11 idées pour rendre concrets les engagements de la grande distribution aux yeux des consommateurs.

Morgane Tanguy
Demain sera bien. Par Haigo.

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Emma et moi sommes passionnées par les enjeux autour de l’alimentation. Nous profitons de notre temps Haigo dédié à la recherche pour vous proposer une expérience de drive revisitée, pour imaginer comment demain les distributeurs pourraient vraiment nous aider à mieux consommer.

Le confinement a été une étrange période à beaucoup d’égards, y compris en ce qui concerne nos habitudes alimentaires. Partout nous avons pu lire que le circuit court était en forte augmentation (La Ruche qui dit Oui a vu son chiffre d’affaire augmenter de +70% en 1 mois tout de même) et les stories instagram de nos amis n’ont jamais autant regorgé de pains au levain homemade. Il était tentant de fantasmer le monde d’après de l’alimentation, rempli de repas faits maisons à partir de produits bios et locaux qui rémunèrent bien les agriculteurs et ne polluent pas la planète.

Pourtant, l’engouement pour les circuits courts est retombé comme un soufflé avec le déconfinement. Les ventes en circuit court ont chuté de moitié, même si elles restent de 20 à 30% supérieures à ce qu’elles étaient avant le Covid 19.

Plusieurs raisons simples à cela, de la bouche de quelques utilisateurs interrogés au cours d’entretiens semi-dirigés:

1/ Être un consommateur engagé demande un investissement de temps et d’argent conséquent ! Cela nécessite de multiplier les points de vente (marché, AMAP, hypermarché…) :

“Quand tu veux faire attention et acheter local ça prend du temps. C’est normal mais il y a des semaines où on galère plus que d’autres. Quand on peut, on va chez le boucher et poissonnier à côté de chez nous mais parfois on n’a pas le temps et donc on prend la viande et le poisson en drive. “

2/ Il est difficile de comprendre et maîtriser les tenants et les aboutissants qui se cachent derrière les qualificatifs de local, de bio, de circuit court, d’agriculture raisonnée, de labels… Alors parfois la simplicité prend le dessus.

“Je ne sais même plus si je dois prendre des lentilles du Puy en boîte ou des lentilles d’espagne BIO, en terme d’impact c’est difficile de savoir lesquelles polluent le moins !”

La volonté de consommer mieux, au service d’une agriculture plus locale, se heurte souvent à des attentes de praticité et de rapidité (en atteste l’augmentation du drive qui s’est accélérée avec le confinement). Les distributeurs l’ont compris et surfent sur ce créneau pour rassurer leurs consommateurs en montant leurs efforts vis la transition alimentaire, à l’image de Leclerc dans sa dernière campagne publicitaire.

Ils peinent toutefois à convaincre, en attestent les commentaires sous ce tweet de Michel Edouard Leclerc vantant la mise en place du Local au début du confinement.

En tant que designers nous sommes persuadées que des expériences bien pensées leur permettraient de rendre ces efforts visibles aux yeux du consommateur.

Nous nous sommes donc demandées comment les distributeurs pourraient faire pour accompagner leurs utilisateurs vers des choix de consommation plus responsables à travers une expérience d’achat en drive revisitée.

Si certaines de ces solutions existent déjà ; tant mieux. Sinon nous espérons que nos propositions pourront vous inspirer !

Et si on profitait de ces bouleversements pour accompagner le consommateur vers des choix plus conscients et responsables ?

Prenons l’exemple d’Arnaud, 30 ans habitant en périphérie de Nantes. Toutes les deux semaines il fait ses courses en drive pour acheter la plupart de ses produits de base. Il a déjà créé sa liste de courses, ça va vite et c’est simple, il les récupère sur le chemin du retour du travail. Il fait de plus en plus attention à acheter des produits de qualité et responsables notamment en ce qui concerne les légumes, la viande et les fromages. Pour ce type de produit il a plus confiance en des magasins spécialisés ou des AMAP qu’en des supermarchés, parce qu’il peut voir le produit et parfois celui qui l’a fait. Mais parfois il manque de temps.

Voici comment un distributeur pourrait proposer à Arnaud une expérience d’achat en ligne plus simple, plus transparente et plus responsable. Pour ne pas faire de jaloux nous avons pris le parti de prototyper nos écrans du point de vue d’un distributeur fictif.

1. Modifier mes comportements grâce à des défis concrets

Changer ses habitudes de consommation n’est pas simple : Arnaud ne sait pas par où commencer, et n’est pas certain que les actions qu’il entreprend soient les bonnes. Il est difficile de comprendre les tenants et les aboutissants derrière le local, bio, les labels, le flexitarisme etc ! Est-ce vraiment moins polluant d’acheter local ? Un produit sans sucre ne présente-t-il pas d’autres additifs pires encore ? Toutes ces questions lui donnent parfois l’impression que ce qu’il entreprend pour améliorer sa consommation est vain.

💡 #1 En arrivant sur le site du drive Arnaud se voit proposer de participer à l’un des 5 défis suivants :

  • Devenir locavore
  • Au fil des saisons
  • Vers le 0 déchets
  • Réduire la viande
  • Sans sucre ajouté

💡 #2 Il peut remplir ses contraintes et son régime alimentaire pour personnaliser l’expérience et avoir des propositions adaptées à la réalité de sa consommation.

💡 #3 Manger local ça ne fait pas tout ! En cliquant sur “En savoir plus” Arnaud peut accéder à du contenu pédagogique pour comprendre ce qui se cache derrière le terme local et ce en toute transparence.

👀 Si vous aimez relever des défis l’application 90 jours vous propose chaque jour un nouveau défi pour être plus responsable. De son côté, Makesense a créé pendant le confinement le programme Réaction, qui permet à n’importe qui de relever des défis autour l’alimentation locale et bio, le lien avec les seniors etc. Ceux ci sont toujours accessibles !

2. Visualiser l’impact de mes courses

Arnaud ne réalise pas forcément l’impact exact de ses achats sur la planète. Il faudrait regarder chaque produit, trouver l’équivalent carbone, regarder sa provenance… Il le fait parfois sur les légumes mais pas sur le reste.

💡 #4 En scannant la liste d’Arnaud, on peut lui permettre de visualiser simplement le bilan carbone de son panier, et lui donner des indicateurs parlant sur le trajet parcouru par son panier.

👀 L’application Carbo mesure chaque semaine votre impact carbone et vous permet de vous situer par rapport à d’autres utilisateurs.

3. Me proposer des pistes d’améliorations concrètes, avant et pendant mes courses…

Arnaud a besoin qu’on lui donne de nouvelles idées pour consommer autrement, il ne connaît pas tous les produits et toutes les possibilités, et le drive n’est pas le meilleur endroit pour explorer.

💡#5 L’application propose à Arnaud 14 alternatives plus locales sur sa liste de course ! Il peut s’agir de légumes d’un agriculteur local, de confitures de la région, ou de faire soi-même un plat avec des produits locaux plutôt que de l’acheter cuisiné. Il peut les remplacer très simplement tout en les comparant au produit original.

💡 #6 Pendant ses courses, lorsque Arnaud ajoute un produit à son panier, on lui indique qu’il existe une alternative plus locale. Il peut la consulter, il voit alors directement l’impact en terme de prix et peut décider ou non de remplacer son choix initial.

4. Visualiser concrètement l’impact de mon action sur l’agriculture locale

Quand il achète des produits en supermarché, Arnaud ne sait pas vraiment comment sont rémunérés les agriculteurs et les producteurs, qui ils sont, comment ils produisent… Il faudrait prendre la peine de faire une recherche google pour compléter les informations de la fiche produit. S’il paye un peu plus cher pour des produits plus locaux, il aimerait comprendre ce que cela va réellement apporter de positif !

💡 #7 Au moment de voir son panier, on montre à Arnaud la distance entre ses produits et son frigo. Il peut replacer sur une carte les différents produits pour voir très simplement d’où ils proviennent. Il voit aussi directement ceux qui ont beaucoup voyagé.

💡 #8 Il peut en savoir plus sur les agriculteurs en question en regardant leur fiche : il peut y trouver des informations sur les modes de cultures, des photos de l’exploitation, la liste des références etc.

💡 #9 Une fois le panier validé, on lui donne des indicateurs précis sur les conséquence de son achat ! Cette fonctionnalité a d’ailleurs été mise en place récemment par la Ruche qui dit oui.

💡 #10 Quand sa commande est prête on propose à Arnaud de rendre visite à un agriculteur sur le chemin s’il veut voir de ses yeux comment sont cultivés les légumes dans son assiette ou comment est produite la confiture sur ses tartines.

5. M’inciter à aller plus loin :

Consommer plus local c’est bien mais cela ne fait pas tout. Si on veut ne pas dépasser les 2° de réchauffement climatique indiqués dans le rapport du GIEC, tout le monde doit s’y mettre et s’améliorer continuellement. Arnaud aimerait qu’on lui propose de nouveaux défis pour aller plus loin dans sa démarche de consommation responsable.

💡 #11 Une fois le premier défi relevé et les bonnes habitudes prises, Arnaud peut commencer un autre défi ou proposer à un ami de se lancer à son tour!

Et si le drive devenait une vitrine pour les agriculteurs locaux ?

Vous l’aurez compris, le scénario ci-dessus nécessite de repenser la relation entre enseignes de grande distribution, propriétaires de magasins et producteurs ! Nous n’avions pas pris l’exemple du défi local par hasard 😉.

Aujourd’hui, les propriétaires de grandes surfaces organisées en coopérative (c’est à dire Leclerc, Système U, Intermarché) référencent parfois les producteurs en direct mais ne peuvent pas proposer ce type de produit sur le drive qui est géré par la centrale. Ce type de référencement a plusieurs avantage pour les distributeurs : c’est bien sûr plus écologique (les produits ne transitent pas par la centrale), cela leur permet de s’adapter à la demande ultra locale, et de mieux maîtriser leur communication autour du soutien au producteur de la région.

Mais ce type de produit très local est encore minoritaire dans l’offre des supermarchés ! La distribution en direct présente de nombreux coûts cachés pour les magasins qui doivent gérer eux-même la partie administrative. Par ailleurs le processus de référencement se fait de manière empirique, souvent suite à une visite d’un producteur.

En une page, voici comment nous imaginons donc cette relation ré-inventée. Dans celle-ci le producteur peut distribuer simplement ses produits, le propriétaire de grande surface enrichir son offre de produits locaux et maîtriser sa communication et la centrale joue son rôle d’interface et de facilitateur entre les deux:

Et si on le faisait pour de vrai ?

Pour décliner ces écrans nous nous sommes basées sur l’application des magasins U qui est très bien construite d’un point de vue UX. Voici pour vous donner une idée quelques écrans aux couleurs de Leclerc, Auchan, Intermarché et Carrefour. Et si on le faisait vraiment ensemble ?

Découvrez les expériences que nous avons créées pour Foodette, Owkin ou encore AXA et la RATP !

Si vous souhaitez aller plus loin :

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