

Inspiré des travaux de Stephen Kaplan.

Choisissez un endroit naturel dans lequel vous vous sentez bien et auquel vous avez un accès facile chaque jour. Passez-y autant de temps que possible. Cela n’a pas besoin d’être une forêt ou un endroit reculé, un parc en ville ou votre balcon peut tout aussi bien faire le job.

Pour choisir cet endroit, posez-vous les questions suivantes :

  • Passer du temps dans cet endroit me permet-il de briser la routine ? Puis-je ici m’éloigner des choses qui sollicitent mon
    attention ?
  • Ce lieu est-il suffisamment vaste pour solliciter longtemps mon attention sans effort particulier ? En gros, pouvez-vous rester longtemps à contempler ce lieu sans éprouver d’ennui.
  • Est-ce que je me sens absorbé par ce décor ?
  • Cet endroit correspond-t-il à mes attentes et à mes intérêts actuels ?

Plus vous aurez de réponses affirmatives et plus vous profiterez des bénéfices dont je parle dans cet article.

L’important ici est de renouer un lien quotidien avec une nature que vous appréciez.

Application n°3 : Améliorez la qualité de vos boîtes

  • Aérer régulièrement (surtout après une pluie ou un orage) vos pièces (même au bureau)
  • Introduisez des plantes dans vos intérieurs.

Voilà, Cet article en arrive à présent à son terme.

Si vous voulez en savoir plus sur les applications scientifiques qui améliorent le bien-être, vous êtes libre de venir visiter mon blog : https://des-sciences-pour-changer-de-vie.com/

Mes sources d’inspiration

Mergali, Nieri. (2018). La thérapie secrète des arbres : les bienfaits de l’énergie de la nature sur notre santé mentale et physique.

(1) Alcock, White, Wheeler, Fleming, Depledge (2014). Longitudinal Effects on Mental Health of Moving to Greener and Less Green Urban Areas Environmental science and technology 48 (2), pp. 1247–1255.

(2) Kardan, Gozdyra, Misic, Moola, Palmer, Paus, Berman (2015). Neighborhood greenspace and health in a large urban center. Scientific Reports volume 5, Article number: 11610.

(3) Ulrich. (1984). View through a window may influence recovery from surgery. Science, Vol. 224, Issue 4647, pp. 420–421.

(4) Li. (2009). Effect of forest bathing trips on human immune function. Environmental Health and Preventive Medicine, pp. 15–68.

(5) Li, Morimoto, Kobayashi et coll. (2008). Visiting a Forest, but Not a City, Increases Human Natural Killer Activity and Expression of Anti-Cancer Proteins. Inernational journal of immunopathology and pharmacology, Vol. 21(1), pp. 117–127.

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Grégory Besnard
Essentiel

Je partage avec vous des applications concrètes et scientifiques pour changer votre quotidien. Plus de contenu ici: https://des-sciences-pour-changer-de-vie.com