Parlons neuromythes !

Jérémy Coron
Essentiel
Published in
7 min readDec 5, 2020

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De tout temps, notre cerveau nous a fascinés, nous a fait fantasmer, nous a fait rêver.

Il s’est alors vu attribuer bon nombre de légendes et d’idées reçues…

Légendes et idées reçues qui perdurent encore aujourd’hui malgré les nombreuses études scientifiques qui ont montré et démontré leur non-véracité.

Ces légendes et idées reçues portent un nom… les neuromythes.

Laissez-moi vous présenter 5 d’entre eux.

#1 Les styles d’apprentissage.

D’après une légende très répandue, nous disposerions toutes et tous de « styles d’apprentissage » différents.

Nous serions soit plus kinesthésiques, soit plus visuels ou soit plus auditifs de nature…

Ces « prédominances », particulièrement utilisées en PNL (Programmation Neuro Linguistique), auraient des incidences directes dans la façon dont nous devrions concevoir notre approche de l’apprentissage.

👁 Les « profils » visuels apprendraient plus efficacement par le biais des images, des vidéos ou par toute forme de représentation.

👂 Les « profils » auditifs seraient plus à l’aise avec la voix et l’audio.

👋 Les « profils » kinesthésiques développement leurs connaissances par le toucher et les émotions avant toute chose.

Tout ça est… faux.

Notre cerveau est avant tout un organe visuel.

80% de notre perception du monde provient de nos yeux.

Les chiffrent parlent par eux-mêmes :

Nous possédons,

➡️ 135 000 000 récepteurs pour la vue.

➡️ 6 000 000 pour l’odorat.

➡️ 700 000 pour le toucher.

➡️ 35 000 pour l’ouïe.

Notre cerveau est donc « taillé » pour traiter des images avant toute autre forme d’information.

Pourquoi ?

Simplement, car nous avons évolué dans un environnement extérieur pendant des centaines de milliers d’années.

Environnement extérieur où notre capacité à voir et à percevoir le monde qui nous entourait était clé pour notre survie.

Il est en effet plus avantageux de voir un prédateur arriver que de devoir attendre de le « sentir » ou de le « toucher ».

Là où nos chances de survie existent dans le premier cas, elles sont plus que maigres, pour ne pas dire insignifiantes, dans les suivants…

Donc, non, nous n’avons pas plusieurs styles d’apprentissages, nous avant tout des êtres visuels et uniquement visuels, mais là où les notions de “visuel, kinesthésique et auditif” prennent sens c’est dans leur capacité à capter un apprenant, à le maintenir attentif et alerte vis-à-vis de l’apprentissage communiqué.

#2 Nous n’utilisons que 10% de notre cerveau.

Ce neuromythe est de loin le plus répandu.

Son origine serait liée aux premières études portant sur le cerveau, premières études où les équipements de mesures qui n’étaient pas « assez » sensibles à l’époque ont identifié des zones « inactives » dans notre cerveau, donnant la fausse impression que nous ne l’utilisions pas à 100%.

Dans la réalité, nous utilisons tout notre cerveau constamment et à tout moment, éveil comme sommeil, travail comme moment de détente.

Pourtant cette légende persiste et se voit même alimenter par certains films comme le film « Lucy » de Luc Besson.

#3 Tout l’apprentissage se joue à la petite enfance.

Autre neuromythe, selon une croyance répandue, il serait indispensable d’apprendre le maximum de choses entre 3 et 6 ans, car passé cet âge, apprendre devient beaucoup plus laborieux.

Faux, faux et faux.

Enfin… c’est avant tout un mythe à nuancer.

Ce qui est vrai est que notre plus grand potentiel d’apprentissage se situe de notre naissance à nos 2 ans. Durant cette période, notre cerveau est une vraie éponge, et pour le remarquer il suffit de voir la quantité d’informations qu’apprend un enfant à cet âge-là : marcher, manger, interagir avec son environnement, commencer à parler, reconnaître les sons, les odeurs, les goûts, les textures ou encore les couleurs.

Ensuite, jusqu’au début de l’adolescence, le cerveau continue d’apprendre et d’emmagasiner des connaissances larges et diffuses.

C’est seulement passé les 16–18 ans qu’il commence à se spécialiser dans certains domaines, dans certaines tâches, dans certaines connaissances.

Spécialisation qui limite, de fait, l’apprentissage de connaissances périphériques.

Mais attention, cela ne veut pas dire pour autant que le cerveau, passé cet âge, n’apprend plus rien.

L’une des plus belles caractéristiques de notre cerveau, c’est sa plasticité.

Autrement, il peut, à tout âge se modifier, se moduler et se remodeler pour apprendre de nouvelles connaissances, de nouvelles compétences et de nouveaux mécanismes.

Certes, c’est plus facile d’apprendre et de développer des compétences à 20 ans qu’à 90 ans, mais en aucun cas, arrivé à cet âge, c’est impossible.

Tout le secret réside dans le fait de sans cesse cultiver sa curiosité pour de nombreux domaines, divers et varier. Pratique qui va nous permettre de stimuler de nombreux réseaux neuronaux dans notre cerveau et d’en interconnecter bon nombre d’entre eux.

#4 Écouter Mozart rend intelligent

En voilà un beau neuromythe 100% basé sur… un bug scientifique.

Nous sommes en 1973, date à laquelle des chercheurs américains ont publié, dans la revue Nature, des résultats sidérants qui induisent qu’ « Écouter Mozart augmenterait le QI significativement ».

Dans l’étude en question, ce sont 3 groupes d’adultes qui ont été soumis à des tests cognitifs avant et après avoir écouté soit du Mozart, soit une musique relaxante, soit… rendus tout.

Le groupe « Mozart » eu effectivement des résultats supérieurs aux deux autres groupes, mais des résultats… tout juste supérieurs, rien de réellement significatif… surtout au regard du faible panel de « cobayes ».

Mais, malgré la présence d’études supplémentaires ou de contre-études, la légende s’est rapidement répandue à travers le monde et il aura fallu plus de 15 ans pour que la revue Nature revienne sur l’étude en question et montre sa non-pertinence.

Entre temps, le marketing a largement eu le temps de s’accaparer du sujet et de promouvoir bon nombre d’accessoires « Mozarisés » pour booster l’apprentissage de nos chers enfants notamment.

C’est notamment à cause de ce marketing de masse que ce neuromythe reste encore autant présent de nos jours. De nombreuses années après que sa non-véracité a été prouvée.

#5 Le cerveau gauche et le cerveau droit

Autre neuromythe plus que répandu, le neuromythe du cerveau gauche et du cerveau droit.

Vaste sujet sur lequel se basent de (trop) nombreux tests psychologiques et de personnalité.

Cette « histoire » de cerveau gauche et de cerveau droit n’est, comme son nom l’indique, qu’une… histoire.

Une histoire fondée sur aucun élément scientifique.

Penser que nous sommes soit un profil créatif, donc cerveau droit ou soit rationnel, donc cerveau gauche est une erreur.

D’où provient ce neuromythe ?

Il provient simplement de la spécialisation existante de nos différents lobes cérébraux.

En effet, les différentes parties de notre cerveau ne partagent pas exactement les mêmes fonctions et les mêmes rôles.

Là où le lobe frontal gère les émotions, le lobe pariétal joue un rôle clé dans notre capacité à se situer dans l’espace.
Là où le lobe occipital est le centre de nos fonctions visuelles, notre lobe temporal est principalement centré sur nos facultés de mémorisation.

Donc oui, nos lobes ont des rôles différents, mais non il n’y a pas de « profils cerveau droit » et de « profil cerveau gauche »…

Arrêtons de participer à ses neuromythes.

Il est maintenant temps d’en finir avec ces bêtises.

Il est, selon moi, de notre devoir, en tant que passionnés du cerveau, de son fonctionnement, de ses mécanismes et de son ergonomie, de lutter contre ces idées reçues.

Idées reçues bien trop souvent exploitées par des personnes aux mauvaises intentions, dans un but uniquement commercial.

Ainsi, la prochaine fois que quelqu’un vous parlera de son côté « cerveau droit », faites-vous le devoir de la placer sur le bon chemin et non pas sur le chemin des neuromythes.

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Jérémy Coron
Essentiel

Passionné de neuroergonomie et de surperformance professionnelle, je vous partage le résultat de mes recherches au travers de mon podcast hebdomadaire.