Mathieu H
9 min readMay 3, 2015

La Nintendo “Virtual Boy” a été commercialisé aux États-Unis en 1995 et abandonnée en 1996 — ce qui en fait la baleine blanche du jeu électronique pour les amateurs. Mon plus jeune frère en avait repéré une à un vide grenier et négociées avec l’argent récolté à la sueur de son job d’été pour avoir un aperçu de l’avenir. Malheureusement, cet avenir infligeait d’aveuglants maux de tête et imprimait une image rouge fantôme inquiétante qui durait longtemps après l’expérience terminée.

Selon le Wikia Nintendo :

“Les effets 3D sont le résultat de deux réseaux linéaires 1x224, chacun dirigé vers un œil, et qui sont présentés au joueur par le biais de miroirs oscillants qui provoquent un murmure émis par le Virtual Boy. L'effet 3D peut causer un traumatisme dans la zone oculaire (en fait, Nintendo a exhorté les parents à ne pas laisser les enfants de moins de sept ans jouer, car le système avait le potentiel d'endommager leurs yeux). Sachant cela, Nintendo introduit une option au sein de chaque jeu Virtual Boy commercialisé qui met en pause le jeu toutes les quinze ou trente minutes.”

L'effet final est plus proche de celui du parallaxe plutôt que la vraie réalité immersive. Le résultat en était un jeu en deux dimensions améliorée (défendable) par dimensionnalité - «virtuelle» uniquement par le nom.

Quinze ans plus tard la Réalité Virtuelle (VR) fait son grand retour avec Oculus, Samsung Gear VR, le projet Morpheus, Google Cardboard, HTC Vibe, OSVR, et d'autres joueurs plus petits pas encore annoncés.

La technologie de Réalité Virtuelle a fait un grand pas en avant, mais la pensée derrière les expériences VR n’a pas avancé.

Concevoir pour un écran plat et penser un environnement immersif sont deux défis fondamentalement différents. Voici mes quelques clés apprises de l'expérimentation VR chez Instrument :

Penser comme un humain

Il y a eu beaucoup de changements dans les 200.000 années où l’homo sapiens a marché la terre.

Nous sommes passés de prairies ouvertes où l'on pouvait voir le danger ou les récompenses... à des espaces urbains où l’on se réfère à des signes pour nous informer… et en fin de compte à des ordinateurs où nous passons par une interface graphique pour communiquer.

Voici ce qui peut être considéré comme des modèles d'interaction :

La Savane
Le plus ancien des modèles d'interaction. Nous pouvons tout voir, nous sommes à terre. Le contenu obéit à l'espace. Les objets du présent sont à portée de main. L'avenir est à l'horizon, le passé derrière nous.

Le Magasin
Comme dans la savane, la boutique implique un espace où vous pouvez vous déplacer mais avec un niveau plus élevé de la densité. Le contenu peut être disposé aux murs ou sur des plans à l'intérieur de l’espace.

L’Abstraction Les 40 dernières années ont vu l’arrivée du paysage numérique ; un plan à deux dimensions qui rend abstrait des concepts familiers du monde réel comme écrire, utiliser un calendrier, stocker des documents dans des dossiers qui deviennent éléments de l’Interface Utilisateur (UI). Cette approche permet un haut niveau de densité d’information et le multitâche. Le mauvais côté réside dans le fait que les nouveaux modèles d’interaction doivent être appris et qu’il y a une charge cognitive plus élevée dans la prise de décision.

Je soupçonne que les réflexes pulsionnels, de réaction aux dangers ou aux récompenses ressurgissent plus facilement. Par exemple, si vous êtes dans un paysage de Réalité Virtuelle et qu’il y a un fossé d’un côté de vous et une route plate de l’autre, vous prendrez la route — même si il n’y a pas de réel danger. Maintenant, disons qu’il y a un signe pour un fossé et un signe pour une route. Il faut du temps pour lire et comprendre le signe (la charge cognitive) et comme nous savons que les gens ont tendance à ne pas lire beaucoup, donc environ la moitié se jettera dans le vide et le reste prendra la route.

Utilisez la perspective à votre avantage

Les concepteurs utilisent la taille, le contraste et la couleur pour désigner la hiérarchie. Ces outils sont encore disponibles dans la VR, mais ils sont un peu différents. La taille est par exemple basée sur la distance entre l’utilisateur et un élément de contenu.

Le contenu peut être traité comme un Ecran Tête-Haute, se verrouillant à une distance déterminée à partir du sujet-visionneur.

Il peut être verrouillé à l’environnement afin que la vue de l’élément change pour les utilisateurs tandis qu’ils se déplacent à travers l’environnement.

Et il peut flotter libre, verrouillé au monde.

Regarder autour

Les concepteurs et designers ont maintenant comme terrain de jeu un champ de vision complet, et demandent aux humains de tourner leurs têtes ou leurs corps entiers.

Malgré cela, les concepteurs tentent de forcer des solutions 2D dans un espace 3D, tout comme le Virtual Boy à l’époque.

Il y a (en quelque sorte) une raison compréhensible à cela ; un petit cône de concentration.

Ce qu’il se passe réellement à l’intérieur d’un appareil VR comme Cardboard or Gear VR : un seul écran est effectivement divisé en deux, divisant la résolution. Votre œil se concentre en fait sur le centre de cette zone, un accent de cône qui devient rapidement flou. Cela fait une assez petite zone, d’assez faible résolution pour travailler.

Il y a plusieurs façons de résoudre ce problème de petit cône de concentration, et voici quelques options à l’aide de plusieurs zones imbriquées :

1/ Plat : la solution basique L’interface est écrasée pour l’espace 3D. Il est difficile de lire le texte ou les images en perspective. Il n’y a pas de sens de réalité dans l’espace.
C’est un mur.

2/ Incurvé : un peu mieux Le contenu est courbé autour de l’utilisateur, de sorte que les faces fassent toujours face à l’utilisateur — ce qui rend beaucoup plus facile à lire le texte ou les images.

3/ Moins de contenu : mieux Moins c’est mieux, même si cela nécessite une certaine habileté pour se déplacer à travers elle.

4/ Entouré : le Meilleur La hiérarchie peut être déduite de la proximité au cône de concentration. Le contenu secondaire peut être poussé hors de vue mais toujours rester accessible.

…Ou alors séparez les interactions complexes en différents dispositifs. Par exemple, la densité d’écran de Google Cardboard est assez grossière. Plutôt que d’essayer de mettre une interface complexe et dense dans un environnement VR, utilisez le téléphone pour vous rendre où vous devez aller et puis sautez dans l’environnement VR pour l’explorer.

Construire à l’échelle

La technologie va s’améliorer. Les casques deviendront plus légers, les écrans vont devenir plus denses, et nous aurons plus de façons d’interagir avec les environnements virtuels. En ce moment, ces entrées sont assez limitées et peuvent être dépendantes de la plateforme, mais leurs potentialités (affordances en anglais) n’ont pas besoin de l’être.

L’affordance est un terme commun dans la conception de l’expérience utilisateur qui signifie : “Une situation où les caractéristiques sensorielles d’un objet implique intuitivement sa fonctionnalité et son utilisation.” (via usabilityfirst.com)

Une version simple de ceci peut être trouvé sur le web. Survolez un lien texte et l’icône de la flèche doit passer à une icône de main signifiant que quelque chose va se passer si vous cliquez. En survolant un lien avec une souris, un trackpad, ou le stylet ne change pas l’affordance ; ça reste une main. Nous sommes conditionnés à attendre le même comportement, indépendamment du moyen d’entrée.

La VR aura besoin de ces potentialités pour indiquer ce avec quoi on pourra être en interaction, et quand cette interaction aura lieu. L’affichage sensoriel de ces affordances devrait évoluer avec la technologie tout comme les potentialités des écrans. Une mise en avant qui se produit maintenant sur le regard, devra encore travailler pour le suivi de la main, de micro-gestes ou même d’un événement de l’esprit, d’une pensée.

Concentrez-vous sur l’expérience

La Réalité Virtuelle est immersive ; sa conception devrait soutenir et renforcer le sentiment de la présence de l’utilisateur dans l’environnement virtuel.

  • Éviter tout mouvement rapide, il rend les gens malades.
  • Si il y a une ligne d’horizon, la garder stable. Un horizon mobile en VR, c’est comme un horizon mobile lorsque vous êtes sur un bateau : pas bon.
  • Évitez les transitions rapides ou brusques dans l’espace, ils sont très désorientants.
  • Ne pas obliger l’utilisateur à trop déplacer leur tête ou leur corps. Non seulement c’est désorientant, mais l’utilisateur peut porter son casque dans un environnement où ils ne peut pas se retourner, un avion par exemple.
  • Soyez prudent en mélangeant 2D et 3D, le changement peut être choquant.
  • Gardez la densité des informations et des objets sur l’écran assez basse, beaucoup plus basse que dans le design standard sur écran. Tout ne doit pas être visible.
  • Utilisez des indices du monde réel, si et quand c’est possible.
  • Les scènes trop lumineuses sont fatigantes.
  • En cas de doute : test, test, test.

Et avec ça on fait quoi ?

La manière dont nous vivons le monde change et continuera à changer radicalement. D’ici 20 ans, quand nous regarderons en arrière, le passage AR / VR (Augmented Rality / Virtual Riality) sera considéré comme aussi important et percutant que les principaux changements de paradigme du XXe siècle, y compris l’Internet.

Il est particulièrement excitant de travailler dans la conception de cette expérience en ce moment. Les problèmes sont tous nouveaux — nous ne sommes pas liés à de vieux modèles d’interaction. Nous pouvons et allons échouer, mais les succès vont changer la façon dont nous expérimenterons le monde.

Expériences VR recommendées :
Jaunt: Cinematic VR
Oculus Story Studio
Alien Isolation
Doom 2 on the Rift !
Samsung Milk VR

Lectures recommendées (en anglais) :
Landscape and Memory by Simon Schama
The Sword of Damocles
The Rise and Fall and Rise of VR
Rainbows End by Vernor Vinge

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Matt Sundstrom est amoureux de l’avenir, du dessin et de l’expérience utilisateur. Trouvez-le chez Instrument ; une agence indépendante de création numérique qui lance marques, produits et campagnes avec des expériences interactives pour chaque écran — située dans la verdoyante Portland, Oregon.
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Images © Matt Sundstrom 2015

Mathieu H

French graphic designer, illustrator, advertising lover & so much more. ///////////////////////////////////// Graphiste illustrateur freelance, et bien plus.