Vêtements : quelle vie après notre placard ?

Valérie François
Essentiel
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5 min readMar 5, 2019

Une fois par an, je fais le tri dans ma penderie. Je mets en grande partie les vêtements que je ne porte plus dans les conteneurs de recyclage à deux pas de chez moi. Je me suis toujours demandée ce que devenaient ces vêtements. Pas vous ? Et il y a un mois, le groupe zéro déchet de Versailles a organisé une visite d’un centre de tri du Relais en région parisienne. Je me suis dit qu’il était temps que j’aille voir ce qui se passait de l’autre côté du miroir de la fast fashion.

La mode, deuxième industrie la plus polluante

Vous ne le savez peut-être pas mais la mode et en particulier la fast-fashion ruine notre planète. Elle est après le pétrole, l’industrie la plus polluante au monde ! On fabrique chaque année 80 milliards de vêtements. Et pourtant on ne porte que 30 % de notre garde robe.

  • 2 500 litres d’eau en moyenne pour fabriquer un tee-shirt
  • 10 % de la consommation mondiale de pesticide utilisé pour la culture du coton
  • 70 % des cours en Chine sont pollués par l’industrie du textile
  • 70 millions de baril d’essence nécessaire chaque année pour la fabrication du polyester.

Et on ne parle pas des conditions de travail désastreuses des ouvriers du textile en Asie ou en Afrique !

Et tout cela pourquoi ?

  • 80 milliards de vêtements fabriqués chaque année
  • 70 % de notre garde-robe n’est pas portée
  • Chaque français jette 12 kgs de vêtements chaque année !

Quel immense gâchis ! Tant que nous ne modifierons pas notre manière de consommer, cela ne changera pas. A-t-on vraiment besoin d’autant de vêtements dans notre garde-robe ?

Et que fait-on de ces vêtements après les avoir portés ?

Sur les 80 milliards de vêtements fabriqués chaque année, 26 milliards finissent dans des sites d’enfouissements ou incinérés. Pour éviter cela, vous pouvez les donner ou les mettre dans ces fameux conteneurs blancs que l’on voit fleurir dans toutes les villes.

Que deviennent les vêtements une fois jetés dans ces bacs ?

Vous ne vous êtes jamais demandé ce que devenaient les vêtements une fois jetés dans ces conteneurs ? Je suis sûre que oui ! J’ai eu ma réponse en allant visiter un centre de tri du Relais à Chanteloup-les-Vignes. Rien de tel que de passer de l’autre côté de la barrière pour se rendre compte du gâchis qu’engendre notre besoin d’acheter toujours plus de fringues.

6000 tonnes de vêtements collectés chaque année

Le Relais de Chanteloup-les-Vignes collecte 6000 tonnes de vêtements par an.

Le Relais est un réseau d’entreprises d’insertion spécialisé dans la valorisation des TLC (textiles, linge de maison, chaussures) pour la création d’emplois durables et la lutte contre l’exclusion sociale créée en 1984 par la Communauté Emmaüs de Bruay La Buissière. A Chanteloup-les-vignes, une centaine de salariés sont embauchés en CDI ou en contrat d’insertion.

Lorsque l’on arrive au Relais, on est d’abord submergé par ces montagnes de vêtements.

Le centre de tri collecte chaque année 6 000 tonnes de vêtements. 18 tonnes par jours !

Ces vêtements proviennent des dons mis dans les conteneurs mais aussi des surplus de vêtements des associations comme le Secours Catholique et la Croix-Rouge et Emmaüs.

« Et on n’arrive pas à tout trier », nous explique le chef d’atelier. Le centre n’a la capacité de trier « que » 3 800 tonnes par an. Le reste est réorienté vers d’autres centres de tri du Relais ou des trieurs privés.

Que font-ils de tous ces vêtements ?

97 % des vêtements sont valorisés.

  • 6 % (les vêtements les plus beaux) alimentent les boutiques Ding Fring, il y en a 70 boutiques en France et 7 en Ile-de-France. Allez-y ! vous y ferez de bonnes affaires !
  • 10 % sont transformés en chiffon
  • 26 % sont transformés en matière première. Une partie est recyclée en isolant thermique et acoustique, fait à partir de vieux jeans recyclés et appelé le Métisse®.
  • 55 % part en Afrique : Le Relais possède en Afrique 3 centres de tri : Madagascar, Burkina Faso et Sénégal. Ils rachètent les vêtements, les retrient sur place puis les vendent au prix du marché pour ne pas dévaloriser les activités locales. Les revenus générés sont réinvestis sur place à d’autres activités comme les coopératives agricoles ou l’artisanat. Le cercle semble donc plutôt vertueux même si une question reste néanmoins sans réponse : que deviennent les vêtements dont les africains ne veulent pas ? Certains partent dans les friperies locales ou les marchés, mais sans doute aussi dans les poubelles à ciel ouvert de ces pays.

Comment ça marche ?

Les vêtements sont déchargés, mis dans des bacs puis pesés. Puis les sacs plastiques sont déchirés « ce qui n’est pas très écolo », reconnaît-on. Mais ils n’ont pas encore trouvé d’autres solutions pour protéger les vêtements dans les conteneurs.

Les vêtements sont déchargés, mis dans des bacs puis pesés.

Un premier tri est effectué entre ce qui est dit « léger » et ce qui est « lourd » comme les manteaux qui sera mis de côté et ne partira pas bien sûr en
Afrique !

Les vêtements passent sur un tapis roulant ou des employés les tris en fonction de l’état, de la matière et des catégories (boutique, Métisse®, recyclage). Il y a également un tri manuel qui est effectué pour récupérer les articles de meilleures qualités qui n’ont pas été repérés sur le tapis. « Il faut une bonne connaissance du textile et de la matière car c’est souvent au touché que les salariés estiment la matière du vêtement. Il faut 6 mois pour arriver à bien trier un vêtement. Les salariés changent de poste régulièrement. Il y a une rotation », nous explique la chargée de communication qui nous accompagne.

Les vêtements passent sur un tapis roulant ou des employés les tris en fonction de l’état, de la matière et des catégories

Les vêtements qui partent à l’exportation ou qui vont dans l’usine du nord de la France pour fabriquer le Métisse® sont mis dans des balles de 450 kilos.

Les vêtements qui partent à l’exportation sont mis dans des balles de 450 kgs.

Une personne est dédiée aux chaussures et aux sacs, une autre récupère les dentelles. Les vêtements destinés aux boutiques sont soigneusement pliés et rangés.

Les vêtements destinés aux boutiques sont soigneusement pliés et rangés.

Et vous, faites-vous attention à vos achats de vêtements ? En voyant tout ce gâchis et l’énorme impact que cette sur-consommation d’habits a sur notre planète, êtes-vous prêts à acheter mieux mais moins ?

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Valérie François
Essentiel

Journaliste-rédactrice @cidj @linfodurable #éducation, #emploi, #parité, #développementdurable, #écologie #voyageuse Auteure de Sibériennes, ed. #Transboreal