First Employee: Alan
Une discussion avec Kevin Aserraf, 8ème employé et aujourd’hui Product Marketing Team Lead chez Alan.
First Employee est une série d’interviews qui racontent les parcours explosifs et souvent méconnus des premiers employés des plus grands succès Tech de notre écosystème.
Gabriel : Que faisais-tu avant de rejoindre Alan ?
Kevin : Avant de rejoindre Alan j’ai passé 3 ans au sein du groupe La Poste. J’y ai fait mon stage de fin d’études. Je travaillais d’abord au sein de la direction de la stratégie et du M&A. Face au déclin du courrier, on réfléchissait continuellement à digitaliser La Poste pour transformer ses sources de revenus. Je travaillais alors avec d’anciens consultants de grands cabinets en stratégie et ça a été un stage très formateur.
J’ai ensuite eu l’opportunité de lancer au sein du groupe un accélérateur de start-up. Le projet était porté par mon maître de stage. On a obtenu un budget de 12 millions d’euros à déployer sur 3 ans, et ils m’ont gardé en CDI. En parallèle de la construction du programme d’accélération j’étais responsable du dealflow, comme le serait un analyste dans un fonds de Venture Capital. Je sourçais et rencontrais des start-ups, puis j’essayais de leur trouver des sponsors au sein de La Poste, de construire des partenariats avec des business units du groupe. On avait parfois également l’option de monter au capital de ces startups.
L’accélérateur a accompagné une trentaine de startups sur les 3 ans que j’ai passés là-bas. J’ai pu créer des bonnes relations avec au moins 10 d’entre elles. A force de rencontrer des entrepreneurs et d’entendre leurs pitchs j’ai eu très envie de passer de l’autre côté et de rejoindre un projet.
Gabriel : Comment s’est passée ta rencontre avec Alan ?
Kevin : C’est en participant à la première promotion du programme Lion de the Family que le projet est d’abord passé sous mon radar. On y parlait d’Alan comme du prochain grand succès de l’écosystème alors qu’ils n’étaient encore qu’en soft launch. On disait d’eux qu’ils avaient une équipe solide, qu’ils attaquaient un marché immense mais très compliqué et qu’ils avaient levé beaucoup d’argent. 12 millions d’euros en seed, ce qui était un montant impressionnant à l’époque.
Ensuite, comme je gérais l’adresse générique de contact de l’accélérateur de La Poste j’ai reçu un email d’une campagne envoyée par Jean-Charles, le CEO d’Alan. Il cherchait à distribuer Alan en créant des partenariats avec les accélérateurs. J’ai donné mon feu vert et envoyé un email à nos 30 startups. 8 ont répondu dans la journée, ce qui était un engagement bien plus élevé que lors de mes autres propositions de partenariat. C’était un excellent signal du besoin.
Jean-Charles m’a demandé si je souhaitais communiquer sur le partenariat. J’ai écrit un post Medium et il l’a publié dès le lendemain sur le blog d’Alan. Notre première interaction s’était donc très bien passée et je lui ai demandé s’il avait des postes ouverts chez Alan. Il m’a proposé de passer au bureau. Il était enrhumé ce jour-là, ce qui l’énervait particulièrement en tant que fondateur d’une startup dans la santé ! Après notre café, je me souviens qu’il m’a envoyé un mail s’excusant d’avoir été HS pendant notre rendez-vous, alors que j’avais adoré notre échange et trouvais sa vision extrêmement précise. Je me souviens m’être dit : « Qu’est-ce que ça doit être quand il est à 100% ! ».
Il cherchait un profil très senior growth marketing mais avec davantage d’expériences que moi. Avec le recul, et ça a été un apprentissage pour Alan, c’était une bonne décision de prendre quelqu’un de plus junior sur ce premier recrutement growth. J’ai dû faire mes preuves au début mais j’ai eu la chance d’apprendre dans le meilleur environnement qu’il soit.
Gabriel : Est-ce que tu avais des doutes sur le projet à ce moment ?
Kevin : J’avais passé plusieurs entretiens dans d’autres startups et j’avais systématiquement un doute. Je regardais ces startups comme un VC, en jugeant le projet dans son ensemble, en cherchant à comprendre leur potentiel, pas uniquement le salaire et le titre. Ce qui me semble important compte tenu de l’énergie qu’il faut investir dans un projet quand on arrive aussi tôt.
Alan cochait beaucoup de cases : une équipe expérimentée, ayant déjà rencontré un premier succès entrepreneurial, une super exécution avec l’obtention de l’agrément d’assureur en peu de temps et une levée de 12m€ en seed, et une culture forte basée sur la transparence. Enfin Alan donnait des BSPCE à tous ses salariés, ce que je trouve être un point d’alignement très important.
Gabriel : A quoi ressemblait Alan quand tu as rejoint l’entreprise ?
Kevin : Le produit était live depuis 3 mois. Nous avions environ 500 utilisateurs. J’étais le 8ème employé en plus des 2 co-fondateurs. Nous étions donc 10 dans des petits locaux situés cité Paradis avec beaucoup d’autres startups. Pour l’anecdote, le premier projet sur lequel j’ai travaillé avant même d’arriver chez Alan était le lancement du partenariat avec Payfit. C’est encore aujourd’hui une intégration cœur dans notre produit.
Gabriel : A ton arrivée aviez-vous déjà trouvé votre Product-Market Fit ?
Kevin : Ma première année chez Alan a été dédiée à la recherche de ce Product-Market Fit. On a découvert nos personas, notre buying journey, comment vendre notre produit. On itérait très vite. On a par exemple lancé en 3 semaines la verticale Travailleurs Non-Salariés et Indépendants.
Sur cette première année Alan n’avait pas encore de Sales. C’était donc Jean-Charles et moi qui nous en occupions. Au début nous pensions que notre produit serait principalement self-serve avec un Product-Market Fit auprès d’entrepreneurs pour qui Alan serait leur premier assureur. En réalité beaucoup d’entreprises voulaient changer d’assurance et de contrat. Il a donc fallu mettre en place des processus de vente plus structurés, avec des démos, des decks commerciaux, etc.
Gabriel : Votre go-to-market a complètement changé entre ton arrivée et le Product-Market Fit.
Kevin : Exactement. On pensait que notre marché naturel était les entreprises de 0 à 4 employés et donc que l’on construisait une entreprise marketing-intensive, capable de générer de l’inbound sur un produit self-service. Même si on savait qu’on allait devoir aller upmarket à un moment, on a commencé à recevoir des marques d’intérêt pour notre produit de la part d’entreprises de 20 à 200 employés, qui étaient déjà équipées, mais qui ressentaient également le besoin d’un meilleur produit d’assurance. Ces entreprises avaient en revanche besoin d’interagir avec un Sales pour switcher. On a donc commencé à recruter l’équipe Sales et ensuite créer un processus de démarchage outbound. Je me souviens que c’était pour nos premiers Sales un excellent signal que Jean-Charles et moi arrivions à vendre le produit alors que nous n’étions pas formés à la vente.
Gabriel : Et j’imagine que tu as énormément appris pendant cette phase ?
Kevin : Ça a été très important pour moi d’être face aux clients. J’ai acquis une bonne compréhension de ce que l’on construisait avec Alan. Et ça m’est toujours utile aujourd’hui. En parallèle de mon rôle de Sales avec Jean-Charles j’ai également beaucoup bossé sur le produit avec les designers et ingénieurs. Je faisais le lien entre les besoins des clients et l’équipe Produit.
Gabriel : Comment t’es-tu rapproché du Product Marketing ?
Kevin : Sur mes 2 premières années mon objectif était de passer de 0 à 1 sur l’ensemble des sujets marketing. Dès que l’on voyait de la traction sur un canal, comme l’acquisition payante ou le content marketing, on recrutait un expert qui pouvait le faire mieux que moi. On a fonctionné comme ça jusqu’à ce que je trouve un domaine sur lequel je me sentais à la hauteur de devenir moi-même expert. Et ça s’est produit il y a 12 mois sur la partie Product Marketing.
Gabriel : Tu peux nous expliquer en quoi consiste le Product Marketing chez Alan ?
Kevin : Bien sûr. On suit un processus en 3 temps. Le premier est de récolter et centraliser la connaissance client / prospect / marché. Par exemple les feedbacks de nos clients, les insights sur nos personas, leurs buying journeys, etc. Ensuite on transforme et synthétise ces informations pour les équipes produit et assurance de manière à mieux construire nos offres, notre roadmap et la façon dont on communique sur le produit. La dernière étape est de transformer ces messages et ces offres en du contenu prêt à être utilisé par nos équipes customer-facing. On produit des formats très différents, comme du matériel pour l’équipe Sales leur permettant de mieux connecter avec leurs clients ou de mieux vendre, ou du matériel pour les Account Managers afin de faciliter l’upsell ou d’éviter le churn.
Finalement, l’équipe Product Marketing est garante de la feedback loop. On fait en sorte que tout ce qui remonte du terrain via les Sales, les Account Managers et tous les autres rôles customer-facing soit centralisé dans une knowledge base alimentant continuellement nos offres et permettant de construire de nouveaux produits, de nouvelles features.
Le fonctionnement de l’équipe Product Marketing est très influencé par la culture d’Alan qui valorise beaucoup l’écrit. Cela nous a permis de scaler l’équipe. Nous ne sommes que 4 Product Marketers pour une équipe de 80 Sales aujourd’hui. C’est un ratio assez faible comparativement aux autres scale-ups.
D’autre part Alan vient très souvent remplacer une solution déjà installée chez nos clients dans un marché qui est souvent drivé par le couple prix / coverage du produit d’assurance. On vient avec un positionnement différent, compétitif en prix mais différencié par le produit et l’expérience utilisateur. En conséquence on a un fort enjeu d’évangélisation et la performance de nos Sales est déterminante pour le succès de l’entreprise. La création de contenu est un levier important de cette performance.
Gabriel : Depuis ton premier jour jusqu’à aujourd’hui, quels ont été les moments les plus difficiles à traverser pour toi ?
Kevin : Le moment où l’on a très vite scalé les segments, nos différentes cibles commerciales. Il a fallu jongler avec des personas très différents et créer des campagnes à la fois pour des travailleurs non-salariés et pour des entreprises de plus de 300 personnes.
Un autre aspect assez challenging est d’être capable d’absorber la croissance de notre équipe Sales qui chaque année double voire triple. On a pour objectif de ne pas diminuer la qualité du contenu que l’on produit et de construire des relations avec les Team Leaders malgré tout. C’est ce qui fait notre défi au quotidien et c’est ce qui rend notre travail très excitant.
Gabriel : Quels sont d’après toi les avantages de rejoindre une startup aussi tôt ? Et les inconvénients ?
Kevin : Je pense que c’est le meilleur moyen pour maximiser son impact au sein d’une organisation. Comme l’équipe est encore petite, il y a très peu de politique, ce qui permet d’être à 100% dans l’action. A cette époque j’ai appris à travailler en totale autonomie et à prendre des risques dans mon quotidien.
Cette courbe d’apprentissage rapide vient néanmoins avec des inconvénients. Les démarrages de startup sont généralement stressants, prenants, il faut être tout le temps hands-on et à l’aise avec le fait de travailler dans l’incertitude. Quand j’ai rejoint Alan personne ne savait si le projet allait réussir ou échouer, et il fallait pouvoir accepter cette éventuelle situation d’échec.
Gabriel : Existe-t-il un profil idéal “premier employé” ?
Kevin : A part une personne qui a déjà joué ce rôle et qui voudrait le refaire une deuxième fois, ce qui existe certainement mais n’est pas courant, je vais décevoir beaucoup de founders mais je ne pense pas qu’il y ait un seul profil idéal. Il faut avoir envie d’être hands-on et prêt à apprendre beaucoup, très vite.