Comment écrire un article : se libérer de la page blanche

Définir les étapes du voyage pour conduire votre lecteur vers votre réflexion

Aurélie Rolland
francetelevisions-design
10 min readJan 7, 2019

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L’écriture est un cadeau précieux de l’espèce humaine. Elle nous permet de retranscrire nos idées, nos expériences et se fait témoin de notre évolution.

Transmettre par l’écriture semble aujourd’hui un fait acquis, cependant la tâche est ardue. Au sentiment d’illégitimité, se mêle la pudeur et la peur du regard de l’autre. Je ne suis pas en capacité de vous aider concernant ces blocages. Par contre, je peux modestement vous raconter de quelle manière je dépasse la page blanche et le flou de savoir par où commencer !

Au mois de novembre, j’ai animé un atelier qui avait pour but d’embarquer toute personne souhaitant écrire des articles / histoires mais dont la tâche semblait trop compliquée. L’objectif en fin d’atelier n’était pas parvenir à rédiger un article mais que chaque participant puisse repartir avec un peu de méthodologie* pour pouvoir contourner l’angoisse de la page blanche. Il n’y a rien de plus “abyssal” que de ne pas savoir par où commencer.

J’ai construit mon atelier autour de la métaphore du voyage : du choix de la destination jusqu’à l’arrivée. Je vous propose d’en retranscrire l’expérience ici.

*J’inscris méthodologie en italique car je ne pense pas qu’il existe (de manière générale dans la vie) des lignes déjà définies qui ne puissent être enjambées. Je crois que chacun peut trouver sa façon de fonctionner. Ici, j’ai partagé la mienne dans les grandes lignes pour que chacun puisse se les approprier.

Etape 1 : Quelle est notre destination ?

Que voulez-vous transmettre à votre lecteur ?

Lorsque nous décidons de partir en vacances, la première étape est de savoir où nous désirons aller. Si la destination est identifiée nous pouvons commencer à préparer notre voyage :)

Il en est de même lorsque nous écrivons un article. Se lancer à corps perdu dans la rédaction d’un argumentaire sans savoir précisément ce que nous souhaitons transmettre nous fait prendre le risque de nous faire perdre de notre énergie, de créer de la frustration et de traiter l’article de façon superficielle.

Ainsi, la première question que je me pose lorsque j’écris est “quel est le but de cet article / de ce mail / de ce doc”. Il me faut répondre à la problématique de savoir ce que je veux transmettre au lecteur avant de commencer tout travail de rédaction.

Pourquoi j’écris un article ? Qu’est ce que je veux que le lecteur ressente, apprenne, comprenne grâce à ce dernier ?

Il me faut trouver le pourquoi avant de réfléchir au comment.

Pour déterminer le pourquoi, j’essaie d’être efficace et concise. Une phrase doit suffire. Si je sens que mes objectifs sont trop nombreux, je me recentre et fais des choix. Cette partie est celle que je soigne le plus car elle est la colonne vertébrale de mes articles. Sans un pourquoi ni une destination, il n’y pas d’article.

Etape 2 : Par quelles villes devons-nous passer afin de rejoindre notre destination ?

Quelles sont les informations / grandes parties nécessaires à la compréhension de notre article ?

Après avoir choisi la destination de notre prochain voyage, il faut que nous définissions les grandes “étapes” de notre trajet en voiture*. En premier lieu, nous devons choisir par quelles villes nous devons passer pour atteindre notre point d’arrivée.* oui ;)

C’est lors de cette étape que je détermine les grandes parties de mon article, les piliers de “ma pensée”. Souvent, je me pose la question de savoir lesquelles sont les grandes idées qui structurent mon argumentaire et par lesquelles l’utilisateur doit passer pour comprendre le fondement de l’article.

Quelles sont les grandes informations structurantes pour l’utilisateur afin qu’il comprenne bien l’article ?

J’écris mes parties 1., 2., 3. etc… en une phrase chacune et en essayant d’être le plus synthétique possible (la rédaction viendra après). L’exercice que je m’impose est que le lecteur puisse comprendre l’essence de l’article avec ces quelques phrases.

Etape 3 : Quelles départementales devons-nous prendre pour atteindre chacune des grandes villes ?

Quelles sont les informations nécessaires à la compréhension de chacune des parties définies en étape 2 ?

Après avoir défini nos grandes escales de voyage, il nous faut pour chacune d’entre elles définir les routes à prendre pour s’y rendre.

Je continue mon exploration de plus en plus fine. Pour chaque grande partie, je liste mes idées. Je ne rédige pas, je les inscrits sous forme de liste de quelques mots. Si j’ai le sentiment que cela n’est pas assez granulaire, je réitère l’exercice pour chaque bullet point en listant à nouveau les grandes idées s’y rattachant (je répète ces étapes autant de fois de fois que nécessaire).

Quelles sont les informations clefs pour que le lecteur comprenne bien chacune des sous-parties ?

Parfois, il m’arrive de réitérer à six reprises cette étape d’affinage. Je ne m’impose pas de règles. J’étoffe jusqu’au moment où je me sens assez “rassurée et organisée” pour commencer la rédaction. Le secret est de commencer macro pour devenir de plus en plus micro.

Etape 4 : Quelles sont les “précautions” à prendre avant de commencer notre voyage ?

Comment soigner son introduction et sa conclusion ?

Avant de prendre la route, nous devons vérifier certaines choses : faire le plein, préparer nos valises, etc… Nous devons aussi préparer notre arrivée, s’assurer qu’il y aie des hôtels dans la ville par exemple !

Comment soigner mon entrée en matière pour donner envie au lecteur de ne pas lire superficiellement l’article ?

Comme pour toutes les autres étapes, je commence mon travail avec une liste en bullet points. Je n’ai pas vraiment de recette magique mais j’essaie avec l’introduction de donner envie de lire le reste de l’article. Parfois je tease, parfois pas. Parfois je tisse les idées clefs des grandes parties, parfois pas. Je m’efforce toutefois de faire varier mon introduction et ma conclusion en fonction de ma destination, s’il s’agit d’un REX ou d’une idée à faire passer, ces parties seront assurément différentes. Pour la conclusion, j’essaie de laisser le lecteur sur une phrase percutante ou une punchline poussant la réflexion de ce dernier à aller plus loin.

Il s’agit là, de la partie la plus difficile car il faut réussir à capter l’attention de notre lecteur très rapidement, il faut donc ne pas négliger cette partie du travail ! Je pars du postulat que le lecteur lit l’intro, la conclusion et le reste en diagonal.

Etape 5 : Ce n’est plus le temps des questions, mais le moment de prendre la route

Normalement après avoir structuré notre pensée, la rédaction semble moins pétrifiante ! C’est le moment de se lancer.

Voilà notre périple est bouclé, il ne nous reste plus qu’à prendre la route ! Mais il ne faut pas oublier que ce que nous avons fait est un plan de route “théorique”. Parfois, nous pouvons décider en cours de route de prendre un chemin qui n’était pas inscrit sur notre itinéraire parce que la vue peut y être plus belle, le trajet plus rapide etc…

J’essaie de garder une certaine flexibilité lorsque j’écris. Je commence la redaction lorsque toutes mes idées me semblent présentes et structurées. Mais parfois, au cours de l’écriture, je pense à d’autres choses que je n’avais pas listées ou je trouve que certaines idées s’enchainent mal. Je me réadapte sans cesse. Je ne tente pas de coller absolument au plan initial si ce dernier n’est plus adapté. Mon plan est une aide mais il n’est pas strict mais je n’oublie jamais mon objectif lorsque je rédige.

Etape 6 : Prenez le large, relisez et réitérez

Ce n’est pas grave si en cours de route nous nous rendons compte que notre itinéraire est trop long, trop compliqué. Parfois, il peut arriver que nous n'ayons pas pris en compte certaines données. Ce n'est pas grave de s'arrêter au bord de la route et de ré-ajuster notre trajectoire.

Souvent, je réécris 3 fois mes articles. Lors de la rédaction, le fait de détailler mon plan peut me faire prendre conscience que mon objectif était trop ambitieux, pas assez précis. Si je décide d’affiner mon objectif ou une partie, je passe en revue tout mon plan et n’hésite pas à le retravailler.

J’ai aussi ma communauté de relecteurs (coeur coeur!). Leur avis est important pour moi, parfois, je me rends compte que j’ai raté ma cible (souvent mes écrits sont trop longs et un peu ennuyants). Ce n’est pas grave, ce n’est pas du travail perdu. Je le reprends pour que mon travail serve mieux mon propos.

Je laisse aussi passer quelques semaines entre la veille, l’écriture et la relecture. Parfois, je me rends compte que je suis trop papillonante.

J’itère (souvent trop), je simplifie, je recommence (fréquemment), j’affine l’écriture, j’essaie de rendre l’article plaisant à la lecture. Je prends mon temps. Ce qui peut-être un défaut car entre temps, je suis passée à d’autres batailles et mon médium ainsi que ma dropbox paper regorgent d’articles non publiés.

Conclusion

Écrire est une démarche personnelle à destination d’une personne physique. Elle peut-être un lecteur inconnu, un proche, soi-même. Je ne pense pas qu’il ait de méthodologie miracle pour dépasser l’angoisse de l’écriture mais je pense que l’on peut trouver l’énergie et le sens d’écrire en n’oubliant jamais à qui nous nous adressons et qu’est ce que nous voulons transmettre.

Et si je peux oser vous donner un seul conseil que j’ai du mal à appliquer à moi-même, ce serait :

Lancez-vous, publiez ! Ce ne sera jamais parfait mais si vous écrivez pour vos lecteurs, il y en aura forcément qui seront touchés :)

À ce propos, je vous suggère ce super article inspirant :

Envie d’en apprendre plus sur le déroulé de l’atelier ?

Nous étions une quinzaine autour d’une grande table. Certains souhaitant par la suite écrire des articles, d’autres des nouvelles. A la fin de l’atelier, un des participants m’a dit qu’il réutiliserait “cette méthodologie” pour écrire ses documents de communication interne.Nous avons commencé par un energizer durant lequel chacun à inscrit le même mot sur un papier. Puis nous avons ensuite fait tourner les papiers à nos voisins. À chaque fois, nous écrivions un nouveau mot sur le papier ayant la même sonorité. Lorsque les papiers ont tournés 8 fois, nous les avons placés dans un chapeau. Chacun a pioché une des listes et a dû écrire une phrase avec au moins trois des mots présents sur la liste.
C’était un moment drôle et absurde qui nous à tous mis à l’aise.
Ensuite, j’ai demandé à chaque participant d’écrire un mot sur un papier. J’ai tiré un papier sur lequel était inscrit le mot “Automne”. “Automne” est devenu notre sujet d’article.
Je tenais à ce que tous les participants écrivent sur le même thème afin de leur montrer qu’il pouvait être traité de mille et une façons. Ce n’est pas parce que quelqu’un a écrit sur un sujet qu’il n’y a plus rien à dire. Nous avons tous notre point de vue singulier, c’est une richesse et chacun est légitime.
J’ai dessiné sur un grand tableau une maison, une route et un point d’arrivée.
J’ai expliqué l’étape 1 et j’ai demandé à chaque participant d’écrire une phrase sur un post it sur ce qu’ils voulaient nous transmettre autour de ce thème. Chacun a lu sa phrase et j’ai collé les post it au niveau du point d’arrivée.
Suite à cela, j’ai expliqué l’étape 2. Après un certain laps de temps où les participants listaient leurs grandes étapes, chacun les a lues. Nous avons continué l’atelier ainsi jusqu’à l’étape de la rédaction de l’intro et de la conclusion.Le retour de l’atelier a été très positif ! Dans la semaine un des participants m’a envoyé un message pour me dire qu’il avait mis en pratique l’atelier pour un de ses documents de travail. Un autre m’a dit que ce n’était pas la peur d’écrire qui le retenait maintenant mais plutôt sa flemme ! Ah la flemme, ce fléau ;)
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Aurélie Rolland
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Passionate product designer working with startups | ex @francetelevisions | Ready for the future