Onur Karapinar : « J’ai appris de mon impatience, de mon immaturité et de mon arrogance. »
Dans le cadre de la sortie de mon livre le 17 Décembre 2017, « Comment devenir remarquable à l’ère du numérique », j’ai interviewé Onur Karapinar.
Onur a créé « Essentiel », l’une des plus grosses publications Medium française.
Si j’ai fait le choix d’interviewer Onur, c’est parce qu’il est sur le chemin pour devenir remarquable. Il n’a pas encore atteint ce qu’il souhaite accomplir, mais j’ai pensé qu’il serait intéressant de l’interroger sur sa stratégie et les actions qu’il met en place pour arriver à ses fins.
On parle d’apprentissage, des obstacles de la vie, de sagesse, de rigueur, de peur et de son mentor.
Est-ce que tu peux te présenter et nous parler de ton parcours ?
Je suis auteur et fondateur de Essentiel, une publication qui cherche à répondre à une question : quels sont les ingrédients qui font le succès personnel et professionnel ?
J’écris du contenu pour inspirer les personnes à devenir la meilleure version d’eux-mêmes afin qu’ils puissent libérer leur potentiel pour vivre selon leurs aspirations. Les thèmes vont de la productivité au développement personnel en passant par le sens de la vie.
Pour mon parcours, je suis diplômé d’un Master 1 en Information/Communication à l’Université Sorbonne-Nouvelle.
Le seul salut de ma formation universitaire est de m’avoir donné une dynamique sociale pour appréhender une liberté intellectuelle. Cela représente une occasion incroyable pour concevoir son orientation, mais c’est aussi à double tranchant, car cela implique de savoir occuper son temps pertinemment. Coluche disait très justement : « Les portes de l’avenir sont ouvertes à ceux qui savent les pousser. » Alors j’ai cherché à pousser toutes les poignées de porte sur mon chemin.
Cela m’a conduit à produire et animer une émission de radio hebdomadaire, réaliser des reportages, diriger des équipes, gérer des communautés, m’initier un peu au journalisme, accompagner des porteurs de projets, tester des vêtements, donner des cours et j’ai même écrit des sketchs pour travailler avec un humoriste.
Tout cela s’est fait en dehors de l’université. Je n’ai pas souhaité poursuivre en Master 2 pour ne pas perdre une année de plus. La théorie étouffante m’a poussé à une recherche de pragmatisme qui s’est traduit par un intérêt envers le monde entrepreneurial.
J’ai poursuivi en participant au programme entrepreneur Ticket for Change en 2015, un programme d’accélération des premiers pas pour approfondir, tester et lancer un projet à impact positif.
Le tour Ticket for Change a été l’une des plus grandes expériences humaines de ma vie jusqu’à présent. J’ai découvert qu’il y avait des personnes qui parvenaient à vivre en conciliant passion et intégrité dans leurs affaires. Pour la première fois de ma vie, on m’a invité à l’introspection. Qui suis-je ? D’où je viens ? Comment j’en suis arrivé à là ? Une porte a été entrouverte, mais il me manquait un autre son de cloche pour agir.
C’est ainsi que je suis arrivé à rejoindre la formation Lion, l’école de l’avant-garde des employés de start-up lancée par TheFamily. C’est ici que je me suis un peu initié à la culture start-up, j’ai compris que je ne pouvais pas me résoudre à être un salarié et à travailler pour le rêve des autres. J’ai compris qu’il fallait entreprendre.
Pendant ces années d’exploration, j’ai accumulé beaucoup d’expériences : comment écrire, comment concevoir un contenu de qualité, comment appréhender la nature humaine, la psychologie.
C’est à ce moment-là où j’ai commencé à ouvrir une porte en alliant mes compétences et mes aspirations.
Est-ce que t’as eu des moments déclics dans ta vie ?
Le premier qui me vient à l’esprit, c’est le moment où j’ai failli arrêter l’université dès la première année.
J’avais entretenu tellement d’attentes de la faculté que je suis tombé de haut. Les cours ne décrivaient pas le monde dans lequel je vivais, l’ambiance passive n’encourageait à aucune volonté d’investissement personnel, je ne comprenais pas l’intérêt, ni même la portée de ma présence dans cette institution.
La déception grandissait jour après jour. Je choisissais les cours et je n’allais plus dans les amphithéâtres. Arrivé à un moment de saturation, cette désillusion s’est cristallisée en une résolution. J’avais envoyé une vingtaine de textos pour annoncer à mes camarades de faculté que j’avais pris la décision d’arrêter les études tout en leur souhaitant une bonne continuation.
Les réponses n’ont pas tardé : « Très drôle », « Bien essayé ! On ne me l’avait jamais fait celle-là ! »
Je ne comprenais pas leurs messages.
Jusqu’au moment où l’un d’entre eux m’envoie : « C’est tout ce que tu as trouvé pour ton Poisson d’avril ? »
C’était le 1er avril 2011. Je n’avais pas réalisé que j’avais fait part d’une décision importante le jour d’une tradition festive encourageant à la plaisanterie.
Je m’étais pris au jeu en répondant que « prendre une telle décision ne pouvait être qu’un poisson d’avril ». Mais le mal était déjà fait.
Arrivé à la fin de l’année universitaire, je me retrouve avec dix matières à rattraper, dont une, où je n’étais jamais allé en cours (je ne savais même pas que j’y étais inscrit). Cet échec cuisant m’incitait à rebrousser chemin, je voulais fuir cette pression.
Mais je m’étais tellement démené pour mon admission à l’Université (mon lycée était classé ZEP en banlieue et figurait parmi l’un des plus mauvais de France) que mon orgueil m’a jeté du précipice pour faire face à mes erreurs.
J’étais livré à mes responsabilités et je devais en assumer les conséquences. Le passage en seconde année s’est joué en une semaine de rattrapages stressante et déterminante. Sans conviction… et à ma grande surprise, j’avais réussi.
J’avais validé mon admission en seconde année.
Paradoxalement, ce sont les obstacles universitaires qui, par la suite, m’ont donné envie d’agir et d’être encore plus persévérant.
Statistiquement, j’avais tout pour échouer à l’université (fils d’immigrés, condition précaire, famille monoparentale, mère au foyer analphabète). Je voulais défier les lois de la reproduction sociale, me dire que je pouvais me sortir de ce milieu d’origine défavorable.
La philosophe Chantal Jacquet a proposé un néologisme, les transclasses, pour définir les personnes qui parviennent à s’extirper de tout déterminisme social, à passer de l’autre côté. Je me reconnais dans cette définition. Si je n’avais pas poursuivi mes études, je n’aurai jamais rencontré toutes ces personnes qui m’ont conduit à faire ce que j’ai réalisé. C’est face à l’adversité que j’ai trouvé des aubaines de croissance.
Le tour Ticket for Change a joué un rôle décisif dans mon développement personnel. Ils ont planté une graine dans un terrain fertile, mais rocailleux. Après deux années de recherche et de réflexions, j’ai pu défricher ce terrain pour comprendre la richesse des enseignements dont j’avais bénéficié auparavant. J’ai pu revoir mon parcours avec une lumière introspective et saisir une autre réalité qui m’échappait.
Je me suis mis à écrire, à lire des ouvrages pertinents, à trouver ce que j’avais à dire et à partager à mesure de ma régularité. L’autodiscipline est apparue comme une réponse pour penser à long terme et rediriger mon attention sur ce qui m’est essentiel.
J’ai appris de mes erreurs. J’ai appris de mon impatience, de mon immaturité, de mon arrogance et autres maladresses. J’en suis ressorti grandi.
Tout échec n’est qu’un futur qui a essayé de se manifester. Nous ne pouvons rien faire si ça nous tombe dessus, mais nous pouvons décider de la réaction à avoir pour y faire face.
La différence entre ceux qui réussissent et ceux qui échouent réside dans leur approche de l’échec : soit vous rebondissez aussitôt, réessayez autrement jusqu’à ce que cela fonctionne, soit vous abandonnez et vous sombrez dans l’oubli pour ne pas être allé jusqu’au bout.
C’est quoi ton focus du moment ?
Créer une plateforme (adresse du site quand il sera opérationnel : www.onurkarapinar.com) pour proposer du contenu qui puisse répondre à de nombreuses problématiques liées à la productivité et au développement personnel.
Je veux rendre ces apprentissages accessibles parce que j’ai l’intime conviction que cela peut améliorer la qualité de vie de nombreuses personnes, les aider à exprimer leur réelle singularité, leur vocation, pour qu’ils puissent produire l’œuvre de leur vie.
Ce qui m’intéresse chez toi, c’est que tu es sur le chemin pour devenir remarquable. Est-ce que c’est quelque chose que tu fais de manière consciente ? T’as une stratégie ?
Je passe un certain temps à étudier ce qui fonde le succès à haut niveau. Quelle est la particularité de ceux qui excellent ? Comment se conditionner aux bienfaits du long terme plutôt qu’aux plaisirs immédiats ? Quelles stratégies appliquer pour parvenir à vivre une belle vie en accord avec ses aspirations ?
De l’entrepreneur américain de la Silicon Valley au coureur de marathon kényan, j’ai découvert que les gens qui réussissent viennent de tous horizons et qu’ils commencent à partir de zéro. Mais ils partagent tous une caractéristique : ils ont tous des habitudes incroyables. Cela m’a fait prendre conscience d’un élément essentiel : le succès est la résultante de bonnes petites routines qui peuvent aboutir à de grands résultats avec le temps.
Partant de ce postulat, ma stratégie consiste principalement à bâtir des habitudes saines dont les bénéfices sauront se manifester à long terme.