World War Z, de Max Brooks

Frédéric Danset, écrivain
Frédéric Danset
Published in
3 min readApr 29, 2018

Chronique sur le livre

La guerre contre les zombies est finie. La preuve, voici le rapport de la commission post-traumatique.

La guerre fut mondiale, dévastatrice. C’est bien la première fois qu’une guerre mérite son épithète de mondiale avec autant d’à-propos. Elle a embrasé le monde, des sommets tibétains jusqu’aux rivages de l’Afrique du Sud en passant par l’Europe. Elle a vu naitre des héros, elle a vu toutes les nations se lier pour combattre le fléau, elle a vu les #zombies (on dit les zacks) faire des ravages dans tous les camps et dans tous les milieux sociaux, mais elle a vu une fois encore les hommes développer de nouvelles stratégies pour l’emporter.

Ce qui demeure ressemble à un monde en ruine, vivant, mais épuisé et vacillant. Il faut impérativement travailler à collecter les éléments qui vont reconstituer la mémoire des évènements et permettre aux sociétés post-zack de rebondir. Pour cela l’auteur, employé par l’ONU, recueille des témoignages auprès d’hommes et de femmes rescapés de la catastrophe. Il nous associe à son travail sans rien occulter, et parvient, au fil de ses voyages intercontinentaux, à nous restituer peu à peu un tableau global des circonstances du désastre, depuis la découverte du virus dans la campagne chinoise, jusqu’aux batailles homériques qui ont vu l’héroïsme ou la lâcheté tour à tour l’emporter. Si le monde est passé à deux doigts de sa destruction, il ne doit sa survie qu’à l’isolement de groupe résistant au sein de zones fortifiées pour mieux y organiser la riposte. Cela signifie que pour sauver le genre humain, l’immense majorité de l’humanité a été sciemment sacrifiée. La valeur politique trouve là la meilleure expression de ce qu’est la responsabilité

Mais là, vous n’y croyez pas, n’est-ce pas ? Vous vous dites, et alors… je suis abonné à Paris-Match et j’ai déjà vu ce genre de choses — des reportages de l’ONU s’entend. Et puis quoi ? Me montrer devant mon conjoint ou mes amis avec une livre de… zombies dans la main ! C’est la honte. Vous trouvez ces histoires tout juste bonnes à faire ricaner sournoisement votre petit frère pendant qu’il bouffe ses crottes de nez ? Vous pensez que tout ça fleur bon la culculterie chère aux geeks et la contreculture zadiste ? Et bien vous avez tort. Vraiment, vraiment tort. Parce que la guerre contre les zombies a bien eu lieu, parce que les témoignages sonnent si justes qu’on se demande parfois si l’auteur n’a as eu accès aux véritables archives d’évènements dont nous n’aurions pas entendu parler. Il ancre cette guerre dans notre mémoire à la manière de ces chroniques de résistants qui nous ont rendu palpable l’histoire du monde. La diversité des environnements ou des personnages, celles des situations, le retrait du narrateur/auteur par rapport à ce qu’il nous révèle construit un récit d’un niveau bien supérieur à celui du genre zombie, et, une fois n’est pas coutume, un livre d’une intelligence aiguë assez rare dans la production littéraire générale.

Je vous adresse ce commandement de survie : lisez ce livre et oubliez le film (renié par l’auteur lui-même), cela n’a rien à voir. Lisez et parlez de ce livre à tous ceux qui doutent du pouvoir de la littérature, conseillez le comme si vous vous engagiez dans le militantiste littéraire, vous ferez alors une bonne action pour le plaisir, la passion, et pour la sanctification de tout ce que les livres peuvent apporter.

--

--