Pourquoi, pourquoi, pourquoi… se passer des 5 Whys ?

Patrick MARUEJOULS
Demain sera bien. Par Haigo.
4 min readMay 14, 2019

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Sans doute avez-vous déjà entendu parler des 5 Whys, ce “tips” lié à la recherche utilisateur pour faire accoucher les esprits les plus retors de ce qu’ils avaient du mal à verbaliser. Voire de ce qu’ils voulaient vous cacher, plus ou moins sciemment.

Sans être trop réducteur, le principe est assez simple : vous considérez que la personne que vous interviewer manque de précision dans une réponse, alors vous lui posez la question « pourquoi ? » jusqu’à ce qu’elle vous livre une réponse plus précise.

Prenons un exemple que nous avons rencontré il y a quelques mois.

“Cette barre de recherche est moche et ne fonctionne pas

  • Pourquoi ?
    Vous voyez bien, elle ne fonctionne pas
  • Pourquoi ?
    L’affichage des résultats n’est pas optimal
  • Pourquoi ?
    C’est écrit trop gros
  • Pourquoi ?
    Quand je viens sur ce site, c’est parfois pour chercher une offre d’emploi. Les résultats sont affichés dans une typographie trop grosse et mes voisins de bureau pourraient remarquer que je suis en train de chercher un poste dans une autre division.”

CQFD

Mais alors, si cette méthode a l’air géniale, pourquoi la remettre en question ?

En réalité, le problème est un peu plus complexe que ça. Dans la plupart des cas, vous ne connaissez pas les personnes que vous interviewez et il faudra créer un climat de confiance pour obtenir un maximum d’insights de qualité. Cette première phase prend du temps. Beaucoup de temps…

Après plusieurs centaines d’interviews chez Haigo, nous avons pris le parti de ne faire que des interviews longues (1h30 en moyenne) pour avoir le temps de créer cette confiance et ce lâcher-prise.

Poser la question « Pourquoi ? » peut souvent provoquer deux sentiments :
1/ “S’il me demande pourquoi, c’est que je n’ai pas dû bien m’exprimer alors que je fais déjà des efforts.”
2/ “S’il me demande pourquoi, c’est qu’il cherche à me faire dire quelque chose.”

Dans les deux cas, les risques d’approximations et de biais dans cette phase de recherche sont élevés :
- Soit parce que la personne va se sentir inférieure et sera inconsciemment plus préoccupée par ça que par la qualité des réponses qu’elle va donner.
- Soit parce que la ficelle du 5 Whys est un peu grosse. Dans ce dernier cas, vous obtiendrez des réponses entendues, potentiellement satisfaisantes pour vous, mais qui vous éloigneront souvent du vrai problème à résoudre pour la personne que vous interviewer.

Par ailleurs, poser la question “pourquoi ?”, casse bien souvent le rythme de la discussion et amène à des réponses courtes et souvent très fonctionnelles.

Alors que fait-on ?

Il faut considérer les 5 whys comme une image. Tel le mineur, quand vous faites de la recherche utilisateur, votre objectif est de creuser le plus profond possible pour obtenir les informations les plus fiables et précises possibles.

Mais alors si le fait de poser la question “pourquoi ?”nous éloigne de cet objectif, comment faire ?

Remplacez la question “pourquoi ?”, par des questions plus subtiles et plus contextualisées.

Voici quelques exemples que nous utilisons fréquemment :

“J’ai démissionné de mon précédent job au bout de 6 mois.”
(Marie, 34 ans, chef de produit)

Pourriez-vous m’expliquer le contexte ?
// L’objectif est ici de déterminer les raisons de la démission, en identifiant d’abord le contexte. Le contexte vous permettra souvent de creuser plusieurs sujets précis.

“La barre de recherche ne fonctionne pas bien.”
(Philippe, 45 ans, sur le site web de son employeur)
Quand utilisez-vous le moteur de recherche ? — ou — Quel type de recherche auriez-vous pu faire ?
// Dans bien des cas, le dysfonctionnement perçu cache autre chose. Connaître les cas d’usages précis permet de spécifier le problème.

“Je n’ai pas le temps de cuisiner le soir en rentrant chez moi.”
(Etienne, marié, 46 ans)

Pouvez-vous nous raconter les soirées de la semaine passée ?
// Ici, l’objectif est de ne pas braquer la personne. La question “pourquoi ?” pourrait être prise comme une forme de jugement de valeur.

Dans ces différents exemples, une seule question ne suffira sans doute pas. Mais ce type de questions plus ouvertes vous permettra d’avoir des insights plus larges et de creuser dans un second temps ceux qui vous semblent être les plus porteurs pour le projet.

N’hésitez pas à nous partager vos retours d’expérience.

Si vous avez un projet qui nécessiterait de la User Research, c’est par là : www.haigo.fr

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Patrick MARUEJOULS
Demain sera bien. Par Haigo.

Co-fondateur de haigo.fr, passionné par le Design Systémique, l’impact sociétal, la coutellerie, la menuiserie et les charentaises !