Comment Donjons & Dragons peut vous aider à devenir un meilleur Leader.

Rémy Saddour
Demain sera bien. Par Haigo.
13 min readJun 27, 2019

Vous pensez que le jeu de rôle papier est l’adage des vieux nerds introvertis ? Dommage, vous passez certainement à coté d’une façon ludique de devenir un meilleur Leader.

Vous vous êtes sûrement déjà retrouvés face à un client qui ne comprend pas votre raisonnement, à la difficulté de garder votre équipe motivée lors d’un projet, ou encore à un atelier qui tourne mal, non ?

Ou peut-être avez vous déjà passé vos après-midis à mener des joueurs dans l’antre de la bête, à faire suer sang et eau leurs personnages pour 3 piécettes et la conviction profonde qu’ils sont sortis grandis de cette épreuve ?

Alors ce qui suit devrait vous parler ;)

Avec du recul j’ai réalisé une profonde similitude entre la conception centrée utilisateur et le jeu de rôle papier.

Je me présente :

Nom: Saddour . Prénom: Rémy . Âge: 29ans

Race: Humain . Sous-genre: Troll . Profil: Designer

Background story:

Après avoir vécu des années dans les périlleuses terres du 93, Rémy entra dans le labyrinthe de l’éducation nationale. Après plusieurs années passées dans ce donjon, il finît par trouver un jour la sortie avec un parchemin baccalauréat +5.

Grandi de sa première aventure et son nouveau parchemin en poche il passa quelques années à combattre les monstruosités d’usages et visuelles. Quelques années et niveaux plus tard, il rejoint la noble confrérie Haigo dans le but de prendre la tête d’un groupe d’aventuriers afin de défendre les droits des utilisateurs dans les sombres contrées des Internets.

Le jeu de rôle (JDR) C’est quoi ?

Si je devais le résumer simplement, je dirais ceci :

“Le JDR, représente un moment partagé par plusieurs personnes pour vivre une histoire qui peut avoir un ton et un style variable en fonction des envies.”

“Exemple de Casus Belli pour décrire le jeu de rôle (reprenant une scène du Seigneur des anneaux).” © Casus Belli

En règle général pour jouer il faut 3 à 6 personnes, un “maître de jeu”, aussi appelé meneur ou MJ, et des “personnages joueurs” aussi appelés joueurs ou PJ. En terme de matériel, il ne faut pas grand chose, des feuilles de papier, crayon, gommes et des dés (de 4 à 20 faces).

Disclaimer : Je ne suis pas expert du jeu de rôle papier… Je suis MJ depuis quelques mois.

Durant ma jeunesse, j’ai joué pas mal de parties de jeux de rôle papier en tant que maître de jeu, puis finalement je suis passé à autre chose souvent par manque d’implication de ma part dans ce rôle que je trouvais difficile.

Tout le monde connaît, ne serait-ce que de nom, Donjon&Dragon. DnD est un « fantasy role-playing game » originellement créé par Gary Gygax et Dave Arneson.

Donjon&Dragon c’est avant tout un bac à sable avec des règles permettant de faire évoluer des joueurs dans un univers imaginaire. Les mécaniques de jeu sont principalement basées sur le storytelling et l’empathie.

Dungeons&Dragons — TM & © 2015 Wizards of the Coast LLC

En rejouant, je m’aperçois de plus en plus de similitudes entre mon métier de Lead Designer et de maître de jeu, tant bien sûr l’aspect gestion d’une équipe, que l’animation d’un atelier de co-création.

Le JDR et le monde du travail.

Depuis que j’ai repris le jeu de rôle, je suis forcé de constater qu’en m’améliorant en tant que maître de jeu (MJ) lors de mes sessions de jeu, je comprends de mieux en mieux l’aspect de Lead Designer.

Au même titre que j’aide une équipe de joueurs à atteindre un objectif dans une histoire fictive, je mène dans ma vie professionnelle des projets avec des équipes ayant des objectifs, mais cela n’est pas le seul parallèle que j’ai constaté.

Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités…

Être maître de jeu est un rôle plaisant, vous possédez le pouvoir de vie ou de mort sur les joueurs, vous avez dans vos mains la possibilité d’offrir monts et merveilles aux membres du groupe, mais aussi sur un coup de tête, de tout leur retirer.

Cependant, c’est un rôle à lourde responsabilité. Vous devez préparer la session de jeu, généralement vous arrivez avant les autres membres de la session et vous repartez après, vos grands pouvoirs vous obligent à trouver un juste milieu, proposer des missions trop complexes auront comme effet l’abandon des joueurs ou la mort des personnages et donc de la frustration.

Au contraire si trop simple, passés les premiers instants de prise en main, les joueurs se lasseront et l’implication de chacun diminuera jusqu’à provoquer l’absentéisme ou le présentéisme sans implications réelles.

Cela est tout aussi vrai pour le monde professionnel, rendre l’objectif de la mission claire et intéressante, donner les moyens à votre équipe de réussir la mission sans pour autant que cela devienne une formalité sans intérêt.

Être en contrôle sans pour autant tout décider, permettre aux membres de votre équipe de faire leurs choix et d’être responsabilisés. Le maître de jeu comme le Lead projet a besoin de personnes impliquées, motivées à l’idée de progresser sur leurs compétences, progresser vers l’objectif de mission, mais aussi sur le plan humain.

Le but principal du maître de jeu et d’un leader consiste à encourager les personnes à essayer, expérimenter, faire preuve d’ingéniosité lorsque les moyens conventionnels ne suffisent pas, mais aussi veiller à une progression linéaire attrayante pour les membres du groupe sur le plan humain et technique.

Généralement lorsque ça ne fonctionne pas, c’est souvent que le maître de jeu a échoué quelque part… Étrangement dans ma jeunesse, peu d’entre nous voulaient du rôle de maître de jeu, ce n’est peut-être, pas pour rien, que le management est un réel métier après tout…

Improviser en fonction du contexte et des joueurs.

Être maître de jeu, cela implique aussi de gérer les événements aléatoires, des choix imprévus mettant les joueurs face à des situations pour lesquelles ils ne sont pas armés… Faire avancer le groupe vers l’objectif commun, tout en permettant à chaque joueur d’accomplir leurs objectifs personnels…

C’est tout aussi vrai lors de la réalisation d’un projet professionnel, chacun doit faire face à des imprévus plus ou moins important, le rôle du leader est de composer avec ces contraintes, mais aussi de permettre à votre équipe de continuer à progresser de la meilleure des façons.

En tant que Maître de Jeu, vous faites avancer l’histoire en la racontant et même avec la meilleure préparation du monde, il est impossible d’anticiper exactement la réaction de vos joueurs ainsi que les résultats des actions qu’ils entreprendront lors de la session…

Préparer une session de jeu, c’est long. Parfois vous devez préparer des histoires qui se dérouleront sur quelques heures, quelques semaines, quelques mois voire même parfois années. Ce genre d’aventures demande autant d’investissement de la part du Maître de jeu que des joueurs.

Dans une moindre proportion temporelle, cela s’applique tout autant aux ateliers de co-conception, généralement une bonne partie du bon déroulement de l’atelier dépends de la préparation en amont « avons-nous correctement cadré la thématique en amont ? », « invité les bonnes personnes autour de la table ? », « sont-ils dans le bon état d’esprit ? », etc…

Pourtant, parfois l’atelier se déroule mal. Dans le jeu de rôle c’est ce que nous définissons par l’échec critique, autrement dit « obtenir un résultat de 1 sur un dès à 20 faces »… certains de mes joueurs parlent même de la loi de Murphy : « Tout ce qui est susceptible d’aller mal, ira mal ».

Un bon maître du jeu ne laissera pas la session de jeu mal tourner, simplement parce que l’un des joueurs aura fait un résultat inattendu, il persévérera, il trouvera un moyen habile de redresser la situation.

Cela n’est pas uniquement propre aux jeux de rôle, depuis toujours l’humanité cherche à simuler les aléas de la vie, de la guerre… Certains des jeux Grec et Chinois les plus archaïques comme « weiqi » ou « petteia », sont des modélisations des terrains et mouvements de troupes forçant le joueur à établir une stratégie, mais aussi s’adapter à son opposition et réagir rapidement en réaction.

Je vous invite d’ailleurs à lire cet article qui donne une autre perspective du « jeu de rôle » plutôt porté sur la simulation de guerre.

Concernant le jeu de rôle papier, il est important de garder en tête que le jeu est toujours fait pour que les joueurs s’amusent. De la même façon dans un atelier, si les participants ne réagissent pas comme prévu lors des activités, même si vous les avez préparées pendant plusieurs heures, n’hésitez pas à arrêterl’activité et improviser quelque chose qui accrochera mieux l’attention des membres de l’atelier.

Aider les membres dans leurs choix.

Il est impossible d’anticiper les choix de vos joueurs, néanmoins le rôle du meneur de jeu doit de manière subtile, suggérer des choix en les mettant en avant. « Cela semble être le meilleur compromis. », « Si tu fais ce choix tu prends le risque de… » ou encore, « OK vous êtes perdus, revenez à votre objectif initial, quel est-il ? pourquoi vous êtes-vous rendu ici ? ».

La base même du jeu de rôle est de prendre des décisions ! Le maître de jeu, lui crée l’illusion d’une infinité de choix, là où il n’en a prévu que 2 ou 3. Si les choix sont trop évidents les membres du groupe se sentiront sur des rails et perdront l’envie d’enquêter, de creuser et d’entrer dans votre monde. Au contraire si vous ne suggérez aucune piste, vous finirez pas perdre vos joueurs, ils n’avanceront pas dans l’intrigue prévue.

Dans le monde du travail, le leader à un rôle similaire, il doit montrer la voie sans pour autant contraindre les membres de l’équipe à suivre exactement le chemin qu’il a tracé.

Laissez les membres de votre groupe choisir le « comment » atteindre cette prochaine étape, même si cela ne vous semble pas la façon la plus optimale, laissez les faire leurs choix et restez présent à leurs côtés pour les aider à se relever en cas d’échec.

Raconter des histoires.

Dans le jeu de rôle, raconter des histoires constitue la base même de l’exercice, que l’on joue à la façon d’une pièce de théâtre en interprétant chacun des personnages ou que l’on décrive à la façon d’un roman les environnements et les traits de caractère qui représentent les personnages…

Raconter des histoires est un exercice difficile mais nécessaire pour un maître de jeu, car l’immersion des joueurs et leur implication en dépendent souvent. C’est souvent aussi vrai dans le monde du travail, en tant que leader, vous devez véhiculer l’envie, motiver votre équipe et cela passe par la parole, votre capacité à expliquer pourquoi ce projet est important, pourquoi chacun va grandir et faire grandir l’entreprise.

Pour cela chaque personne est différente, en tant que leader, vous devez apprendre à connaître les membres de votre équipe, à appréhender la nature de chacun afin de tenir le discours avec le ton qui fera écho aux motivations propres de chacun.

“Restitution de l’expérience utilisateur vécue par les clients de notre client.”

Le récit permet de véhiculer des principes, de garder les gens motivés et impliqués, de mettre en valeur, mais aussi de mettre en garde face à certains risques… Lorsque vous êtes dans le rôle du maître de jeu, il est important de bien connaître les outils que vous avez sous la main. Poser le contexte vous permettra d’aider les joueurs à se projeter dans votre récit.

Moduler le ton de votre voix et la vitesse de parole est tout aussi important et vient donner de la force à l’ambiance décrite, un ton de voix grave, une vitesse de parole lente et hésitante, donnera une atmosphère inquiétante créant du suspens comme pour un film d’épouvante.

Au contraire une voix plus vive et chaleureuse avec une vitesse de parole qui augmente, donnera la sensation d’une scène d’action. Prenez comme exemple un commentateur de foot qui suit une action de jeu menant à un but par exemple…

Prenez le temps de poser vos propos, et n’ayez pas peur des moments de « blanc » dans votre récit et parfois laissez vos joueurs avec ces moment sans paroles afin qu’ils échangent entre eux avant de reprendre le déroulement de votre scénario grâce à des accroches telles que « alors, que faites-vous ? », « quel est votre plan d’action ? », « qui passe en premier ? », etc…

Dans le monde professionnel cela peut s’avérer d’autant plus utile face à un client, lui permettre de rentrer dans votre réalité, celle du projet, de lui faire comprendre votre raisonnement, votre parcours et les choix qui vous ont amenés à ce résultat, mais aussi lui donner la possibilité de réagir avant de refermer subtilement le débat afin de ne pas dépasser le planning prévu.

Appréhender la nature de chacun.

Lorsque vous assurez le rôle de maître de jeu, vous êtes amenés à croiser à votre table des joueurs qui auront différents vécus, avis, personnalités, caractères… Parfois faciles à vivre, parfois plus complexes…

Ce sont autant de futurs problèmes que le maître de jeu doit anticiper et désamorcer, en essayant de comprendre les attentes et les craintes de chacun. Il est aussi important de comprendre la nature de chaque joueur. Certains seront plutôt passifs ou réservés, d’autres plus expressifs et extravertis.

“Illustration par Didier Guiserix tirée de la plaquette « Le Jeu de Rôle ? Qu’est-ce que c’est ? » © Casus Belli”

C’est au maître de jeu de trouver le bon équilibre, donner la parole, mais aussi la reprendre… Permettre à chacun de s’exprimer, de donner son avis et de faire en sorte d’apporter le meilleur de soi. Désamorcer les problèmes en permettant aux joueurs de se confronter en bonne intelligence. Lors des sessions de jeu vous avez un rôle de médiateur, afin que chacun puisse s’exprimer sans ressentiment de part et d’autre.

Dans vos projets professionnels, la communication au sein de l’équipe est tout aussi importante. Il est clé en tant que leader de rechercher le feedback des membres de l’équipe, collectivement ou individuellement en fonction du sujet.

Le projet appartient aux membres de l’équipe, c’est eux qui déterminent s’il sera mené à bien ou non. En tant que leader comme pour le MJ, vous collaborez ensemble afin d’atteindre l’objectif dans les meilleures conditions, autrement dit “vous faites partie intégrante de cette équipe, vous n’êtes ni en dessous, ni au dessus et encore moins contre elle.”

Les membres de votre équipe sont des spécialistes, pas des caricatures.

J’ai vu des joueurs ou des maîtres de jeu dire “Bah tu es une fille, alors fait une femme pour ton personnage.”, “Vu ton caractère, fais un barbare hein…”, etc.

En réalité un bon maître de jeu, va parler les joueurs pour comprendre quel style de personnage le joueur a envie d’interpréter et il arrive souvent que le personnage en question soit hybride, “J’aimerais bien faire un combattant au corps à corps, mais avec quelque pouvoir comme un soin.”

Il ne va pas “cataloguer” en fonction de son idée du jeu. Dans le monde professionnel, ne faites pas cette erreur, “Tu es développeur ? Ah bah je t’appellerai quand on en sera à faire des choix tech.”, “Tu es commercial ? Ah alors attends, on n’a pas besoin de toi là, mais va faire une propale pour ça.”, “Tu es designer ? Ok, mais là on parle stratégie, nous t’appellerons quand on aura besoin de maquettes.”.

Tout particulièrement dans les ateliers de co-conception. Les bonnes idées et les informations importantes peuvent venir de tous. Ne limitez pas les participants et / ou leur créativité sur la base de leurs rôles dans une organisation. Au contraire servez-vous des talents et expertises de chacun pour apporter une perspective différente sur un sujet, afin de débloquer d’autant plus de créativités et d’idées !

Faire grandir les autres sans frustrations.

Lors de mes parties de jeu de rôle, notamment avec des joueurs plus jeunes, j’ai rapidement été confronté à la frustration générée par un gain de puissance et de capacité trop lente dans les premières sessions.

J’ai donc essayé d’offrir une évolution plus rapide dans les premiers instants. Cependant je me suis heurté à une seconde frustration provoquée par ce changement. OK, les joueurs montaient en puissance plus vite, mais passés les premiers niveaux, la suite était donc forcément plus complexe à atteindre et donc plus longue provoquant une longue période d’autant plus frustrante pour ces mêmes joueurs et je ne pouvais pas simplement raccourcir la progression sous peine de rendre la chose trop simple et sans intérêt.

J’ai donc fait un pas en arrière en rendant la progression un peu moins rapide dans les premiers niveaux, mais j’ai surtout travaillé la progression intermédiaire avec des récompenses autre que le niveau suivant, tel que la capacité de renforcer une compétence qui est un pré-requis pour le niveau suivant. En sacralisant lors de la session des défis ou moments “épiques” qui marquent l’achèvement de l’objectif d’un des membres du groupe.

Dans le monde du travail, la situation est très similaire, quelqu’un de junior n’aura pas trop de difficultés à passer à un niveau intermédiaire assez rapidement, mais le passage des niveaux suivants sera long et laborieux. Une période qui peut mener à des pertes de motivation.

C’est au Lead d’identifier la situation et de l’éviter en proposant des défis et des objectifs attrayants au quotidien, mais aussi en parlant avec sa hiérarchie afin de faire en sorte que la progression des membres de l’équipe soit vécue de façon aussi fluide que possible. Ce sujet est particulièrement complexe et variable en fonction de l’entreprise, mais il est néanmoins de la responsabilité du Lead de veiller au bon épanouissement des membres de son groupe.

Pour finir, les JDRs constituent un excellent moyen d’essayer de nouvelles choses et de se former !

Avec des séries comme Stranger Things et le développement des plateformes de crowdfunding, le jeu de rôle redevient tendance.

Jouer le rôle de maître de jeu est l’une des choses les plus formatrice que j’ai pu faire, j’ai autant appris sur le plan personnel que professionnel. Être joueur constitue aussi une formidable source d’apprentissage, cela permet de voir comment d’autres personnes endossent le rôle de meneur et de s’en inspirer!

Moralité, jouez et menez des jeux de rôle papier vous permettra devenir meilleur leader tout en découvrant des univers exceptionnels venant d’écrivain tel que J.R.R Tolkien, H.P Lovecraft ou plus récemment Maxime Chattam.

Chez Haigo, nous sommes toujours à la recherche de nouvelles façons de grandir nous-mêmes, mais aussi de faire grandir notre entourage et nos clients. Si le jeu de rôle vous intéresse, mais que vous ne savez pas comment vous lancer, contactez-nous !

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Rémy Saddour
Demain sera bien. Par Haigo.

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