Petit tour d’horizon des pédagogies alternatives
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Dans cet article, «L’école nouvelle pour tous, une utopie ?», je défendais déjà une vision de l’éducation possible à faire exister aujourd’hui. Une vision qui consiste à placer l’enfant au centre du système scolaire et à s’adapter à lui en fonction de ses besoins et de ses capacités.
Les pédagogies alternatives qui proposent ce type de solution existent déjà. Pas seulement en France mais dans le monde entier. Ce n’est pas nouveau. La plupart des pédagogies sont même nées au début du XXème siècle ! Et pourtant aujourd’hui, il n’existe en France que 700 écoles se revendiquant des pédagogies dites “nouvelles” [Isabelle Pelloux, Ecole du Colibri].
Je ne vous propose pas, dans ce nouvel article, une analyse profonde mais plutôt une vue d’horizon sur certaines propositions existantes. Je fais ici un rapide tour du monde des pédagogies alternatives, ce qui me permet d’avoir l’esprit plus clair au sujet des solutions existantes. Et si, par ce résumé, je peux vous éclairer par la même occasion, ça me plait ! Let’s go.
Montessori
Maria Montessori (1870–1952) est une des 1ères femmes italiennes médecin. Elle développe d’abord sa pédagogie auprès d’enfants déficients mentaux. En 1907, elle accompagne des enfants pauvres dans un quartier populaire de Rome. Elle crée alors la Casa dei bambini qui devient sa base de recherche, un laboratoire d’expérimentation pour peaufiner sa méthode.
Selon la méthode Montessori, « l’enfant porte en lui son projet, son propre schéma de développement, qui ne peut se réaliser que s’il évolue librement ». Le principe est donc de s’adapter au rythme particulier de l’enfant en se référant aux périodes sensibles de celui-ci. La méthode se distingue par
- l’autodiscipline et l’autocorrection
- un environnement adapté aux besoins, aux capacités et aux centres d’intérêt de chaque enfant
- une ambiance pensée et réalisée pour favoriser le développement de l’enfant
- un apprentissage par l’expérience et la manipulation où le sensoriel est favorisé
Selon Antonella Verdiani, on compte 22000 écoles Montessori réparties sur 6 continents. La plus grande est la City Montessori School de la ville de Lucknow en Inde. Fondée en 1959, elle regroupe 25000 élèves de la maternelle au supérieur. En France, il y aurait environ 3000 élèves dans une soixantaine d’établissements (par exemple à Rennes) .
Certaines écoles publiques ont aussi adopté le matériel Montessori pour l’apprentissage des petits. Un exemple parmi tant d’autres : La ferme des enfants dans le hameau des buis en Ardèche.
Vous avez peut-être entendu parler de Céline Alvarez . Elle est connue pour son expérimentation dans une classe de banlieue parisienne. Les résultats sont impressionnants (article).
La méthode Montessori est la plus réputée des approches alternatives. On trouve du matériel ici et là, on trouve aussi de nombreux tutos pour fabriquer le matériel ici et là. Cela a beaucoup de conséquences positives bien sûr mais il faut veiller à ne pas perdre la vraie philosophie de cette pédagogie. Il y a une approche précise qui accompagne l’apprentissage. Ce n’est pas qu’une question de matériel et d’activité. C’est avant tout une attitude particulière de l’adulte qui doit être mise en place.
Pour l’anecdote, les dernières actus du prince Georges, le royal baby britannique, nous rappelaient sa majestueuse rentrée en maternelle Montessori. Quelle pub pour cette pédagogie !
Steiner et Waldorf
Rudolf Steiner (1861–1925) est d’abord connu pour ces travaux philosophiques. Il est le fondateur de l’anthroposophie en Allemagne. En 1919, la 1ère école Steiner est créée pour les enfants de familles ouvrières à Stuttgart. Les grands principes partagés par la pédagogie Steiner et Waldorf sont :
- former un citoyen du monde capable de donner un sens à sa vie
- apprendre par l’art, le corps et la nature
- rencontrer et coopérer
Aujourd’hui, on compte 250 000 élèves dans le monde (1000 sites surtout aux Etats-Unis et en Allemagne). 160 sites aux US dont 25% en Californie du Nord. Seulement 2300 enfants en France sont répartis dans une vingtaine d’établissements (source wikipédia). Exemple : école les Capucines à Rennes.
En France, elles ont fait la Une en 1999, suite à des suspicions de dérives sectaires. Ces accusations ont rapidement été levées après l’inspection de tous les établissements français. Le député PS Jacques Guyard, qui avait lancé ce débat dans les médias, a été condamné pour diffamation.
Freinet
Célestin (1896–1966) est un instituteur français. C’est aussi un « militant engagé, politiquement et syndicalement[…] il conçoit l’éducation comme un moyen de progrès et d’émancipation politique et citoyenne. » wikipédia. Il épouse Elise Freinet qui participe grandement à l’élaboration du mouvement Freinet. En 1935, il créée sa première école populaire « Le Piouler ». Freinet y propose :
- une pédagogie qui amène l’enfant à ressentir le besoin de travailler, d’apprendre, se passionner, susciter la curiosité.
- un réseau de règles pour former une petite démocratie. L’idée principale de Freinet était de préparer la jeunesse à la vie sociale, intellectuelle et morale contemporaine. Dans cette démocratie, la coopération et l’entraide sont primordiales.
- un apprentissage par tâtonnement expérimental. Les élèves peuvent ainsi développer leur sens critique, leur responsabilité et leur autonomie.
- un apprentissage favorisant la capacité de chercher et d’inventer plutôt que de reproduire.
« Le développement de l’esprit critique des enfants est au centre de la philosophie éducative et on cherche à le stimuler par des techniques diverses et variées et non par une méthode préétablie comme Montessori et Waldorf » Antonella Verdiani
En France, on liste une dizaine d’écoles officielles « Freinet », et environ 3000 classes Freinet et plus de 10000 enseignants formés. « Le « Mouvement Freinet », est connu dans des dizaines de pays […] Nous avons pu ainsi voir des écoles ou des groupes, s’en réclamant, en France, au Mexique, au Brésil, au Japon, très récemment. « Jacques Pain 2007 Encyclopaedia Universalis
Exemple d’une école Freinet à Nantes : Ange Guépin.
Reggio Emilia
(Présentation de La chenille bleue) Après la Seconde Guerre Mondiale, les parents de Reggio Emilia (région du Nord de l’Italie) décidèrent d’ouvrir une école pour leurs jeunes enfants. Loris Malaguzzi, un instituteur d’un village voisin, décida de les soutenir. Il se laissa inspirer par de nombreux pédagogues progressistes. Au fil des ans, les écoles et les crèches de Reggio Emilia ont développé sous sa direction une pédagogie particulière où l’enfant occupe une place centrale.
Un aspect important de cette pédagogie est que chaque enfant a 100 langages à sa disposition. C’est à nous, adultes, de faire découvrir aux enfants tous ces langages en bougeant, chantant, bricolant avec eux…. Alors seulement un enfant peut montrer et exprimer le meilleur de lui-même. La pédagogie Reggio-Emilia se base sur 4 piliers :
- l’enfant est maitre d’oeuvre de ses apprentissages
- une relation forte de confiance et d’engagement de la part de l’équipe pédagogique, des enfants et des parents
- l’expression de soi et besoin de communiquer
- l’environnement et le matériel incite à l’action à travers l’émerveillement
Les lieux s’inspirant de la pédagogie Reggio Emilia sont nombreux dans les pays Scandinaves et anglo-saxons. Je n’ai pas trouvé l’info sur le nombre d’établissement français.
Decroly
Jean-Ovide Decroly (1871–1932) est pédagogue, médecin, et psychologue belge. Il élabore et enrichit sa pédagogie dans une clinique psychiatrique ouverte dans sa maison où vivent ses propres enfants. L’école Decroly, fondée en 1907, pratique la pédagogie active selon laquelle l’enfant est considéré dans sa globalité (corps et esprit sont unis). L’apprentissage se construit à partir de l’observation sur le terrain : du concret vers l’abstrait. L’expression scénique y est énormément développée.
Ex : L’actrice-réalisatrice Mélanie Laurent a été scolarisée dans un collège alternatif (Decroly à Saint-Mandé dans le Val de Marne)
Ecole du colibri
Isabelle Pelloux est institutrice, pédagogue et formatrice. Elle est formée en psychologie et aux outils de la dynamique relationnelle. Elle créée l’Ecole du Colibri en 2014 au sein du centre écologique des Amanins (fondé par Michel Valentin et Pierre Rabhi) dans la Drôme près de Valence.
L’école du colibri accueille chaque année 35 élèves du CP au CM2. La pédagogie d’Isabelle Pelloux met en avant
- la coopération et l’entraide
- l’apprentissage de la gestion mentale
- l’éducation à la paix et à la citoyenneté
- L’atelier philosophie , ouverture à la tolérance, et exprimer sa pensée oralement permet de mieux l’éclaircir
- Apprentissage du vivre ensemble, définir ensemble des règles de fonctionnement
- Gestions des émotions, méthode de gestion des conflits, travaux sur les intelligences multiples, jeux coopératifs…
- Grande place à l’environnement, respect de la nature, découverte du monde du vivant (jardin, cuisine, observation….)
Je ne peux que vous conseiller de lire son livre “L’école du colibri” (Actes Sud) et de voir le film “Quels enfants laisserons-nous à la planète ?”. Ce projet qui vit, existe et fait ses preuves me fait rêver et vibrer ! S’il pouvait pousser des écoles du colibri partout en France et même au-delà…
Living school
Là aussi un bel exemple de réussite, une belle histoire qui me réjouit ! Living school nait en 2007 dans le 19ème arrondissement de Paris. A la tête du projet, Caroline Sost, la directrice de l’établissement montre un tel enthousiasme pour ce projet magnifique ! Aujourd’hui plus de 80 élèves profitent de cette école, de la petite section de maternelle jusqu’au CM2.
La présentation de l’école est directe et franche : « Si vous êtes allergiques à la psychologie, au travail sur soi, à l’écocitoyenneté, ne venez surtout pas chez nous ! » .
Moi, je veux y aller, dis la petite Marine que je suis ! ou la grande… qui sait ? je m’évade, aucune confidence personnelle ne sera faite sur cette page. Entre Living School et l’école du Colibri, mon cœur balance !
Bref, le projet pédagogique de cette école est basé sur le savoir-être. Il favorise la confiance, la sécurité et l’estime de soi. Il est basé sur la psychologie d’évolution. L’apprentissage des comportements éco-citoyens, de l’impact que nous avons sur la nature, du respect de son environnement…
L’école promeut une co-éducation concrète entre les parents et l’équipe pédagogique. Le moteur de l’apprentissage est la joie, le plaisir et les différents sens.
D’autres exemples
- une pédagogie nomade : vie en communauté, responsabilisation, coopération. Equilibre entre le travail manuel et le travail intellectuel.
- Le lycée expérimental de St Nazaire
- Une pédagogie alternative dans une école traditionnelle
Si vous aussi vous voulez faire votre part….
Le site Internet « Créer son école » est une mine d’or en informations juridiques et pratiques pour créer son école. Il propose également un annuaire des écoles indépendantes.
Ou bien rejoignez des projets qui se lancent et qui ont besoin de soutien comme Aimer Vivre et Apprendre , projet d’école innovante à Nantes ou Le lieu utile, projet d’école en région nantaise porté par Florence Aussant (site en construction).
N’hésitez pas à parler de vos propres projets alternatifs en commentaires !
