Comprendre la Blockchain et ses enjeux en un article.

Léo Denis
Futurs.io
Published in
7 min readJul 19, 2017
Une chaîne de blocs !

Note : Ce papier a pour but de vous initier au concept de blockchain et ne traite absolument pas de tous les points techniques qui y sont liés. Ces différents points seront développés dans de prochains papiers. Il peut en revanche vous permettre de cerner un peu plus le sujet.

Blockchain. Un mot. Dix lettres. Un débat.

Révolution ou phénomène de mode ?

Pour y répondre, essayons déjà de comprendre le principe même de la blockchain.

La “Chaîne de Blocs” est une base de données partagée, transparente, fiable et fonctionnant “sans organe central de contrôle”.

Concrètement, qu’est ce que cela veut dire ?

Elle est partagée : tout le monde peut en avoir une copie à jour sur son ordinateur.

Elle est transparente : toutes les informations en relation avec les transactions effectuées y figurent et sont lisibles de tous.

Elle est fiable : il est techniquement impossible qu’une information erronée ou qu’une erreur soit présente et validée sur la blockchain. Par exemple, il est impossible de dépenser deux fois les mêmes bitcoins.

Elle fonctionne sans organe central de contrôle : aucune entité (institution, personne, logiciel…) ne contrôle et ne régule la blockchain et les informations qui y sont présentes. C’est le réseau en lui-même qui la régule et lui assure sa fiabilité par le biais de plusieurs processus mathématiques et algorithmiques.

Décrite de la sorte, elle ne présente pas un intérêt évident.

Lorsqu’on parle de “la blockchain”, on parle du concept, de la technologie au sens large du terme. Il existe en réalité plusieurs blockchains, la plus célèbre étant la blockchain Bitcoin. On peut aussi donner comme exemple la blockchain Ethereum, qui a pris beaucoup d’ampleur les années passées.

Il faut donc d’abord s’intéresser aux premières applications de la blockchain pour en percevoir l’utilité.

Au commencement, la blockchain est l’immense “registre” du Bitcoin.

Le sacro-saint Bitcoin

A son lancement (17/02/2009), la première blockchain fait office de journal comptable au Bitcoin. Elle permet de transcrire une preuve de chaque transaction en renseignant les adresses du destinataire, de l’expéditeur et le montant en bitcoins transféré.

Elle permet donc d’échanger de la monnaie sans erreur, et surtout sans organe central de contrôle ie sans banque centrale et pratiquement sans intermédiaire.

“Pratiquement” car les transactions ne se transcrivent pas seules dans la blockchain, quelqu’un doit forcément vérifier leur validité : les fonds transférés sont-ils bien présents sur le compte de l’expéditeur ? Les adresses de l’expéditeur et du destinataire existent-elles ? L’expéditeur a-t-il envoyé les mêmes fonds à deux adresses différentes ? (double dépense).

Ce sont les principales questions qui se posent lors de la validation des transactions.

Ce “quelqu’un” sont en réalité ceux que l’on nomme les “mineurs”. Concrètement, ils valident les transactions et apportent les réponses à toutes les questions qui sont posées au-dessus, et ce pour chaque transaction.

Pour des raisons d’optimisation, les transactions à valider sont regroupées dans un bloc qui est validé et ajouté dans la blockchain à raison de un toutes les 10 minutes environ, et “qui ne bougera jamais”. Personne ne pourra modifier les informations qui se trouvent dans ce bloc.

Théoriquement, on peut donc encore consulter la trace de la toute première transaction effectuée en Bitcoin.

On pourrait définir ce type de blockchain comme une blockchain de “première génération”. Destinée à l’échange de monnaie, on perçoit un potentiel :

  • Transfert de monnaie sans tiers de confiance
  • Un système d’information fiable, sans erreur, transparent et universel
  • Un possible passage de l’asymétrie d’information à la symétrie d’information : tout le monde a la possibilité de connaître la même information au même moment. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

Cependant ce potentiel s’avère compliqué à développer car les possibilités de programmation et les différentes applications que l’on peut en faire sur ce “type” de blockchain restent limitées.

Le Smart Contract ou le contrat de confiance (Et on parle pas de D@rty, là.)

Un “Smart Contract” est tout d’abord un programme qui, aujourd’hui, s’exécute sur la blockchain. Ce programme est accessible et lisible par toutes les parties autorisées, et développé pour exécuter automatiquement les termes d’un contrat lorsque les conditions sont réunies.

Le Smart Contract

Attention, les smart contracts ne sont en aucun cas (du moins pour l’heure) des contrats au sens juridique du terme. Ils ne sont que des logiciels qui appliquent les contrats automatiquement.

Exemple : vous souhaitez louer votre appartement pour l’été. Vous passez par un juriste pour rédiger et signer un contrat : 500€ en début de location, 500€ en fin de location, caution de 2000€. Vous vous rendez ensuite à la banque afin de mettre en place les différents transferts de fonds (chèque, virement..).

Avec un Smart-contract, tout est géré automatiquement.

Le logiciel est programmé pour : transférer 500€ et la caution en début de location, transférer 500€ et rendre la caution en fin de location. Si un sinistre a lieu durant la location : le propriétaire fournit une pièce justificative au contrat qui ne rendra pas la caution au locataire.

On peut imaginer qu’il ne sera plus nécéssaire, à terme, de passer par un juriste, et que le logiciel fera office de contrat.

On entre là dans l’épineuse question législative de la blockchain.

Techniquement, le smart-contract vous permet de passer un contrat avec quelqu’un en qui vous n’avez pas confiance. Tout simplement parce que les termes du contrat ne seront pas modifiés à posteriori, puisqu’il est impossible de modifier quelque chose qui figure définitivement sur la blockchain.

Étant donné que tout est automatisé, il vous suffit de faire confiance à la Blockchain et au logiciel pour passer ce contrat.

C’est en partie pour cela que l’on parle de la Blockchain comme une «Révolution de la confiance».

A juste titre : il apparaît aujourd’hui que sur une certaine blockchain, les possibilités de calcul sont infinies, et les possibilités de programmation de smart-contracts aussi. Cette blockchain est la blockchain Ethereum.

La blockchain bitcoin est en réalité basée sur des smart-contracts, mais ne permet pas d’en créer pour le moment.

La blockchain Ethereum permet donc de mettre en place n’importe quel smart-contract, mais pas à n’importe quel prix.

L‘engouement autour du concept de “Blockchain” est donc bien justifié. Cependant cette dernière peut en quelque sorte être victime de son succès.

La blockchain victime de son lien de parenté avec le Bitcoin

Lorsque vous entendez “blockchain”, vous pensez souvent “Bitcoin”.

Et lorsque vous pensez “Bitcoin”, vous pensez tout de suite aux nombreuses activités illégales qui ont pu être menées grâce à lui. Vous n’avez pas tort, le bitcoin a bel et bien financé des activités du marché noir. Il faut d’ailleurs sortir de cette idée, en 2016, les activités illégales ne représentaient que 2% des volumes contre près de 40% fin 2012.

Cependant il faut bien se rendre compte que le concept de blockchain va beaucoup plus loin que le simple transfert de monnaie bitcoin, et ainsi il ne faut pas faire de raccourcis en pensant qu’elle est responsable du financement de ces activités.

La blockchain chez les grands groupes = “Le sexe chez les ados”

Si l’on se place du côté des grands groupes, nombre d’entre eux lancent des projets dits “blockchain” sans que l’on sache vraiment pourquoi, où est leur intérêt, et en quoi la blockchain leur est utile.

Au même titre que le Big Data, Steve Brazier (patron du cabinet de recherche Canalys) aurait pu faire une analogie entre la blockchain chez les grands groupes et le sexe chez les ados.

Pourquoi ?

“Tout le monde en parle, tout le monde cherche à savoir comment on fait, tout le monde pense que les autres le font, mais finalement personne ne le fait”. Et tout ça au profit des sites porno… ou des articles et vidéos sur la blockchain.

Effectivement, la blockchain est utilisée dans certains projets alors que finalement, peut-être qu’une bonne vielle base de données aurait suffit. Et cela amène certains à penser que la blockchain n’est pas une réelle avancée en soi, voire pire : ne sert à rien.

Eurêka ! La symétrie..

Pour conclure, la blockchain nous permettra de penser la société de demain, à condition qu’elle soit bien utilisée et non à tort et à travers parce que c’est la technique du moment.

Ce n’est pas nouveau, le réel enjeu d’aujourd’hui, c’était déjà celui d’hier et ce sera probablement celui de demain : c’est l’information.

Il suffit de regarder ce bon vieux Wall Street pour s’en rendre compte.

“La meilleure valeur sur le marché, crois moi, c’est une bonne information… t’es d’accord ?” Gordon Gekko, Wall Street

Le réel enjeu de la blockchain, c’est donc de passer de l’asymétrie d’information à la symétrie d’information, ou du moins d’entre-ouvrir cette porte.

Le rêve de symétrie d’informations que porte la blockchain a un prix : vaincre ceux qui vivent de l’organisation de l’asymétrie d’informations au point de la cultiver, ceux qui ont si bien vécu jusqu’en 2008…

…Mais peut être que ces derniers ont déjà compris comment détourner ce nouveau procédé afin de créer une situation encore plus déséquilibrée, accroissant les inégalités et nous amenant vers une société où la symétrie d’information n’est que pure illusion.

Quand on voit que certaines boîtes dont on ne citera pas le nom montent des projets “blockchain” avec IBM probablement pour créer leur propre monnaie cryptographique, il y a de quoi se poser des questions… (Indice, ça commence par Goldm@n et ça finit par S@chs)

“Every dream has a price.” — Wall Street

À suivre…

--

--

Léo Denis
Futurs.io

Étudiant en économie - Gestion à l’ENS Paris Saclay, blockchain-addict