Sport, nature et dépassement de soi!

Schaus Séverine
Il était une fois…Frinette
10 min readFeb 2, 2018

[jours 72 – 74]

On the road again!

La pluie nous accompagne ce matin, ce qui nous oblige à expédier un peu notre arrêt aux Huka falls. Pourtant l’endroit est magnifique… même sous la pluie battante! L’eau est d’une couleur incroyable et une telle puissance se dégage des chutes, à première vue pourtant pas très impressionnantes…

L’eau turquoise des chutes Huka (pas forcément visible sur ces photos, je vous l’accorde!)

Lorsqu’on arrive à Taupo pour le déjeuner, la pluie a cessé. La ville n’est pas très intéressante, si ce n’est son lac. Le reste n’est qu’un enchaînent de cafés, resto et agences de voyage.

Le ciel se dégage timidement juste assez pour nous laisser entrevoir le sommet enneigé de volcans au loin.

On s’enfonce ensuite dans la montagne pour atteindre une petite station perchée dans un bel écrin de verdure (le Whanganui National Park): Blue Duck Station. Le chemin pour y accéder ne semble pas tout à fait conçu pour un gros bus comme le nôtre. Happy nous explique qu’il lui est d’ailleurs arrivé d’être coincé pendant quelques heures à cause d’un rocher tombé sur la piste et bloquant le passage. On passe aussi sur plusieurs ponts de fortune… il faut avoir confiance!

Mais les paysages, même sous ce ciel boudeur, sont superbes. Des plaines vallonnées tapissées de verdure, habitées par des centaines de moutons… ouaw!

Cette étape de 2 nuits est en général la préférée des voyageurs Stray sur l’île du Nord, et je commence à comprendre pourquoi…

On prend possession de notre lodge en bois et je cuisine avec Rose en sirotant un bon verre de vin… le bonheur!

En guise de dessert, les hommes nous ont concocté de délicieuses crêpes aux myrtilles, initialement prévues pour notre réveillon de Noël. Toutes les excuses sont bonnes pour prolonger la fête! ;o)

La soirée se termine avec quelques verres autour du feu, vraiment sympa!

J’ai une journée chargée et sportive qui m’attend aujourd’hui. Je commence par une randonnée à cheval pendant 3h. Pour la plupart des autres cavaliers, il s’agit de leur première promenade. Évidemment, l’idée de passer 3h au pas me frustre un peu mais je suis assez convaincue que la beauté du paysage me fera vite oublier ce sentiment!

Je suis à la fin du peloton, suivie juste d’un Kiwi qui travaille à la station. On sympathise et je me délecte de ses histoires (sa vie de chasseur, de raseur de moutons, de dresseur de chevaux,…). Je vais le trouver encore plus sympa lorsqu’il me propose d’attendre que les autres prennent de l’avance sur un sentier pour qu’on les rattrape ensuite au galop!

Notre ballade a failli finir plus tôt que prévu après que l’une des novices soit tombée de son canasson (objectivement, c’est plutôt lui qui l’a éjectée…) mais elle a trouvé le courage de remonter dessus et de permettre au groupe de profiter du reste de la randonnée. Et chose promise chose due: nous laissons les autres prendre de l’avance et les rattrapons à plein galop. Enfin… c’était le plan, avant que je découvre dans le feu de l’action que mon cheval est un trotteur! J’ai eu tout le mal du monde à le faire changer d’allure… mais ouaw! quelles sensations!

Lors de notre break en haut de la colline, c’est cette fois la chef de la meute qui me propose d’aller galoper vers le sommet. Yiiiipaaaaa! Encore une belle montée d’adrénaline… je suis heu-reuse!

Sans parler du cadre idyllique… je me félicite d’avoir finalement réservé cette activité.

J’ai à peine le temps d’avaler mon lunch que je suis déjà attendue pour ma prochaine activité : 3 heures de kayak sur la rivière Whanganui.

La Nouvelle-Zélande recense 9 “Great Walks”, ces randonnées incontournables, dans des décors exceptionnels (il y en a surement plus que 9 qui doivent valoir le déplacement!). Parmi ces 9, l’une se fait en partie en kayak. Nous, on se contentera de parcourir un petit troncon seulement mais ca suffit pour nous donner une idée de la beauté de ce trekking…

Je fais équipe avec ma copine Rose et tantôt on s’éclate dans les petits rapides (sauf dans celui qui a failli nous faire chavirer… gloups!), tantôt on s’émerveille de la beauté et du calme qui nous entoure, et puis… oui… je l’admets, on s’amuse aussi un peu devant les problèmes de coordination de pagaies de nos amis masculins! ;o)

Le retour est prévu en speedboat… et quel retour! Déjà, il se fait sous une pluie battante (on a pourtant eu un grand soleil pendant toute la descente)… il fait froid! Puis, à un moment, le “chauffeur” nous dit de nous accrocher, puis se met à décompter et youhouuhouuu! Le bateau fait un 360 en nous éclaboussant largement au passage! Excellent! Tellement bien que j’en redemande et reste dans le bateau pour aller chercher les 3 derniers kayakeurs restés “en bas”!

La rivière Whanganui (seule photo souvenir que j´ai pu prendre de notre sortie kayak) — L’un des chiens de chasse en pleine sieste réparatrice

La deuxième soirée à Blue Duck Station est bien plus calme que la première… et pour cause, une toute grosse journée nous attend demain…

5h30, la porte du bus se ferme, on est partis. Il fait polaire ce matin, ça nous aide à rester éveillés.

On a 1h30 de route à faire jusqu’à Whakapapa, la station de départ du célèbre Tongariro Alpine Crossing, randonnée d’1 jour (19,4km) considérée comme la plus belle de Nouvelle-Zélande.

Cela fait 3–4 jours que la traversée est interdite pour cause de conditions météorologiques extrêmes. En arrivant à Whakapapa, on ne sait toujours pas si on s’est levés si tôt pour rien ou pas. J’avoue être très partagée. J’angoisse à l’idée de ne pas être capable de faire cette ascension. Du coup, au plus profond de moi, j’espère que ce soit annulé pour que le doute persiste (peut-être que j’y serai arrivée… ou pas!)… mais d’un autre côté, c’est un moment phare de la visite de l’île du Nord, ce serait tellement dommage de le louper.

Le verdict vient de tomber : on peut monter! Par contre, le responsable nous prévient : les températures ressenties au sommet sont proches des -6 degrés et le vent souffle à près de 60km/h ce qui suffit pour dévier la trajectoire du pied en marchant et peut donc être très dangereux.

Je ne débordais déjà pas de confiance à la base, mais à entendre ces mises en garde, je suis sur le point de capituler. Je n’ai aucune envie de mourir de froid après avoir glissé du sommet (et ça, c’est seulement si je ne meurs pas d’une crise cardiaque en grimpant là-haut!)! Trop jeune pour ça! ;o)

Mais la pression sociale fait son effet : je ne me débine pas et enfile toutes les couches que je trouve dans mon sac. Après quelques hésitations, je loue aussi des gants «juste au cas où». Et c’est la peur de l’échec au ventre que je monte dans le shuttle qui nous amène au début du trek.

Au début, tout va bien… Le terrain est plat, le sentier est bien délimité, le décor est splendide. Mais je n’arrive tout de même pas à me relaxer et profiter du moment présent. Depuis que j’ai vu la carte de la randonnée, je n’ai qu’une obsession : le «Devil’s Staircase», les escaliers du diable. Un tronçon de plus d’1h d’ascension, tout ce que j’aime…

Mises en garde sympathiques… de quoi bien nous détendre! (Et je n’ai pas pris en photo le panneau en bas de Devil’s Staircase qui dit que pour ceux qui ne sont pas en assez bonne forme physique, c’est maintenant ou jamais le moment de faire demi-tour!)

Bon, c’est vrai que j’aurais dû me douter que pour franchir le sommet d’une montagne, à un moment donné, il me faudrait grimper un peu… Même beaucoup…

Et lorsqu’après une vingtaine de marches, mes jambes étaient déjà douloureuses et mon souffle court, je me suis dit que c’était vraiment pas gagné d’avance! J’aurais pu faire demi-tour, j’y ai pensé, j’avoue… Mais non, je voulais relever le défi! Peut-être en 3 fois plus de temps que tout le monde, mais je devais y arriver!

Je me suis fixée 2 règles essentielles (et leçons de vie en même temps!) : (1) aller à mon propre tempo, sans chercher à suivre mes amis ou sans faire attention aux autres et (2) arrêter de regarder tout le chemin qu’il me reste encore à parcourir et me concentrer sur le court terme, ces 4–5 prochaines marches…

Alors oui, je me suis arrêtée assez souvent, mais j’ai toujours continué à avancer. Et en mettant ainsi un pied devant l’autre, encore, et encore… vous savez quoi? Et bien on arrive à bout de ces escaliers de la mort! Youhouuu!

Ma joie ne fut que de courte durée car après avoir traversé un joli cratère bien plat (bonheur!), un autre mur s’est rapidement imposé à moi. Pas de marches, cette fois, juste de la grimpette, jusqu’au sommet du Mont Tongariro. Le froid intensifié par le vent rend l’ascension à la fois plus éprouvante et plus facile (on ne transpire pas vraiment!).

C’est donc non sans grandes difficultés mais avec une fierté indescriptible que j’atteins les 1967m (en ayant démarré à 1130m) du sommet. Les conditions là-haut sont horribles. Il fait extrêmement froid et le terrain est dangereux. Je comprends maintenant ce risque lié au vent… il est réel! La descente est très compliquée. Même si ce qu’on voit de loin nous pousse à accélérer le pas, il ne faut pas se précipiter, sous peine de glisser sérieusement.

Les paysages qui m’entourent sont assez fabuleux mais je ne prends quasiment pas de photos, risquant de perdre un doigt à chaque fois que je sors une main de mes gants (qui m’ont finalement sauvé la vie…). Et je sais déjà que chaque mètre de cette randonnée restera longtemps gravé dans ma mémoire. Point besoin de photos! ;o)

Comme un mirage, apparaissant et disparaissant en fonction des nuages qui passent à grande vitesse, un lac d’un bleu intense trône au milieu du cratère. Je suis étonnée d’y retrouvées mes copines du début de randonnée, je n’étais donc apparemment pas si lente que ça…

Le magnifique Blue Lake, mis en valeur lors d’un rare rayon de soleil.

J’avais imaginé pique-niquer au bord de ce lac, à savourer au soleil ma délicieuse salade préparée la veille…

En réalité, je me retrouve recroquevillée sur un caillou, sous les flocons de neige, à regretter d’avoir prévu une salade aux crudités limite congelés au lieu du bon vieux sandwich, bien plus facile de gober en 35 secondes… Je souffre! ;o)

On reprend rapidement la route sous peine d’être congélés sur place en restant immobile. Sous ces conditions, je ne peux pas vraiment dire que je prends encore beaucoup de plaisir. Le mental est mis en mode «survie», c’est tout ce qui compte pour l’instant.

Après une dernière petite ascension, l’heure est maintenant à la descente. La vallée est baignée dans le soleil, les conditions sont bien meilleures que là-haut. Il nous faudra encore plus de 2h pour arriver à la fin, qui se fait vraiment attendre sur les 2 derniers kilomètres (dans une forêt assez monotone)…

Mais après 6h30 d’efforts et de bataille mentale, je franchis enfin la ligne d’arrivée… Je suis fatiguée mais je sens aussi ce regain d’énergie lorsque je relâche enfin la pression que je m’étais mise toute seule… Ce drôle de sentiment de petit miracle accompli me fait sourire sans que je ne m’en rende compte…

A l’avenir, quelle que soit l’épreuve qui s’imposera à moi, je me rappellerai que j’ai fait le Tongariro Crossing et que donc… tout est possible! ;o)

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